Cass. 1re civ., 2 octobre 2013, n° 12-24.867
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Charruault
Avocats :
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 juin 2012), que M. X..., mandataire liquidateur de la société Biche de Bère en liquidation judiciaire, assigné, ès qualités, par l'association des exploitants du centre commercial Marques Avenue Romans, en paiement de la somme de 2 696,98 euros que la société, adhérente de l'association, devait au titre des cotisations pour les troisième et quatrième trimestres 2006 et de la somme de 404,54 euros au titre de la clause pénale, a formé une demande reconventionnelle en remboursement des cotisations perçues par l'association, fondée sur la nullité de l'adhésion obligatoire à celle-ci ; que l'arrêt confirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de l'association tendant à voir fixer sa créance du chef des cotisations impayées au jour du jugement d'ouverture, l'infirme pour le surplus et dit nulle l'adhésion de cette société à l'association des exploitants du centre commercial Marques Avenue Romans ;
Attendu que M. X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt de limiter la condamnation de l'association, au titre de la restitution des cotisations versées, à la somme de 182,33 euros, alors, selon le moyen :
1°/ que dans les conclusions d'appel, les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; qu'en l'espèce, dans le dispositif de ses conclusions l'association des exploitants du centre commercial Marques Avenue Romans se bornait à demander le rejet de la demande de M. X..., ès qualités, tendant au remboursement des cotisations perçues par l'association, sans demander la restitution en valeur des prestations fournies ni la compensation avec sa propre dette de remboursement des cotisations perçues ; qu'en limitant la condamnation de l'association envers M. X..., ès qualités, au titre de la restitution des cotisations à la somme de 182,33 euros après avoir fixé la valeur des prestations fournies au montant des cotisations versées par la société Biche de Bère, soit 12 136,41 euros, et en procédant à la compensation des sommes dues de part et d'autre, quand elle n'était saisie d'aucune demande de l'association en restitution de la valeur des prestations, ni d'une demande de compensation, la cour d'appel a violé l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile ;
2°/ que les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ses prétentions est fondée ; qu'en l'espèce, l'association des exploitants du centre commercial Marques Avenue Romans se bornait à faire valoir, dans le corps de ses conclusions, que la société Biche de Bère devait restituer la valeur des prestations servies par l'association, sans chiffrer son montant ni fournir aucun élément de nature à permettre aux juges de l'évaluer ; qu'en limitant la condamnation de l'association envers M. X..., ès qualités, au titre de la restitution des cotisations à la somme de 182,33 euros, après avoir fixé la valeur des prestations fournies au montant des cotisations versées par la société Biche de Bère, soit 12 136,41 euros, et en procédant à la compensation des sommes dues de part et d'autre, quand la cour d'appel n'était saisie d'aucun demande chiffrée de restitution en valeur des prestations fournies ni d'aucun moyen relatif à cette évaluation, la cour d'appel a violé l'article 954, alinéa 1er, du code de procédure civile ;
3°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, en évaluant d'office la valeur de restitution des prestations au montant des cotisations prévues au contrat d'adhésion, soit 12 136,41 euros, et en procédant également d'office à la compensation de cette somme avec celle due par l'association au titre de la restitution des cotisations, sans inviter les parties à faire valoir leurs observations, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile ;
4°/ que toute personne dont les droits et libertés reconnus par la Convention européenne des droits de l'homme ont été violés, a droit à un recours effectif ; que la restitution en valeur par l'adhérent de prestations non sollicitées, pour un montant strictement équivalent à celui des cotisations versées, conduit à une reconnaissance théorique, dénuée de toute effectivité, de la liberté du preneur de ne pas adhérer à l'association et de ne pas bénéficier desdites prestations ; qu'en l'espèce, comme le faisait valoir M. X..., ès qualités, les prestations fournies par l'association des exploitants du centre commercial Marques Avenue Romans avaient été imposées à la société Biche de Bère par une adhésion forcée à cette association ; qu'en imposant néanmoins à M. X..., ès qualités, une restitution en valeur de ces prestations imposées à la société Biche de Bère de façon illicite, pour un montant strictement équivalent à celui des cotisations versées, la cour d'appel a violé les articles 6 § 1, 11 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble l'article 1304 du code civil ;
5°/ que la restitution en valeur des prestations fournies par une association de commerçants, à la suite de l'annulation de la clause d'adhésion forcée d'un locataire, doit être équivalente au prix des prestations fournies ; qu'en se bornant à constater qu'au vu des éléments du dossier, il convenait d'estimer la valeur de restitution des prestations fournies par l'association des exploitants du centre commercial Marques Avenue Romans au montant des cotisations prévues au contrat d'adhésion et versées par l'adhérente, soit 12 136,41 euros, sans préciser sur quels éléments elle se fondait pour retenir cette évaluation, ni indiquer la nature et l'importance des prestations fournies, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1304 du code civil ;
Mais attendu que, amenée à se prononcer sur la mise en oeuvre du principe des restitutions réciproques en conséquence de l'annulation de la convention d'adhésion obligatoire liant les parties et saisie des conclusions de l'association, soutenues par des développements relatifs à la restitution de la valeur des prestations fournies et non contestées, par lesquelles celle-ci lui demandait expressément, dans le dispositif, de « débouter M. X..., ès qualités, de sa demande de remboursement des cotisations perçues par elle pour un montant total de 12 318,74 euros », prétention qui contenait le rejet de cette demande fondé implicitement sur l'extinction de la dette à due concurrence de sa créance de restitution par l'effet de la compensation légale et, partant, le chiffrage de la valeur des prestations correspondantes, la cour d'appel a, sans méconnaître le principe de la contradiction, souverainement évalué, au vu des éléments qui lui étaient soumis et dont elle n'avait pas à préciser le détail, la valeur des prestations justifiant l'indemnisation de l'association et que M. X..., ès qualités, pouvait critiquer, et en a, à bon droit, ordonné la compensation avec le montant des cotisations sujettes à restitution ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.