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Décisions

Cass. com., 10 mars 2004, n° 19-19.590

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats généraux :

Me Galy, SCP Krivine et Viaud

Cass. com. n° 19-19.590

9 mars 2004

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 7 mai 2019), à compter de mai 2012, Mme T..., propriétaire d'un appartement situé au-dessous de celui appartenant à la SCI Naceur (la SCI), a déploré des dégâts des eaux, en provenance de l'appartement de la SCI et les désordres ont persisté en dépit de travaux effectués par la SCI en novembre 2013. Un expert, désigné en référé, a conclu, par un rapport du 26 novembre 2015, qu'il existait trois sources de fuites en provenance de l'appartement de la SCI.

3. Mme T... et le syndicat des copropriétaires du [...] (le syndicat des copropriétaires ) ont assigné la SCI, qui avait été mise en redressement judiciaire le 22 septembre 2016, son mandataire et son administrateur judiciaires afin de voir exécuter les travaux de remise en état et d'obtenir l'indemnisation des préjudices subis.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième et troisième moyens, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le quatrième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La SCI et son liquidateur font grief à l'arrêt de condamner la SCI à payer à Mme T... la somme de 2 170 euros au titre du préjudice de jouissance pour la période postérieure au 22 septembre 2016, alors « qu'en vertu de l'article L. 622-17 du code de commerce, les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ; qu'en énonçant que "s'agissant de la période de 19 mois, allant du redressement judiciaire à l'adoption du plan, il est admis en jurisprudence que les créances quasi-délictuelles nées postérieurement au jugement d'ouverture entrent dans les prévisions de l'article 622-17 du code de commerce (ancien article 40 ), de sorte qu'il s'agit d'une dette qui doit faire l'objet d'une condamnation pure et simple "à réparer le préjudice de jouissance subi par Mme T..., cependant qu'il résultait de ses propres constatations que cette créance d'indemnisation contre la SCI n'était pas née pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période , la cour d'appel a violé l'article L. 622-17 du code de commerce, ensemble les articles L. 622-22 et L. 622-24 du même code. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

6. Le syndicat des copropriétaires et Mme T... contestent la recevabilité du moyen. Ils soutiennent que la SCI n'a pas prétendu devant la cour d'appel que la créance n'entrait pas dans les prévisions de l'article L. 622-17 du code de commerce, de sorte que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit.

7. Cependant, le moyen, qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fait, est de pur droit.

8. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles L. 622-17 I et L. 622-24, alinéa 5, du code de commerce, rendus applicable au redressement judiciaire par l'article L. 631-14 :

9. Selon ces textes, pour être payable à son échéance, une créance doit être née après le jugement d'ouverture du redressement judiciaire, pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur. A défaut, elle doit suivre la procédure instituée par le second texte susvisé.

10. Pour condamner la SCI à payer à Mme T... la somme de 2 170 euros au titre du préjudice de jouissance subi par cette dernière pour la période postérieure au 22 septembre 2016, l'arrêt retient que, pour la période de dix-neuf mois allant du redressement judiciaire à l'adoption du plan, les créances quasi-délictuelles nées postérieurement au jugement d'ouverture entrent dans les prévisions de l'article L. 622-17 du code de commerce et doivent faire l'objet d'une condamnation pure et simple.

11. En statuant ainsi, alors que la créance d'indemnité destinée à réparer le trouble de jouissance subi par Mme T..., en raison des fuites provenant de l'appartement de la SCI, ne répondait pas aux besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation et ne constituait pas non plus la contrepartie d'une prestation fournie à la SCI débitrice, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la SCI Naceur à payer à Mme T... la somme de 2 170 euros au titre du préjudice de jouissance pour la période postérieure au 22 septembre 2016, l'arrêt rendu le 7 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai.