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Décisions

Cass. crim., 29 septembre 1992, n° 92-83.464

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Gunehec

Rapporteur :

M. Milleville

Avocat général :

M. Galand

Avocat :

SCP Bore et Xavier

ch. d'acc. Bourges, du 26 mai 1992

26 mai 1992

REJET du pourvoi formé par X..., contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bourges, en date du 26 mai 1992, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises du département du Cher sous l'accusation de viols sur mineure de 15 ans par personne ayant autorité.

LA COUR,

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 85, 86, 593, 687 du Code de procédure pénale :

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté les exceptions de nullité de la procédure ;

" aux motifs qu'au vu des accusations portées par Mlle Y... le 29 septembre 1989 contre X..., le procureur de la République a demandé aux services de gendarmerie, le 14 novembre 1989, de continuer l'enquête ; qu'entendu le 11 décembre 1989, X... a reconnu s'être livré à divers attouchements et rapports sexuels sur sa nièce ; que les allégations de la jeune femme étaient insuffisantes à défaut de toute confirmation extérieure et appelaient des investigations complémentaires ; que c'est seulement au résultat de l'audition du mis en cause et d'une confrontation que sont apparus les indices graves et concordants justifiant l'inculpation et la présentation de la requête aux fins de désignation de la juridiction d'instruction ; que c'est d'ailleurs à la fin de cette audition que X... a fait état de sa qualité d'élu communal ; qu'il ne saurait être reproché au procureur de la République d'avoir ignoré les responsabilités administratives de l'intéressé ; que par ailleurs, aucune autre investigation n'a été effectuée avant la requête précitée (arrêt attaqué p. 3) ;

" 1°) alors que le procureur de la République doit adresser sans délai une requête à la chambre criminelle de la Cour de Cassation dès qu'une des personnes énumérées à l'article 681 du Code de procédure pénale est susceptible d'être inculpée, même en l'absence de présomptions sérieuses contre cette personne ; que, pour rejeter l'exception de nullité de la procédure, l'arrêt attaqué énonce que ce n'est que le 11 décembre 1989 que sont apparus des indices graves et concordants de culpabilité ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

" 2°) alors que la requête aux fins de désignation d'une juridiction d'instruction doit être présentée sans délai ; qu'il résulte des propres termes de l'arrêt attaqué que le procureur de la République a eu connaissance, au plus tard le 11 décembre 1989, de la qualité de X... et qu'il n'a présenté la requête à la chambre criminelle que le 8 février 1990 ; qu'en refusant d'annuler la procédure d'enquête et l'instruction subséquente, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 11 décembre 1989, sur instructions du procureur de la République, X... a été entendu par les gendarmes sur les accusations de viols portées contre lui par sa nièce ; qu'après confrontation avec celle-ci, il a reconnu les faits ;

Attendu qu'à l'issue de cette audition, il a déclaré qu'il était adjoint au maire ; qu'il a alors été mis fin à sa garde à vue ;

Attendu qu'après s'être fait communiquer les procès-verbaux de délibérations du conseil municipal justifiant de la qualité de X..., le procureur de la République a, le 8 février 1990, présenté requête en désignation de juridiction ; que, par arrêt du 14 mars 1990, la chambre criminelle a procédé à cette désignation ; que l'information a été ouverte le 12 avril 1990 ;

Attendu qu'en cet état, l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs allégués ; qu'en effet, l'obligation de saisir la chambre criminelle de la Cour de Cassation d'une requête en désignation de juridiction d'instruction ou de jugement n'est pas applicable lors de l'enquête préalable à la mise en mouvement de l'action publique ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 80, 591 et 593 du Code de procédure pénale :

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité des actes de l'instruction ;

" aux motifs que l'étendue de la saisine du juge d'instruction a été déterminée par l'arrêt de la chambre criminelle de la Cour de Cassation ayant désigné la juridiction susceptible d'être chargée de l'instruction ; que la requête du procureur de la République à laquelle cette décision faisait référence récapitulait avec l'arrêt de la cour d'appel de Bourges les éléments de l'enquête annexés au réquisitoire introductif ;

" 1°) alors qu'un réquisitoire aux fins d'informer ne peut être valablement délivré que sur la présomption d'une infraction déterminée dont il doit caractériser l'existence en visant des faits précisément individualisés dans l'espace et le temps afin de permettre au juge d'instruction de s'assurer de sa compétence et de déterminer l'étendue de sa saisine ; qu'en énonçant qu'il pouvait être suppléé à la carence du réquisitoire introductif par la requête en désignation de juridiction et par l'arrêt de désignation prononcé par la Cour de Cassation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

" 2°) alors qu'au réquisitoire introductif doivent être jointes les pièces sur lesquelles repose la poursuite ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les poursuites reposaient sur les faits visés dans la requête en désignation de juridiction ; que cette requête n'a été jointe au dossier que sur injonction faite par la chambre d'accusation par son arrêt du 5 mai 1992 ; d'où il suit que le réquisitoire était irrégulier et que, par suite, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

" 3°) alors que le juge d'instruction ne peut instruire que sur les faits expressément indiqués dans l'acte qui le saisit ; que les règles relatives à l'étendue de la saisine du juge d'instruction sont d'ordre public ; qu'en énonçant que le défaut de production de la requête en désignation de juridiction, comportant seule les faits auxquels le réquisitoire introductif se référait, n'avait pas préjudicié aux intérêts de la défense, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et violé derechef les textes susvisés " ;

Attendu qu'il résulte de l'examen du dossier que, devant la chambre d'accusation, l'inculpé a invoqué la nullité du réquisitoire introductif au motif que celui-ci portait simplement la mention " Vu les pièces jointes ", sans aucune référence à ces pièces ; que par les motifs exactement reproduits au moyen, les juges ont rejeté cette exception ;

Attendu que si c'est à tort que la chambre d'accusation s'est fondée sur la requête en désignation pour justifier le rejet, sa décision n'encourt pas, pour autant, la censure dès lors qu'il n'est pas contesté que les procès-verbaux d'enquête préliminaire ont été annexés au réquisitoire introductif et que le simple visa, dans ce réquisitoire, des pièces qui y étaient jointes équivaut à une analyse desdites pièces, analyse à laquelle la chambre d'accusation a procédé souverainement ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation : (sans intérêt) ;

Et attendu que la chambre d'accusation était compétente ; qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle X... a été renvoyé ; que la procédure est régulière ; qu'enfin, les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crimes par la loi ;

REJETTE le pourvoi.