ART, 12 février 2002, n° 02−147
ART (DEVENUE L'ARCEP)
se prononçant sur le différend opposant MFS Communications à France Télécom relatif à la fourniture par France Télécom de liaisons louées aux opérateurs tiers
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Hubert
L’Autorité de régulation des télécommunications,
Vu le code des postes et télécommunications, notamment ses articles L. 34−8, L. 36−8 et R. 11−1 ;
Vu la décision n° 99−528 de l’Autorité de régulation des télécommunications en date du 18 juin 1999 portant règlement intérieur ;
Vu l’arrêté du 12 décembre 2000 modifié autorisant la société MFS Communications SA à établir et exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public ;
Vu l’arrêté du 12 mars 1998 autorisant la société France Télécom à établir et exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public ;
Vu le décision n° 00−1328 en date du 15 décembre 2000 complétant la décision n°2000−813 en date du 28 juillet 2000 établissant pour 2001 la liste des opérateurs exerçant une influence significative sur un marché des télécommunications ;
Vu la décision n° 2001−750 de l’Autorité en date du 25 juillet 2001 établissant pour 2002 la liste des opérateurs exerçant une influence significative sur le marché du service téléphonique fixe et celui des liaisons louées ;
Vu la décision n° 02−146 de l'Autorité en date du 12 février 2002 approuvant le chapitre 8 relatif au service d'interconnexion des liaisons louées de l'offre technique et tarifaire d'interconnexion de France Télécom pour les exploitants des réseaux ouverts au public L. 33−1 pour l'année 2002 ;
Vu l’avis n° 99−967 de l’Autorité en date du 5 novembre 1999 sur la décision tarifaire de France Télécom n° 99−158 E relative à l’évolution des tarifs de liaisons louées nationales et l’avis n° 01−48 du 10 janvier 2001 sur la décision tarifaire de France Télécom n° 2000 400 relative aux tarifs des liaisons louées à 34 et 155 Mbit/s ;
Vu la demande de règlement d’un différend enregistrée le 13 août 2001, présentée par la société MFS Communication, RCS Paris n° B 398 517 169, dont le siège social est situé 21, rue Balzac − 75008 Paris, représentée par M. Thomas Marten, directeur des affaires réglementaires ;
Le différend porte sur les conditions tarifaires et techniques des prestations de liaisons louées de courte distance et de débits compris entre 64 kbit/s et 155 Mbit/s de l’offre de France Télécom pour les opérateurs.
Dans sa saisine, MFS Communications SA (ci−après dénommé MFS) demande à l’Autorité :
- de dire d’une part que les liaisons louées aux opérateurs de courte distance (jusqu’à 50 kilomètres) et de débits compris entre 64 kbit/s et 155 Mbit/s constituent des prestations d’interconnexion lorsqu’elles sont fournies par France Télécom à un exploitant de réseau ouvert au public pour raccorder le site d’un client audit réseau.
- qu’à ce titre, leurs tarifs doivent être orientés vers les coûts pertinents de l’interconnexion et en particulier vers les CMILTs de l’opérateur historique ;
- de fixer pour l’année 2002 des tarifs correspondant au tableau produit dans la saisine éventuellement augmentés d’un mark−up de 10%, et pour 2001, de façon rétroactive, des prix équivalents aux prix publics du catalogue diminués de moitié ;
- d’ordonner le gel des engagements de qualité de service à leur niveau antérieur à la modification unilatérale des contrats par France Télécom ;
- d’ordonner à France Télécom de proposer une offre d’interconnexion spécifique de liaisons louées aux opérateurs, dont MFS précise les caractéristiques en annexe de sa saisine.
Sur le contexte juridique
MFS indique que, au titre de la directive 97/33/CE explicitée par le projet de recommandation relative aux liaisons louées aux opérateurs de la Commission de décembre 1999, il apparaît que les liaisons louées de courte distance fournies par les opérateurs historiques, destinées à compléter le réseau des opérateurs tiers, relèvent du régime de l’interconnexion. MFS cite à l’appui de ses arguments l’interprétation de l’OFTEL dans sa décision de décembre 2000.
MFS ajoute qu’en France, le régime des liaisons louées aux opérateurs relève notamment de l’article D. 99−9 du code des postes et télécommunications qui place les services d’interconnexion au même rang que les services d’interconnexion de trafic commuté. De plus, MFS se fonde sur l’avis n° 99−967 de l’Autorité en date du 5 novembre 1999, dans lequel l’Autorité indique qu’elle est compétente pour traiter des litiges relatifs aux prestations de liaisons louées entre opérateurs, au titre des articles L. 34−8−II et L. 36−8 du code des postes et télécommunications.
MFS estime que, conformément à l’article D. 99−17 de ce même code, le tarif des liaisons louées d’interconnexion doit être orienté vers les coûts au sens de l’interconnexion, ce qui exclut notamment les coûts commerciaux.
Sur le contexte économique
MFS reconnaît que le marché des liaisons louées de longue distance est aujourd’hui concurrentiel. En revanche, elle estime que France Télécom exerce encore un quasi−monopole sur le marché des liaisons louées de courte distance en dehors de Paris intra muros et du quartier de La Défense, car les liaisons louées s’appuient sur le réseau de desserte de France Télécom, y compris la boucle locale. Le recours aux liaisons louées de France Télécom est ainsi indispensable pour parcourir le " dernier kilomètre ", même dans les villes où les opérateurs construisent leurs propres boucles optiques.
MFS considère que jusqu’à présent France Télécom n’a pas respecté la réglementation relative à l’interconnexion en ce qui concerne les liaisons louées : les opérateurs ont en effet accès à ces services au même tarif que les clients finals, et même à des tarifs supérieurs compte tenu des importantes réductions au volume dont peuvent bénéficier les plus gros clients. Or MFS soutient que le principe selon lequel un opérateur peut se fournir auprès de France Télécom " à un prix fortement inférieur au prix de détail " a été reconnu par l’Autorité dans sa recommandation du 25 juillet 2001 et en dehors même du cadre de l’interconnexion stricto sensu dans sa décision n°01−253 du 2 mars 2001.
Sur le caractère raisonnable de sa demande
MFS estime que l’offre de France Télécom pour les liaisons louées aux opérateurs constituée du service d’aboutement de liaisons et de liaisons louées partielles conduit à un prix supérieur à celui des liaisons Transfix de détail. Cette offre ne peut donc être utilisée par les opérateurs.
MFS expose que les tarifs des liaisons Transfix ne sont pas orientés vers les coûts et sont discriminatoires envers les opérateurs. Elle estime ainsi que :
- un grand client de France Télécom peut obtenir jusqu’à 19% de remise au volume (15 % en moyenne) alors qu’un opérateur nouvel entrant ne bénéficie d’aucune réduction. De plus MFS souligne que les pratiques de remises au volume sont antinomiques avec les règles de l’interconnexion ;
- France Télécom pratique également des remises en fonction de la durée des contrats sur les redevances mensuelles et sur les frais d’accès au service. Combinées avec les remises au volume, les réductions peuvent atteindre jusqu’à 40% des prix de base des liaisons Transfix, ce qui constitue une première indication des coûts réels encourus par France Télécom ;
- une autre indication réside dans le tarif du service TFM 2048 offert uniquement à Paris. MFS considère que ce tarif pratiqué par France Télécom est dû non à des coûts plus faibles à Paris mais à la présence d’une concurrence effective sur cette zone géographique ;
- une comparaison des prix qu’elle paie en France, en Allemagne, en Suède et au Royaume−Uni, fourni en annexe VII de son mémoire, montre le prix excessif des liaisons louées françaises ;
- le modèle CMILT qu’elle a développé montre également que les tarifs Transfix sont au moins deux fois supérieurs aux coûts d’interconnexion.
- le résultat est identique si on examine le niveau des tarifs par une approche sur l’évaluation de la marge (MFS estime que sa marge brute de revente doit être de 50%, à l’instar du ratio retenu par l’Autorité dans sa décision n° 01−253 concernant le différend entre Liberty Surf et France Télécom) développée à l’annexe IV de son mémoire de saisine ;
- pour les liaisons à 34 et 155 Mbit/s, MFS soutient que les tarifs de Transfix HD, tels que pratiqués par France Télécom, sont trop élevés. Cette position se fonde sur la réalisation d’un test de squeeze avec les tarifs de Global ATM, qui révèle un effet de ciseau.
Au soutien de sa demande, MFS expose ensuite une évaluation du tarif orienté vers les coûts des liaisons louées par trois méthodes concourant, d’après elle, au même résultat :
1. modèle CMILT de MFS et HAI Consulting développé à l’annexe IX de son mémoire de saisine ;
2. méthode dite de la marge brute appliquée au tarif du service Transfix Métropolitain de France et au tarif des services Transfix HD (34 et 155 Mbit/s) en région parisienne qui sont 50% moins chers dans les autres régions. MFS prend comme base de son raisonnement les tarifs en région parisienne, qui résultent non de coûts moindres mais de l’existence d’une concurrence effective ;
3. méthode de retail moins, cumulant 15% de remise au volume, 15% de remise longue durée et 20% de coûts commerciaux évités (estimation de la Commission européenne).
Sur la demande relative à la qualité de service
MFS indique que France Télécom a modifié unilatéralement les contrats Transfix de tous ses clients, y compris les opérateurs, en ce qui concerne les conditions de qualité de service. Les principales modifications relevées par MFS sont une baisse du montant des pénalités, un plafonnement inférieur, une réduction du nombre de cas où elles s’appliquent et enfin une moindre flexibilité générale des conditions de fourniture et de modification du parc de liaisons louées.
MFS estime que la baisse du montant des pénalités dues par France Télécom en cas de non−respect des conditions contractuelles risque d’amplifier le phénomène de baisse de qualité de service de France Télécom constaté récemment par MFS. MFS conteste ces modifications des conditions contractuelles sur le fond, puisqu’elles induisent une baisse de qualité de service, et sur la forme puisque France Télécom a procédé à une modification unilatérale des contrats, excluant toute négociation.
Ainsi, afin d’empêcher une discrimination entre le niveau de qualité pour les opérateurs tiers et pour les clients finals de France Télécom, MFS demande que l’offre d’interconnexion de liaisons louées pour les opérateurs inclue des pénalités déplafonnées et un système de reporting qu’elle décrit en annexe.
Vu la lettre du chef du service juridique de l’Autorité en date du 24 août 2001 communiquant aux parties le calendrier prévisionnel de dépôt des mémoires et le nom des rapporteurs ;
Vu les observations en défense enregistrées à l’Autorité le 19 septembre 2001 présentées par la société France Télécom, RCS Paris n° 380 129 866, dont le siège social est situé 6, place d’Alleray, 75505 Paris cedex 15, représentée par Monsieur Marc Fossier, Directeur des relations extérieures ;
Préalablement à l’examen des arguments développés au fond par MFS, France Télécom :
- s’étonne que MFS n’ait pas saisi les occasions d’offres commerciales de France Télécom pour faire baisser ses coûts dans l’immédiat ;
- conteste la présentation de MFS des nouvelles conditions contractuelles des services Transfix ;
- nie les effets de ciseaux globaux entre ses offres Transfix et le service Multilan, sauf dans le cas " marginal et caricatural " présenté par MFS.
Sur la qualification juridique des liaisons louées demandées par MFS
Dans ses observations, France Télécom souligne qu’une prestation de liaisons louées de courte distance ne relève pas du régime de l’interconnexion et que sa qualification ne saurait résulter de la présente procédure.
France Télécom indique qu’au titre de l’article L. 32 du code des postes et télécommunications, l’interconnexion est définie comme une prestation réciproque entre opérateurs permettant à l’ensemble des utilisateurs de communiquer entre eux. De cette définition, France Télécom conclut que :
- le destinataire de la prestation (opérateur plutôt que client final) n’entraîne pas de conséquence quant à la qualification juridique de cette prestation (interconnexion ou service de détail) ;
- l’absence de concurrence n’a également pas d’influence sur la nature juridique de la prestation.
France Télécom indique que MFS confond services de liaisons louées et services d’interconnexion de liaisons louées : au titre de l’article D. 99−9, la prestation d’interconnexion de liaisons louées est un service " d’accès au service de base : trafic commuté et liaisons louées pour les opérateurs L. 33−1 "
Ainsi, France Télécom considère :
- d’une part, que le service d’aboutement de liaisons (reliant le PoP d’un opérateur au brasseur de France Télécom) inscrit à son catalogue d’interconnexion relève de la définition de l’article D. 99−9 du code ;
- d’autre part, que le service de liaisons louées partielles (du brasseur de France Télécom au site du client de l’opérateur tiers) qui figure dans les conventions d’interconnexion relève également de l’interconnexion au titre de la directive 97/33 et de l’interprétation qui en est faite dans le projet de recommandation de la Commission de novembre 1999.
En revanche, France Télécom estime qu’une prestation reliant directement le Pop de l’opérateur au site de son client ne constitue pas une prestation d’interconnexion.
De plus, France Télécom indique qu’elle n’a pas le pouvoir de distinguer le site d’un client ordinaire du PoP d’un opérateur qui constitue un site client comme un autre. Les liaisons louées à des opérateurs sont donc des liaisons fournies qui ne peuvent être vendues aux opérateurs dans des conditions privilégiées sans aller à l’encontre de l’obligation de non−discrimination à laquelle France Télécom est tenue. D’ailleurs, l’article D. 374 du code des postes et télécommunications ne fait pas référence à une utilisation des liaisons louées dans des conditions différentes de celles figurant aux articles L. 34 et suivants de ce même code.
Enfin, France Télécom soutient que la requalification juridique d’une prestation de nature commerciale en prestation d’interconnexion ne peut résulter d’un règlement de différend : elle ne peut que résulter d’une décision de l’Autorité dans le cadre des dispositions de l’article D. 99−16 du code pour laquelle France Télécom bénéficie d’un droit de recours devant le Conseil d’Etat
France Télécom relève en outre que la prestation demandée par MFS ne figure pas à son catalogue d’interconnexion 2001, approuvé par l’Autorité. En conséquence, elle souligne que si l’Autorité faisait droit à la demande rétroactive de MFS pour l’année 2001, cela viderait de son sens la procédure d’approbation du catalogue d’interconnexion de France Télécom.
France Télécom déduit de l’ensemble de ces considérations que l’Autorité doit déclarer la demande de MFS irrecevable.
Sur la méthode d’évaluation des tarifs de MFS
Par ailleurs, France Télécom estime que les arguments de MFS relatifs à la méthode d’évaluation des coûts et aux débits demandés ne sont pas pertinents. En effet, France Télécom souligne que la méthodologie de tarification retenue par MFS n’est pas cohérente avec la méthode d’évaluation des CMILT retenue par l’Autorité pour les travaux sur le dégroupage et pour le catalogue d’interconnexion pour 2002, qui impliquait un rapprochement entre un modèle top−down de France Télécom et un modèle bottom−up du secteur.
France Télécom remarque que les modélisations de type bottom−up ont une vertu pédagogique mais sont simplistes, alors que l’approche top−down constitue la méthode principale de détermination des CMILT.
De plus, France Télécom estime que la méthode bottom−up développée par MFS (et non par le secteur puisqu’il s’agit d’une modélisation propriétaire) aboutit à des tarifs irréalistes dus à des estimations de coûts trop basses, alors même que MFS reconnaît que les tarifs de boucle locale sont très élevés et alors que le mark−up de 10 % retenu par MFS présuppose une future réconciliation du modèle CMILT de l’Autorité. Les données de MFS reposent en outre sur un modèle adapté à la Californie dont les conditions de géographie physique et humaine sont très différentes de celles du territoire français.
France Télécom conteste également des éléments de la méthode de calcul de MFS pour les hauts débits, notamment le nombre de fibres par câble, la longueur moyenne de raccordement, le taux de mutualisation, les
facteurs d’amortissement. France Télécom estime que le calcul sur ces éléments conduit à sous−estimer les coûts correspondants.
France Télécom conteste également plusieurs points de la méthode utilisée par MFS :
- le fait que ce soient les tarifs les plus bas qui soient considérés comme les plus représentatifs ;
- l’application d’un coefficient minorant de 50 % appliqué deux fois ;
- le fait que cette méthode apporte des résultats opposés pour les liaisons 2 Mbit/s d’une part et à 34 et 155 Mbit/s d’autre part, alors que MFS en tire des conclusions identiques sur la pertinence de ses estimations. En outre, les résultats donnent des tarifs inférieurs à ceux figurant dans la recommandation de la Commission européenne.
France Télécom conteste plusieurs éléments du raisonnement de MFS pour l’évaluation des coûts des liaisons à des débits inférieures à 2 Mbit/s et notamment :
- le taux de remplissage de BPN utilisés par MFS, sans prendre en compte le taux de rendement ;
- la méthode du prorata pour établir les prix des liaisons par rapport aux prix des liaisons à 2 Mbit/s, sans prendre en compte les coûts fixes, indépendants des débits.
France Télécom estime, en ce qui concerne l’analyse d’effet de ciseaux entre les tarifs de Transfix HD et de Global ATM HD que les deux offres comparées par MFS ne sont pas des offres exclusives à l’usage des opérateurs et qu’il n’y a pas lieu d’effectuer des tests d’effets de ciseaux, qui n’ont d’ailleurs pas été réalisés par l’Autorité dans le cadre de ses avis préalables à leur homologation par les ministres. Ces décisions d’homologation n’ont pas été contestées en justice.
Par ailleurs France Télécom conteste le fait qu’un test d’effet de ciseau puisse être valablement réalisé à partir d’un exemple particulier, et estime qu’il devrait être vérifié de manière globale.
Pour ce qui concerne les tarifs demandés de façon rétroactive pour l’année 2001, France Télécom conteste l’estimation de ses coûts par MFS pour 2001, comme étant équivalents aux tarifs de détail amputés de 50%. France Télécom soutient que ce pourcentage de 50% résulte d’une erreur de calcul de la part de MFS, pour le cumul des réductions au volume (15 %), à la durée (15 %) et des coûts commerciaux évités (20 %). Ce cumul ne correspond pas à la somme arithmétique de 50 % mais à 42 %. Outre cette erreur factuelle, France Télécom considère que ce cumul de pourcentage n’a pas de réelle signification, ces valeurs de réductions n’étant pas indépendantes les une des autres comme le soutient MFS
Sur l’état du marché des liaisons louées
Dans ses mêmes observations en défense, France Télécom conteste la nécessité pour MFS de disposer d’une offre de liaisons louées partielles à 34 et 155 Mbit/s de la part de France Télécom pour proposer des offres haut débit aux clients finals. En effet, en premier lieu, elle estime qu’une forte concurrence règne sur le marché des liaisons louées à haut débit.
France Télécom produit à l’appui de son estimation des extraits d’une étude réalisée par l’IDATE sur le marché des services à haut débit ainsi que des extraits d’une étude qu’elle a réalisée elle−même sur ce marché.
France Télécom souligne en outre ne pas disposer d’avantages comparatifs par rapport aux autres opérateurs en ce qui concerne le raccordement des sites qui nécessite de sa part comme de la part des autres opérateurs la
construction d’infrastructures. France Télécom indique que seul un très faible nombre de ses clients est aujourd’hui raccordé à ses boucles optiques. France Télécom estime excessif de lui demander de construire des infrastructures pour le compte de ses concurrents, dès lors que MFS indique n’en avoir besoin que pour une durée de deux ans, ce qui est une durée trop courte sans commune mesure avec la durée des amortissements comptables.
En second lieu, France Télécom conteste l’analyse de MFS qui estime que les collectivités locales qui choisissent d’investir dans la construction de boucles optiques dépendent de France Télécom pour le raccordement des sites.
Sur la demande de tarifs rétroactifs de MFS
France Télécom estime que l’Autorité ne saurait faire droit à la demande de MFS en ce qu’elle est rétroactive.
En effet, France Télécom soutient que faire droit à cette demande serait incohérent avec les dispositions contenues dans le catalogue 2001 d’interconnexion qui a pourtant été approuvé par l’Autorité. France Télécom estime qu’une telle demande contredirait un principe général du droit français, le principe de non−rétroactivité. Ce dernier est un principe général du droit reconnu aussi bien en droit civil qu’en droit administratif, une loi ou un acte administratif ne pouvant par principe remettre en cause une situation juridique passée. Pour France Télécom, faire droit à la demande de MFS reviendrait à prononcer un jugement constitutif (création d’un nouveau produit d’interconnexion) avec effet rétroactif, ce qui est contraire au principe de non−rétroactivité. France Télécom demande donc à l’Autorité de rejeter la demande de rétroactivité de MFS.
En outre, France Télécom considère que la demande de rétroactivité conduirait l’Autorité à exercer une compétence qui n’est pas prévue par l’article L. 36−8 du code des postes et télécommunications. La rédaction de cet article ne permet pas à l’Autorité de se prononcer seulement pour l’avenir et non de remettre en cause des droits acquis. France Télécom appuie son argument sur un arrêt du Conseil d’Etat en date du 16 juin 2000. Elle précise que cet arrêt bien que concernant une autre autorité réglementaire et une procédure régie par le droit public ne modifie pas les termes du débat soulevé par la saisine de MFS.
France Télécom en conclut que l’Autorité doit rejeter la demande de MFS. Sur l’offre d’interconnexion de liaisons louées faite au catalogue 2002
France Télécom estime que l’offre faite par France Télécom répond au besoin de MFS et considère dès lors qu’il y a lieu de rejeter la demande de cette dernière.
France Télécom annonce une offre de service d’interconnexion de liaisons louées dans son catalogue d’interconnexion pour 2002, ce qui répondra aux besoins justifiés des opérateurs.
Cette offre sera constituée par un service d’aboutement de liaisons à 2 et 155 Mbit/s, connectant le point de présence d’un opérateur à un brasseur de France Télécom situé dans la même zone de transit et d’une liaison louée partielle, de 64 kbit/s à 2 Mbit/s, reliant le brasseur au site du client de l’opérateur tiers (la demi−liaison est proposée dans la zone de couverture de chaque brasseur, ce qui permet d’établir des liaisons d’une longueur moyenne de 50 km) l’autre demi−liaison devant être fournie par l’opérateur à son client. Le service d’aboutement de liaison peut être remplacé par une offre de colocalisation. Les tarifs seront orientés vers les coûts pertinents de l’interconnexion.
Sur la qualité de service
France Télécom considère que la demande de MFS sur le maintien de la qualité de service figurant dans les conditions générales de vente antérieures au 1er juin 2001 ne relève pas de la compétence de l’Autorité.
France Télécom considère que la demande de MFS concernant le maintien des conditions de qualité de service de ses offres de détail antérieures à celles mises en œuvre à compter du 1er juin 2001 relève de la confusion entre d’une part, les offres d’interconnexion, relevant des dispositions de l’article L. 36−8, et, d’autre part, les offres de détail qui n’en relèvent pas.
Elle considère que l’Autorité n’est pas compétente pour intervenir en ce qui concerne les évolutions des conditions générales d’abonnement à une liaison louée. En effet, les contrats de liaisons louées conclus entre France Télécom et les autres opérateurs relèveraient du régime juridique des prestations commerciales, distinct de celui de l’accès et de celui de l’interconnexion. La demande portant sur les conditions contractuelles des offres existantes ne peut donc être reliée à l’objet de la saisine.
En outre, France Télécom rappelle que la modification des conditions de qualité de service figurant dans des contrats de liaisons louées a été réalisée par France Télécom en conformité avec l’article 12.2. de ses conditions générales de vente, article qui est lui−même conforme aux dispositions de l’article D. 370 du code des postes et télécommunications.
Par ces motifs, France Télécom demande à l’Autorité de rejeter l’ensemble des demandes de MFS.
Vu la lettre de la société MFS Communications enregistrée à l’Autorité le 27 septembre 2001 demandant communication des pièces complémentaires évoquées dans les observations en défense de la société France Télécom enregistrées à l'Autorité le 19 septembre 2001 et demandant un délai supplémentaire pour transmettre ses observations en réplique ;
Vu la lettre du chef du service juridique en date du 28 septembre 2001 accordant un délai supplémentaire aux parties pour transmettre leurs observations ;
Vu la lettre de la société France Télécom enregistrée à l’Autorité le 2 octobre 2001 communiquant les pièces complémentaires évoquées dans leurs observations en défense enregistrées le 19 septembre 2001 ;
Vu la lettre de la société MFS Communications enregistrée à l’Autorité le 3 octobre 2001 indiquant que les pièces complémentaires transmises par la société France Télécom le 2 octobre 2001 étaient incomplètes ;
Vu les observations en réplique de la société MFS Communications enregistrées le 8 octobre 2001 ;
Dans ses nouvelles observations, MFS conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens que précédemment. Toutefois, MFS indique se ranger à l’analyse présentée par France Télécom dans ses observations en défense sur deux points, qui sont intégrés dans le présent mémoire :
- d’une part, sur la méthode de tarification des liaisons louées de moins de 2 Mbit/s ;
- d’autre part, sur la question des " faux PoPs " dont un opérateur déloyal pourrait se servir pour fausser la concurrence.
En outre, MFS note avec satisfaction que France Télécom ne conteste pas plusieurs points de sa saisine :
- la demande portant sur les conditions de reporting de la qualité de service ;
- la pertinence de la recommandation de la Commission sur la tarification des liaisons louées ;
- l’absence de concurrence sur le marché des liaisons louées en dehors de Paris / La Défense.
Par ailleurs, MFS constate que la nouvelle rédaction de l’article L. 34−8 du code des postes et télécommunications, issu de l’ordonnance du 25 juillet 2001, impose bien à France Télécom d’inclure une offre de liaisons louées dans son catalogue d’interconnexion, confirmant la décision de l’Autorité n° 00−1328 susvisée.
MFS rappelle les trois composantes principales de sa saisine :
1) Demande transitoire
Pour la période allant du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2001, MFS demande à l’Autorité de fixer des conditions financières équitables : la tarification demandée est égale au prix public des liaisons Transfix (hors remises) diminuée de 50 %, en référence aux benchmarks européens et aux tarifs affichés par la recommandation de la Commission.
Pour la période postérieure au 31 décembre 2001, et jusqu’à la migration effective des liaisons existantes vers une offre d’interconnexion, MFS demande à l’Autorité de fixer les tarifs des liaisons louées au niveau des CMILT estimés par MFS, à la suite des corrections apportées au tableau figurant en page 4 du présent mémoire, augmenté d’un mark up de 10 %.
2) Demande définitive
MFS demande à l’Autorité d’ordonner à France Télécom d’offrir un nouveau produit d’interconnexion répondant aux critères contenus dans l’annexe IX de son acte de saisine. Lorsque cette offre sera effectivement disponible, MFS s’engage à faire migrer l’ensemble des anciennes liaisons louées vers ces nouveaux services d’interconnexion. MFS demande également à ce que cette migration n’implique pas de charge financière supplémentaire. Les tarifs applicables sont ceux figurant dans l’annexe IX de l’acte de saisine.
Pour répondre à la bonne volonté manifestée par France Télécom dans son mémoire en défense, MFS renonce à certaines demandes figurant dans son mémoire de saisine, à savoir :
- le contrôle des tarifs, par l’Autorité, des liaisons louées dans leur configuration technique actuelle postérieurement à la mise en œuvre effective par France Télécom de l’offre d’interconnexion de liaisons louées dans l’architecture décrite par MFS (annexe IX du mémoire de saisine) ;
- la tarification initialement demandée des liaisons d’un débit inférieur à 2048 kbit/s, qui a été revue à la hausse pour répondre à des remarques de France Télécom sur le modèle CMILT de MFS.
Par ailleurs, MFS s’engage à mettre en place un mécanisme décrit à l’annexe VII du présent mémoire afin de garantir que ces liaisons relieront bien un de leur point de présence au site de leurs clients et non deux sites de leurs clients.
3) Engagements de qualité de service
MFS demande des engagements de qualité de service pour les liaisons de l’offre provisoire et définitive au moins équivalents aux engagements figurant dans l’offre Transfix avant les modifications du 1er juin 2001, avec des engagements de la part de France Télécom, pour l’offre définitive, tels que ceux figurant dans l’annexe IX de l’acte de saisine.
Sur la nature de la prestation de liaisons louées
MFS conclut aux mêmes fins et par les mêmes moyens que précédemment. Elle estime qu’une prestation de liaison louée entre le site d’un client final et le point de présence de l’opérateur constitue une prestation d’interconnexion. MFS relève que France Télécom fournit déjà une prestation d’interconnexion pour les liaisons louées (liaisons louées partielles, dans le cadre des conventions d’interconnexion, complétées par des liaisons d’aboutement, dans le cadre du catalogue d’interconnexion), ce qui permet bien de relier un site client avec le PoP d’un opérateur. Même si aucun opérateur n’utilise à ce jour cette prestation, elle existe cependant.
MFS considère comme démentie dans les faits l’analyse de France Télécom, fondée sur l’article L. 32 du code des postes et télécommunications, selon laquelle toute prestation d’interconnexion constitue une prestation " réciproque " permettant aux utilisateurs de deux opérateurs de communiquer entre eux, notamment du fait que le catalogue d’interconnexion de France Télécom propose des services qui ne constituent pas des prestations " réciproques " (liaisons de sécurisation, services spéciaux, facturation pour compte de tiers,…).
Comprenant le souci économique de France Télécom de ne pas voir ses offres Transfix concurrencées de façon déloyale par des opérateurs qui relieraient deux sites de leurs clients par des liaisons achetées à France Télécom sous le régime de l’interconnexion, MFS propose une liste de critères, permettant de définir un PoP et garantissant que les liaisons relevant de l’interconnexion ne soient pas utilisées directement pour des offres de détail par les opérateurs.
Sur l’analyse tarifaire des prestations de liaisons louées, MFS estime que France Télécom n’apporte aucun élément pertinent permettant de remettre en cause le modèle CMILT HAI, à partir duquel ont été reconstitués les prix de détail de l’offre de détail de France Télécom pour les liaisons à 155 Mbit/s.
Sur l’absence de contradiction sérieuse des autres démonstrations économiques de MFS
MFS estime que France Télécom ne conteste pas de façon sérieuse les autres démonstrations économiques de MFS :
- France Télécom rétablit seulement le calcul de la somme des remises applicables aux liaisons louées de détail, qui se monte à 42 % et non à 50% comme l’avance MFS ;
- France Télécom considère que le ratio de 20 % du chiffre d’affaires pour les coûts commerciaux évités paraît élevé, sans apporter d’élément à l’appui de cette affirmation ;
- France Télécom ne donne pas d’information sur le prix de TFM 2048 qui est 50 % moins cher que les autres liaisons louées de même débit et même longueur ;
- France Télécom ne donne pas d’explication sur la possibilité de réaliser des réductions de coût pour les liaisons de courte distance dans la région parisienne, compte tenu des coûts élevés du génie civil et de l’immobilier dans cette zone géographique, que MFS ne s’explique que par la pression concurrentielle existante.
D’après MFS, les textes réglementaires relatifs à l’interconnexion ont pour objet de permettre, en période d’ouverture à la concurrence, d’atteindre des prix tels qu’ils se situeraient en situation de concurrence effective. C’est pourquoi, MFS considère que les prix pratiqués par France Télécom, notamment pour TFM 2048 à Paris, zone sur laquelle existe une concurrence, constituent une bonne indication du niveau des coûts réels de France Télécom. MFS considère donc que le prix de TFM, amputé des coûts pertinents évités, confirme le bien fondé de la demande de MFS, visant à une réduction de 50% pour les liaisons de courte distance.
MFS rappelle que la recommandation de la Commission de novembre 1999 déterminait des prix plafond et qu’elle devait être mise en œuvre avant le 31 décembre 2001.
Enfin à l’appui de ces nouvelles observations, MFS produit de nouvelles comparaisons internationales, à la suite des décisions récentes des régulateurs italien et britannique ; ces comparaisons ont été faites pour les liaisons de 5 km, sur des contrats de 3 ans et en incluant les frais d’accès au service. D’après ces comparaisons, les prix de France Télécom se rapprochent, dans les zones où il existe de la concurrence, de ceux pratiqués en Italie, Allemagne, Royaume−Uni et Suède, notamment pour les liaisons à 2, 34 Mbit/s, même s’ils restent supérieurs aux prix recommandés par la Commission et aux prix résultant du modèle CMILT HAI de MFS. En revanche, ces prix sont très supérieurs dès lors que l’on se situe dans les régions autres que Paris.
MFS corrige une erreur qui s’était glissée dans son mémoire de saisine sur le tarif des liaisons louées Transfix 155 Mbit/s en province (dernier graphe de l’annexe IV) : une erreur de longueur (1 kilomètre au lieu de 5) a conduit à minorer le prix de ce type de liaison. Un nouveau graphe est fourni.
Sur l’effet de ciseau tarifaire provoqué par Global ATM HD
MFS estime que France Télécom ne remet pas en cause l’existence d’un tel effet de ciseau démontré par MFS à l’annexe III de sa saisine initiale, mais conteste le fait qu’un test de ciseau puisse être valablement réalisé sur un seul cas et non pas de manière globale.
MFS rappelle, d’une part que les règles de la concurrence s’appliquent même aux cas isolés, comme vient de le démontrer le Conseil de la Concurrence dans l’affaire Renault, et d’autre part que la démonstration prouvait qu’aucun autre opérateur n’aurait pu pratiquer des tarifs similaires à ceux de Global ATM HD, du fait du niveau des tarifs des liaisons louées d’extrémité.
Sur la méthode de détermination des tarifs de liaisons louées à moins de 2 Mbit/s
MFS prend en compte la position de France Télécom pour les liaisons à moins de 2 Mbit/s, considérant le coût non strictement proportionnel au débit. En conséquence, MFS propose, en annexe IV, une méthode plus adaptée que celle avancée précédemment.
Sur l’analyse du marché
MFS estime infondé le moyen soulevé par France Télécom considérant qu’elle n’est pas tenue d’offrir une prestation d’interconnexion pour des débits supérieurs à 2 Mbit/s, France Télécom ne se considérant pas comme puissante sur ce marché.
Sur les analyses juridiques diverses de France Télécom
MFS soutient que sa demande ne vise pas à modifier les tarifs de détail des liaisons louées Transfix de France Télécom, mais à fixer les tarifs d’une prestation entre opérateurs relevant de l’interconnexion et des compétences de l’Autorité, au titre des articles L. 34−8 et L. 36−8 du code des postes et télécommunications.
MFS n’a pas renoncé à ses droits d’opérateur en achetant des liaisons Transfix (d’ailleurs auprès de la DIVOP de France Télécom) : elle y a été conduite par le refus de France Télécom de fournir des liaisons louées à un tarif orienté vers les coûts, conformément à la décision n° 00−1328 de l’Autorité en date du 15 décembre 2000 qui désigne France Télécom comme opérateur puissant sur le marché des liaisons louées. Dans sa réponse France Télécom n’a pas contesté la réalité de l’échec des négociations.
Par ailleurs, MFS soutient que rien ne s’oppose à ce que l’Autorité fixe des conditions financières pour une prestation déjà fournie, en se fondant sur les décisions de l’Autorité n° 00−947 (règlement de différend entre Bouygues Télécom et France Télécom) et n° 00−489 (règlement de différend entre 9 Télécom et France Télécom). Elle considère que la rétroactivité est en outre prévue par l’article 7.3 de la directive 97/33 relative à l’interconnexion.
L’arrêt du Conseil d’Etat n° 202835 du 16 juin 2000 produit aux débats par France Télécom ne traite pas de la rétroactivité des décisions mais confirme la compétence d’une autorité réglementaire (à l’époque le ministre chargé des postes et télécommunications) pour fixer le tarif d’une prestation de liaisons louées entre opérateurs, considérée comme une prestation d’interconnexion.
MFS estime que l’offre de France Télécom, présentée dans ses observations en défense, ne répond pas à sa demande pour quatre raisons :
- le point d’interconnexion déterminé par France Télécom est le siège des brasseurs et non le PRO ;
- les débits ne sont pas ceux demandés par MFS ;
- les engagements de qualité de service sont insuffisants ;
- les tarifs ne sont pas indiqués, non plus que leur mode de calcul (à " vol d’oiseau ou non ").
De plus les conditions de migration des liaisons louées actuellement utilisées par MFS vers la nouvelle offre d’interconnexion ne devraient pas faire encourir de charges financières supplémentaires à MFS.
MFS considère sa demande raisonnable, en terme de prestation et de tarifs, puisqu’elle correspond aux obligations découlant de la réglementation en vigueur.
Sur la qualité de service
MFS estime infondé le moyen soulevé par France Télécom tiré de l’incompétence de l’Autorité pour se prononcer sur les engagements de qualité de service des liaisons louées fournies par France Télécom dans le cadre de l’interconnexion, MFS se fonde sur l’article 9−3 de la directive 97/33 qui cite explicitement " le maintien de la qualité de service de bout en bout " parmi les sujets sur lesquelles peuvent se prononcer les autorités réglementaires nationales. Toutefois, MFS reconnaît la complexité du sujet (fixation de critères de performances associées à des pénalités). C’est pourquoi, elle demande une solution simple qui est le maintien des conditions générales de ventes de Transfix, telles qu’elles ressortent des contrats signés antérieurement au 1er juin 2001, dans l’attente d’une solution qui serait négociée dans un cadre multilatéral.
MFS considère que France Télécom est infondée à modifier unilatéralement les conditions générales de vente en matière de qualité de service notamment, même dans ses contrats vis à vis des utilisateurs finals, car cela ne concerne pas les cas prévus à l’article 12.2. de ces conditions générales, qui visent les modifications des " conditions d’exploitation ou d’organisation des réseaux ".
MFS constate que France Télécom ne conteste pas la mise en place d’un système de reporting, résumé à l’annexe IX du présent mémoire, dont le but est de prévenir toute discrimination entre l’opérateur historique, ses filiales et services, qui sont en concurrence directe avec MFS sur le marché des services de transmission de données pour les entreprises.
Vu la lettre de la société France Télécom enregistrée à l’Autorité le 10 octobre 2001 concernant les pièces complémentaires enregistrées le 2 octobre 2001 ;
Vu la lettre de la société France Télécom enregistrée à l’Autorité le 18 octobre 2001 demandant un délai supplémentaire pour transmettre ses nouvelles observations en défense ;
Vu la lettre du chef du service juridique en date du 19 octobre 2001 fixant au 25 octobre 2001 la date de remise de ses nouvelles observations en défense ;
Vu les secondes observations en défense de la société France Télécom enregistrées le 25 octobre 2001 ; France Télécom conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que dans son précédent mémoire.
