Livv
Décisions

Cass. com., 2 mai 1968, n° 65-12.993

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guillot

Rapporteur :

M. Monguilan

Avocat général :

M. Gegout

Avocats :

Me Célice, Me Ryziger, Me Le Bret

Rennes, du 13 mai 1965

13 mai 1965

SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SA PREMIERE BRANCHE ;

ATTENDU QUE, SELON LES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE (RENNES, 13 MAI 1965) LES BIENS DE PRESSE QUI APPARTENAIENT A LA SOCIETE EN COMMANDITE PAR ACTIONS PRESSE REGIONALE DE L'OUEST (P.R;O) EDITRICE DU JOURNAL OUEST-ECLAIR, ONT ETE TRANSFERES A L'ETAT, DEVOLUS A LA SOCIETE NATIONALE DES ENTREPRISES DE PRESSE (S.N.E.P) PUIS ATTRIBUES A LA SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE OUEST FRANCE QUI S'EN EST PORTEE ACQUEREUR ;

QUE, LA PEINE DE CONFISCATION DONT LA P.R.O. AVAIT ETE FRAPPEE AYANT ETE REMISE PAR MESURE DE GRACE, LES MODALITES DE L'ACQUISITION DESDITS BIENS ONT FAIT L'OBJET D'UN CONTRAT DIRECTEMENT CONCLU ENTRE LA P.R.O. ET OUEST FRANCE CONFORMEMENT AUX PREVISIONS DE L'ARTICLE 9 DE LA LOI DU 2 AOUT 1954 ET QUE LE PRIX CONVENU DE 595 MILLIONS D'ANCIENS FRANCS, PAYABLE EN SIX ANNUITES, PRIX APPROUVE AVEC L'ENSEMBLE DU CONTRAT PAR L'ASSEMBLEE GENERALE DES ACTIONNAIRES DE LA P.R.O. DU 10 SEPTEMBRE 1956, A ETE VERSE PAR OUEST FRANCE AUX ECHEANCES STIPULEES ;

QUE, CEPENDANT, EN 1963 ET 1964, LA P.R.O. ETANT ALORS EN LIQUIDATION AMIABLE, CERTAINS DE SES ACTIONNAIRES (CONSORTS X..., EPOUX Y..., EPOUX Z..., CONSORTS A..., B... ET DEMOISELLE C...) ONT PRETENDU QUE LA VENTE ETAIT NULLE PAR SUITE D'ERREUR OU DE DOL, AUCUN COMPTE N'AYANT ETE TENU DE LA VALEUR DE LA CLIENTELE POUR LA FIXATION DU PRIX ;

QUE LESDITS ACTIONNAIRES ONT, EN CONSEQUENCE, ASSIGNE, D'UNE PART, LA SOCIETE OUEST FRANCE EN NULLITE DE LA VENTE ET, D'AUTRE PART, LA P.R.O. EN DECLARATION DE JUGEMENT COMMUN ;

ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DECLARE LES DEMANDEURS IRRECEVABLES EN LEUR ACTION, AU MOTIF QUE CELLE-CI TENDAIT A REMETTRE EN CAUSE LE CONTRAT QUI AVAIT ETE DECIDE PAR LA MAJORITE DES ACTIONNAIRES DE LA P.R.O. ET QU'ON NE POUVAIT ADMETTRE QUE LA MINORITE PUISSE INDIRECTEMENT DISCUTER LES DECISIONS DE LA MAJORITE, ALORS, SELON LE POURVOI, QUE L'ACTION EXERCEE, FONDEE SUR DES VICES DU CONSENTEMENT, ETAIT ABSOLUMENT INDEPENDANTE DU POINT DE SAVOIR DANS QUELLES CONDITIONS UN CONSENTEMENT AVAIT ETE DONNE PUISQU'IL ETAIT ESSENTIELLEMENT ARGUE DE CE QUE CE CONSENTEMENT AVAIT ETE VICIE ;

