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Décisions

CJUE, 4e ch., 16 mars 2023, n° C-439/20 P

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE

Arrêt

Annulation

PARTIES

Demandeur :

Commission européenne, Jiangsu Seraphim Solar System Co. Ltd, Conseil de l’Union européenne, Conseil de l’Union européenne, Jiangsu Seraphim Solar System Co. Ltd

Défendeur :

Commission européenne

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Lycourgos

Juges :

Mme Rossi, M. Bonichot, M. Rodin, Mme Spineanu Matei

Avocat général :

M. Pitruzzella

Avocats :

Me Luengo, Me Maxian Rusche, Me Heeren, Me Melin, Me Vigneron

CJUE n° C-439/20 P

15 mars 2023

LA COUR (quatrième chambre),

1 Par leurs pourvois respectifs, la Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne (ci-après, ensemble, les « institutions ») demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 8 juillet 2020, Jiangsu Seraphim Solar System/Commission (T 110/17, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2020:315), par lequel celui-ci a annulé l’article 2 du règlement d’exécution (UE) 2016/2146 de la Commission, du 7 décembre 2016, retirant l’acceptation de l’engagement de deux producteurs-exportateurs au titre de la décision d’exécution 2013/707/UE confirmant l’acceptation d’un engagement offert dans le cadre des procédures antidumping et antisubventions concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine pour la période d’application des mesures définitives (JO 2016, L 333, p. 4, ci-après le « règlement litigieux »), en tant qu’il concerne Jiangsu Seraphim Solar System Co. Ltd (ci-après « Jiangsu Seraphim »).

Le cadre juridique

Le règlement antidumping de base

2 À la date de l’institution des droits antidumping en cause, les dispositions régissant l’adoption des mesures antidumping par l’Union européenne figuraient dans le règlement (CE) no 1225/2009 du Conseil, du 30 novembre 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 2009, L 343, p. 51, et rectificatifs JO 2010, L 7, p. 22, et JO 2016, L 44, p. 20).

3 Conformément à son article 23, ce règlement a abrogé le règlement (CE) no 384/96 du Conseil, du 22 décembre 1995, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 1996, L 56, p. 1), lequel avait été modifié, notamment, par le règlement (CE) no 461/2004 du Conseil, du 8 mars 2004 (JO 2004, L 77, p. 12).

4 Les considérants 18 et 19 du règlement no 461/2004 énonçaient :

« (18) L’article 8, paragraphe 9, du règlement [no 384/96] dispose, entre autres, qu’en cas de retrait d’engagements par une partie, un droit définitif doit être institué conformément à l’article 9 sur la base des faits établis dans le contexte de l’enquête ayant abouti aux engagements. Cette disposition entraîne une double procédure qui prend du temps et associe une décision de la Commission retirant l’acceptation de l’engagement à un règlement du Conseil réinstituant le droit. Cette disposition ne laissant aucun pouvoir d’appréciation au Conseil en ce qui concerne l’institution du droit ou son niveau, en cas de violation ou de retrait d’un engagement, il est jugé approprié de modifier les dispositions de l’article 8, paragraphes 1, 5 et 9, afin de clarifier les compétences de la Commission et de permettre le retrait d’un engagement et l’application du droit au moyen d’un seul et unique acte juridique. Il importe également de veiller à ce que la procédure de retrait soit menée à terme dans un délai de normalement six mois, ne pouvant, en aucun cas, excéder neuf mois, afin d’assurer l’application correcte des mesures en vigueur.

(19) Le considérant 18 s’applique mutatis mutandis aux engagements au titre de l’article 13 du règlement [(CE) no 2026/97 du Conseil, du 6 octobre 1997, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de la communauté européenne (JO 1997, L 288, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 1973/2002 du Conseil, du 5 novembre 2002 (JO 2002, L 305, p.4)]. »

5 À la date d’adoption du règlement litigieux, la prise de mesures antidumping par l’Union était régie par le règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de l’Union européenne (JO 2016, L 176, p. 21, ci-après le « règlement antidumping de base »). Conformément à son article 24, premier alinéa, le règlement antidumping de base a abrogé le règlement no 1225/2009. En vertu de son article 25, le règlement antidumping de base est entré en vigueur le 20 juillet 2016.

6 L’article 8 du règlement antidumping de base, intitulé « Engagements », disposait :

« 1. À condition qu’un examen préliminaire positif ait établi l’existence d’un dumping et d’un préjudice, la Commission peut, conformément à la procédure consultative visée à l’article 15, paragraphe 2, accepter des offres par lesquelles les exportateurs s’engagent volontairement et de manière satisfaisante à réviser leurs prix ou à ne plus exporter à des prix de dumping, si elle est convaincue que l’effet préjudiciable du dumping est éliminé.

Dans ce cas, et aussi longtemps que ces engagements restent en vigueur, les droits provisoires institués par la Commission conformément à l’article 7, paragraphe 1, ou les droits définitifs institués conformément à l’article 9, paragraphe 4, selon le cas, ne s’appliquent pas aux importations du produit concerné fabriqué par les sociétés visées dans la décision de la Commission portant acceptation des engagements et ses modifications ultérieures.

Les augmentations de prix opérées en vertu de ces engagements ne sont pas plus élevées qu’il n’est nécessaire pour éliminer la marge de dumping et devraient être moindres que la marge de dumping si elles suffisent à éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union.

[...]

