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Décisions

CA Poitiers, ch. civ. 1, 23 décembre 2011, n° 10/03274

POITIERS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

J-P P.

Défendeur :

AUDEBERT ALAIN (SARL), Maître M. ROUSSELOT-GEGOUE

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Madame Colette MARTIN-PIGALLE

Conseillers :

Madame Catherine KAMIANECKI, Madame Marie-Jeanne CONTAL

Avoués :

SCP ALIROL - LAURENT, SCP GALLET - ALLERIT, SCP MUSEREAU François MAZAUDON Bruno PROVOST-CUIF Stéphanie AVOUES ASSOCIES

Avocats :

Me Thierry MORENVILLEZ, Me Catherine MOLLE

ROCHEFORT SUR MER, du 15 avr. 2009

15 avril 2009

Sur la base d'un devis du 12 juillet 2005 d'un montant total de 302.250,26 € Jean-Pierre P. a confié à François D. Costa Rego, qui exerçait son activité artisanale de rénovation tous corps d'état sous l'enseigne François Costa avant de constituer la société Costa-Guislain (à laquelle il a cédé son fonds) la rénovation d'un ensemble immobilier destiné à la location, sis à l'Ormeau La Gripperie Saint Symphorien (Charente- Maritime). Ces travaux ont été confiés à différentes sociétés de construction dans le cadre d'un contrat de sous-traitance.

J-P P. a acquitté des factures à hauteur de la somme de 156.360,28 € arrêtée au 16 juillet

2006. Suite à la résiliation du marché confié à la société Costa Guislain par lettre recommandée avec

accusé de réception du 12 mai 2006, les parties sont convenues d'arrêter contradictoirement le montant des travaux réalisés en se faisant l'un et l'autre assister d'un expert.

Par jugement du 8 février 2008, le tribunal de commerce de Rochefort saisi à l'initiative de la société Audebert Alain (titulaire du lot électricité) s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande en paiement de la somme principale de 7.266,92 € formée à l'encontre de J-P P. (correspondant au solde restant dû) et a renvoyé son examen devant le tribunal de grande instance de Rochefort.

C'est dans ces conditions que par jugement réputé contradictoire du 15 avril 2009, ce tribunal a :

- condamné in solidum la société Costa Guislain et M P. à payer à la société Alain Audebert la somme de 7.266,92 € outre les intérêts au taux légal à compter du18 juillet 2006, et 1.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Alain A. et la société Costa Guislain du surplus de leurs demandes.

La Cour :

Vu l'appel interjeté le 19 août 2010 par M P.

Vu les dernières écritures déposées le 17 octobre 2011 par J-P P. aux termes desquelles poursuivant l'infirmation du jugement déféré, il conclut à l'irrecevabilité des demandes de la société Audebert Alain, subsidiairement à leur débouté et à sa condamnation à lui payer une somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions déposées le 21 octobre 2011 par la société A A. suivant lesquelles il sollicite la confirmation du jugement entrepris, sauf à accueillir son appel incident et à condamner Maître Rousselot-Gegoue es qualités et M P. à lui payer les sommes de 1.500 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et de 1.5 00 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions déposées le 13 octobre 2011 par Maître Marie-Adeline Rousselot-Gegoue prise en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Crt Constructions Renovations Techniques venant aux droits par changement de dénomination de la société Costa-Guislain, suivant lesquelles elle s'en rapporte à la sagesse de la cour sur le mérite et le bien fondé de l'appel formé par J-P Piochaud,et conclut à l'irrecevabilité des demandes formées par J-P P. et la société Alain Audebert.

Sur ce :

Attendu que l'appelant se prévalant de l'application des articles 4 et 14 du code de procédure civile stigmatise le fait que le premier juge aurait statué ultra petita, dès lors que la société Alain Audebert n'aurait jamais sollicité sa condamnation, qu'il en conclut que la demande présentée en cause d'appel à son encontre constitue une demande nouvelle irrecevable par application de l'article 564 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'il résulte de la lecture du jugement du tribunal de grande instance de Rochefort du 15 avril 2009, que la société Alain Audebert a par conclusions signifiées le 17 novembre 2008 sollicité la condamnation solidaire de la société Costa Guislain et de M P., qu'en conséquence le tribunal était saisi de la demande sur laquelle il a statué, que ce moyen doit donc être écarté ;

Attendu que la société Alain Audebert expose disposer d'une action directe contre M P., qu'elle invoque l'application de l'article 1798 du code civil ainsi que celle de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, qu'elle précise en effet n'avoir aucun lien contractuel direct avec M P. ;

Attendu que l'article 1798 du code civil, qui a pour objet d'assurer le paiement du travail manuel et qui consacre au profit notamment des ouvriers salariés du secteur du bâtiment une véritable action directe en paiement des salaires contre le maître de l'ouvrage, à l'occasion du contrat conclu par celui-ci avec l'employeur, n'a pas vocation à s'appliquer à la présente cause, qui a pour fondement l'action directe du sous-traitant contre le maître de l'ouvrage, en raison du non paiement par l'entrepreneur principal et qui est régie par la loi précitée du 31 décembre 1975 ;

Attendu à ce propos que la société intimée, qui ne justifie pas avoir (conformément à l'article 3 de la loi précitée) été acceptée pas plus que ses conditions de paiement et ce de manière non équivoque par le maître de l'ouvrage, ne peut en sa qualité non contredite de sous-traitant exercer l'action directe contre M P., ce d'autant qu'à défaut de soutenir ou d'établir également que ce maître de l'ouvrage avait connaissance de sa présence sur le chantier elle ne peut pas plus lui faire reproche de ne pas avoir respecté l'obligation que lui impose l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 de mettre en demeure l'entrepreneur principal ou le sous-traitant de s'acquitter de ses obligations ; qu'en conséquence infirmant le jugement entrepris il y a lieu de la débouter de sa demande en paiement dirigée contre M P. ;

Attendu que l'entrepreneur principal est contractuellement tenu au paiement des travaux réalisés par le sous-traitant, ce d'autant que comme en l'espèce il ne peut exciper de fautes contractuelles commises par celui-ci (notamment dans l'exécution du lot électricité) à défaut d'éléments les caractérisant, qu'en conséquence il y a lieu de fixer la créance de la société Alain Audebert à la somme non contestée de 7.266,92 € , outre les intérêts au taux légal à compter du 18 juillet 2006, et les dépens dès lors que cette société justifie avoir déclaré sa créance le 23 avril 2009 ;

Attendu que la société Alain Audebert, qui ne justifie pas du préjudice subi du fait de la résistance abusive qu'elle invoque doit être déboutée de sa demande à ce titre ;

Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de M P. les frais non inclus dans les dépens ;

Par ces motifs :

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné M Jean-Pierre P. à payer à la société Alain Audebert la somme de 7.266,92 € assortie des intérêts au taux légal à compter du 18 juillet 2006 et à celle de 1.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Déboute la société Alain Audebert de ses demandes dirigées contre M Jean-Pierre P. ;

Fixe la créance de la société Alain Audebert à la somme de 7.266,92 € outre les intérêts au taux légal à compter du 18 juillet 2006 ;

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions ;

Condamne la société Alain Audebert en tous les dépens, qui pourront être recouvrés directement par application de l'article 699 du code de procédure civile.