QU'UNE TELLE ACTION EN NULLITE AURAIT PU ETRE EXERCEE MEME A L'OCCASION D'UNE DECISION PRISE A L'UNANIMITE ;

QU'IL SUFFISAIT, DES LORS, DE CONSTATER, POUR QUE L'ACTION DES DEMANDEURS FUT RECEVABLE, QUE LE LIQUIDATEUR SE REFUSAIT A L'EXERCER ;

QUE LA MEME ACTION OBLIQUE AURAIT D'AILLEURS DU ETRE ACCORDEE, LE CAS ECHEANT, A N'IMPORTE QUEL CREANCIER SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 1166 DU CODE CIVIL, QU'AU DEMEURANT LA P.R.O. AVAIT ETE VALABLEMENT MISE EN CAUSE EN LA PERSONNE DE SON LIQUIDATEUR ;

MAIS ATTENDU QUE, SI, EN LEUR QUALITE D'ACTIONNAIRES DE LA P.R.O., SOCIETE DISSOUTE QUI SE SURVIVAIT POUR LES BESOINS DE SA LIQUIDATION, LES DEMANDEURS AVAIENT UN DROIT DEJA OUVERT AU PARTAGE DU RELIQUAT DE L'ACTIF APRES PAYEMENT DU PASSIF, ILS N'ETAIENT PAS, POUR AUTANT, DES CREANCIERS HABILES A AGIR AUX LIEU ET PLACE DE LA SOCIETE PAR APPLICATION DE L'ARTICLE DU CODE CIVIL ;

QUE, SANS MECONNAITRE QUE LA DEMANDE TENDAIT A FAIRE PRONONCER LA NULLITE DE LA VENTE POUR VICES DU CONSENTEMENT DE LA P.R.O. ET A FAIRE, EN CONSEQUENCE, CONDAMNER L'ACQUEREUR A RESTITUER A CETTE DERNIERE TOUS LES BIENS COMPRIS DANS LADITE VENTE, LA COUR D'APPEL A CONSIDERE A JUSTE TITRE QUE, S'ILS DISPOSAIENT D'UNE ACTION CONTRE LES ADMINISTRATEURS OU LES LIQUIDATEURS COUPABLES OU NEGLIGENTS, LES DEMANDEURS NE POUVAIENT PAS, EN REVANCHE, SE SUBSTITUER, DE LEUR PROPRE AUTORITE, AU LIQUIDATEUR POUR EXERCER CONTRE L'ACQUEREUR L'ACTION EN NULLITE, EVENTUELLEMENT OUVERTE A LA SOCIETE VENDERESSE DES BIENS LITIGIEUX ;

QUE, DANS SA PREMIERE BRANCHE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;

SUR LA SECONDE BRANCHE DU PREMIER MOYEN : ATTENDU QUE LE POURVOI SOUTIENT ENCORE QUE, DES L'INSTANT OU LES DEMANDEURS INVOQUAIENT AUSSI, EN TANT QUE DE BESOIN, LA FRAUDE COMMISE A LEUR EGARD TANT PAR LA SOCIETE VENDERESSE QUE PAR LA SOCIETE ACQUEREUR, DIRIGEES PAR LES MEMES PERSONNES, LESDITS DEMANDEURS ETAIENT INCONTESTABLEMENT FONDES A RECLAMER AUX DEUX SOCIETES LA REPARATION DU DOMMAGE QUE LA FRAUDE LEUR AVAIT CAUSE ;

MAIS ATTENDU QUE CE N'EST POINT COMME VICTIMES D'UNE FRAUDE CONCERTEE DES DEUX SOCIETES, COMMISE CONTRE EUX, QUE LES DEMANDEURS AGISSAIENT DEVANT LA COUR D'APPEL ;