Concernant la mise en place rétroactive d’un nouveau produit d’interconnexion, France Télécom indique que MFS ne peut demander de bénéficier de façon rétroactive des services qui n’ont pas été fournis par le passé. La situation est donc différente de celles auxquelles MFS fait référence puisque dans les décisions mentionnées, il s’agissait de modifier, pour le passé, des tarifs de prestations d’interconnexion déjà fournies pendant la période concernée par la demande de rétroactivité.
France Télécom souligne que MFS n’a pas souscrit dans le passé aux prestations d’interconnexion de liaisons louées proposées par France Télécom dans le cadre du catalogue (liaisons d’aboutement) et des conventions d’interconnexion (liaisons louées partielles) mais a préféré souscrire des contrats de liaisons Transfix.
France Télécom considère qu’il serait difficilement admissible que MFS demande, par le biais d’un règlement de différend, de corriger les effets de ses propres choix techniques et commerciaux. France Télécom souligne que MFS aurait pu demander plus tôt à l’Autorité de trancher la question, afin de ne pas adhérer à une offre commerciale de France Télécom ou bien aurait pu demander des mesures d’urgences. France Télécom considère que l’Autorité ne pourrait donner un effet rétroactif à sa décision pour des raisons de sécurité juridique.
France Télécom souligne que ses propositions répondent aux besoins de MFS notamment en ce que les liaisons d’aboutement permettent de couvrir l’ensemble d’une zone de transit, et par conséquent de couvrir tous les clients de cette zone à partir d’un seul point de présence.
Les débits qui ne sont pas proposés par France Télécom dans le cadre de ses propositions sont les liaisons louées partielles à 34 et 155 Mbit/s. France Télécom renvoie à son précédent mémoire pour conclure qu’elle n’est pas tenue de fournir ces liaisons dans le cadre de l’interconnexion.
France Télécom estime, sur la qualité de service, que les engagements proposés dans le cadre du catalogue constituent des engagements de base mais que ceux−ci pourront être renforcés dans le cadre de conventions librement négociées, afin de déterminer, liaison par liaison, le niveau de qualité requis.
France Télécom demande donc à l’Autorité de renvoyer les parties à la négociation sur l’offre qui figurera au catalogue d’interconnexion pour l’année 2002.
Sur la mise en œuvre du reporting, France Télécom soutient que la demande de MFS portant sur un suivi trimestriel par opérateur, service ou filiale de FT ne donnera pas des résultats comparables, les offres souscrites pouvant différer ainsi que les politiques d’achats.
En conséquence, France Télécom propose un reporting global (moyenne et écart type) sur ses clients, sur douze mois glissants. Sur les indicateurs proposés par MFS, France Télécom les reprend point par point en soulignant leurs lacunes, notamment parce que les cas d’erreurs (retards, panne, ponctualité) non imputables à France Télécom devraient en être exclus.
France Télécom précise de plus qu’elle propose déjà dans les contrats Transfix des options de reporting, appelées " responsable service client " et " tableau de bord de production ", MFS ayant souscrit à la première. Elle est disposée à fournir aussi une telle offre dans le cadre des liaisons louées partielles mais note que cette offre ne pourra qu’être optionnelle, tous les clients ne souhaitant pas y souscrire, et qu’elle aura nécessairement un coût.
Sur la méthode de détermination des tarifs
France Télécom souhaite d’une part, revenir sur certains points méthodologiques des analyses de MFS et, d’autre part, apporter des explications sur l’analyse erronée, produite par MFS, du tarif de TFM 2048.
France Télécom note que MFS affirme dans son second mémoire avoir besoin de liaisons louées d’interconnexion pour de nombreuses années, à la différence des deux ans avancés dans sa saisine. France Télécom s’étonne de devoir investir sur le long terme dans sa boucle locale pour le compte des autres opérateurs.
France Télécom conteste le fait que le modèle de MFS reflète " l’état de l’art en matière de modélisation économique ", puisqu’il s’agit d’un modèle " bottom−up " dont les économistes reconnaissent les limites. De plus il ne s’agit pas d’un modèle " du secteur ", mais d’un modèle propriétaire.
France Télécom affirme accepter la confrontation des modèles économiques, contrairement à ce qu’affirme MFS, puisqu’elle l’a déjà fait dans le cadre de l’interconnexion et du dégroupage de la boucle locale, sous l’égide de l’Autorité.
Le fait que MFS considère le prix de TFM 2048 comme représentatif des coûts des autres liaisons louées à 2 Mbit/s constitue selon France Télécom une erreur d’interprétation. Il s’agit d’une offre répondant à des critères d’éligibilité précis, influant sur les conditions économiques de l’offre (notamment un débit global par site de 8 Mbit/s), entraînant des économies d’échelles que ne connaissent pas des liaisons louées à 2 Mbit/s isolées. Quant au prix du génie civil en région parisienne, il est effectivement plus élevé que dans des zones moins denses, mais la forte concentration de la demande entraîne également de fortes économies d’échelles, constat classique de toute économie de réseaux.
Sur l’analyse du marché
France Télécom conteste l’analyse concurrentielle du marché des liaisons louées à haut débit produite par MFS.
En outre, France Télécom considère qu’aucun texte ne prévoit qu’un opérateur puisse être contraint à installer de la fibre optique pour compte de tiers. Au contraire, la recommandation de la Commission ne fait référence qu’à des services dont le support n’est pas nécessairement de la fibre optique . France Télécom indique que c’est pour cette raison qu’elle ne propose pas de service à 34 Mbit/s dans son projet d’offre au catalogue d’interconnexion, puisqu’elle ne fournit des liaisons à 34 Mbit/s que sur des supports en fibre optique.
France Télécom précise que le règlement de la Commission sur le dégroupage exclut le dégroupage de la fibre optique, ce à quoi revient la demande de MFS.
Sur les conditions contractuelles applicables aux liaisons louées Transfix
France Télécom soutient que l’Autorité ne pourrait sans méconnaître les règles du code des postes et télécommunications fixer les conditions de migration des liaisons louées commerciales, ressortissant à des conditions contractuelles entre les parties, vers le service d’interconnexion proposé par France Télécom.
Vu la lettre de la société MFS Communications enregistrée à l’Autorité le 31 octobre 2001 concernant les pièces complémentaires évoquées dans les observations en défense de la société France Télécom enregistrées à l'Autorité le 19 septembre 2001 ;
Vu la décision n° 01−1054 de l'Autorité en date du 7 novembre 2001 prorogeant le délai dans lequel l'Autorité doit se prononcer ;
Vu la lettre du chef du service juridique en date du 28 novembre 2001 adressant un questionnaire aux parties et fixant au 12 décembre 2001 la date de clôture de remise des réponses ;
Vu la lettre de la société France Télécom enregistrée à l’Autorité le 10 décembre 2001 demandant une semaine supplémentaire pour transmettre ses réponses au questionnaire du rapporteur ;
Vu la lettre du chef du service juridique en date du 10 décembre 2001 fixant au 19 décembre 2001 la date de clôture de remise des réponses au questionnaire ;
Vu la décision n° 01−1196 en date du 12 décembre 2001 prorogeant le délai dans lequel l'Autorité doit se prononcer sur le différend opposant MFS Communications à France Télécom ;
Vu les réponses de France Télécom et de MFS Communications au questionnaire du rapporteur enregistrées le 19 décembre 2001 ;
Vu la lettre de la société MFS Communications enregistrée à l'Autorité le 17 janvier 2002 faisant part à l'Autorité d'une décision du régulateur britannique (OFTEL) ;
Vu la lettre en date du 16 janvier 2002 de la société France Télécom enregistrée à l'Autorité le 18 janvier 2002 concernant une erreur dans sa réponse au questionnaire du rapporteur ;
Vu la lettre du chef du service juridique en date du 21 janvier 2002 convoquant la société France Télécom et MFS Télécommunications à une audience devant le collège le 5 février 2002 ;
Vu la lettre de la société MFS Communications enregistrée à l’Autorité le 31 janvier 2002 n'émettant pas d'objection à ce que l'audience devant le collège soit publique ;
Vu la lettre de la société France Télécom enregistrée à l’Autorité le 4 février 2002 souhaitant que l'audience devant le collège ne soit pas publique ; interrogée sur ce point par le Président de l'Autorité à l'ouverture de l'audience, la société MFS Communications a précisé qu'elle pouvait souscrire à la demande de France Télécom ;
Après avoir entendu, le 5 février 2002, lors de l'audience devant le collège :
- le rapport de Mmes Françoise Laforge et Elodie Ziegler, rapporteur et rapporteur adjoint, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
- les observations de MM. Thomas Marten et Laurent Papiernik, pour la société MFS Communications ;
- les observations de MM. Marc Fossier et Jean−Daniel Lallemand, pour la société France Télécom ;
En présence de :
- M. Jean Marimbert, directeur général, Philippe Distler, François Lions, Loïc Taillanter, Mmes Elisabeth Rolin, Cécile Dubarry, Christine Galliard, agents de l'Autorité ;
- MM. Lionel Drouin, Mme Françoise Ceailles, pour la société MFS Communications, assisté de Maître Winston Maxwell, Cabinet Carridi, Mee, Rué ;
- MM Jean Mazier, Christian Gacon, Mmes Aurélia David, Evelyne Glickmann, pour la société France Télécom ;
Le collège en ayant délibéré le 12 février 2002, hors la présence du rapporteur, du rapporteur adjoint et des agents de l'Autorité,
1. Sur la recevabilité de la demande de MFS
1.1. Sur la qualification juridique des liaisons louées demandées par MFS
Il résulte des dispositions de l’article 2 de la directive 92/44/CE modifiée par la directive 97/51/CE (dite " ONP liaisons louées ") et de l’annexe I de la directive 97/33/CE du 30 juin 1997 relative à l’interconnexion, transposées par l’article R. 9 du code des postes et télécommunications, que les liaisons louées constituent des " capacités de transmission transparentes entre points de terminaison du réseau, à l’exclusion de la commutation sur demande ". Il s’ensuit donc que, contrairement à ce qu’expose France Télécom, la technologie ou le support physique employés pour fournir une telle prestation (paire de cuivre, fibre optique, câble, …) n’a pas d’incidence sur la qualification juridique d’une telle prestation. De même, cette définition recouvre l’ensemble des débits disponibles sur le marché (liaisons analogiques ou numériques, à bas débit ou haut débit).
Il résulte des dispositions de la directive 97/33/CE précitée, et notamment de ses annexes I et II, que les prestations de liaisons louées permettant à un opérateur de relier les sites de ses clients à son réseau via le réseau d’un opérateur tiers relèvent du régime juridique de l’interconnexion. Aux termes de l’article D. 99−9 du code des postes et télécommunications, les " prestations d’accès aux services de base " dont " pour les opérateurs de réseaux ouverts au public, les liaisons louées ", doivent figurer dans les accords d’interconnexion entre opérateurs.
Cette analyse est confirmée par la Commission européenne, dans sa recommandation C(1999)3863 du 24 novembre 1999, relative à la tarification des liaisons louées d’interconnexion dans un marché libéralisé aux termes de laquelle " ces services d’interconnexion de lignes louées sont fournis par un opérateur à un autre opérateur pour l’accès aux locaux d’un client et constituent un segment de la ligne louée de bout en bout reliant les différentes installations du client ".
Ainsi, tout opérateur doit satisfaire aux demandes justifiées d’interconnexion de liaisons louées émanant d’un autre opérateur autorisé au titre de l’article L. 33−1 du code des postes et télécommunications, dans les conditions définies à l’article L. 34−8−I de ce même code et notamment en fonction de sa capacité à satisfaire cette demande, quelle que soit, par ailleurs, sa position sur le marché. Dans ces conditions, conformément aux dispositions de l’article L. 36−8 du code des postes et télécommunications, l’Autorité est compétente pour régler un litige entre opérateurs.
Ainsi, il résulte de tout ce qui précède que l’Autorité est compétente pour se prononcer sur un litige entre opérateurs concernant les conditions techniques et tarifaires pour les prestations d’interconnexion de liaisons louées.
1.2. Sur l’échec des négociations
Il résulte de ce qui précède que la saisine de MFS portant sur le refus de France Télécom de lui fournir une prestation de liaisons louées d’interconnexion à un tarif orienté vers les coûts doit être regardée comme portant sur un échec des négociations commerciales relatives à la conclusion d’une convention d’interconnexion à un réseau de télécommunication au sens des dispositions de l’article L. 36−8 du code des postes et télécommunications.
Il ressort des pièces du dossier que les négociations ont commencé entre les parties par une lettre en date du 16 octobre 2000. Par ce courrier, MFS demandait que les liaisons Transfix haut débit soient orientées vers les coûts. Dans sa réponse à ce courrier en date du 30 octobre, France Télécom a proposé à MFS des offres à haut débit relevant de ses prestations fournies aux clients finals à titre commercial mais a refusé de négocier une baisse des liaisons Transfix haut débit. Dans son courrier du 8 décembre 2000, MFS demandait à France Télécom de lui fournir une offre de liaisons louées qui répond aux besoins spécifiques d’un opérateur autorisé au titre de l’article L. 33−1 du code des postes et télécommunications, et comportant : des débits à 34 et 155 Mbit/s, des distances variant entre 0 et 15 kilomètres, la possibilité de relier le site client soit au PRO de France Télécom ou MFS est colocalisé, soit directement au POP non colocalisé de MFS. Les termes de la lettre de France Télécom datée du 22 décembre 2000 indiquent que les liaisons louées de courte distance ne relèvent pas de l’interconnexion, mais des prestations commerciales.
