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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 10, 10 mai 2021, n° 19/20987

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Financière MTB (SARL)

Défendeur :

Cambon Partners (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Loos

Conseillers :

Mme Castermans, M. de Chergé

T. com. Paris, du 3 oct. 2019, n° 201605…

3 octobre 2019

 FAITS ET PROCÉDURE

La Sas Cambon Partners, venant aux droits de la société Financière Cambon, exerce une activité de conseil dans le secteur des activités comptables.

La Sarl Financière MTB est spécialisée dans le secteur des activités de sociétés holding.

La Sas Synodiance est spécialisée dans l'activité de « search marketing » qui consiste à optimiser le positionnement de sites web dans les moteurs de recherches internet. Le capital social est détenu notamment par la société Financière MTB, la société CM-CIC Investissement SCR, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S..

Au début de l'année 2015, les actionnaires de la société Synodiance ayant envisagé de céder leurs parts à un acteur du secteur, la société CM-CIC Investissement SCR a présenté la société Financière Cambon aux autres actionnaires.

Le 10 avril 2015 la société Financière Cambon a conclu une convention de mandat d'une durée de 7 mois avec les sociétés Financière MTB, CM-CIC Investissement SCR, M. Jean-François A., M. Yann S. et M. Jean Pascal T., ayant pour objet une mission d'assistance et de conseil pour approcher des partenaires potentiels et conduire les négociations avec un éventuel acquéreur.

Le 21 janvier 2016, la société Financière Cambon a adressé à la société Synodiance une mise en demeure de payer la somme de 26.296,40 euros.

Le 26 janvier 2016, la société Synodiance a fait valoir que la société Financière Cambon avait été défaillante dans l'exécution de son mandat et n'a pas donné suite.

Le 07 avril 2016, la société Mymedia New Co a conclu avec les actionnaires de la société Synodiance un traité de cession de leurs titres.

Par acte d'huissier du 12 juillet 2016, la société Financière Cambon a assigné en paiement les anciens actionnaires de la société Synodiance devant le tribunal de commerce de Paris.

Le 31 octobre 2018, la société Cambon Partners s'est désistée d'instance et d'action à l'égard de la société CM-CIC Investissement SCR, désistement constaté le 12 décembre 2018 par le tribunal de commerce de Paris. Par courrier en date du 2 juillet 2019, M. T. a déclaré accepter le désistement d'instance et d'action de la société Cambon Partners à son égard.

Par jugement du 03 octobre 2019, le tribunal de commerce de Paris a :

- pris acte du désistement d'instance et d'action réciproque de la Sas Cambon Partners anciennement dénommée Sas Financière Cambon et de M. Jean Pascal T.,

- condamné la Sarl Financière MTB à payer à la Sas Cambon Partners anciennement dénommée Sas Financière Cambon la somme de 297.932,65 euros en principal,

- condamné M. Jean-François A. à payer à la Sas Cambon Partners anciennement dénommée Sas Financière Cambon la somme de 76 044.05 euros en principal,

- condamné M. Yann S. à payer à la Sas Cambon Partners anciennement dénommée Sas Financière Cambon la somme de 9570.94 euros en principal,

- dit que ces sommes porteront intérêts au taux de la BCE majoré de 10 points à compter du 9 mai 2016,

- condamné in solidum les défendeurs à payer à la requérante la somme de 15 000 euros sur le fondement de l',

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté les parties de leurs demandes autres plus amples ou contraires,

- condamné les défendeurs solidairement aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquides à la somme de 219,18 euros dont 36,32 6 de TVA.

Par déclaration du 14 novembre 2019, la société Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S., ont interjeté appel du jugement.