QU'ALLEGUANT QUE, LORS DE LA VENTE PAR ELLE CONSENTIE, LA P.R.O. AVAIT ETE TROMPEE, ILS PRETENDAIENT, EN CONSEQUENCE, POUVOIR, AU LIEU ET PLACE DU LIQUIDATEUR, AGIR CONTRE LA SOCIETE OUEST FRANCE ACQUEREUR, LEURS CONCLUSIONS AYANT POUR FINS L'ANNULATION DE LA VENTE AU PROFIT DE LA P.R.O. ET LA RESTITUTION A CETTE DERNIERE DE TOUS LES BIENS VENDUS, MAIS NON LA DECLARATION D'UNE RESPONSABILITE COMMUNE DE DEUX SOCIETES ENVERS EUX ET L'INDEMNISATION D'UN PREJUDICE PERSONNEL ;

QUE LE GRIEF FAIT A L'ARRET ATTAQUE DE N'AVOIR PAS DECLARE LES DEMANDEURS RECEVABLES " A RECLAMER AUX DEUX SOCIETES LA REPARATION DU DOMMAGE QUE LA FRAUDE LEUR AVAIT CAUSE " EST DONC DENUE DE FONDEMENT, LA COUR D'APPEL N'AYANT PAS ETE SAISIE D'UNE TELLE ACTION ;

D'OU IL SUIT QU'EN SA SECONDE BRANCHE LE MOYEN NE PEUT DAVANTAGE ETRE ACCUEILLI ;

SUR LE SECOND MOYEN : ATTENDU QU'IL EST ENFIN REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DECLARE QUE LA DEMANDE SUBSIDIAIRE, FONDEE SUR " L'ENRICHISSEMENT SANS CAUSE " REALISE PAR LA SOCIETE OUEST FRANCE, NE POUVAIT, ETANT NOUVELLE, ETRE FORMEE PAR LA PREMIERE FOIS EN CAUSE D'APPEL, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, L'ACTION PRINCIPALE TENDAIT ESSENTIELLEMENT AU RETABLISSEMENT DU PATRIMOINE DE LA P.R.O. TEL QU'IL AURAIT DU EXISTER ET QUE LES CAUSES EMPRUNTEES A LA NULLITE POUR ERREUR OU POUR DOL N'ETAIENT QU'UN MOYEN DE PARVENIR A CE RESULTAT, D'OU IL SUIT QUE LA DEMANDE, EN TANT QU'ELLE ETAIT FONDEE SUR L'ENRICHISSEMENT SANS CAUSE, S'INTEGRAIT NECESSAIREMENT DANS L'OBJET DE LA DEMANDE ORIGINAIRE ET TENDAIT AUX MEMES FINS ;

MAIS ATTENDU QU'A JUSTE TITRE LA COUR D'APPEL A CONSIDERE QUE LA DEMANDE NOUVELLE, FONDEE SUR L'ENRICHISSEMENT QU'AURAIT REALISE LA SOCIETE OUEST FRANCE EN S'APPROPRIANT SANS CAUSE JURIDIQUE LA CLIENTELE DU JOURNAL OUEST ECLAIR, NON COMPRISE DANS L'ACTE DE VENTE, NE PROCEDAIT PAS DE LA DEMANDE ORIGINAIRE FONDEE SUR LES VICES DU CONSENTEMENT DONT SERAIT ATTEINT LEDIT ACTE, LA DEMANDE EN INDEMNISATION POUR LA CLIENTELE SUPPOSANT LA VENTE VALABLE ET LA PROPRIETE DES BIENS DE PRESSE DEFINITIVEMENT ACQUISE A LA SOCIETE OUEST FRANCE ALORS QUE LA DEMANDE ORIGINAIRE TENDAIT AU CONTRAIRE A L'ANNULATION DE LA VENTE ET A LA RESTITUTION PAR LA SOCIETE OUEST FRANCE DE TOUS LES BIENS DE PRESSE EN SA POSSESSION ;

QUE LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 13 MAI 1965 PAR LA COUR D'APPEL DE RENNES.