En outre, par un courrier du 18 juin 2001, MFS étend sa demande initiale en souhaitant recevoir de France Télécom une offre de liaisons louées pour l’ensemble des débits (64 kbit/s jusqu’à 155 Mbit/s) et longueur (jusqu’à 50 Km) associée à des engagements de qualité de service, de flexibilité et de délais de déploiement meilleurs ou comparables à ceux applicables aux liaisons Transfix avant les modifications des contrats introduites par France Télécom le 1er juin 2001. Or, France Télécom, dans des courriers du 4 et 27 juillet 2001, n’a pas souhaité satisfaire à la demande de MFS, mais sollicitait à nouveau un rendez−vous avec MFS pour explorer les améliorations prévues pour l’offre de liaisons louées partielles. Une réunion s’est tenue le 2 août 2001, qui n’a pas permis d’aboutir à un accord entre les parties.
Ces éléments permettent de constater l’échec des négociations entre les deux parties sur la fourniture par France Télécom d’une offre d’interconnexion de liaisons louées pour MFS. Il suit de là que ladite saisine est recevable au regard des dispositions de l’article L. 36−8 du code des postes et télécommunications.
2. Sur le caractère justifié de la demande de MFS
2.1. Sur les obligations renforcées incombant à France Télécom en matière d’interconnexion de liaisons louées
L’Autorité rappelle en premier lieu que la société France Télécom figure sur les listes des opérateurs exerçant une influence significative sur le marché des liaisons louées prévues par le 7° de l’article L. 36−7 du code des postes et télécommunications et établies pour les années 1999, 2000, 20001, 2002 par les décisions n° 98−982 en date du 27 novembre 1998, n° 99−767 en date du 15 septembre 1999, n° 00−1328 en date du 15 décembre 2000 et n° 01−750 en date du 25 juillet 2001.
Dans ces conditions, la société France Télécom doit respecter les obligations relevant de l’article 7 de la directive 97/33/CE et de l’article L. 34−8 du code des postes et télécommunications en ce qui concerne l’interconnexion de liaisons louées et elle est notamment soumise à l’obligation d’orienter ses tarifs vers les coûts.
L’Autorité constate que le cadre réglementaire européen et les dispositions du code des postes et télécommunications ne prévoient pas actuellement la possibilité de moduler les obligations imposées aux opérateurs désignés comme exerçant une influence significative sur un marché, au sein des activités mentionnées à l’annexe II de la directive 97/33 ou de l’article L. 36−7−7° de ce même code, en fonction de la part de marché des opérateurs sur un sous−segment particulier de marché. Les obligations prévues par les textes réglementaires portent donc sur l’ensemble des prestations correspondant à la définition des liaisons louées mentionnée ci−dessus, quels que soient les débits de ces liaisons.
Aussi, l’Autorité considère−t−elle comme fondés les arguments présentés par MFS tendant à démontrer que France Télécom doit faire droit aux demandes d’orientation des tarifs vers les coûts pertinents pour les prestations d’interconnexion de liaisons louées émanant des opérateurs autorisés au titre de l’article L. 33−1 du code, indépendamment des débits de ces liaisons.
2.2. Sur les coûts à prendre en compte
L’Autorité constate que, depuis 1998, les coûts de référence de l’interconnexion ont été les coûts moyens comptables prévisionnels pertinents tels que définis dans l’article D.99−19 du code des postes et télécommunications. Or, conformément aux dispositions de l’article D.99−20 du code, l’Autorité a engagé en 2001 les travaux nécessaires à la mise en œuvre de CMILT (Coûts moyens incrémentaux de long terme). Les éléments méthodologiques de cette mise en œuvre figurent dans la décision n° 01−1146 de l’Autorité en date du 30 novembre 2001 approuvant l’offre technique et tarifaire d’interconnexion de France Télécom pour les exploitants de réseaux ouverts au public L.33−1 pour l’année 2002.
Au regard de l’avancement des travaux réalisés, l’Autorité a considéré que les tarifs 2002 établis par France Télécom étaient cohérents avec une valorisation de coûts en CMILT tout en poursuivant les travaux de réconciliation des modèles en vue de disposer d’une référence stabilisée et pérenne.
L’Autorité considère donc que les coûts à prendre en compte en ce qui concerne les liaisons louées d’interconnexion doivent être établis en référence aux CMILT, en cohérence avec les prestations d’interconnexion figurant au catalogue d’interconnexion de France Télécom pour 2002. A ce stade, l’Autorité ne dispose pas d’un modèle de CMILT pour les réseaux de liaisons louées dans la mesure où le secteur n’a pas proposé de modèle bottom−up spécifique aux liaisons louées et où une réconciliation avec les coûts avancés par France Télécom issus de son modèle top−down n’a donc pas pu être engagée.
3. Sur la demande de MFS relative à la définition d’une offre d’interconnexion de liaisons louées spécifique aux opérateurs
France Télécom ayant au cours de la procédure avancé une nouvelle offre de liaisons louées d’interconnexion pour les débits inférieurs ou égaux à 2 Mbit/s, il convient de traiter séparément le cas des liaisons à 34 et 155 Mbit/s.
3.1. Sur la demande relative aux liaisons de débits inférieurs à 2 Mbit/s
3.1.1. Sur le principe
Il ressort des pièces versées au dossier que MFS demande à disposer d’une offre d’interconnexion spécifique pour les liaisons louées de débits inférieurs ou égaux à 2 Mbit/s. MFS demande précisément à pouvoir s’interconnecter, et donc prendre livraison des liaisons soit au niveau des Points Raccordement Opérateurs (PRO) du réseau de France Télécom soit au point de présence de son réseau le plus proche de son client final. Enfin, MFS présente une demande tarifaire associée à ces différentes prestations, sur la base d’un modèle CMILT.
Il résulte de ce qui précède que les liaisons louées de débits de 64 kbit/s à 2 Mbit/s reliant un client final au réseau d’un opérateur sont des prestations d’interconnexion. Or, l’Autorité rappelle qu’il lui revient, dans le cadre du règlement de ce litige de " préciser les conditions équitables, d’ordre technique et financier, dans lesquelles l’interconnexion doit être assurée " conformément à l’article L. 36−8 du code des postes et télécommunications.
Aux termes des dispositions de l’article L. 34−8 du code des postes et télécommunications : " La demande d’interconnexion ne peut être refusée si elle est justifiée au regard, d’une part, des besoins du demandeur, d’autre part, des capacités de l’exploitant à la satisfaire (…) ". Il résulte des dispositions précitées, que la demande d’interconnexion de MFS Communications ne peut être refusée si elle est justifiée au regard d’une part, de ses besoins et d’autre part, des capacités de France Télécom à la satisfaire.
3.1.2. Sur l’architecture adaptée aux relations entre opérateurs
A cet égard, l’Autorité constate que les liaisons louées de débits inférieurs ou égaux à 2 Mbit/s sont construites sur le réseau dit Réseau de Transmission Numérique Multiservices (RTNM) de France Télécom, dont les nœuds sont des brasseurs. Il convient de souligner que ce réseau est distinct du réseau téléphonique commuté de France Télécom, dont les points d’interconnexion sont entre autres les PRO. Dans ces conditions, les PRO se trouvent dans certains cas mais pas systématiquement sur des sites de brasseurs. Dès lors France Télécom n’a pas toujours la capacité technique pour satisfaire la demande d’interconnexion de MFS au PRO pour le service de liaisons louées d’interconnexion.
En revanche, l’Autorité constate, ce qui n’est pas contesté par France Télécom, que l’interconnexion aux brasseurs du réseau RTNM est techniquement réalisable. Il suit de là que France Télécom doit, conformément aux dispositions de l’article D. 99−15 de ce même code, proposer à MFS une offre d’interconnexion aux brasseurs de son réseau RTNM.
A cet égard, l’Autorité estime que l’architecture du service d’interconnexion de liaisons louées proposé dans le catalogue d’interconnexion 2002 de France Télécom, tel qu’il a été approuvé par la décision n° 02−146 de l’Autorité en date du 12 février 2002 approuvant le chapitre VIII relatif au service d’interconnexion de liaisons louées de l’offre technique et tarifaire d’interconnexion de France Télécom pour les exploitants de réseaux ouverts au public L.33−1 pour l’année 2002, répond à la demande de MFS.
MFS a également demandé une option de " double brassage ", signifiant ainsi qu’une liaison louée devait pouvoir être livrée, au sein d’une même zone de transit, hors de la zone de couverture du premier brasseur reliant le client. L’Autorité considère que cette demande est justifiée au regard des besoins de MFS lorsque notamment les volumes de liaisons louées partielles ne justifient pas que MFS s’interconnecte aux brasseurs de la zone arrière concernée. France Télécom devra donc proposer à MFS, dans sa convention d’interconnexion, une solution de prolongement hors de la zone arrière des liaisons louées partielles.
3.1.3. Sur le tarif applicable
Concernant le tarif applicable, France Télécom, désigné par l’Autorité pour l’année 2002 comme opérateur exerçant une influence significative sur le marché des liaisons louées, est soumise à l’obligation que ses tarifs d’interconnexion rémunèrent l’usage effectif du réseau de transport et de desserte et reflètent les coûts correspondants, conformément à l’article L. 34−8 du code des postes et télécommunications.
Il résulte de l’instruction que les parties sont en désaccord sur plusieurs éléments et hypothèses du modèle CMILT bottom−up produit par MFS pour estimer les coûts d’interconnexion au réseau de liaisons louées de France Télécom. L’Autorité a examiné avec attention le modèle CMILT produit par MFS et a relevé, comme le soulève aussi France Télécom, des erreurs sur plusieurs points. En outre, l’Autorité a noté que des hypothèses de ce modèle étaient, comme le soulève également France Télécom, difficilement vérifiables.
En conséquence, l’Autorité considère que la proposition de MFS concernant la détermination des CMILT ne saurait être retenue.
L’Autorité considère en outre que les éléments apportés par MFS ne sont pas de nature à remettre en cause les tarifs des liaisons louées figurant au chapitre VIII de son catalogue d’interconnexion 2002, dont l’Autorité a estimé qu’ils étaient cohérents avec les coûts de l’opérateur historique issus de son modèle CMILT utilisé pour le catalogue d’interconnexion 2002.
Dans ces conditions, l’Autorité décide que France Télécom devra proposer à MFS une convention d’interconnexion de liaisons louées en application du chapitre VIII du catalogue d’interconnexion pour 2002, en vue de la signature d’une convention au plus tard le 30 septembre 2002
3.2. Sur la demande relative aux liaisons de débits de 34 et 155 Mbit/s
L’Autorité note qu’il ressort de l’instruction que MFS demande à disposer d’une offre d’interconnexion aux opérateurs pour les liaisons louées de débits de 34 et 155 Mbit/s, pour laquelle France Télécom n’a pas fait de proposition dans le cadre de son catalogue d’interconnexion pour 2002. MFS demande précisément à pouvoir s’interconnecter au niveau des Points Raccordement Opérateurs (PRO) du réseau de France Télécom et à pouvoir acheter des liaisons jusqu’à son point de présence le plus proche du client final. Enfin, MFS présente une demande tarifaire associée à ces différentes prestations, sur la base d’un modèle CMILT.
Il résulte de ce qui précède que les liaisons louées de débits de 34 et 155 Mbit/s reliant un client final au réseau d’un opérateur sont des prestations d’interconnexion.
Aux termes des dispositions de l’article L 34−8 du code des postes et télécommunications, France Télécom ne peut refuser une demande d’interconnexion si elle est justifiée au regard des besoins du demandeur et de sa capacité à la satisfaire.
3.2.1. Sur le caractère justifié de la demande de MFS
Il ressort des pièces versées au dossier que MFS dispose notamment des solutions suivantes pour proposer des services haut débit à ses clients finals :
- utiliser sa propre infrastructure et notamment ses propres fourreaux dans le cas où elle relie également son client ;
- partager avec France Télécom l’infrastructure existante et en particulier les fourreaux reliant son client ;
- demander à France Télécom de s’interconnecter à son réseau ;
L’Autorité considère qu’une demande d’interconnexion de MFS n’est pas justifiée au regard de ses besoins dans les deux premiers cas, c’est−à−dire soit lorsque MFS dispose d’une infrastructure en propre, soit lorsque France Télécom lui propose de mettre en œuvre, dans des délais et à des tarifs raisonnables, une solution de partage des infrastructures existantes, puisque dans ces deux cas MFS dispose d’une solution alternative lui permettant de raccorder son client dans des conditions équivalentes à celles dont bénéficie France Télécom.
En revanche, lorsqu’une telle solution de partage des fourreaux n’est pas mise en œuvre par France Télécom, dans des délais et à des tarifs raisonnables, et que MFS ne dispose pas d’une infrastructure en propre, la demande d’interconnexion de MFS apparaît justifiée au regard de ses besoins.
S’agissant de la capacité de France Télécom à satisfaire les besoins de MFS, il ressort de l’instruction qu’elle peut être tenue pour établie dans les deux situations suivantes :
- lorsque le raccordement optique existe déjà jusqu’au client final de MFS ;
- lorsque des fourreaux du réseau général de France Télécom existent et sont disponibles jusqu’aux locaux du client final même si le raccordement optique n’est pas disponible, soit en raison de la saturation des câbles existants, soit en raison de l’absence de câbles de fibres optiques. En particulier, l’Autorité estime qu’en l’absence de difficultés exceptionnelles, France Télécom ne saurait raisonnablement soutenir qu’elle n’a pas la capacité à satisfaire la demande de MFS en ajoutant un câble de fibres optiques dans des fourreaux existants. Elle ne saurait non plus soutenir que cela nécessite la construction d’une infrastructure nouvelle pour le compte des opérateurs, puisqu’il s’agit en l’espèce de rajouter un câble dans une infrastructure existante, ce qui constitue une opération courante dans un réseau de télécommunications.
Il résulte cependant de l’instruction que France Télécom peut rencontrer dans certains cas des difficultés particulières à satisfaire la demande de MFS. Ces difficultés potentielles expliquent notamment que la fourniture de service dans le cadre des contrats Transfix HD soit subordonnée à une étude de faisabilité.
Il n’apparaît donc pas raisonnable d’imposer à France Télécom de poser un câble en présence de difficultés particulières. Toutefois, France Télécom devra définir précisément dans sa convention d’interconnexion avec MFS les difficultés qui peuvent l’amener à refuser la pose d’un câble de fibres optiques. Ces difficultés devront naturellement correspondre aux cas rencontrés dans la mise en œuvre de l’offre Transfix HD. Elle pourra également, dans les mêmes conditions que pour l’offre Transfix HD, subordonner la pose d’un nouveau câble optique à une étude de faisabilité dans les mêmes conditions que pour Transfix HD.
3.2.2. Sur l’architecture adaptée aux relations entre opérateurs
En application de l’article D. 99−15 du code des postes et télécommunications, France Télécom doit permettre à MFS de s’interconnecter en tous les points de son réseau où cela est nécessaire et techniquement réalisable. L’Autorité rappelle que France Télécom a indiqué au cours de l’instruction que son réseau haut débit s’appuyait sur les ressources du réseau général et qu’en conséquence l’interconnexion était techniquement possible en certains points du réseau général tels que les nœuds de répartition d’abonnés, et les commutateurs de différents niveaux. De plus, l’Autorité constate que France Télécom n’a pas démontré au cours de l’instruction l’impossibilité pour un opérateur de s’interconnecter à ces différents points, en réutilisant notamment dans certains cas ses équipements colocalisés au titre de l’interconnexion voix dans les sites hébergeant des commutateurs ou des PRO.
Dans ces conditions, l’Autorité estime que France Télécom devra proposer à MFS de s’interconnecter à son réseau de liaisons louées à 34 et 155 Mbit/s en tous les points où cela est techniquement réalisable. Ainsi, l’Autorité considère que les demandes d’interconnexion en ces différents points du réseau général de France Télécom, et en particulier aux points d’interconnexion préexistants pour le trafic commuté, ne pourront être rejetées que sur la base de critères objectifs afférant à la faisabilité technique d’une telle interconnexion.
En conclusion, l’Autorité décide que France Télécom devra proposer à MFS, sauf à mettre en œuvre le partage de l’ensemble de son parc de fourreaux avec MFS à des tarifs et dans des délais raisonnables, une convention d’interconnexion pour les liaisons de débits de 34 et 155 Mbit/s dans les conditions précédemment évoquées.
3.3. Sur la demande relative aux conditions de migration
3.3.1. Sur le principe d’une migration
MFS a indiqué, dans ses écritures, qu’elle demandait à ce que la migration de ses anciennes liaisons louées, souscrites sur la base de contrats Transfix, vers la nouvelle offre d’interconnexion adapté aux relations entre opérateurs se fasse sans charge supplémentaire pour MFS.
Il résulte de ce qui précède que l’architecture d’interconnexion de liaisons louées retenue est différente de celle utilisée pour les liaisons Transfix, notamment en raison de la présence pour la première de points d’interconnexion sur le réseau de France Télécom. L’Autorité constate que la migration nécessitera donc, dans le cas général, des opérations concrètes de modification des liaisons (et notamment de leur routage et de leurs extrémités) au sein des réseaux de France Télécom et de MFS.
Dans ces conditions, l’Autorité considère que la migration ne peut être dans le cas général, comme le demande MFS, une opération " virtuelle " de simple modification de la facturation. L’Autorité souligne d’ailleurs que MFS a indiqué dans sa réponse au questionnaire que la migration constituait une opération lourde pour son propre réseau, qui se décomposait en plusieurs étapes et nécessitait l’intervention de ses équipes techniques.
3.3.2. Sur le partage des coûts résultant de la migration
L’Autorité constate également que France Télécom a indiqué que la migration était une opération lourde dans son propre réseau, qui nécessitait aussi l’intervention de ses propres équipes techniques.
L’Autorité écarte l’argument de France Télécom selon lequel le changement d’architecture est entièrement imputable à MFS. En effet, l’Autorité note que MFS a indiqué au cours de l’instruction, ce qui n’a pas été contesté par France Télécom, que l’offre de liaisons louées structurée en liaisons louées partielles et liaisons d’aboutement telle qu’elle était proposée à MFS jusqu’à présent lui serait revenu 20% plus chère que l’offre Transfix sans remise. En l’état des conditions de l’offre de liaisons louées partielles et de liaisons d’aboutement de France Télécom, MFS a été conduite à retenir une offre Transfix, qui était moins chère. En outre, l’Autorité constate qu’aucune offre présentant des points d’interconnexion sur le réseau de France Télécom n’a été proposée pour les débits de 34 et 155 Mbit/s.
L’Autorité considère donc que la migration a lieu dans des conditions techniques et financières équitables si chaque partie assume les opérations nécessaires à cette migration dans son propre réseau. Ainsi, l’Autorité considère que France Télécom ne pourra demander à MFS de compensation financière pour les opérations de migration qu’elle devrait réaliser dans son réseau. Réciproquement, MFS ne pourra demander à France Télécom de compensation financière pour les opérations que MFS doit réaliser elle−même en vue de cette migration.
3.3.3. Sur les frais d’accès au service
MFS demande également à ne pas payer les frais d’accès au service lors de la migration d’une ancienne liaison vers une liaison d’interconnexion souscrite en remplacement, c’est−à−dire ayant le même client final.
Il ressort de l’instruction que France Télécom peut procéder à une migration sans avoir à établir une nouvelle liaison mais par simple reroutage de la liaison existante. Or ce reroutage correspond aux travaux de migration, qui ont déjà été traités au paragraphe 3.3.2. Dans ces conditions, l’Autorité estime que les frais d’accès au service ne peuvent être facturés à MFS.
Il ressort cependant des pièces fournies par France Télécom qu’une telle migration nécessite dans le cas général une coupure de service, le temps d’effectuer l’opération technique de migration. MFS a reconnu la nécessité d’une telle coupure en soulignant qu’elle pouvait être limitée dans le temps et se dérouler dans des fenêtres de maintenance prédéfinies.
En conséquence, l’Autorité décide que France Télécom proposera à MFS un mode de migration avec coupure de service sans lui facturer ni frais d’accès au service ni frais de migration. A cet égard, France Télécom devra préciser dans sa convention d’interconnexion avec MFS la durée maximale d’une coupure, qui ne pourra raisonnablement excéder quelques heures. En outre, France Télécom devra également négocier avec
MFS les fenêtres de coupure, qui devront être raisonnables au regard de ce qui se fait habituellement pour des opérations de maintenance et tenir compte des contraintes commerciales de MFS.
Il apparaît en revanche que si MFS souhaite que la migration se fasse sans coupure de service, la création d’une nouvelle liaison par France Télécom est nécessaire. Dans ce cas, MFS demandant une prestation particulière, l’Autorité estime équitable que MFS assume les coûts d’établissement d’une liaison nouvelle, qui ne pourront être supérieurs aux frais d’accès au service pour la liaison considérée.
3.3.4. Sur la sortie des contrats Transfix
France Télécom a elle−même proposé lors de l’audience de ne pas pénaliser MFS lors de sa sortie des contrats longue durée en cours si elle reportait la durée restante sur la nouvelle convention d’interconnexion pour laquelle la durée minimale de souscription est d’un an. Dans ces conditions, l’Autorité retient cette solution qui devra être proposée à MFS dans le cadre de la convention d’interconnexion. L’Autorité note que France Télécom a également indiqué que la migration physique des liaisons pourrait avoir lieu d’ici à la mi−2004.
3.4. Sur la demande relative à la qualité de service
3.4.1. Sur la compétence de l’Autorité
Il ressort de l’instruction que MFS demande que les liaisons louées basées sur une nouvelle architecture d’interconnexion présentent des garanties de qualité de service meilleures que celles proposées dans les contrats Transfix.
Aux termes des dispositions de l’article 9−3 de la directive 97/33 CE " les conditions fixées par l'autorité réglementaire nationale peuvent notamment comprendre les conditions destinées à garantir une concurrence effective, des conditions techniques, des conditions de tarification, de fourniture et d'utilisation, des conditions de conformité aux normes pertinentes, de conformité aux exigences essentielles, de protection de l'environnement et/ou de maintien de la qualité de bout en bout du service ". Ces dispositions sont reprises dans l’article D. 99−9 du code des postes et télécommunications, aux termes duquel les accords d’interconnexion précisent au minimum " la qualité des prestations fournies : disponibilité, sécurisation, efficacité, synchronisation ", " les délais de mise à disposition", " les procédures d’intervention et de relève de dérangement ".
Enfin, l’article L. 36−8−I du code des postes et télécommunications dispose que la décision de l’Autorité précise " les conditions équitables, d’ordre technique (…) , dans lesquelles l’interconnexion ou l’accès spécial doivent être assurés "
Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l’Autorité est compétente pour régler tout différend concernant la qualité de service des accords d’interconnexion.
3.4.2. Sur les conditions de la qualité de service
L’Autorité note que France Télécom propose dans le cadre de ses contrats Transfix et Transfix HD des garanties de qualité de service pour les liaisons louées.
L’Autorité estime que la nature technique des liaisons louées Transfix et des liaisons louées résultant de la nouvelle offre d’interconnexion est sans incidence sur le niveau de qualité de service que France Télécom peut fournir. A cet égard, l’Autorité constate que France Télécom n’a pas démontré l’impossibilité de garantir un même niveau de qualité de service sur ces deux produits.
Aux termes de l’article D. 99−12 : France Télécom " … fournit l’interconnexion dans des conditions non discriminatoires. Les modalités techniques et financières des services d'interconnexion qu'ils offrent, à conditions équivalentes, aux autres opérateurs, notamment la qualité technique des prestations, les délais de mise à disposition et la disponibilité de ces prestations, doivent être équivalentes à celles retenues, le cas échéant, pour leurs propres services ou ceux de leurs filiales ou partenaires. ".
En conséquence, l’Autorité considère qu’une différence de qualité de service entre les liaisons louées de type Transfix et celles de la nouvelle offre d’interconnexion ne serait pas fondée sur des critères objectifs. De plus, elle introduirait une discrimination entre la qualité de service que France Télécom propose à ses clients finals et celle réservée aux opérateurs.
A cet égard, l’Autorité considère que le catalogue d’interconnexion pour 2002 propose un niveau de qualité de service standard et des options correspondant à ceux proposés dans l’offre Transfix.
Dans ces conditions, l’Autorité décide que France Télécom proposera dans sa convention d’interconnexion des garanties de qualité de service en application du chapitre VIII du catalogue d’interconnexion 2002 et au moins égales à celles des offres Transfix en cours.
3.4.3. Sur les prestations non prévues au catalogue d’interconnexion
S’agissant des prestations de qualité de service qui ne sont pas prévues au catalogue d’interconnexion pour 2002, France Télécom indique dans ses secondes observations en défense que " comme cela est pratiqué dans le cadre de l’offre Transfix, des engagements de qualité de service plus élevés seront proposés aux opérateurs qui le souhaiteraient, dans le cadre d’offres complémentaires. Ces offres complémentaires permettront à un opérateur d’obtenir des engagements équivalents à ceux obtenus par les clients de l’offre Transfix lorsqu’ils souscrivent les options ad hoc. "
Dans ces conditions, la convention d’interconnexion devra prévoir, si MFS le souhaite, l’ensemble des niveaux de garanties proposés dans les contrats Transfix en cours, à des tarifs inférieurs ou égaux.