Par dernières conclusions signifiées le 19 février 2021, la société Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S., demandent à la cour de :

Vu les , L. 321-1, L. 321-2 et L. 531-1 du code monétaire et financier, 12 du code de procédure civile,

- dire recevable et bien fondé l'appel interjeté par les anciens actionnaires de la société Synodiance, Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S. contre le jugement du tribunal de commerce du 03 octobre 2019 ;

- infirmer le jugement du tribunal de commerce du 03 octobre 2019 ;

- ordonner la restitution des sommes remis à la société Cambon Partners au titre de l'exécution provisoire du jugement du tribunal de commerce du 03 octobre 2019 entre les mains des anciens actionnaires de la société Synodiance, la société Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S. ;

A titre principal,

- dire que la qualité de conseiller en investissement financier, activité soumise à l'agrément de l'Autorité des Marchés Financiers, est applicable à l'activité de la société Cambon Partners dans le cadre de ses relations avec les anciens actionnaires de la société Synodiance, Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S. ;

- prononcer la nullité du contrat de mandat signé le 10 avril 2015 entre la société Cambon Partners et les anciens actionnaires de la société Synodiance, Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S. en raison de son objet illicite ;

- ordonner la restitution par la société Cambon Partners aux anciens actionnaires de la société Synodiance, Financière MTB, Monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S., à hauteur de leur participation dans la société, des sommes forfaitaires remises à la société Cambon Partners en vertu du contrat de mandat d'un montant total de 38.296 euros ;

- condamner la société Cambon Partners à verser à titre de dommages et intérêts aux anciens actionnaires de la société Synodiance la somme de 5.000.000 euros répartie comme suit : 3.174.500 euros pour la société Financière MTB ; 810.500 euros pour monsieur Jean-François A. ; 102.000 euros pour monsieur Yann S..

A titre subsidiaire,

- dire que le droit de suite de l'article 7 du mandat est inapplicable aux relations entre la société Cambon Partners et les anciens actionnaires de la société Synodiance, Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S.,

- dire que les anciens actionnaires de la société Synodiance, Financière MTB, monsieur Jean-François A. et Monsieur Yann S., ne sont débiteurs d'aucun honoraire de résultat à l'égard de la société Cambon Partners ;

- ordonner la restitution des sommes versées au titre de l'honoraire de résultat par Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S. à raison du caractère exécutoire du jugement du tribunal de commerce de Paris du 3 octobre 2019

A défaut,

- dire que la société Cambon Partners n'a pas exécuté avec diligences les obligations qui lui étaient faites par le contrat de mandat du 10 avril 2015 ; que l'honoraire de résultat de 383.583,02 euros demandé par la société Cambon Partners est disproportionné au regard des services rendus ;

- supprimer l'honoraire de résultat de 383.583,02 euros au bénéfice de la société Cambon Partners ;

A défaut,

- réduire l'honoraire de résultat de la société Cambon Partners à juste proportion ;

En tout état de cause,

- dire qu'ont été commis des manquements contractuels par la société Cambon Partners dans l'exécution du mandat confié le 10 avril 2015 par les anciens actionnaires de la société Synodiance ;

- condamner la société Cambon Partners à verser à titre de dommages et intérêts aux anciens actionnaires de la société Synodiance, et en raison de leur perte de chance de céder leurs titres à leur juste prix, la somme de 5.000.000 d'euros répartie comme suit : 3.174.500 euros Financière MTB ; 810.500 euros pour monsieur Jean-François A. ; 102.000 euros pour monsieur Yann S..

En tout état de cause,

- ordonner la restitution de la somme de 15.000 euros versée à la société Cambon Partners au titre de l'article 700 du code de procédure au titre de l'exécution provisoire du jugement du tribunal de commerce de Paris du 03 octobre 2019 ;

- condamner Cambon Partners à verser aux anciens actionnaires de la société Synodiance, Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S., la somme de 10.000 euros au titre de l', ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Par dernières conclusions signifiées le 10 février 2021, la société Cambon Partners demande à la cour de :

Vu les, 1382 ancien du même code, l 41-6 du code de commerce, l 321-1, 3° du code monétaire et financier,

- confirmer en tous points le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 3 décembre 2019 ;

- débouter les appelants de leurs demandes reconventionnelles ;

- condamner conjointement et solidairement les appelants à payer à la société Cambon Patners la somme de 50.000 euros sur le fondement de l', outre les entiers dépens.