9. En cas de violation ou de retrait d’un engagement par une partie à celui-ci ou de retrait de l’acceptation de l’engagement par la Commission, l’acceptation de l’engagement est retirée par une décision ou un règlement de la Commission, selon le cas, et le droit provisoire institué par la Commission conformément à l’article 7 ou le droit définitif institué conformément à l’article 9, paragraphe 4, s’applique automatiquement, à condition que l’exportateur concerné, sauf dans le cas où il a lui-même retiré son engagement, ait eu la possibilité de présenter ses commentaires. La Commission fournit des informations aux États membres lorsqu’elle décide de retirer un engagement.

Toute partie intéressée ou tout État membre peut fournir des renseignements contenant des éléments attestant à première vue l’existence d’une violation d’un engagement. L’évaluation ultérieure visant à déterminer s’il y a eu ou non violation de l’engagement est normalement menée à terme dans un délai de six mois et, dans aucun cas, au-delà d’un délai de neuf mois à compter du dépôt d’une demande dûment étayée.

La Commission peut demander l’aide des autorités compétentes des États membres pour la surveillance des engagements.

10. Un droit provisoire peut être institué conformément à l’article 7 sur la base des meilleurs renseignements disponibles, lorsqu’il y a des raisons de croire qu’un engagement est violé ou, en cas de violation ou de retrait d’un engagement, lorsque l’enquête ayant abouti à cet engagement n’a pas été menée à terme. »

7 L’article 10 de ce règlement, intitulé « Rétroactivité », disposait, à son paragraphe 5 :

« En cas de violation ou de retrait d’engagements, des droits définitifs peuvent être perçus sur les marchandises mises en libre pratique quatre vingt-dix jours au plus avant la date d’application des mesures provisoires, à condition que les importations aient été enregistrées conformément à l’article 14, paragraphe 5, et que l’évaluation rétroactive ne s’applique pas aux importations antérieures à la violation ou au retrait de l’engagement. »

8 L’article 14 dudit règlement, intitulé « Dispositions générales », prévoyait, à son paragraphe 1 :

« Les droits antidumping, provisoires ou définitifs, sont imposés par voie de règlement et perçus par les États membres selon la forme, le taux et les autres éléments fixés par le règlement qui les impose. Ces droits sont aussi perçus indépendamment des droits de douane, taxes et autres charges normalement exigibles à l’importation.

[...] »

Le règlement antisubventions de base

9 À la date de l’institution des droits compensateurs en cause, les dispositions régissant l’adoption de mesures antisubventions par l’Union figuraient dans le règlement (CE) no 597/2009 du Conseil, du 11 juin 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 2009, L 188, p. 93).

10 Conformément à son article 34, ce règlement a abrogé le règlement no 2026/97, lequel avait été modifié, notamment, par le règlement no 461/2004.

11 À la date d’adoption du règlement litigieux, la prise de mesures antisubventions par l’Union était régie par le règlement (UE) 2016/1037 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de l’Union européenne (JO 2016, L 176, p. 55, ci-après le « règlement antisubventions de base »). Conformément à son article 35, le règlement antisubventions de base a abrogé le règlement no 597/2009. En vertu de son article 36, le règlement antisubventions de base est entré en vigueur le 20 juillet 2016.

12 Le règlement antisubventions de base contient des dispositions relatives aux engagements et à la rétroactivité rédigées en des termes, en substance, identiques aux dispositions correspondantes du règlement antidumping de base.

13 Ainsi, notamment, l’article 13, paragraphe 1, deuxième alinéa, l’article 13, paragraphe 9, l’article 13, paragraphe 10, l’article 16, paragraphe 5, et l’article 24, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base correspondent, en substance, respectivement, à l’article 8, paragraphe 1, deuxième alinéa, à l’article 8, paragraphe 9, à l’article 8, paragraphe 10, à l’article 10, paragraphe 5, et à l’article 14, paragraphe 1, du règlement antidumping de base.

14 En outre, dans la mesure où les dispositions pertinentes des règlements antidumping et antisubventions de base (ci-après, ensemble, les « règlements de base ») sont, en substance, identiques à celles relevant, respectivement, du règlement no 1225/2009 et du règlement n° 597/2009, il sera fait référence, aux fins de l’examen des pourvois, à l’instar du Tribunal dans l’arrêt attaqué, aux règlements de base, sauf si les règlements nos 1225/2009 et 597/2009 divergent de ces derniers ou si le contexte l’exige.

Le règlement d’exécution (UE) no 1238/2013

15 L’article 3, paragraphe 2, du règlement d’exécution (UE) no 1238/2013 du Conseil, du 2 décembre 2013, instituant un droit antidumping définitif et collectant définitivement le droit antidumping provisoire institué sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO 2013, L 325, p. 1), prévoit :

« Une dette douanière naît au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique :

a) dès lors qu’il est établi, en ce qui concerne les importations décrites au paragraphe 1, qu’une ou plusieurs des conditions énoncées à ce paragraphe n’ont pas été remplies ; ou

b) lorsque la Commission retire son acceptation de l’engagement en vertu de l’article 8, paragraphe 9, du règlement [no 1225/2009], en adoptant un règlement ou une décision qui se réfère à des transactions spécifiques et déclare non conformes les factures correspondantes. »

Le règlement d’exécution (UE) no 1239/2013

16 L’article 2, paragraphe 2, du règlement d’exécution (UE) no 1239/2013 du Conseil, du 2 décembre 2013, instituant un droit compensateur définitif sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO 2013, L 325, p. 66), prévoit :

« La dette douanière naît au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique :

a) dès lors qu’il est établi, en ce qui concerne les importations décrites au paragraphe 1, qu’une ou plusieurs des conditions énoncées à ce paragraphe n’ont pas été remplies ; ou

b) si la Commission retire son acceptation de l’engagement en vertu de l’article 13, paragraphe 9, du règlement [no 597/2009], en adoptant un règlement ou une décision qui se réfère à des transactions spécifiques et déclare non conformes les factures correspondantes. »

Les antécédents du litige

17 Les antécédents du litige ont été exposés aux points 1 à 12 de l’arrêt attaqué dans les termes suivants :

« 1 [Jiangsu Seraphim] fabrique des modules photovoltaïques en silicium cristallin en Chine et les exporte vers l’Union européenne.

2 Le 4 juin 2013, la Commission [...] a adopté le règlement (UE) no 513/2013, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine et modifiant le règlement (UE) no 182/2013 soumettant à enregistrement ces importations originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO 2013, L 152, p. 5).

3 Par décision 2013/423/UE, du 2 août 2013, portant acceptation d’un engagement offert dans le cadre de la procédure antidumping concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules et wafers) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO 2013, L 209, p. 26), la Commission a accepté un engagement de prix (ci-après l’“engagement”) offert par la chambre de commerce chinoise pour l’importation et l’exportation de machines et de produits électroniques (ci-après la “CCCME”) au nom de [Jiangsu Seraphim] et de plusieurs autres producteurs exportateurs.

4 Le 2 décembre 2013, le Conseil [...] a adopté le règlement d’exécution [no 1238/2013].

5 Le 2 décembre 2013, le Conseil a également adopté le règlement d’exécution [no 1239/2013].

6 L’article 3, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1238/2013 et l’article 2, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1239/2013 prévoient, dans les mêmes termes, que la Commission peut identifier des transactions pour lesquelles une “dette douanière naît au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique” dans les situations où l’acceptation de l’engagement de prix est retirée.

7 Par sa décision d’exécution 2013/707/UE, du 4 décembre 2013, confirmant l’acceptation d’un engagement offert dans le cadre des procédures antidumping et antisubventions concernant les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine pour la période d’application des mesures définitives (JO 2013, L 325, p. 214), la Commission a confirmé l’acceptation de l’engagement, tel que modifié à la demande de la CCCME, pour le compte des producteurs-exportateurs chinois. Le 10 septembre 2014, la Commission a adopté la décision d’exécution 2014/657/UE, acceptant une proposition soumise par un groupe de producteurs exportateurs en concertation avec la CCCME en vue de l’apport d’éclaircissements concernant la mise en œuvre de l’engagement visé dans la décision d’exécution 2013/707 (JO 2014, L 270, p. 6).

8 Le droit ad valorem total applicable aux importations de cellules et de modules photovoltaïques originaires de Chine pour les sociétés non retenues dans l’échantillon qui ont coopéré et qui sont inscrites sur la liste figurant à l’annexe I du règlement d’exécution no 1238/2013 et à l’annexe 1 du règlement d’exécution no 1239/2013 est de 47,7 %. Il correspond à un droit antidumping de 41,3 % (article 1er, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1238/2013) auquel s’ajoute un droit compensateur de 6,4 % (article 1er, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1239/2013). Les importations couvertes par l’engagement et la décision d’exécution 2013/707 sont exonérées de ces droits en vertu de l’article 3, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1239/2013.

9 Par lettre du 11 octobre 2016, la Commission a informé [Jiangsu Seraphim] qu’elle envisageait de lui retirer l’acceptation de l’engagement en précisant les principaux éléments et considérations sur lesquels elle se fondait. À cette lettre étaient annexés un rapport d’information général et un rapport spécifique à [Jiangsu Seraphim].

10 Dans le rapport spécifique à [Jiangsu Seraphim], la Commission indiquait qu’elle entendait retirer l’acceptation de l’engagement et informait [celle-ci], sous le titre 4, intitulé “Invalidation des factures conformes”, qu’elle entendait, d’une part, invalider les factures conformes qui accompagnaient les ventes faites à l’importateur et, d’autre part, enjoindre aux autorités douanières de recouvrer la dette douanière dans le cas où [Jiangsu Seraphim] n’aurait pas présenté de factures conformes valides au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique des marchandises.

11 Par courrier du 28 octobre 2016, [Jiangsu Seraphim] a soumis des observations sur le rapport d’information général et sur le rapport qui lui est spécifique de la Commission. Elle expliquait, en substance, que la Commission n’avait pas le pouvoir d’invalider les factures, ni d’enjoindre aux autorités douanières de percevoir des droits comme si aucune facture conforme n’avait été présentée. Selon [Jiangsu Seraphim], cela revenait en réalité à donner un effet rétroactif au retrait de l’engagement.

[...] »

Le règlement litigieux

18 La Commission a confirmé sa position dans le règlement litigieux qu’elle a adopté sur le fondement de l’article 8 du règlement antidumping de base et de l’article 13 du règlement antisubventions de base. À l’article 1er du règlement litigieux, la Commission a retiré l’acceptation de l’engagement de prix qu’elle avait consentie, notamment, pour Jiangsu Seraphim (ci-après l’« engagement concerné »).

19 L’article 2 du règlement litigieux prévoit :

« 1. Les factures conformes énumérées à l’annexe I du présent règlement sont invalidées.