Il ressort de l’instruction que France Télécom a modifié les conditions de qualité de service de ses contrats Transfix à compter du 1er juin 2001.
L’Autorité considère qu’en vertu de l’article D. 99−12 du code des postes et télécommunications, MFS doit pouvoir bénéficier, si elle le demande, de conditions de qualité égales aux conditions accordées à l’un des clients finals de France Télécom dans le cadre des contrats Transfix.
A supposer que les conditions de qualité de service antérieures à la modification de France Télécom du 1er juin 2001 soient appliquées à l’un des clients de France Télécom, MFS pourra alors en bénéficier dans le cadre de sa convention d’interconnexion, si elle le demande.
Au demeurant, l’Autorité note que le Tribunal de Commerce de Paris, par son jugement en date du 12 septembre 2001, a imposé à France Télécom le maintien des conditions de qualité de service figurant dans les contrats de liaisons louées conclus avec les sociétés Cégétel et SFR.
3.4.4. Sur les pénalités
Il résulte également de l’instruction que les garanties de qualité de service sont assorties, dans les contrats Transfix, de pénalités en cas de non−respect des engagements lorsque cela est imputable à France Télécom. L’Autorité écarte l’argument de France Télécom selon lequel ces pénalités ne sont pas un élément clef pour garantir effectivement le respect de ses engagements de qualité de service.
L’Autorité considère que les pénalités assorties aux conditions de qualité de service prévues au catalogue d’interconnexion répondent pour partie à la demande de MFS. Pour les conditions de qualité de service qui ne sont pas prévues au catalogue ou qui portent sur les liaisons à 34 et 155 Mbit/s, France Télécom devra assortir sa convention de pénalités au moins égales à celles des contrats Transfix en cours, pour des prestations équivalentes.
L’Autorité considère cependant qu’un plafond de pénalités peut être défini, s’il reste raisonnable et ne conduit pas à une baisse de la qualité de service générale. Ainsi, l’Autorité considère qu’un plafond ne pourra être inférieur au plafond global prévu dans le catalogue d’interconnexion.
3.4.5. Sur la mise en place d’un système de suivi
Il résulte de l’instruction que MFS demande la mise en place d’un système de suivi de la qualité de service, comprenant des indicateurs de mesure de la qualité de service, pour chaque opérateur, service ou filiale de France Télécom.
Au cours de l’instruction, l’Autorité note qu’un accord est apparu entre les parties sur la possibilité de mise en place d’un tel système. En revanche, la méthode et les modalités n’ont pas fait l’objet d’un accord.
A cet égard, l’Autorité estime que la mise en œuvre d’un système de suivi apparaît comme un élément de nature à rendre plus transparent le respect des engagements de France Télécom. L’Autorité considère, comme les parties, qu’un tel système peut être défini dans le cadre de sa convention d’interconnexion. L’Autorité note au demeurant que France Télécom propose dans le cadre de ses contrats Transfix des options de suivi de la qualité de service et qu’elle était disposée à les proposer dans le cadre des conventions d’interconnexion. En conséquence, l’Autorité demande à France Télécom d’inclure dans ses conventions avec MFS un système de suivi de la qualité de service, dont les conditions seront au moins aussi favorables que dans les options des contrats Transfix. En outre, s’agissant de prestations d’interconnexion, les tarifs de cette offre de suivi de la qualité de service seront orientés vers les coûts correspondants.
4. Sur la demande de MFS relative aux liaisons louées Transfix souscrites dans l’attente d’une offre d’interconnexion spécifique aux opérateurs
MFS demande à l’Autorité de déterminer, pour tous les débits de liaisons, un tarif orienté vers les coûts pertinents pour l’interconnexion, pour les liaisons louées qu’elle a souscrites auprès de France Télécom dans le cadre de contrats Transfix, dans l’attente de la mise en œuvre effective, par France Télécom, d’une prestation d’interconnexion de liaisons louées reposant sur une architecture adaptée à des relations entre opérateurs.
MFS justifie sa demande du fait d’une part, de l’absence d’une offre d’interconnexion à des tarifs orientés vers les coûts et, d’autre part, du délai nécessaire à la mise en place effective de prestations d’interconnexion de liaisons louées spécifiques aux opérateurs.
France Télécom indique qu’elle proposait en 2001 une prestation d’interconnexion de liaisons louées constituée d’une offre de service d’aboutement de liaisons inscrites à son catalogue d’interconnexion et d’une offre de liaisons louées partielles proposées dans ses conventions d’interconnexion. Elle souligne également que le fait que MFS ait conclu avec France Télécom des contrats pour des offres de détail Transfix, dans les conditions de son catalogue de détail pour les clients finals relève d’un choix propre à MFS. Elle fait enfin valoir que si MFS n’était pas satisfaite de cette solution, rien ne l’empêchait de saisir l’Autorité à une date antérieure à sa saisine, et, éventuellement d’assortir cette saisine d’une demande de mesures conservatoires.
4.1 Sur le principe d’une solution transitoire dans l’attente d’une solution définitive
L’Autorité constate que le tarif de l’offre de liaisons louées d’interconnexion, et notamment les liaisons louées partielles fournies dans le cadre des contrats d’interconnexion, n’était pas orienté vers les coûts pertinents pour l’interconnexion. MFS indique en effet, ce qui n’est pas contesté par France Télécom, que, du fait d’une part, du caractère élevé du tarif 2001 des liaisons louées partielles et liaisons d’aboutement et de l’architecture imposée par France Télécom pour cette prestation d’interconnexion et, d’autre part, d’une tarification des liaisons louées de détail de bout en bout et à vol d’oiseau entre le site de l’opérateur et le site de ses clients avec possibilité de remises, le prix effectivement payé par MFS au titre des prestations de détail était inférieur de 20 % au prix qu’elle aurait payé si elle avait eu recours aux prestations d’interconnexion de liaisons louées telles que proposées par France Télécom.
En outre, l’ensemble des débits demandés par MFS, et notamment les liaisons à 2, 34 et 155 Mbit/s n’est pas fourni, jusqu’à ce jour, par France Télécom dans le cadre des prestations d’interconnexion de liaisons louées, le recours aux offres de détail de France Télécom étant alors la seule solution possible pour MFS.
L’Autorité constate donc que MFS a eu recours aux prestations de détail de France Télécom du fait de l’absence d’une offre de France Télécom satisfaisant ses obligations réglementaires en matière de fourniture de liaisons louées d’interconnexion.
L’Autorité estime par ailleurs que France Télécom ne peut valablement reprocher à MFS de n’avoir pas saisi l’Autorité de façon plus précoce ou de n’avoir pas demandé de mesures conservatoires dans le cadre de cette saisine, compte tenu du fait que :
- d’une part, la recevabilité d’une demande de règlement de différend est subordonnée à l’échec de négociations, ce que MFS n’a pas considéré comme acquis avant mi−août 2001, des échanges entre les parties ayant eu lieu au début de ce même mois ;
- d’autre part, l’obligation de France Télécom de fournir une prestation d’interconnexion de liaisons louées à un tarif orienté vers les coûts est antérieure à l’engagement des négociations entre les parties, puisque France Télécom a été désignée comme exerçant une influence significative sur le marché des liaisons louées à partir de l’année 1999.
Il ressort de l’instruction que le passage pour MFS de liaisons louées de type Transfix à des liaisons fondées sur la nouvelle offre d’interconnexion de liaisons louées nécessitera un délai lié à l’architecture différente qui a été retenue pour cette dernière prestation. Pour faire droit pendant ce délai à la demande justifiée de MFS d’interconnexion de liaisons louées, il y a lieu de définir une prestation transitoire d’interconnexion de liaisons louées qui puisse être d’application immédiate.
Une telle solution d’application immédiate ne peut être fondée que sur les liaisons louées Transfix actuellement souscrites par MFS.
Dès lors, l’Autorité considère comme recevable et justifiée la demande de MFS de disposer d’une solution transitoire sur la base des offres Transfix de France Télécom, comme étant le seul substitut possible pour que les droits reconnus à MFS par la présente décision trouvent une traduction équitable dès son prononcé.
Une telle solution ne remet en cause :
- ni l’homologation des tarifs des services Transfix destinés aux clients finals, à la suite d’un avis préalable de l’Autorité, dans la mesure où les bénéficiaires de ces prestations ne se situent pas dans une situation réglementaire équivalente et où les obligations de France Télécom vis à vis de ses clients finals et de ses clients opérateurs sont distinctes, notamment en terme de tarification ; ainsi contrairement à ce qu’avance France Télécom le fait de pratiquer des tarifs distincts en fonction de ces deux catégories de clients ne fait pas obstacle, en l’espèce, au respect de ses obligations de non−discrimination ;
- ni l’approbation du catalogue d’interconnexion de France Télécom par l’Autorité pour les années 1998 à 2001, dans la mesure où l’intégralité de la prestation d’interconnexion de liaisons louées, et notamment les liaisons louées partielles, ne figurait pas à ces catalogues ; l’Autorité n’a donc pas été en situation d’approuver une telle offre. Par ailleurs, l’approbation du catalogue d’interconnexion de France Télécom par l’Autorité ne fait pas obstacle à ce que d’autres prestations d’interconnexion figurent dans les conventions d’interconnexion, pour lesquelles l’approbation a priori de l’Autorité n’est pas prévue par les textes législatifs et réglementaires, ou soient intégrées dans le catalogue ultérieurement.
4.2 Sur la durée d’application de cette solution
Au cours de l’audience du 5 février 2002, France Télécom a proposé d’appliquer la tarification fondée sur la nouvelle prestation d’interconnexion adaptée aux relations entre opérateurs, dès lors que MFS aura indiqué à France Télécom les liaisons qu’elle souhaitait faire migrer vers la nouvelle prestation, et dès lors qu’une convention d’interconnexion portant sur la nouvelle prestation aura été conclue entre les parties. Cette tarification interviendra donc avant la migration effective des liaisons. L’Autorité considère que cette proposition est équitable.
Toutefois, l’Autorité estime que MFS ne saurait de façon instantanée indiquer la reconfiguration de son réseau. Une telle reconfiguration nécessite en effet des études approfondies portant sur plus de 2000 liaisons. L’Autorité estime en conséquence qu’il est nécessaire de prévoir une période laissant à MFS le temps d’effectuer les études nécessaires au cours de laquelle la facturation s’effectue selon l’architecture de l’offre actuellement en vigueur. L’Autorité estime qu’il est équitable de limiter cette période à la date à laquelle les parties auront conclu une convention et se seront accordées sur les liaisons que MFS souhaite faire migrer, et au plus tard :
- le 30 septembre 2002 pour les liaisons louées partielles de débits inférieurs ou égaux à 2 Mbit/s, date à laquelle MFS devra avoir indiqué à France Télécom son architecture cible ;
- le 31 juillet 2003 pour les liaisons louées partielles de débits 34 et 155 Mbit/s, ce qui correspond à un délai supplémentaire de sept mois à compter de la proposition par France Télécom d’une convention d’interconnexion pour des liaisons de ces débits.
L’Autorité estime donc qu’un tarif provisoire devra s’appliquer au parc existant et aux nouvelles liaisons pendant ces périodes. Au−delà de ces échéances, si MFS a recours aux prestations de liaisons louées Transfix de France Télécom, l’Autorité considère que France Télécom sera en droit de tarifer ces prestations sur la base des tarifs figurant à son catalogue de détail.
4.3. Sur le niveau des tarifs transitoires
4.3.1. Sur le principe d’une méthode retail moins
Pour 2002, MFS demande à bénéficier des prestations Transfix et Transfix HD qu’elle a souscrites à des tarifs orientés vers les coûts. L’orientation des tarifs vers les coûts doit être estimée selon MFS soit sur la base de CMILT, soit par la méthode dite de " retail moins ", c’est à dire les tarifs de détail de France Télécom amputés des coûts non pertinents pour l’interconnexion, notamment les coûts commerciaux. Pour la détermination des CMILT, MFS produit dans ses mémoires un modèle contesté par France Télécom.
L’Autorité constate que les échanges entre les parties, résultant notamment de leurs réponses au questionnaire des rapporteurs, n’ont pas permis l’élaboration d’une méthode incontestable, du fait des nombreuses divergences d’appréciations entre les parties, portant notamment sur le modèle de MFS lui−même dans ses caractéristiques géographiques, sur l’architecture du réseau de référence et sur la durée d’amortissement. C’est pourquoi l’Autorité considère qu’en l’espèce la méthode dite " retail moins " permet une meilleure évaluation des tarifs dont MFS est en droit de bénéficier.
4.3.2 Sur le montant de la réduction
En ce qui concerne la méthode de retail moins, MFS retient comme facteur minorant des tarifs de détail de Transfix deux éléments figurant au catalogue des prix de détail de France Télécom, l’un qu’elle estime à 15 % pour les remises au volume, l’autre qu’elle estime à 15 % pour les remises à la durée des contrats ; par ailleurs elle fait une estimation des coûts commerciaux de 20 %.
