Cass. crim., 8 octobre 1985, n° 84-95.606
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Berthiau
Rapporteur :
M. Zambeaux
Avocat général :
M. Rabut
Avocat :
SCP Waquet
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 53 ET SUIVANTS, 174, 593 ET 802 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QUE SELON L'ARTICLE 53 DU CODE DE PROCEDURE PENALE EST QUALIFIE CRIME OU DELIT FLAGRANT LE CRIME OU LE DELIT QUI SE COMMET ACTUELLEMENT OU VIENT DE SE COMMETTRE ;
ATTENDU QUE TOUT JUGEMENT OU ARRET DOIT ETRE MOTIVE ;
QUE LE DEFAUT OU L'INSUFFISANCE DES MOTIFS EQUIVAUT A LEUR ABSENCE ;
ATTENDU QUE X... JOSIANE EPOUSE Y..., Y... JOCELYN, Z... JEAN-MARIE ET A... MANUEL QUI FAISAIENT L'OBJET D'UNE INFORMATION OUVERTE POUR TENTATIVE D'ESCROQUERIE, FALSIFICATION DE DOCUMENT ADMINISTRATIF ET USAGE, DETENTION ET TRANSPORT D'ARMES DES 1RE ET 4E CATEGORIE ET ASSOCIATION DE MALFAITEURS ONT, APRES DISJONCTION DES POURSUITES EN CE QUI CONCERNE LA TENTATIVE D'ESCROQUERIE, LA FALSIFICATION DE DOCUMENT ADMINISTRATIF ET L'USAGE DE CELUI-CI, AUX FINS DE JONCTION A UNE AUTRE INFORMATION, ETE RENVOYES DEVANT LA JURIDICTION REPRESSIVE SOUS LA PREVENTION DE DETENTION ET TRANSPORT PAR AU MOINS DEUX PERSONNES D'ARMES DES 1RE ET 4E CATEGORIE ET ASSOCIATION DE MALFAITEURS ;
QUE LORS DE LEUR COMPARUTION DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL, AVANT TOUTE DEFENSE AU FOND, LES PREVENUS ONT SOUTENU LA NULLITE DU PROCES-VERBAL DE PERQUISITION DU 26 OCTOBRE 1983 RELATANT LES OPERATIONS AU COURS DESQUELLES AVAIENT ETE DECOUVERTS ET SAISIS, DANS L'AUTOMOBILE A BORD DE LAQUELLE ILS CIRCULAIENT, LES ARMES, DOCUMENTS ET OBJETS SUR LESQUELS SE FONDAIT LA POURSUITE ;
QUE LES PREMIERS JUGES, APRES AVOIR REJETE CETTE EXCEPTION, ONT DECLARE LES QUATRE PREVENUS COUPABLES DES DELITS REPROCHES ET LES ONT CONDAMNES A DES PEINES D'EMPRISONNEMENT EN ORDONNANT LEUR MAINTIEN EN DETENTION ;
QUE SUR APPEL, TANT DES PREVENUS QUE DU MINISTERE PUBLIC, LA COUR D'APPEL, PAR L'ARRET ATTAQUE, A FAIT DROIT A L'EXCEPTION SOULEVEE, A ANNULE LE PROCES-VERBAL CRITIQUE AINSI QUE LA PROCEDURE ULTERIEURE ET A ORDONNE LA MISE EN LIBERTE DES PREVENUS DETENUS ;
ATTENDU QUE, DANS LE JUGEMENT INFIRME, LES PREMIERS JUGES ONT EXPOSE QUE, LE 26 OCTOBRE 1983, LES GENDARMES AVAIENT ETE AVERTIS QUE LA DAME B..., HOTELIERE, VENAIT D'ETRE VICTIME DE QUATRE PERSONNES CIRCULANT DANS UNE AUTOMOBILE DONT LE NUMERO D'IMMATRICULATION AVAIT ETE RELEVE ET QUI APRES AVOIR REGLE LE PRIX DE LEURS CONSOMMATIONS AVEC UNE CARTE DE CREDIT, ETAIENT PARTIES PRECIPITAMMENT QUAND LA COMMERCANTE AVAIT ENTREPRIS DES VERIFICATIONS ;
QUE DES PATROUILLES AYANT ETE ORGANISEES, CELLES-CI AVAIENT PERMIS D'INTERCEPTER LE VEHICULE SIGNALE ET DE L'AMENER AVEC SES OCCUPANTS A LA GENDARMERIE OU, AGISSANT EN FLAGRANT DELIT, LES ENQUETEURS AVAIENT FOUILLE LE VEHICULE, CE QUI AVAIT ENTRAINE LA DECOUVERTE DES ARMES, DOCUMENTS ET OBJETS QUI FURENT SAISIS ;