2. Les droits antidumping et les droits compensateurs dus au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique, en vertu de l’article 3, paragraphe 2, point b), du règlement d’exécution (UE) no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, point b), du règlement d’exécution (UE) no 1239/2013, sont perçus. »

La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

20 Par une requête déposée au greffe du Tribunal le 18 février 2017, Jiangsu Seraphim a introduit un recours tendant à l’annulation de l’article 2 du règlement litigieux. Dans le cadre de ce recours, elle a soulevé un moyen unique, tiré de ce que, par le règlement litigieux, la Commission avait violé l’article 8, paragraphes 1, 9 et 10, ainsi que l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base, l’article 13, paragraphes 1, 9 et 10, ainsi que l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base, la requérante en première instance faisant valoir que cette institution avait invalidé des factures conformes, puis enjoint aux autorités douanières nationales de percevoir des droits, comme si aucune facture conforme n’avait été émise et communiquée à ces autorités douanières au moment où les marchandises avaient été mises en libre pratique.

21 Dans le cadre dudit recours, Jiangsu Seraphim a, en outre, soulevé une exception d’illégalité à l’égard de l’article 3, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1239/2013, fondée sur une prétendue violation de l’article 8 et de l’article 10, paragraphe 5, du règlement no 1225/2009 ainsi que de l’article 13 et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement no 597/2009, telles ces dernières dispositions étaient applicables à la date d’adoption des règlements d’exécution nos 1238/2013 et 1239/2013.

22 À cet égard, tout d’abord, le Tribunal a précisé, au point 27 de l’arrêt attaqué, que l’objet du recours portait sur la légalité de l’invalidation des factures conformes de Jiangsu Seraphim et sur les conséquences à en tirer, notamment, en ce qui concerne la récupération des droits antidumping et des droits compensateurs dus, et non pas sur la question de savoir si c’était à bon droit que la Commission avait retiré son acceptation de l’engagement concerné.

23 Statuant, ensuite, en premier lieu, aux points 28 à 49 de l’arrêt attaqué, sur la fin de non-recevoir soulevée par la Commission, soutenue par le Conseil, et tirée de l’irrecevabilité du recours dont il était saisi, le Tribunal a considéré que Jiangsu Seraphim était directement et individuellement concernée par l’article 2 du règlement litigieux, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, et qu’elle avait, par ailleurs, un intérêt à agir à cet égard.

24 Le Tribunal a donc conclu à la recevabilité de ce recours.

25 En deuxième lieu, le Tribunal s’est prononcé, aux points 50 à 64 de l’arrêt attaqué, sur la recevabilité de l’exception d’illégalité, soulevée par Jiangsu Seraphim, à l’égard de l’article 3, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1239/2013.

26 À cet égard, estimant, notamment, qu’il ne pouvait être considéré que Jiangsu Seraphim fût recevable, au sens de la jurisprudence issue de l’arrêt du 9 mars 1994, TWD Textilwerke Deggendorf (C 188/92, EU:C:1994:90), à contester ces dispositions, sur le fondement de l’article 263 TFUE, directement à la suite de leur adoption, le Tribunal a jugé que rien ne s’opposait à ce que la requérante soulève une exception d’illégalité à l’égard desdites dispositions dans le cadre du recours dont il était saisi.

27 En troisième lieu, le Tribunal a, aux points 65 à 152 de l’arrêt attaqué, examiné le bien-fondé du moyen unique soulevé dans le cadre de ce recours.

28 À cet effet, le Tribunal a, tout d’abord, précisé, au point 130 de l’arrêt attaqué, que la question qui se posait en l’espèce, à savoir celle de l’imposition dans le temps des droits antidumping et des droits compensateurs qui auraient été dus en l’absence d’un engagement entre temps violé ou retiré, devait être examinée au regard des dispositions expresses de l’article 8, paragraphe 10, et de l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base ainsi que de celles de l’article 13, paragraphe 10, et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base.

29 Le Tribunal a, ensuite, écarté, aux points 137 et 138 de l’arrêt attaqué, l’interprétation proposée par les institutions selon laquelle le pouvoir de celles-ci, en tant qu’elles étaient chargées de l’exécution des règlements de base d’exiger, dans le cadre de l’exercice de cette compétence d’exécution, le paiement par les entreprises concernées de l’ensemble des droits dus au titre des transactions couvertes par des factures conformes entre-temps invalidées, se déduisait de ces dispositions.

30 Considérant, enfin, aux points 139 à 151 de l’arrêt attaqué, qu’aucun des autres arguments invoqués par les institutions n’était de nature à modifier cette conclusion, le Tribunal a constaté, au point 152 de cet arrêt, que les règlements de base ne sauraient constituer des fondements juridiques suffisants pour l’adoption des dispositions dont l’illégalité était soulevée.

31 En quatrième lieu, afin d’examiner si, en dépit de cette absence de fondements juridiques suffisants dans les règlements de base, l’article 3, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1238/2013 et l’article 2, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1239/2013 pourraient fonder juridiquement le règlement litigieux, le Tribunal a statué, aux points 154 à 157 de l’arrêt attaqué, sur l’exception d’illégalité que Jiangsu Seraphim avait soulevée à l’égard de ces dispositions.

32 Pour des raisons analogues à celles exposées dans le cadre de l’examen au fond du moyen unique soulevé dans le cadre du recours dont il était saisi, portant sur l’économie générale des règlements de base, le Tribunal a fait droit à cette exception d’illégalité et, partant, conclu, au point 158 de l’arrêt attaqué, que lesdites dispositions étaient inapplicables au cas d’espèce.

33 Partant, au point 160 de cet arrêt, le Tribunal a accueilli le moyen unique soulevé dans la cadre du recours dont il était saisi et, en conséquence, a annulé l’article 2 du règlement litigieux.

