Cass. crim., 28 septembre 2005, n° 05-84.495
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
Mme Ponroy
Avocat général :
M. Fréchède
Avocats :
SCP Bachellier et Potier de la Varde, SCP Waquet, Farge et Hazan
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 81, alinéa 1, et 151, alinéa 3, du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt a prononcé l'annulation partielle, par cancellation, de la commission rogatoire du 5 juillet 2000, des procès-verbaux d'audition, de notifications dans le cadre de la garde à vue et d'interrogatoire de première comparution de Jean-Bernard X... ainsi que l'annulation partielle ou totale de diverses autres pièces énumérées ;
"au motif que c'est en méconnaissance des dispositions de l'article 151, alinéa 3, du Code de procédure pénale et des limites de sa saisine fixées par le réquisitoire introductif du 4 juillet 2000, que le juge d'instruction, commettant un excès de pouvoir, et se saisissant lui-même des faits dont l'instruction ne lui était pas confiée, a prescrit des investigations totalement étrangères à l'instruction du délit de tentative d'extorsion de fonds et concernant le grand banditisme grenoblois ;
"alors que l'ensemble des éléments de faits décrits et des indications contenues dans les pièces de l'enquête préliminaire jointes au réquisitoire introductif qui les visait expressément, déterminaient l'objet exact et l'étendue de la saisine du juge d'instruction qui avait, dès lors, le pouvoir de procéder à tous les actes d'information qu'il jugeait utiles à la manifestation de la vérité" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Carole D... a porté plainte, le 3 juillet 2000, auprès des services de police contre Robert Y... et Jean-Bernard X... pour tentative d'extorsion de fonds ; qu'elle a exposé qu'elle avait signé, le 15 juin 1999, avec le gérant de droit du débit de boissons à l'enseigne "Le Santa Clara", un contrat de travail pour un emploi de secrétaire, mais que le véritable dirigeant de l'entreprise l'avait en réalité chargée de la gestion de l'établissement ; que cette gestion s'était avérée déficitaire, le passif atteignant 100 000 francs ; que Robert Y... et Jean-Bernard X... l'avaient alors sommée de restituer cette somme, la menaçant à plusieurs reprises de sévices si elle ne payait pas ; qu'au cours de son audition, Carole D... a fourni des renseignements sur les fréquentations et sur le train de vie de Robert Y... et a, parmi les photographies qui lui ont été présentées, désigné Jean-Pierre Y... et Armand E... comme faisant partie de l'entourage de Robert Y... ;
Attendu qu'une information a été ouverte le 4 juillet 2000 contre personne non dénommée pour tentative d'extorsion de fonds aux visas des articles 312-1 et 312-13 du Code pénal ;
Attendu que le juge d'instruction a délivré le 5 juillet suivant une commission rogatoire aux services de police leur donnant mission, notamment, de faire le point sur l'ensemble du patrimoine des frères Y... et de leurs "acolytes", de répertorier l'ensemble des débits de boissons, bars et autres restaurants au sein desquels ils seraient associés ou qu'ils dirigeraient, directement ou indirectement, de déterminer les conditions dans lesquelles lesdits établissements ont été financés, par qui ils sont gérés et la nature de leurs revenus, d'identifier l'ensemble des gérants et salariés desdits établissements et de se renseigner sur leurs habitudes, antécédents et fréquentations, d'effectuer une enquête approfondie sur le "sex-shop" "Le Malicia" ainsi que sur l'établissement exploité sous l'enseigne "Ital'Café Expresso", d'adresser toutes réquisitions utiles dans le but de déterminer l'origine réelle du patrimoine de l'ensemble des personnes impliquées dans cette affaire ;
Attendu que, pour prononcer l'annulation partielle, par cancellation, de cette commission rogatoire, l'arrêt énonce, notamment, que le seul établissement en cause étant le débit de boissons "Le Santa Clara", il n'y avait pas lieu de faire procéder à des investigations sur le "sex-shop" "Le Malicia" ou sur l'établissement "L'Ital'Café Expresso" ou encore sur l'ensemble des débits de boissons, bars et autres restaurants au sein desquels les frères Y... et leurs "acolytes" seraient associés ou qu'ils dirigeraient, directement ou indirectement ; qu'il n'y avait pas davantage lieu de prescrire des investigations diverses au sujet des "acolytes" des frères Y..., Jean-Pierre Y... n'ayant pas été mis en cause par Carole D... ; que les juges en déduisent que "c'est en méconnaissance des dispositions de l'article 151, alinéa 3, du Code de procédure pénale et des limites de sa saisine fixées par le réquisitoire introductif du 4 juillet 2000 que le juge d'instruction, commettant un excès de pouvoir et se saisissant lui-même de faits dont l'instruction ne lui était pas confiée, a prescrit des investigations totalement étrangères à l'instruction du délit de tentative d'extorsion de fonds et concernant le grand banditisme grenoblois" ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction, qui a souverainement apprécié, quant aux faits, l'étendue de la saisine du juge d'instruction, a justifié sa décision ;
Qu'en effet, les pouvoirs accordés au juge d'instruction par l'article 81, premier alinéa, du Code de procédure pénale qui lui permettent de procéder, conformément à la loi, à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité, sont limités aux faits dont il est régulièrement saisi en application des articles 80 et 86 de ce Code ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.