ATTENDU QUE POUR INFIRMER LE JUGEMENT ENTREPRIS ET ADMETTRE L'EXCEPTION DE NULLITE DE LA PERQUISITION PRATIQUEE DANS L'AUTOMOBILE LES JUGES DU SECOND DEGRE, SANS FAIRE ETAT DES TERMES DU PROCES-VERBAL D'AUDITION DE LA DAME B..., POURTANT ANALYSE PAR LES PREMIERS JUGES, ET RELATANT LES CONDITIONS DANS LESQUELLES LES GENDARMES AVAIENT ETE SAISIS DE LA PLAINTE, ENONCENT QUE LE PROCES-VERBAL DE PERQUISITION DU 26 OCTOBRE 1983 NE FAIT QUE SE REFERER A L'ENQUETE OUVERTE POUR FAUX ET USAGE, ESCROQUERIE, DETENTION D'ARMES DE LA 4E CATEGORIE ALORS QU'AUCUN PROCES-VERBAL DE FLAGRANT DELIT N'AVAIT ETE DRESSE ;
QU'ILS RELEVENT QUE L'ON NE SAURAIT PRENDRE EN CONSIDERATION LES CONSTATATIONS NON CONCRETISEES DANS UN PROCES-VERBAL REGULIER DE L'OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE, SUIVANT LESQUELLES CELUI-CI AURAIT REMARQUE LA PRESENCE D'UNE ARME DANS LE VEHICULE AU MOMENT DE SON INTERCEPTION, DES LORS QUE CES CONSTATATIONS N'ETAIENT RAPPORTEES QUE DE FACON IMPRECISE DANS UN PROCES-VERBAL DE SYNTHESE, ETABLI DEUX JOURS APRES LES FAITS PAR UN AUTRE OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE, EN MECONNAISSANCE DE L'ARTICLE 66 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET DE L'ARTICLE 138 DU DECRET DU 20 MAI 1903 MODIFIE PAR CELUI DU 8 DECEMBRE 1970 ;
MAIS ATTENDU QUE POUR QUE LES OFFICIERS DE POLICE JUDICIAIRE PUISSENT AGIR EN FLAGRANT DELIT IL SUFFIT QU'ILS AIENT CONNAISSANCE D'INDICES APPARENTS D'UN COMPORTEMENT DELICTUEUX ;
QUE L'AVIS DONNE PAR LA VICTIME D'UNE INFRACTION QUI VIENT D'ETRE COMMISE PEUT, AVANT L'ENREGISTREMENT D'UNE PLAINTE REGULIERE, CARACTERISER CES INDICES ;
QUE, PAR AILLEURS, AUCUNE PRESCRIPTION DE LA LOI N'EXIGE QUE LES OFFICIERS DE POLICE JUDICIAIRE CONSTATENT PAR UN PROCES-VERBAL SPECIAL QU'IL Y A FLAGRANT DELIT, CETTE NOTION SE DEDUISANT DES CIRCONSTANCES ;
QU'AINSI, EN NE RECONNAISSANT PAS LE CARACTERE DE FLAGRANCE DES FAITS DENONCES PAR LA DAME B... AUX GENDARMES, LESQUELS, DES LORS QU'ILS AGISSAIENT EN FLAGRANT DELIT ETAIENT FONDES A SAISIR, A L'OCCASION D'UNE PERQUISITION EFFECTUEE DANS LE CADRE DE LEUR ENQUETE, DES ARMES, DOCUMENTS ET OBJETS REVELANT D'AUTRES INFRACTIONS, LA COUR D'APPEL N'A PAS JUSTIFIE SA DECISION ;
QU'EN OUTRE LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 66 DU CODE DE PROCEDURE PENALE RELATIVES A LA REDACTION IMMEDIATE DES PROCES-VERBAUX N'EST PAS PRESCRITE A PEINE DE NULLITE, UNE TELLE SANCTION NE POUVANT ETRE ENCOURUE QUE SI LE RETARD APPORTE A CETTE REDACTION AVAIT ETE DE NATURE A COMPROMETTRE LES DROITS DE LA DEFENSE OU A PORTER ATTEINTE AU RESPECT DU SECRET PROFESSIONNEL TELS QUE LES ARTICLES 54 ET SUIVANTS DU MEME CODE ENTENDENT LES GARANTIR ;
QU'EN L'ESPECE LE PROCES-VERBAL DE PERQUISITION ET SAISIE, SEUL SUSCEPTIBLE DE PORTER ATTEINTE AUX DROITS DE LA DEFENSE, QUI MENTIONNE QU'IL A ETE ETABLI SUIVANT LA PROCEDURE DE FLAGRANT DELIT A ETE DRESSE SUR-LE-CHAMP ;
D'OU IL SUIT QUE LA CASSATION EST ENCOURUE ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE EN TOUTES SES DISPOSITIONS, SAUF CELLES ORDONNANT LA MISE EN LIBERTE DES PREVENUS, L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX DU 10 OCTOBRE 1984 ET, POUR QU'IL SOIT STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE TOULOUSE, A CE DESIGNEE PAR DELIBERATION SPECIALE PRISE EN CHAMBRE DU CONSEIL.