La procédure devant la Cour et les conclusions des parties aux pourvois

34 Par son pourvoi dans l’affaire C 439/20 P, la Commission, soutenue par le Conseil, demande à la Cour :

– d’annuler l’arrêt attaqué ;

– de rejeter le recours en première instance comme étant irrecevable ;

– à titre subsidiaire, de rejeter le recours en première instance comme étant non fondé, et

– de condamner Jiangsu Seraphim aux dépens.

35 Par son pourvoi dans l’affaire C 441/20 P, le Conseil, soutenu par la Commission, demande à la Cour :

– d’annuler l’arrêt attaqué ;

– de rejeter le recours en première instance, et

– de condamner Jiangsu Seraphim aux dépens, ou

– à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire au Tribunal, et

– de réserver la décision sur les dépens encourus en première instance et ceux afférents à la procédure de pourvoi.

36 Jiangsu Seraphim demande à la Cour :

– de rejeter les pourvois et

– de condamner les institutions aux dépens.

37 Par la décision du président de la Cour du 7 janvier 2021, les affaires C 439/20 P et C 441/20 P ont été jointes aux fins de la phase orale de la procédure et de l’arrêt.

Sur les pourvois

38 Au soutien de son pourvoi dans l’affaire C 439/20 P, la Commission, soutenue par le Conseil, soulève quatre moyens, lesquels se recoupent, en grande partie, avec les deux moyens que le Conseil, soutenu par la Commission, soulève au soutien de son pourvoi dans l’affaire C 441/20 P. Dès lors, il convient d’examiner, dans cette mesure, ces moyens ensemble.

39 Les premiers moyens soulevés dans le cadre de ces affaires sont tirés d’erreurs de droit en ce que le Tribunal a déclaré recevables, premièrement, le recours dont il était saisi et, deuxièmement, l’exception d’illégalité soulevée par Jiangsu Seraphim. Les deuxième et troisième moyens soulevés dans le cadre de l’affaire C 439/20 P et la première branche du second moyen soulevé dans le cadre de l’affaire C 441/20 P sont tirés d’erreurs de droit en ce que le Tribunal a considéré que les règlements de base ne constituaient pas une base juridique suffisante pour l’adoption de l’article 2 du règlement litigieux. Le quatrième moyen soulevé dans le cadre de l’affaire C 439/20 P et la seconde branche du second moyen soulevé dans le cadre de l’affaire C 441/20 P sont tirés d’une interprétation erronée de l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 1225/2009 et de l’article 24, paragraphe 1, du règlement no 597/2009 en ce que le Tribunal a jugé que ces dispositions n’autorisaient pas le Conseil à mettre en place un système de contrôle des engagements comprenant l’invalidation des factures concernées.

Sur les premiers moyens de pourvois

Argumentation des parties

40 Par les premiers moyens de pourvois soulevés dans le cadre des affaires C 439/20 P et C 441/20 P, qui s’articulent en deux branches, les institutions, reprochent au Tribunal d’avoir commis des erreurs de droit en jugeant que, premièrement, le recours dont il était saisi et, deuxièmement, l’exception d’illégalité soulevée par Jiangsu Seraphim dans le cadre de ce recours étaient recevables.

41 Par la première branche de ces premiers moyens de pourvois, qui comprend deux griefs, les institutions reprochent au Tribunal d’avoir commis des erreurs de droit en considérant que Jiangsu Seraphim était directement concernée, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, par l’article 2 du règlement litigieux, et que celle-ci avait un intérêt à agir pour demander l’annulation de cet article 2.

42 S’agissant, en premier lieu, du grief, visant les points 37, 38, 44 et 45 de l’arrêt attaqué, tiré de ce que Jiangsu Seraphim n’était pas directement concernée par ledit article 2, les institutions soulignent que c’est non pas Jiangsu Seraphim, en tant que producteur-exportateur, mais bien Seraphim Solar System GmbH, en tant qu’importateur lié, qui a effectué les déclarations en douane concernant les produits pour lesquels les factures émises par Jiangsu Seraphim ont été invalidées par ce règlement et qui est dès lors débitrice des droits antidumping et des droits compensateurs dus en conséquence de l’invalidation de ces factures. Par conséquent, la situation juridique de Jiangsu Seraphim, en tant que producteur-exportateur, n’aurait pas été modifiée par l’article 2 du règlement litigieux. Ainsi, dans la mesure où il conviendrait de comprendre les points 37, 38 et 44 de l’arrêt attaqué en ce sens que la situation juridique de cette dernière société aurait été modifiée ou qu’un tel producteur-exportateur serait toujours directement concerné par un règlement retirant un engagement et invalidant les factures correspondantes, cette constatation serait erronée et ne saurait trouver un quelconque fondement dans la jurisprudence citée à ces points.

43 En second lieu, par un grief soulevé à titre subsidiaire et visant les points 47 et 48 de l’arrêt attaqué, les institutions reprochent au Tribunal des erreurs de droit en ce qu’il a jugé que Jiangsu Seraphim avait un intérêt à agir contre l’article 2 du règlement litigieux.

44 Premièrement, au point 47 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait confondu les notions de « qualité pour agir » et d’« intérêt à agir ». Ce point de motifs reposerait, en outre, sur une interprétation erronée de la condition selon laquelle la partie requérante doit être directement concernée, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, et sur une analogie incorrecte avec le cas de figure d’un règlement de la Commission retirant l’acceptation d’un engagement et instituant des droits pour l’avenir.

45 Or, en l’espèce, le Conseil aurait institué des droits au moment même où la Commission a accepté l’engagement concerné. Il s’ensuivrait que si Jiangsu Seraphim voulait contester l’institution de ces droits, elle aurait dû former un recours contre les règlements du Conseil concernés au lieu de contester uniquement l’invalidation des factures conformes correspondantes et la perception des droits concernant un autre opérateur économique, alors même qu’aucune de ces factures n’aurait modifié sa situation juridique.