SUR CE,

Sur la demande de nullité de la convention de mandat du 10 avril 2015

La société Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S. font valoir sur le fondement de l'article 1162 du code civil que la nullité d'un contrat est encouru dès lors qu'une partie exerçait de façon illégale une profession ; en l'espèce l'activité de la société Cambon Partners portait de manière habituelle sur des conseils en investissement financiers ; elle avait une parfaite connaissance de l'objectif patrimonial poursuivi par les actionnaires de la société Synodiance ; la société Cambon Partners a délivré aux actionnaires de Synodiance des recommandations personnalisées qui caractérisent des prestations de conseil en investissement soumis à l'agrément de l'AMF conformément à l'article L. 531-1 du code monétaire financier.

La société Cambon Partners réplique que sa prestation ne peut être qualifiée de conseil en investissement dans la mesure où la prestation fournie correspond à un service connexe, à savoir le conseil en haut de bilan, ne nécessitant pas d'agrément de l'AMF. La thèse des appelants a un caractère absurde et grotesque. En tout état de cause la nullité du contrat ne peut être encouru.

Ceci étant exposé,

Selon l', alors applicable, « les services d'investissement portent sur les instruments financiers énumérés à l'article L. 211-1 et sur les unités mentionnées à l'article L. 229-7 du code de l'environnement et comprennent les services et activités suivants :

1. La réception et la transmission d'ordres pour le compte de tiers ;

2. L'exécution d'ordres pour le compte de tiers ;

3. La négociation pour compte propre ;

4. La gestion de portefeuille pour le compte de tiers ;

5. Le conseil en investissement ;

6-1. La prise ferme ;

6-2. Le placement garanti ;

7. Le placement non garanti ;

8. L'exploitation d'un système multilatéral de négociation au sens de l'article L. 424-1 ;

9. L'exploitation d'un système organisé de négociation au sens de l'article L. 425-1. »

Selon l'article L. 531-1 du code monétaire et financier, alors applicable, « les prestataires de services d'investissement sont les entreprises d'investissement et les établissements de crédit ayant reçu un agrément pour fournir des services d'investissement au sens de l'article L. 321-1. La prestation de services connexes au sens de l'article L. 321-2 est libre, dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur applicables à chacun de ces services. Elle ne permet pas, à elle seule, de prétendre à la qualité d'entreprise d'investissement. »

Selon l'article L. 541-1 du code monétaire et financier, alors applicable, « " I.-Les conseillers en investissements financiers exercent à titre de profession habituelle les activités suivantes :

1° Le conseil en investissement mentionné au 5 de l'article L. 321-1 ;

2° (Abrogé)

3° Le conseil portant sur la fourniture de services d'investissement mentionnés à l'article L. 321-1 ;

4° Le conseil portant sur la réalisation d'opérations sur biens divers définis à l'article L. 550-1.

II.-Les conseillers en investissements financiers peuvent également fournir le service de réception et de transmission d'ordres pour le compte de tiers, dans les conditions et limites fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers et exercer d'autres activités de conseil en gestion de patrimoine.

III.-Ne sont pas soumis aux dispositions du présent chapitre :

1° Les établissements de crédit et les organismes mentionnés à l'article L. 518-1, les entreprises d'investissement et les entreprises d'assurance ;

2° Les personnes mentionnées au g du 2° de l'article L. 531-2.

