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Décisions

CA Limoges, ch. civ. sect. 2, 3 février 2000, n° 98/00475

LIMOGES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Banque Nationale de Paris (SA)

Défendeur :

Franfinance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Leflaive

Conseillers :

M. Vernudachi, Mme Dubillot-Bailly

Avoués :

SCP Coudamy, SCP J-P et Ch. Durand-Marquet

Avocats :

Me Dauriac, Me Hervy

TGI Limoges, du 3 mars 1998

3 mars 1998

LA COUR

Suivant assignation du 3 novembre 1997, la SA FRANFINANCE a saisi le Juge de l'Exécution du Tribunal de Grande Instance de Limoges pour voir condamner la Banque Nationale de Paris à lui payer la somme de 135.007,31 francs selon décompte établi-le 9 octobre 1997 avec intérêts au taux légal à compter de cette date, outre des dommages-intérêts d'un montant de 5.000 francs sur le fondement de l'article 60 du décret n°92.755 du 31 juillet 1991 et la somme de 3.000 francs au titre de ses frais irrépétibles.

La Banque Nationale de Paris a conclu au débouté de la SA FRANFINANCE de l'ensemble de ses demandes, et a réclamé la somme de 3.000 francs au titre de ses frais hors dépens.

Par jugement en date du 3 mars 1998, le Juge de l'Exécution du Tribunal de Grande Instance de Limoges a condamné la Société Banque Nationale de Paris à payer à la SA FRANFINANCE la somme de 135.007,31 francs avec intérêts au taux légal à compter du 9 octobre 1997.

Par déclaration du 16 mars 1998, la Banque Nationale de Paris a interjeté appel de ce jugement dont elle sollicite la réformation. Elle réclame en outre la somme de 3.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle fait valoir qu'aucun acte de saisie attribution ne lui a été signifié à la requête de la société FRANFINANCE, qu'elle n'est pas tiers saisi, est donc tenue au secret professionnel et ne saurait être sanctionnée par application des articles 59 et 60 du décret du 31 juillet 1992.

La Société FRANFINANCE conclut à la confirmation du jugement attaqué et demande la somme de 8.000 francs par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

L'intimée soutient que l'article 44 de la loi du 9 juillet 1991 et que l'article 59 du décret d'application de cette loi mettent à la charge du tiers saisi dans le cadre d'une saisie-attribution, une obligation de renseignement qui implique la fourniture immédiate à l'huissier de justice d'informations précises et sincères et que l'établissement bancaire ne peut ni se retrancher derrière le secret bancaire,' ni invoquer les dispositions de l'article 39 de la loi du 9 juillet 1991 qui ne font, de la recherche de l'information auprès du Procureur de la République, qu'un subsidiaire au cas où les autres recherches seraient demeurées vaines.

L'ordonnance de clôture a été prononcée par le conseiller de la mise en état le 23 décembre 1999.

SUR QUOI

ATTENDU que le tiers saisi n'est tenu de déclarer à l'huissier de justice l'étendue de ses obligations à l'égard du débiteur, conformément à l'article 44 de la loi n° 91.650 et à l'article 59 du 9 juillet 1991 et à l'article 59 du décret n° 92.755 du 31 Juillet 1991, que si l'acte de saisie-attribution lui a été préalablement signifié ;

Que c'est donc à tort que l'intimée soutient que l'huissier peut parfaitement préparer un procès-verbal de saisie-attribution, solliciter de l'établissement bancaire un certain nombre de renseignements et, s'il le juge utile, signifier un procès-verbal de saisie-attribution ;

ATTENDU, en l'espèce, que l'acte litigieux portant le titre "Procès-verbal de Saisie Attribution" et le nom de l'huissier instrumentaire et la dénomination et l'adresse du créancier, comprend la mention "Adressé à" suivie d'une liste d'établissements bancaires à Limoges, avec au regard de chaque établissement, sous la rubrique "Détentions de fonds" les mentions "oui", "non" et "date" ;

Que les mentions relatives à la saisie attribution prévue par l'article 56 du décret précitées ne figurent qu'à la page suivante ;

Que la présentation matérielle de l'acte démontre que, avant de signifier l'acte de saisie attribution l'huissier interroge d'abord un représentant de l'établissement bancaire et ne lui signifie l'acte de saisie attribution qu'après avilir reçu une réponse positive ;

Que, quelque légitime que soit le souci de l'huissier d'éviter le coût d'actes qui pourraient se révéler inutiles, les dispositions de l'article 56 du décret du 31 juillet 1992 ne sauraient être éludées ;

ATTENDU qu'en l'absence de procès-verbal de saisie-attribution préalable, la société Banque Nationale de Paris n'avait pas qualité de tiers saisi et était fondée à se retrancher derrière le secret bancaire pour ne pas renseigner l'huissier sur l'existence d'éventuelles obligations à l'égard du débiteur ;

Qu'il convient d'infirmer le jugement déféré ;

ATTENDU que la Société FRANFINANCE succombe en ses prétentions et sera condamnée aux dépens mais qu'il apparaît équitable de ne pas allouer d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

INFIRME le jugement rendu par le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de LIMOGES le 3 mars 1998 ;

Statuant à nouveau,

CONSTATE qu'aucun acte de saisie-attribution n'a été signifié à la requête de la société FRANFINANCE ;

DÉBOUTE en conséquence la société FRANFINANCE de sa demande ;

DIT n'y avoir lieu à indemnisation sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

CONDAMNE la société FRANFINANCE aux dépens de première instance et d'appel et accorde à la SCP COUDAMY, avoué, le bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.