46 Deuxièmement, selon les institutions, le Tribunal a, au point 48 de l’arrêt attaqué, implicitement interprété la notion d’« intérêt à agir », contrairement à la jurisprudence, comme s’il suffisait de démontrer un simple avantage économique résultant du succès du recours intenté, alors que le bénéfice pertinent devrait pouvoir être vérifié dans la situation juridique de la partie requérante. En tout état de cause, aucune preuve n’aurait été fournie par Jiangsu Seraphim d’une quelconque incidence de l’annulation de l’article 2 du règlement litigieux sur la relation commerciale de celle-ci avec Seraphim Solar System. En outre, cette annulation n’aurait pas d’incidence juridique sur l’existence de la dette douanière de cette dernière société.

47 Par la seconde branche desdits premiers moyens de pourvois, qui vise les points 57 à 64 de l’arrêt attaqué, les institutions reprochent au Tribunal, en substance, d’avoir à tort considéré que l’exception d’illégalité, que Jiangsu Seraphim avait soulevée à l’égard de l’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1239/2013 (ci-après, ensemble, les « dispositions visées par l’exception d’illégalité »), était recevable.

48 Les institutions soutiennent, en premier lieu, que le Tribunal a, à tort, estimé que Jiangsu Seraphim n’était pas recevable à demander l’annulation de ces dispositions et que la requérante en première instance n’était donc pas « empêchée », au sens de la jurisprudence issue des arrêts du 9 mars 1994, TWD Textilwerke Deggendorf (C 188/92, EU:C:1994:90), et du 15 février 2001, Nachi Europe (C 239/99, EU:C:2001:101), de soulever cette exception d’illégalité. En effet, il ressortirait, notamment, des arrêts du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil (C 205/16 P, EU:C:2017:840), et du 27 mars 2019, Canadian Solar Emea e.a./Conseil (C 236/17 P, EU:C:2019:258), que le Tribunal a erronément jugé que Jiangsu Seraphim ne pouvait être considérée comme ayant été directement et individuellement concernée par lesdites dispositions et qu’elle n’avait pas un intérêt à agir dans le cadre du recours en annulation dont il était saisi.

49 En deuxième lieu, les institutions soulignent que les dispositions visées par ladite exception d’illégalité sont indissociables des autres dispositions des règlements d’exécution nos 1238/2013 et 1239/2013. Or, lorsque plusieurs articles ou, comme en l’espèce, l’ensemble du dispositif d’un acte de l’Union ne peuvent être dissociés, tous les griefs contestant la légalité de cet acte devraient être soulevés lors de la contestation dudit acte dans son intégralité. Ainsi, le Tribunal aurait commis une erreur de droit, au point 57 de l’arrêt attaqué, en se prononçant uniquement sur la question de savoir si la requérante en première instance était recevable à contester les dispositions visées par l’exception d’illégalité que celle-ci avait soulevée. En effet, Jiangsu Seraphim aurait pu attaquer l’intégralité des règlements d’exécution nos 1238/2013 et 1239/2013, ce qui serait le critère pertinent dans ce contexte, en invoquant, dans ce cadre, l’illégalité de toute disposition spécifique de ceux-ci. Dès lors, faute d’avoir attaqué ces règlements d’exécution dans le délai de recours qui lui était imparti, Jiangsu Seraphim aurait été forclose pour soulever une exception d’illégalité à cet égard.

50 En troisième lieu et à titre subsidiaire, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en considérant que la même exception d’illégalité était recevable, dans la mesure où, les dispositions visées par cette dernière n’étant pas dissociables du reste des règlements d’exécution nos 1238/2013 et 1239/2013, Jiangsu Seraphim n’aurait pas pu soulever une exception d’illégalité concernant seulement les dispositions visées par l’exception d’illégalité, mais aurait dû soulever cette dernière à l’égard de l’intégralité de ces règlements d’exécution, « en paquet ». En outre, contrairement à ce que le Tribunal a considéré au point 63 de l’arrêt attaqué, les dispositions visées par l’exception d’illégalité constitueraient non pas des dispositions à caractère général, mais des décisions individuelles à l’égard de Jiangsu Seraphim.

51 En quatrième lieu et à titre encore plus subsidiaire, le moyen unique soulevé en première instance serait inopérant en ce qu’il serait dirigé contre des dispositions qui ne constituent pas la base juridique du règlement litigieux. En effet, ce règlement aurait été fondé sur l’article 8 du règlement antidumping de base et sur l’article 13 du règlement antisubventions de base. En outre, selon les institutions, le Tribunal semble avoir conclu que Jiangsu Seraphim n’était pas forclose pour soulever une exception d’illégalité au titre de l’article 277 TFUE à la suite d’une interprétation erronée du moyen unique soulevé par celle-ci, en ce sens que, par ce moyen, la requérante en première instance aurait fait valoir que le règlement litigieux lui-même violerait les dispositions pertinentes des règlements de base. Ce faisant, le Tribunal aurait manifestement statué ultra petita.

52 Jiangsu Seraphim soutient que les premiers moyens de pourvois soulevés dans le cadre des affaires C 439/20 P et C 441/20 P doivent être écartés comme étant dénués de fondement.