IV.-Les conseillers en investissements financiers ne peuvent à titre habituel et rémunéré donner de consultations juridiques ou rédiger des actes sous seing privé pour autrui que dans les conditions et limites des articles 54,55 et 60 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques. »

Selon la communication « position DOC 2018 03 - ACPR-AMF » du 14 mars 2018 sur la distinction entre le conseil en investissement et le conseil aux entreprises en matière de structure de capital, de stratégie industrielle, de fusions et de rachat d'entreprises : « ces activités entrent dans les services connexes visés au 3 de l'article L. 321-2 du code monétaire et financier et sont hors du champ du statut CIF (conseil en investissements financiers). L'AMF considère qu'il convient de tenir compte de l'objectif poursuivi par le client :

- Objectif de nature entrepreneuriale et industrielle : tel est le cas lorsque le client cherche à financer son développement, sa croissance externe ou de nouvelles synergies industrielles, ou à pénétrer de nouveaux marchés dans le cadre d'un projet défini ou à organiser la cession ou l’acquisition d'une branche d'activité, alors le conseil fourni est celui visé au 3 de l'article L. 321-2 du code monétaire et financier. (Hors CIF)

-Objectif de nature patrimoniale : tel est le cas lorsque le client cherche la constitution d'une épargne, la recherche d'un rendement financier régulier, ou à se couvrir contre un risque ' alors le conseil fourni est un conseil en investissement au sens du 5 de l'article L. 321-1 du même code.

Les prestations entrant dans le champ de l'article 3 (hors CIF) doivent répondre aux 4 critères suivants : diligences portent sur les fondamentaux de l'entreprise, analyse du secteur, éventuelles évolutions et récentes opérations en vue de préciser le projet entrepreneurial du client, accompagnement du client dans la recherche des contreparties (sociétés cibles, branches d'activité, personnes physiques), de nouveaux associés ou actionnaires ou d'apporteurs de fonds susceptibles d'être intéressés par l'entreprise, existence d'une négociation multi ou bilatérale pour la fixation des termes et conditions de l'opération, intuitu personae fort entre le client et son conseiller, entre le client et les contreparties ».

La convention de mandat conclue le 10 avril 2015 entre les sociétés Financière Cambon, Financière MTB et CM-CIC Investissement SCR, M. Jean-François A., M. Yann S. et M. Jean Pascal T., a pour objet de délimiter la mission d'assistance et de conseil en vue de mener une étude et l'éventuelle réalisation d'une opération de rapprochement avec un autre acteur industriel (cession, apport, échange de tout ou partie, fusion ) et comporte les sujétions suivantes : rédaction de la documentation nécessaire, constitution de listes de partenaires potentiels, approche de ceux agréés par les actionnaires, conduite des négociations, coordination et supervision des travaux de tous conseils pour formaliser l'opération.

La société Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S. font valoir que la société Cambon Partners aurait délivré des prestations de conseil en investissement financier soumis à l'agrément de l'AMF.

Mais, s'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, la société Financière MTB, MM. Jean-François A. et Yann S. font état d'allégations soutenus par une « capture d'écran », un « communiqué de presse », une « interview », une « communication sur l'opération Lynx » et des extraits de courriels, dénués de toute valeur probante.

Il convient de rappeler de ce point de vue que la convention signée des parties stipule clairement que « les actionnaires et la société Synodiance souhaitent étudier la possibilité d'un rapprochement avec un autre acteur industriel » et limite le mandat octroyé à la société Financière Cambon à la recherche de cet acteur industriel.

En outre, contrairement aux allégations de la société Financière MTB, de MM. Jean-François A. et Yann S., l'objectif des actionnaires de la société Synodiance était de « céder l'intégralité du capital en numéraire au jour de l'opération en évitant d'éventuels compléments de prix », avec une forte restriction en matière de calendrier, et non de constituer une « épargne » sur laquelle il n'est fourni aucun élément.

