Cass. com., 3 mars 2004, n° 00-13.027
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 18 janvier 2000), que, par acte du 18 mai 1994, la SA Immobilière de la rue Jean Mermoz, propriétaire de locaux donnés à bail le 10 mai 1989 à la SA Quincaillerie Lorraine, a fait délivrer à celle-ci un commandement tendant au paiement du loyer du 1er janvier 1994 au 30 juin 1994 ; que, par acte du 26 mai 1994, la SA Quincaillerie Lorraine a fait opposition à ce commandement motif pris que par acte du 28 juin 1993 à effet au 31 décembre 1993, M. François X..., directeur général, usant de la faculté triennale de résiliation, avait fait délivrer congé à la SA Immobilière de la rue Jean Mermoz ; que cette dernière a contesté la validité de ce congé délivré par le directeur général de la SA Quincaillerie Lorraine contre la volonté de son président, M. Pierre X..., congé auquel les présidents des sociétés locataire et bailleresse ont renoncé aux termes d'une convention conclue les 26 juillet et 2 août 1993 ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que la société Cibomat, venant aux droits de la société Quincaillerie lorraine, fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré mal fondée son opposition au commandement de payer, alors, selon le moyen :
1 ) que le directeur général d'une société anonyme tient de la loi le pouvoir d'agir au nom de cette société et de l'engager vis-à-vis des tiers; que M. François X..., directeur général de la société a régulièrement donné congé à la société qui se trouvait ainsi liée ; que la cour d'appel de Nancy, en tenant ce congé pour nul, a violé les articles 113, alinéa 1er, et 2 et 117, alinéa 2, de la loi du 24 juillet 1966 ;
2 ) que la cour d'appel ne s'est pas expliquée sur la volonté contraire du président, M. Pierre X..., et sur les manifestations de son opposition expresse ; qu'elle n'a pas motivé sa décision et qu'elle a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
3 ) que le directeur général disposant à l'égard des tiers des mêmes pouvoirs que le président, la décision du président M. Pierre X... ne pouvait prévaloir sur celle du directeur général M. François X..., leur égalité excluant sur ce point tout principe hiérarchique ; que la cour d'appel de Nancy a violé les articles 113, alinéa 1er, et 2 et 117, alinéa 2, de la loi du 24 juillet 1966 ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'a pas tenu pour nul le congé délivré, le 28 juin 1993, par le directeur général, dont elle a, au contraire, retenu qu'il pouvait en principe valablement le délivrer, a relevé qu'il l'avait été contre la volonté du président de la société, ce qui avait été constaté par actes des 26 juillet et 2 août 1993, par les présidents de la société bailleresse et de la société locataire, qui avaient convenu que le bail continuerait à produire tous ses effets entre les parties ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la société Cibomat fait encore le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1 ) que le conseil d'administration d'une société anonyme est investi, pour la gérer, des pouvoirs les plus étendus ; que les dissensions entre le président et le directeur général contre la protection des intérêts sociaux nécessitaient son intervention, que le conseil d administration a, le 28 septembre 1993, nommé M. François X..., président-directeur général et approuvé le congé donné à la société immobilière de la rue Jean Mermoz ; que la cour d'appel devait s'attacher à cette intervention et à ses conséquences ; qu'en s'abstenant de le faire, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article 98 de la loi du 24 juillet 1966 ;
2 ) qu'elle n'a pas, dans le même temps, répondu à la motivation du tribunal de grande instance de Nancy qui insistait sur le rôle de protection des intérêts sociaux imparti au conseil d'administration et sur la nécessité de son intervention ; que la cour de Nancy n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que la société Quincaillerie lorraine n'ayant pas invoqué devant la cour d'appel les pouvoirs généraux d'administration que le conseil d'administration tient des articles 98, alinéa 1er, de la loi du 24 juillet 1966, la cour d'appel n'avait ni à tirer les conséquences de la décision prise postérieurement au renoncement du congé par les présidents, le 28 septembre 1993, par le conseil d'administration de la société Quincaillerie Lorraine, ni à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée ; que le moyen irrecevable en sa première branche comme nouveau et mélangé de fait et droit, manque en fait pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.