Appréciation de la Cour

53 Il importe de rappeler, à titre liminaire, que la recevabilité d’un recours introduit par une personne physique ou morale contre un acte dont elle n’est pas le destinataire, au titre de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, est subordonnée à la condition que lui soit reconnue la qualité pour agir, laquelle existe dans deux cas de figure. D’une part, un tel recours peut être formé à condition que cet acte la concerne directement et individuellement. D’autre part, une telle personne peut introduire un recours contre un acte réglementaire ne comportant pas de mesures d’exécution si celui-ci la concerne directement (arrêt du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C 453/19 P, EU:C:2021:608, point 31 et jurisprudence citée).

54 Par la première branche des premiers moyens de pourvois soulevés dans le cadre des affaires C 439/20 P et C 441/20 P, les institutions mettent en cause, en premier lieu, l’analyse à laquelle le Tribunal a procédé, notamment aux points 37, 38, 44 et 45 de l’arrêt attaqué, en examinant le premier de ces deux cas de figure, à savoir en ce qui concerne la question de savoir si la requérante en première instance était directement concernée, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, par l’article 2 du règlement litigieux.

55 Selon une jurisprudence constante de la Cour, rappelée par le Tribunal au point 36 de l’arrêt attaqué, la condition selon laquelle une personne physique ou morale doit être directement concernée par la décision faisant l’objet du recours, telle que prévue à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, requiert que deux critères soient cumulativement remplis, à savoir que cette décision, d’une part, produise directement des effets sur la situation juridique de cette personne et, d’autre part, ne laisse aucun pouvoir d’appréciation aux destinataires chargés de sa mise en œuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation de l’Union, sans application d’autres règles intermédiaires (voir en ce sens, notamment, arrêts du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci, C 622/16 P à C 624/16 P, EU:C:2018:873, point 42, ainsi que du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission, C 453/19 P, EU:C:2021:608, point 83).

56 À cet égard, les institutions font, notamment, valoir que, en l’espèce, c’est non pas, contrairement à ce que le Tribunal a considéré, en particulier, aux points 44 et 45 de l’arrêt attaqué, Jiangsu Seraphim, en tant que producteur-exportateur, qui est directement concernée, au sens de la jurisprudence susmentionnée, par l’article 2 du règlement litigieux, mais Seraphim Solar System, en tant qu’importateur lié, dans la mesure où ce serait cette dernière qui aurait effectué les déclarations en douane requises et qui serait débitrice des droits antidumping et des droits compensateurs dus en conséquence de l’invalidation des factures en cause.

57 Il ressort d’une jurisprudence constante, issue de l’arrêt du 21 février 1984, Allied Corporation e.a./Commission (239/82 et 275/82, EU:C:1984:68, point 12), que les règlements instituant un droit antidumping, bien qu’ils aient, par leur nature et leur portée, un caractère normatif, peuvent concerner directement et individuellement ceux des producteurs et des exportateurs du produit en cause auxquels sont imputées les pratiques de dumping en utilisant des données émanant de leur activité commerciale. Tel est le cas, en général, des entreprises productrices et exportatrices qui peuvent démontrer qu’elles ont été identifiées dans les actes des institutions ou concernées par les enquêtes préparatoires (voir, dernièrement, arrêt du 28 février 2019, Conseil/Growth Energy et Renewable Fuels Association, C 465/16 P, EU:C:2019:155, point 73 et jurisprudence citée).

58 La Cour a précisé, à cet égard, qu’une entreprise ne saurait être considérée comme étant directement concernée par un règlement instituant un droit antidumping en raison de sa seule qualité de productrice du produit soumis audit droit, la qualité d’exportatrice étant, à cet égard, essentielle. En effet, il ressort des termes mêmes de la jurisprudence citée au point précédent que l’affectation directe, par un règlement instituant des droits antidumping, de certains producteurs et exportateurs du produit en cause tient notamment au fait que les pratiques de dumping leur sont imputées. Or, un producteur qui n’exporte pas sa production sur le marché de l’Union, mais se limite à l’écouler sur son marché national ne saurait se voir imputer une pratique de dumping (arrêt du 28 février 2019, Conseil/Growth Energy et Renewable Fuels Association, C 465/16 P, EU:C:2019:155, point 74).

59 En application de ces principes, il y a lieu de relever, en premier lieu, que Jiangsu Seraphim est à la fois productrice et exportatrice des produits visés par les règlements d’exécution nos 1238/2013 et 1239/2013.

60 En deuxième lieu, Jiangsu Seraphim a été identifiée à l’annexe I des règlements d’exécution nos 1238/2013 et 1239/2013, lesquels ont institué le droit antidumping définitif et le droit compensateur définitif faisant l’objet du litige, à l’annexe de la décision n° 2013/423, par laquelle la Commission a accepté l’engagement de prix visé par ce litige, à l’annexe de la décision n° 2013/707, par laquelle la Commission a confirmé une telle acceptation, ainsi qu’à l’article 1er du règlement litigieux, par lequel la Commission a retiré cette acceptation en ce qui concerne, notamment, Jiangsu Seraphim.

61 En troisième lieu, il importe de souligner que le retrait de l’acceptation de l’engagement concerné, acté par le règlement litigieux, et dont il résulte que Jiangsu Seraphim ne bénéficie plus des exemptions prévues à l’article 3, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1238/2013 et à l’article 2, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1239/2013, produit des effets comparables, sur la situation juridique des producteurs-exportateurs concernés, aux effets des dispositions réglementaires instituant les droits en question sur la situation juridique des producteurs-exportateurs concernés. Or, il résulte de la jurisprudence rappelée au point 57  du présent arrêt que de tels producteurs-exportateurs peuvent être considérés comme directement affectés par les dispositions réglementaires pertinentes.