De plus, la société Financière MTB, MM. Jean-François A. et Yann S. allèguent que l'objectif des actionnaires de la société Synodiance était « patrimonial », mais échouent à relever un tel objectif dans la convention signée le 10 avril 2015 et dans le traité de cession de titres. De fait, se référant aux organes de régulation CESR et AMF, ils tentent de comparer certains critères avec des constats erronés. Ils ne justifient ainsi ni d'une « recommandation », ni d'une « transaction », assimilent les réunions et les courriels échangés entre les parties à des « canaux de distribution » et s'identifient à la fois en tant qu' « investisseurs » et « anciens actionnaires » pendant l'exécution du contrat.

Par ailleurs, la société Financière MTB, MM. Jean-François A. et Yann S. assimilent les titres de la société Synodiance à un « instrument financier » (écrits, page 27), sans même opérer de distinction entre une opération de cession de titres et l'achat de produits spécifiques souscrits dans le cadre d'un contrat d'adhésion.

Enfin, M. Jean-François A. et Yann S., appelants, sont devenus salariés du groupe My Media dans le cadre de la cession réalisée.

La convention de mandat conclue le 10 avril 2015 portait en réalité sur une mission d'assistance et de conseil à la réalisation d'une opération à visée entrepreneuriale, telle que la cession d'une société. Les sociétés Financière MTB et CM-CIC Investissement SCR, M. Jean-François A., M. Yann S. et M. Jean Pascal T. ont ainsi eu recours à un accompagnement par la société Synodiance pour un projet « en haut de bilan », dont l'objectif était de nature entrepreneuriale ou industrielle. Or, les activités de conseil en haut de bilan peuvent être exercées sans agrément, relevant du service connexe prévu à l'alinéa 3 de l'article L. 321-2 du CMF.

Il en résulte que la société Financière MTB, MM. Jean-François A. et Yann S. doivent être déboutés de toutes leurs demandes relatives à la reconnaissance de la qualité de conseiller en investissement financier, la nullité du contrat qui en découlerait, ainsi que la restitution de leur participation et le paiement de dommages et intérêts.

C'est en conséquence à juste titre que les premiers juges ont débouté la société Financière MTB, MM. Jean-François A. et Yann S. de leurs demandes.

Le jugement déféré sera confirmé sur ces chefs.

Sur l'honoraire de résultat et la créance de la société Cambon Partners

La société Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S. font valoir que les conditions d'application de l'article 7 du mandat ne sont pas réunies ; le droit de suite ne peut jouer, car au jour du terme du mandat, la société MyMedia ne pouvait pas être considérée comme un « Partenaire(s) Potentiel(s) » d'autant que l'acquéreur final des actions de la société Synodiance n'était pas la société MyMedia mais MyMedia New Co, personne morale distincte. A titre subsidiaire, sur le fondement de l'article 1999 du code civil, les honoraires de résultats doivent être supprimés ou réduits en considération des fautes commises, à savoir le non-respect du calendrier fixé par le mandat, le manque de diligences dans la recherche de contreparties, la violation des engagements de confidentialité et la sous-évaluation du prix de vente des titres des actionnaires de la société Synodiance.

La société Cambon Partners réplique que son rôle a été déterminant dans la cession de la société Synodiance intervenue au profit de My Media Group et qu'en application de l'article 7 du contrat de mandat sur le droit de suite, la commission de réalisation lui est intégralement due, ayant parfaitement exécuté le contrat.

Ceci étant exposé,

La convention de mandat conclue le 10 avril 2015 entre les sociétés Financière Cambon, Financière MTB et CM-CIC Investissement SCR, M. Jean-François A., M. Yann S. et M. Jean Pascal T., stipule :

« Article 3. Rémunération

3.1 Commission forfaitaire

En rémunération de ses prestations de conseil et d'assistance, FC percevra de la Société une commission forfaitaire mensuelle de 5.000 euros (hors taxes), limitée à six échéances. Cette commission sera déductible de la commission de réalisation visée au 3.2.

