Cass. com., 13 juin 2006, n° 03-16.695
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 27 mai 2003), que la société GEMODIS était liée à la SNC Prodim Sud, devenue la société Prodim Grand Sud puis la société Prodim, par un contrat de franchise conclu le 18 septembre 1991 ; que par actes du 20 juin 1996, le franchiseur et le franchisé sont convenus de résilier la première franchise et d'en conclure une seconde outre un contrat d'approvisionnement ; que les trois conventions comprenaient une clause compromissoire disposant que "toutes contestations auxquelles pourront donner lieu l'interprétation et l'exécution du présent accord seront soumises à trois arbitres" et précisant la constitution d'un tribunal arbitral à Paris ; que le 31 janvier 1997, la société GEMODIS a donné son fonds de commerce en location gérance ; qu'après la mise en redressement judiciaire de la société GEMODIS par jugement du tribunal de commerce de Mont-de-Marsan du 6 février 1998, ce même tribunal a arrêté par jugement du 12 juin 1998 le plan de cession de l'entreprise, M. X..., maintenu dans ses fonctions de représentant des créanciers, étant désigné commissaire à l'exécution du plan ; qu'ultérieurement, celui-ci a assigné le franchiseur devant le tribunal de la procédure collective à l'effet de voir désigner un expert chargé de déterminer l'aggravation du passif dont la société Prodim serait responsable pour avoir soutenu artificiellement la société franchisée ; que la société Prodim, se prévalant de la clause compromissoire, a soulevé l'incompétence du tribunal de
commerce au profit du tribunal arbitral ; que le tribunal "a débouté" le franchiseur de son exception d'incompétence et a ordonné une expertise ;
que la société Prodim ayant formé un contredit, la cour d'appel l'a rejeté ;
Attendu que la société Prodim fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1 / que les juges ne peuvent soulever d'office un moyen, sans inviter les parties à s'en expliquer ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a rejeté le contredit de compétence qu'elle avait formé, en retenant que M. X... avait agi en qualité de représentant des créanciers, de sorte que les clauses compromissoires, insérées dans les divers contrats ayant lié le franchiseur à la société GEMODIS, ne lui étaient pas opposable, alors que ce moyen n'avait été invoqué par aucune des parties, a violé l'article 16 du nouveau code de procédure civile ;
2 / qu'en présence d'une clause compromissoire, l'arbitre est seul compétent pour se prononcer, à titre préalable, sur l'étendue de la convention d'arbitrage ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui, sans relever la nullité manifeste des clauses compromissoires insérées dans les divers contrats ayant lié les sociétés Prodim et GEMODIS, a écarté la compétence arbitrale, prétexte pris de ce que les clauses compromissoires ne seraient pas opposables à M. X..., ayant agi en qualité de représentant des créanciers, a excédé ses pouvoirs, au mépris des prescriptions des articles 1458 et 1466 du nouveau code de procédure civile ;
3 / que le tribunal de la procédure collective n'est compétent que pour connaître des contestations nées de celle-ci ou sur lesquelles cette procédure exerce une influence juridique ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a rejeté l'exception d'incompétence, fondée sur des clauses compromissoires insérées aux contrats ayant lié les sociétés GEMODIS et Prodim, sans même rechercher si l'action en responsabilité intentée par M. X... ne reposait pas sur des faits antérieurs à l'ouverture de la procédure collective, laquelle n'était pas susceptible d'influer sur les contestations nées de ces faits, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 174 du décret du 27 décembre 1985 ;
Mais attendu, en premier lieu, que dans ses conclusions d'appel, la société Prodim soutenait que la clause compromissoire était opposable aux organes de la procédure collective et que M. X..., ès qualités, était tenu de respecter la convention d'arbitrage ; que le moyen évoqué à la première branche était donc dans le débat ;
Attendu, en second lieu, qu'après avoir énoncé que la clause compromissoire ne concerne que les litiges entre les parties qui l'ont stipulée et n'est opposable au commissaire à l'exécution du plan que dans la mesure où celui-ci exerce les droits et actions du débiteur lui-même suivant les modalités de la liquidation judiciaire, par application de l'article L. 621-83 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, l'arrêt retient que tel n'est pas le cas de l'action de M. X... qui a été engagée au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; qu'ayant ainsi fait ressortir l'inapplicabilité évidente de la convention d'arbitrage, de nature à faire obstacle au principe évoqué à la deuxième branche, la cour d'appel n'était pas tenue d'effectuer la recherche évoquée à la troisième branche ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.