Cass. com., 28 juin 1983, n° 82-11.412
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Baudouin
Rapporteur :
M. Delmas Goyon
Avocat général :
M. Cochard
Avocats :
Me Copper Royer, Me Choucroy
Sur les deux premiers moyens réunis:
Attendu que selon l'arrêt déféré (Paris, 22 décembre 1981) la société "Centre de Gestion Immobilière" (la CEGIM) dont M. Saint Pierre était le gérant majoritaire, a été condamnée par arrêt du 1er avril 1977, devenu définitif, à payer à M. Soumet, tiers porteur, deux lettres de change qu'elle avait acceptées, que la CEGIM n'ayant pas exécuté cette condamnation, M. Soumet a obtenu à son encontre un jugement prononçant la liquidation de ses biens, mais que ce jugement a été rétracté sur tierce opposition, que M. Saint Pierre a fait alors procéder à la liquidation amiable de la CEGIM, désignant M. Waczecka comme liquidateur, que cette liquidation ayant été clôturée sans qu'ait été prise en compte la créance de M. Soumet, ce dernier a assigné personnellement MM, Saint Pierre et Waczecka en paiement de sa créance et en dommages-intérêts;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir fait droit à la demande de M. Soumet, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'action de ce dernier tendait, dans le litige actuel comme dans celui qui a donné lieu à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris en date du 1er avril 1977, au paiement de deux lettres de change venant à échéance le 20 janvier 1975, mais que l'autorité de cette décision du 1er avril 1977 n'était que relative, les parties n'étant pas les mêmes, que la Cour d'appel de Paris ne pouvait opposer à MM. Saint Pierre et Waczecka un arrêt rendu contre la société à responsabilité limitée CEGIM, que la Cour d'appel a violé l'article 1351 du Code civil, alors, d'autre part, que s'agissant d'une créance contre la CEGIM, son règlement incombait d'abord à cette société qui subsistait aussi longtemps que les droits et obligations à caractère social n'étaient pas liquidés, qu'en écartant tout recours contre la société à responsabilité limitée, la Cour d'appel de Paris n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 391 de la loi du 24 juillet 1966;
Mais attendu qu'en relevant que l'action dont disposait M. Soumet contre la CEGIM, dont la personnalité morale subsistait pour les besoins de la liquidation, eût été illusoire en l'absence de tout élément d'actif, qu'en déclarant recevable son action en responsabilité contre MM. Saint Pierre et Waczecka, et en condamnant ces derniers pour les "fautes dommageables" qu'ils avaient commises en omettant délibérément d'inclure la créance de M. Soumet, dont ils avaient connaissance et qui n'était pas contestée, dans les comptes de liquidation, la Cour d'appel a justifié sa décision sans violer aucun des textes visés aux moyens; que ceux-ci sont sans fondement;
Sur le troisième moyen:
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir condamné in solidum MM. Saint Pierre et Waczecka à payer diverses sommes à M. Soumet, alors, selon le pourvoi, que M. Waczecka était seul liquidateur, que la participation de M. Saint Pierre à la liquidation ne pouvait résulter ni de la maîtrise de la majorité du capital, ni de l'achat de parts d'une société civile immobilière, que la Cour d'appel de paris n'a mis en évidence aucun fait précis établissant un lien entre des agissements imputables à M. Saint Pierre et l'omission de la créance de M. Soumet, que la Cour d'appel n'a pas justifié sa décision vis-à-vis de l'article 400 de la loi du 24 juillet 1966;
Mais attendu que c'est par une appréciation souveraine des documents qui lui étaient soumis que la Cour d'appel a retenu que M. Saint Pierre s'était immiscé dans les opérations de liquidation avec l'accord du liquidateur, et que leurs fautes conjointes avaient causé un préjudice à M. Soumet dont ils lui devaient réparation; que le moyen est sans fondement.
PAR CES MOTIFS:
REJETTE le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 22 décembre 1981 par la Cour d'appel de Paris.