Cass. crim., 14 février 1984, n° 83-94.762
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ledoux
Rapporteur :
M. Zambeaux
Avocat général :
M. Dontenwille
Avocat :
SCP Waquet
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 83 ET 206 DU CODE DE PROCEDURE PENALE,
"EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A OMIS D'ANNULER L'ORDONNANCE DESIGNANT MONSIEUR LAPIERRE EN QUALITE DE JUGE D'INSTRUCTION POUR INFORMER SUR LES FAITS REPROCHES A L'INCULPE, ET LA PROCEDURE SUBSEQUENTE ;
"ALORS QUE LORSQU'IL EXISTE DANS UN TRIBUNAL PLUSIEURS JUGES D'INSTRUCTION, SEUL LE PRESIDENT DU TRIBUNAL OU, EN CAS D'EMPECHEMENT, LE MAGISTRAT QUI LE REMPLACE EST HABILITE A DESIGNER LE JUGE QUI DOIT ETRE CHARGE D'UNE INFORMATION ;
QU'EN L'ESPECE LE JUGE D'INSTRUCTION AYANT ETE DESIGNE PAR LE PARQUET ET NON PAR LE PRESIDENT DU TRIBUNAL, LA PROCEDURE D'INFORMATION ETAIT NULLE ET IL APPARTENAIT A LA CHAMBRE D'ACCUSATION, CHARGEE D'EN VERIFIER LA REGULARITE, DE CONSTATER, FUT-CE D'OFFICE, CETTE NULLITE ;
" ATTENDU QUE SI LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE A INDIQUE DANS SA REQUETE QU'IL DEMANDAIT LA DESIGNATION DE "MONSIEUR LAPIERRE, JUGE D'INSTRUCTION DE PERMANENCE EN RAISON DE L'URGENCE", C'EST LE PRESIDENT DU TRIBUNAL QUI, EN APPLICATION DE L'ARTICLE 83 DU CODE DE PROCEDURE PENALE A, PAR ORDONNANCE DU 8 JUILLET 1982, DESIGNE CE JUGE D'INSTRUCTION POUR SUIVRE L'INFORMATION ;
QU'IL S'EN SUIT QUE LE MOYEN MANQUE EN FAIT ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 104, 105, 172, 206, 591 ET 802 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, ENSEMBLE VIOLATION DES DROITS DE LA DEFENSE,
"EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A REFUSE D'ANNULER LE PROCES-VERBAL EN DATE DU 19 JUILLET 1982, D'INTERROGATOIRE DE M. T... ENTENDU COMME TEMOIN PAR LE JUGE D'INSTRUCTION DANS UNE INFORMATION OUVERTE CONTRE X PARAISSANT ETRE AINSI QUE LA PROCEDURE SUBSEQUENTE ALORS QU'IL EXISTAIT CONTRE LUI DES INDICES GRAVES ET CONCORDANTS DE CULPABILITE ;
"AUX MOTIFS" QU'AU DEBUT D'UNE INFORMATION IL EST INEVITABLE QU'UN FUTUR INCULPE SOIT SOUVENT ENTENDU COMME TEMOIN, SOUS LA FOI DU SERMENT", LES CHARGES ETANT SOUVENT IMPRECISES OU INSUFFISANTES ;
QUE "LE JUGE D'INSTRUCTION A NON SEULEMENT LE POUVOIR MAIS LE DEVOIR DE NE PAS PROCEDER A UNE INCULPATION IMMEDIATE S'IL N'A ETE SAISI QUE CONTRE X" ;
"ALORS QU'IL EST INTERDIT AU JUGE D'INSTRUCTION D'ENTENDRE COMME TEMOIN UNE PERSONNE CONTRE LAQUELLE IL EXISTE DES INDICES GRAVES ET CONCORDANTS DE CULPABILITE ;
QU'EN L'ESPECE, LA LETRE ADRESSE PAR LE TEMOIN A SA FILLE, SUR LE FONDEMENT DE LAQUELLE L'INFORMATION AVAIT ETE OUVERTE, FAISAIT APPARAITRE QU'IL AVAIT PU SE RENDRE COUPABLE D'AGISSEMENTS CONSTITUTIFS D'ATTENTATS A LA PUDEUR, ET LE REQUISITOIRE INTRODUCTIF DU 8 JUILLET 1982 INDIQUAIT D'AILLEURS QU'IL RESULTAIT CONTRE X, PARAISSANT ETRE FONCTIONNAIRE DE POLICE, DES PRESOMPTIONS GRAVES D'ATTENTATS A LA PUDEUR" ;
QU'IL APPARAIT DONC QUE, DES SON AUDITION COMME TEMOIN, DES INDICES GRAVES ET CONCORDANTS DE CULPABILITE EXISTAIENT CONTRE L'INCULPE ;
QUE C'EST DONC EN VIOLATION DE L'ARTICLE 105 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET POUR FAIRE ECHEC AUX DROITS DE LA DEFENSE, QUE LE JUGE D'INSTRUCTION A ENTENDU LE TEMOIN SOUS SERMENT ;
QU'AINSI LE PROCES-VERBAL D'AUDITION DE CE TEMOIN DEVAIT ETRE ANNULE AINSI QUE LA PROCEDURE SUBSEQUENTE ;
VU LESDITS ARTICLES, ENSEMBLE LES ARTICLES 80 ET 114 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
ATTENDU QUE DES QUE LE MINISTERE PUBLIC A REQUIS NOMMEMENT L'OUVERTURE D'UNE INFORMATION CONTRE UNE PERSONNE, CELLE-CI NE PEUT PLUS ETRE ENTENDUE COMME TEMOIN ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE QUE SAISI D'UNE PLAINTE DE EPOUSE T... DENONCANT SON MARIE T... COMME AUTEUR D'ATTENTATS A LA PUDEUR SUR SA FILLE Y... LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE A PRIS DES REQUISITIONS AUX FINS D'INFORMER CONTRE "X PARAISSANT ETRE T... FONCTIONNAIRE DE POLICE QUE LE JUGE D'INSTRUCTION CHARGE DE SUIVRE CETTE INFORMATION A, LE 19 JUILLET 1982, ENTENDU T... EN QUALITE DE TEMOIN, ENSUITE, LE MEME JOUR, SA FILLE PUIS, FINALEMENT L'A INCULPE ;
ATTENDU QUE POUR REJETER LA DEMANDE D'ANNULATION PRESENTEE PAR L'INCULPE, LA CHAMBRE D'ACCUSATION ENONCE "QU'AU DEBUT D'UNE INFORMATION IL EST INEVITABLE QU'UN FUTUR INCULPE SOIT SOUVENT ENTENDU COMME TEMOIN" ET QUE LES CHARGES ETANT IMPRECISES OU INSUFFISANTES CONTRE PERSONNE DENOMMEE, LE JUGE D'INSTRUCTION A LE POUVOIR DE NE PAS PROCEDER A UNE INCULPATION IMMEDIATE S'IL N'A ETE SAISI QUE CONTRE X ;
MAIS ATTENDU QU'EN L'ESPECE, MALGRE LA FORMULE EMPLOYEE PAR LE PARQUET, EST CLAIREMENT ET NOMMEMENT DESIGNE DANS LE REQUISITOIRE INTRODUCTIF ;
QUE DES LORS SI LE JUGE D'INSTRUCTION DEMEURAIT MAITRE DU MOMENT OU IL ESTIMAIT OPPORTUN DE NOTIFIER L'INCULPATION APRES AVOIR LE CAS ECHEANT PROCEDE A TOUTES INVESTIGATIONS UTILES, IL NE POUVAIT NEANMOINS L'ENTENDRE SOUS SERMENT EN QUALITE DE TEMOIN, ELUDANT AINSI LES DISPOSTIONS DE L'ARTICLE 114 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
ATTENDU QU'EN REFUSANT DE CONSTATER LA NULLITE DE L'ACTE CRITIQUE, LA CHAMBRE D'ACCUSATION A VIOLE LES TEXTES PRECITES ET MECONNU LES DROITS DE LA DEFENSE ;
QUE LA CASSATION EST AINSI ENCOURUE ;
PAR CES MOTIFS ET SANS QU'IL Y AIT LIEU DE STATUER SUR LES AUTRES MOYENS DE CASSATION PROPOSES PAR LE DEMANDEUR :
CASSE ET ANNULE EN TOUTES SES DISPOSITIONS L'ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE LA COUR D'APPEL DE MONTPELLIER DU 22 NOVEMBRE 1983 (N. 369) ET, POUR QU'IL SOIT A NOUVEAU STATUE CONFORMEMENT A LA LOI, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE LA COUR D'APPEL DE NIMES, ET POUR LE CAS OU LADITE CHAMBRE D'ACCUSATION DECLARERAIT QU'IL EXISTE DES CHARGES SUFFISANTES CONTRE L'INCULPE A L'EGARD DES CHEFS DE LA POURSUITE.