France Télécom conteste cette approche en indiquant en particulier que ce cumul de pourcentage n’a pas de réelle signification, les valeurs de ces facteurs de réductions n’étant pas indépendantes les unes des autres comme l’avance MFS, les remises à la durée et au volume incluant en partie des économies d’échelles de coûts commerciaux. De plus, elle indique que l’estimation réalisée par MFS de coûts commerciaux correspondant à 20% du prix de détail est élevée, mais elle ne fournit pas, dans ses mémoires ni dans sa réponse au questionnaire des rapporteurs, d’estimation de ses coûts commerciaux ni d’appréciation précise sur la répartition des économies d’échelles auxquelles correspondent les remises dont bénéficient les clients des offres Transfix et Transfix HD.
Compte tenu du fait que les tarifs des liaisons louées de détail fournies par France Télécom doivent respecter le principe d’orientation vers les coûts pertinents pour les clients finals, conformément aux dispositions de l’article 10 de la directive 92/44 modifiée pour l’application de laquelle France Télécom a été désignée par l’article 15 de son cahier des charges approuvé par le décret n° 96−1225 du 27 décembre 1996, l’Autorité considère que les tarifs de liaisons louées de France Télécom sont au moins égaux à ses coûts même lorsqu’ils sont assortis des remises maximales prévues à son catalogue.
L’Autorité a examiné les réductions consenties par France Télécom par rapport aux tarifs de base dans le cadre de ses offres de détail qui portent sur :
- la durée des contrats, avec un maximum de 15% pour des contrats d’une durée de cinq ans ;
- le volume du chiffre d’affaires réalisé, avec un maximum de 15% ;
- le nombre de liaisons par site, avec un maximum de 10 % pour les redevances mensuelles et de 50% pour les frais d’accès au service.
Ainsi, au total, les plus grands clients de France Télécom peuvent bénéficier de 35 % de remise par rapport aux tarifs de base du catalogue de détail pour les offres Transfix et Transfix HD, les remises au volume étant consenties en " pied de facture ", sur tous les contrats d’un même titulaire.
France Télécom, dans sa réponse au questionnaire des rapporteurs, justifie ces réductions par des économies sur les coûts commerciaux et techniques et plus précisément, dans chacun des trois cas précités :
- les remises à la durée correspondent à des charges de production moins importantes, telles que des travaux de construction plus espacés dans le temps, et des frais de vente et d’administration de contrats plus réduits ;
- les remises au volume du chiffre d’affaires correspondent à des économies portant sur les frais fixes de production et d’exploitation, ainsi que sur des coûts commerciaux ;
- les remises sites correspondent a des effets de mutualisation des coûts de raccordements.
Dans ces conditions, l’Autorité estime que les coûts non encourus par France Télécom pour fournir des services de liaisons louées à un client opérateur concernent d’une part les coûts commerciaux et, d’autre part, des coûts techniques. Toutefois, l’Autorité reconnaît qu’il ne serait pas justifié au regard des coûts encourus par France Télécom pour fournir à MFS des prestations de liaisons louées de type Transfix, de retenir l’ensemble cumulé de ces remises, certaines correspondant réellement à des volumes de commande plus importants que ceux de MFS.
En ce qui concerne les coûts commerciaux, ils sont exclus des coûts pertinents pour l’interconnexion conformément aux dispositions de l’article D. 99−18 du code des postes et télécommunications. L’Autorité estime raisonnable d’estimer le niveau de ces coûts à 20 % du tarif de base des offres Transfix de France Télécom, ce qui correspond en particulier à l’estimation de MFS et contre laquelle France Télécom n’a pas apporté d’éléments permettant de la contester de façon précise. Ainsi, l’Autorité considère que sur les 35 % de remises maximales consenties par France Télécom à ses plus grands clients, 20% correspondent à des coûts commerciaux.
Il en ressort que les économies de coûts afférentes aux conditions techniques peuvent représenter 15% des tarifs de base. L’Autorité considère que les caractéristiques d’un opérateur permettent à France Télécom de réaliser des économies sur ces coûts techniques du fait notamment d’une plus grande mutualisation des débits aux extrémités des liaisons en en particulier aux PoP de l’opérateur ainsi que des charges de production plus faibles, compte tenu de la globalité et de la permanence des relations que cet opérateur entretient avec France Télécom du faits de leurs relations d’interconnexion. L’Autorité estime raisonnable d’estimer cette économie de coûts à […] du tarif de base des offres de détail de France Télécom, soit […] du montant maximal estimé par l’Autorité des remises sur les coûts techniques.
Ainsi, l’Autorité fixe le tarif des liaisons louées par MFS à France Télécom, dans le cadre de la solution transitoire, au plus aux tarifs de base inscrits à son catalogue en vigueur au moment de la facturation amputés de 27%, pour ce qui concerne à la fois les redevance mensuelles et les frais d’accès au service, à l’exclusion de toute autre réduction prévue au catalogue de détail. Réciproquement, France Télécom ne pourra pas conditionner cette remise à des engagements de durée ou de volume de la part de MFS.
Toutefois, si les réductions obtenues par MFS auprès de France Télécom du fait des contrats conclus dans le cadre antérieur à la présente décision de règlement de différend étaient supérieures à celles déterminées ci−dessus, France Télécom devrait appliquer le meilleur des deux tarifs.
4.4 Sur la demande de maintien des engagements de qualité de service
4.4.1 Sur la compétence de l’Autorité
MFS demande que les conditions de qualité de service des contrats de type Transfix soient maintenues au niveau déterminé par les contrats conclus et non pas selon les dispositions que France Télécom a adoptées, à la suite d’une modification unilatérale des contrats.
France Télécom considère que l’Autorité n’est pas compétente pour se prononcer sur les conditions générales de vente des offres de détail, qui relèvent d’un régime juridique différent de celui de l’accès et de l’interconnexion. France Télécom rappelle que la modification des conditions de qualité de service figurant dans des contrats de liaisons louées a été réalisée en conformité avec l’article 12.2. de ses conditions générales de vente, article qui est, d’après elle, conforme aux dispositions de l’article D. 370 du code des postes et télécommunications.
Il résulte de ce qui précède (cf. par. 3.4) que l’Autorité est compétente pour régler tout différend concernant la qualité de service des accords d’interconnexion conclus entre France Télécom et MFS. Or, la prestation transitoire de liaisons louées définie dans la présente décision au titre de la mise en œuvre immédiate des droits de MFS en matière d’interconnexion, relève bien du régime de l’interconnexion. L’Autorité est donc compétente pour se prononcer sur la qualité de service de cette prestation transitoire.
4.4.2. Sur le niveau de qualité de service
L’Autorité considère que France Télécom a la capacité d’appliquer de façon immédiate à MFS la qualité de service définie pour l’offre d’interconnexion de liaisons louées adaptée aux opérateurs, dans la mesure où les conditions de qualité de service sont indépendantes de l’architecture de l’offre.
En conséquence, l’Autorité considère que France Télécom devra appliquer à MFS, à compter de la présente décision, des conditions de qualité de service telles que définies au paragraphe 3.4.
4.5 Sur la demande d’un tarif rétroactif pour 2001
MFS demande à l’Autorité l’application d’un tarif de type " retail moins " de façon rétroactive pour la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2001.
France Télécom considère que cette demande est irrecevable en ce que la rétroactivité serait contraire à un principe général du droit. Selon France Télécom, la licéité de la rétroactivité n’est admise que si elle a pour but de reconnaître, à compter du jour de la demande, un droit préexistant et d’en tirer les conséquences (jugement déclaratif), et non dans le cas où le jugement a pour but de reconnaître des droits nouveaux (jugement constitutif). France Télécom considère que, par sa saisine, MFS demande à l’Autorité de lui reconnaître des droits nouveaux : l’Autorité ne pourrait donc faire droit à cette demande sans contrevenir à un principe général du droit.
L’Autorité estime que si la présente décision fait obligation à France Télécom de faire droit, à compter de son adoption, à une demande d’interconnexion portant sur les liaisons louées à MFS, cette dernière n’est pas recevable à demander à l’Autorité de prononcer des obligations à l’encontre de France Télécom portant effet à une date antérieure à l’intervention de la présente décision, dans la mesure où, au cas présent, les services qui faisaient l’objet de la prestation contractuelle ne constituaient pas une prestation d’interconnexion de même nature que celle qui doit être mise en œuvre au titre de l’exécution de la présente décision.
Décide :
Article 1 : France Télécom devra proposer à MFS une offre d’interconnexion en application du chapitre VIII du catalogue d’interconnexion 2002, en vue de la signature d’une convention au plus tard le 30 septembre 2002. Cette convention devra également intégrer une offre permettant à MFS de recueillir les liaisons louées partielles en dehors de la zone de couverture où se situe le client, telle que définie dans le catalogue d’interconnexion 2002.
Article 2 : France Télécom devra proposer à MFS une offre d’interconnexion de liaisons louées adaptée aux relations entre opérateurs pour les liaisons de débits de 34 et 155 Mbit/s, en vue de la signature d’une convention au plus tard le 31 décembre 2002. Lorsque MFS dispose d’une infrastructure en propre utilisable pour la liaison louée considérée ou lorsque France Télécom lui propose le partage des fourreaux desservant un client dans un délai et à des tarifs raisonnables, France Télécom pourra refuser de satisfaire une demande d’interconnexion de MFS. France Télécom pourra également refuser de satisfaire une demande d’interconnexion de MFS si des contraintes techniques objectives l’y obligent. France Télécom devra prévoir ces cas de difficultés particulières dans sa convention, qui seront conformes à celles identifiées dans le cadre des contrats Transfix HD.
Article 3 : France Télécom ne facturera à MFS ni frais de migration ni frais d’accès au service lorsque la migration d’une liaison de type Transfix vers une liaison louée issue de la nouvelle offre d’interconnexion a lieu avec une coupure de service. Les conditions de cette coupure de service seront négociées entre les parties dans le cadre de leur convention d’interconnexion. France Télécom pourra cependant facturer les coûts relatifs à la construction d’une nouvelle liaison dans le cas où MFS demande une migration sans coupure de service. Les frais dans ce cas ne pourront être supérieurs aux frais d’accès au service.
Article 4 : France Télécom proposera dans sa convention d’interconnexion des conditions de qualité de service au moins égales à celles des contrats Transfix en cours. France Télécom devra y inclure, lorsque MFS le demande, l’ensemble des options de qualité de service disponible dans le cadre des contrats Transfix en cours, à des prix inférieurs ou égaux à ceux des contrats Transfix. Les pénalités associées seront égales à celles proposées dans les contrats Transfix et un éventuel plafond de pénalités ne pourra pas être inférieur à celui prévu par le catalogue d’interconnexion. Un système de suivi de la qualité de service sera négocié entre les parties et ajouté à leur convention d’interconnexion.
Article 5 : A compter de la date de la présente décision et jusqu’à ce que les parties aient conclu une convention d’interconnexion et se soient accordées sur les liaisons de type Transfix que MFS souhaite faire migrer vers la nouvelle offre d’interconnexion définie dans la présente décision, c’est à dire jusqu’au 30 septembre 2002 au plus tard pour les liaisons jusqu’à 2 Mbit/s et jusqu’au 31 juillet 2003 pour les liaisons à 34 et 155 Mbit/s, France Télécom devra appliquer pour les liaisons louées de MFS un tarif égal, au plus, aux tarifs de base inscrits à son catalogue en vigueur au moment de la facturation amputés de 27 %, pour ce qui concerne à la fois les redevances mensuelles et les frais d’accès au service. Cette remise est applicable au plus tard jusqu’au 30 septembre 2002 pour les liaisons de débits inférieurs ou égaux à 2 Mbit/s et jusqu’au 31 juillet 2003 pour les liaisons de 34 Mbit/s et 155 Mbit/s. Si les réductions obtenues par MFS auprès de France Télécom en vertu des contrats conclus dans le cadre antérieur à la présente décision de règlement de différend étaient supérieures à celles déterminées ci−dessus, France Télécom devra appliquer le meilleur des deux tarifs.
Article 6 : France Télécom devra appliquer, dès lors que les parties auront conclu une convention d’interconnexion et se seront accordées sur les liaisons de type Transfix que MFS souhaite faire migrer vers la nouvelle offre d’interconnexion définie dans la présente décision, une tarification fondée sur l’application anticipée du prix des liaisons louées définies dans cette offre, même si la migration effective n’a pas eu lieu. La sortie des contrats Transfix en cours ne devra pas donner lieu à des pénalités, si la durée restante du contrat est reportée sur la nouvelle convention d’interconnexion pour laquelle la durée minimale de souscription est d’un an.
Article 7 : France Télécom devra appliquer aux contrats Transfix de MFS, pendant les périodes transitoires définies à l’article 5 ci−dessus, les conditions de qualité de service et de pénalités identiques à celles de la nouvelle prestation d’interconnexion.
Article 8 : Le surplus des conclusions présentées par les sociétés MFS et France Télécom est rejeté.
Article 9 : Le chef du service juridique ou son adjoint est chargé de notifier aux sociétés MFS et France Télécom la présente décision, qui sera rendue publique sous réserve des secrets protégés par la loi.