3.2 Commission de réalisation

En cas de réalisation de l'Opération, FC percevra des Actionnaires une commission de réalisation calculée comme suit;

2,5% (hors taxes) du Montant Global de l'Opération inférieur à 8.000 000 euros;

4% (hors taxes) du Montant Global de l'Opération compris entre 8.000 000 euros et 10.500.000 euros;

7% (hors taxes) du Montant Global de l'Opération supérieur à 10.500.000 euros;

Le Montant Global de l'Opération s'entend du total des sommes et/ou des valorisations visées par l'Opération dans sa globalité, réalisée immédiatement ou dont la réalisation est prévue à terme dans le cadre des accords matérialisant la réalisation de l'Opération, et notamment du prix de vente (incluant les compléments de prix) de tout ou partie des actions et/ou des actifs cédés dans l'hypothèse d'un paiement en numéraire; et/ou de la valeur des titres reçus en rémunération dans l'hypothèse d'un apport ou d'échange de titres et/ou d'actifs; et/ou des éventuels engagements futurs d'acquisitions complémentaires de titres ; de la valeur des titres composant le capital de la Société retenue pour le calcul de la parité dans l'hypothèse d'une fusion . La commission de réalisation sera payée à FC par les Actionnaires selon le même calendrier que le paiement effectif du Montant Global de l'Opération aux Actionnaires. »

« Article 7. Droit de suite

Si, dans un délai de douze mois suivant le terme de la Convention, les Actionnaires ou la Société devaient conclure toute forme d'accord matérialisant l'Opération avec un ou plusieurs Partenaire(s) Potentiel(s), les droits de FC seraient préservés et la commission de réalisation ci-dessus visée à l'article 3, lui serait intégralement due et versée selon les mêmes termes que ceux visés à l'article 3 suscité. Les Actionnaires et la Société s'engagent à informer, immédiatement et de manière continue FC de tout événement ou fait qui serait susceptible de mettre en œuvre le présent droit de suite. »

La société Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S. font valoir qu'ils ne sont débiteurs d'aucun honoraire de résultat à l'égard de la société Cambon Partners ou qu'à défaut, cette dernière n'a pas exécuté ses obligations.

Mais, si celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation, la société Financière MTB, MM. Jean-François A. et Yann S. n'étayent aucunement l'inexécution des termes du contrat par la société Cambon Partners.

En effet, d'une part, la société Financière MTB, MM. Jean-François A. et Yann S. n'apportent aucune explication sur l'absence de paiement de la commission forfaitaire à compter de la troisième échéance mensuelle. S'ils ont allégué une « défaillance » pour s'exonérer de leurs obligations contractuelles sur une créance de 296 euros Ttc, ils ne remettent pas en cause, ce jour, son paiement puisqu'ils limitent leur demande de restitution des sommes versées au seul honoraire de résultat.

D'autre part, la société Cambon Partners a rempli les obligations stipulées dans la convention de mandat ouvrant droit à la commission de réalisation dans le délai de 12 mois. Elle a ainsi établi un mémorandum d'information adressé à M. R., mandataire social de la société Synodiance, le 22 mai 2015. Ce mémorandum et le « teaser » ont fait l'objet d'une validation le 1erjuin 2015. La société Cambon Partners a également trié et contacté 46 acquéreurs potentiels et formalisé une liste de 38 acquéreurs potentiels classés en deux groupes « tier 1 » et « tier 2 ». La société Cambon Partners a également établi le 15 juin 2015 une liste de huit acquéreurs potentiels ayant exprimé leur absence d'intérêt, outre deux ayant étudié le mémorandum d'information, et programmé un rendez-vous.. R. écrit ainsi à la société Cambon Partners le 23 juin 2015 : « après discussion avec les associés, nous pensons que My Media peut faire partie du Tier 2 » (pièce 39).

Si la société Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S. s'approprient l'origine des contacts en alléguant que « M. R. proposait de contacter la société My Media ayant le numéro de téléphone d'un contact au sein de la société ») écrits, page 7 (, ils n'en justifient aucunement. De ce point de vue, M. Anthony R., mandataire social de la société My Media, acquéreur final, a confirmé dans un courriel du 9 octobre 2017 le rôle de la société Cambon Partners : « c'est bel et bien Cambon Partners qui nous a contacté et présenté l'info mémo ainsi que l'équipe dirigeante. Je confirme que tu m'as encouragé à poursuivre les discussions avec Synodiance ». De même, les appelants confirment implicitement les travaux engagés par la société Cambon Partners : « la société Cambon Partners acceptait d'organiser une réunion et transmettre à My Media les documents relatifs à la société Synodiance » (écrits, page 36).

Par ailleurs, si M. R., mandataire social de la société Synodiance, a exigé la signature d'une lettre d'intention avec la société My Media, sélectionnée par la société Cambon Partners dans le groupe « tier 2 », avant le 31 juillet 2015, un accord de confidentialité a été effectivement signé le 16 juillet 2015 par M. Anthony R. pour la société My Media (pièce 41). Une rencontre entre les dirigeants a été organisée le 23 juillet 2015. Ces constats infirment les allégations liées au non-respect du délai contractuel ou à l'absence de toute relation entre la société My Media et la société Cambon Partners (écrits, page 36).

La société Financière MTB, monsieur Jean-François A. et monsieur Yann S. allèguent de façon peu convaincante une « défaillance du mandataire dans l'exécution de sa mission ». Mais ils n'ont à aucun moment fait état de « fautes commises », d'une « violation des engagements de confidentialité » ou d'une « sous-évaluation du prix de vente », dans un éventuel courrier de mise en demeure, ni même entrepris la résiliation de la convention de mandat. Ils ont ainsi tacitementreconnu à la société Cambon Partners le droit à percevoir une commission de succès pendant la période contractuellement fixée.

En conclusion, lsociété Cambon Partners a établi des contacts et noué des liens d'intérêt, au sens contractuel du terme, qui se distinguent de la simple identification. L'investisseur potentiel a manifesté son intérêt. Lsociété Cambon Partners a préparé les étapes de la cession en s'entourant d'un avocat et d'un expert-comptable. L'intérêt respectif des parties a eu pour conséquence rachat de la société Synodiance par la société My Media New Co par acte de cession du 7 avril 2016, pour un prix de 11 800 000 euros, résultant clairement de l'opération lancée le 10 avril 2015 par la société Cambon Partners.

De ce point de vue, la société My Media est devenue la Sas My Media Group le 11 août 2015, puis « My Media New Co » le 15 avril 2016, dans le cadre de la préparation de l'opération de cession avec la société Synodiance. Mais il est inopérant de relever cette distinction pour remettre en cause le bien-fondé des travaux de l'intimée : « l'argument qui consiste à dire que My Media et My Media Newco ne seraient pas les mêmes sociétés est totalement faux car My Media est une filiale à 100 % de My Media Co rebaptisée My Media Group » (M. Anthony R., courriel du 9 octobre 2017).

C'est en conséquence à juste titre que les premiers juges ont condamné la société Financière MTB à payer à la été Cambon Partners la somme de 297.932,65 euros en principal, M. Jean-François A. à payer à la été Cambon Partners la somme de 76 044.05 euros en principal, M. Yann S. à payer à la été Cambon Partners la somme de 9 570.94 euros en principal et dit que ces sommes porteront intérêts au taux de la BCE majoré de 10 points à compter du 9 mai 2016.

Le jugement déféré sera confirmé sur tous ces chefs.

La solution du litige conduira à rejeter toutes les autres demandes.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

REJETTE toute autre demande ;

CONDAMNE in solidum la société Financière MTB, MM. Jean-François A. et Yann S. à payer à la société Cambon Partners, venant aux droits de la société Financière Cambon, la somme de 10 000 euros en application de l' ;

CONDAMNE in solidum la société Financière MTB, MM. Jean-François A. et Yann S. aux dépens.