62 En particulier, l’article 2 du règlement litigieux prévoit que les factures conformes émises par Jiangsu Seraphim et énumérées à l’annexe I de ce règlement sont invalidées et, en conséquence, que les droits antidumping et compensateur définitifs doivent être perçus à l’égard des transactions visées par ces factures, comme l’a relevé le Tribunal au point 44 de l’arrêt attaqué.

63 Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que ces dispositions ont produit directement des effets sur la situation juridique de Jiangsu Seraphim, en ce que celles-ci affectent nécessairement des opérations auxquelles la requérante en première instance est partie et les relations contractuelles qui les régissent. Par ailleurs, les institutions n’ont pas remis en cause le constat du Tribunal, également effectué au point 44 de l’arrêt attaqué, selon lequel lesdites dispositions ne laissaient aucun pouvoir d’appréciation aux autorités douanières nationales en ce qui concerne l’invalidation des factures en cause et la perception des droits dus à ce titre.

64 Il ressort de ce qui précède que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en jugeant, au point 45 de l’arrêt attaqué, que Jiangsu Seraphim était directement concernée par l’article 2 du règlement litigieux.

65 De plus, pour autant que les institutions reprochent au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en considérant, aux points 47 et 48 de l’arrêt attaqué, que Jiangsu Seraphim avait un intérêt à agir pour demander l’annulation de cet article 2, il convient de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante qu’un recours en annulation intenté par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où cette dernière a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Un tel intérêt suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle même, d’avoir des conséquences juridiques et que le recours puisse ainsi, par son résultat, procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (arrêts du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission, C 33/14 P, EU:C:2015:609, point 55, ainsi que du 27 mars 2019, Canadian Solar Emea e.a./Conseil, C 236/17 P, EU:C:2019:258, point 91).

66 À cet égard, il convient de relever, tout d’abord, qu’il n’est pas exclu, même s’il s’agit de conditions distinctes, que certains facteurs ou éléments soient susceptibles de démontrer à la fois la qualité pour agir d’un requérant contre un acte de l’Union, et, en particulier, l’établissement d’un des critères de cette qualité, telle que le fait d’être directement concerné par cet acte, et l’existence d’un intérêt à agir de ce requérant contre cet acte.

67 Ainsi, en l’espèce, le Tribunal a pu tenir compte, au point 47 de l’arrêt attaqué, pour l’essentiel, des mêmes facteurs pour déterminer s’il y avait un intérêt à agir de Jiangsu Seraphim et pour ce qui concerne la question de savoir, abordée aux points 57 à 63 du présent arrêt, si l’article 2 du règlement litigieux produisait directement des effets sur la situation juridique de celle-ci, à savoir l’invalidation des factures conformes émises par la requérante en première instance et, en conséquence, la perception des droits à l’égard des transactions faisant l’objet de ces factures, sans qu’il puisse en être à ce titre conclu, contrairement à ce que les institutions soutiennent, à l’existence d’une erreur de droit tirée de ce que le Tribunal aurait confondu les notions de « qualité pour agir » et d’« intérêt à agir » ou de ce que celui-ci se serait appuyé à cet égard sur une interprétation erronée de la condition selon laquelle un requérant doit être directement concerné par l’acte faisant l’objet du recours, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

68 Force est de constater, ensuite, que, ainsi que M. l’avocat général l’a constaté, en substance, au point 38 de ses conclusions, le Tribunal pouvait à bon droit considérer que l’invalidation des factures émises par Jiangsu Seraphim et l’injonction de percevoir des droits définitifs dus pour les transactions faisant l’objet de ces factures constituent des facteurs juridiques préjudiciables pour la requérante en première instance, en tant que producteur-exportateur des produits concernés, dont l’élimination procure donc un bénéfice à cette dernière, au sens de la jurisprudence rappelée au point 65 du présent arrêt.

69 Il s’ensuit que, indépendamment du fait de savoir si ou dans quelle mesure la jurisprudence que le Tribunal a évoquée au point 47 de l’arrêt attaqué est pertinente en l’espèce, celui-ci pouvait, à bon droit, conclure, au point 49 de cet arrêt, que Jiangsu Seraphim avait un intérêt à agir en annulation contre l’article 2 du règlement litigieux.

70 Cette constatation ne saurait, en outre, être remise en cause par le grief soulevé par les institutions tiré de ce que les droits en cause auraient en effet déjà été institués lors de l’acceptation de l’engagement concerné, étant donné que, en ce qui concerne la condition de l’intérêt à agir, il convient de déterminer si un tel intérêt, et ainsi, plus particulièrement, la situation préjudiciable que le recours intenté est susceptible de pallier, perdure et existe encore, en tout état de cause, à la date d’introduction de celui-ci (voir, en ce sens, arrêts du 6 septembre 2018, Bank Mellat/Conseil, C 430/16 P, EU:C:2018:668, point 50, ainsi que du 27 mars 2019, Canadian Solar Emea e.a./Conseil, C 236/17 P, EU:C:2019:258, point 92).

71 Enfin, pour autant que les institutions visent à contester les considérations du Tribunal figurant au point 48 de l’arrêt attaqué, il suffit de constater, comme le Tribunal l’a, par ailleurs, indiqué lui même, que ce point n’énonce qu’un motif surabondant. Ce grief doit, dès lors, être écarté comme étant inopérant (voir, en ce sens, arrêt du 17 septembre 2020, Troszczynski/Parlement, C 12/19 P, EU:C:2020:725, point 60 et jurisprudence citée).

72 Il résulte des considérations qui précèdent que la première branche des premiers moyens de pourvois soulevés dans le cadre des affaires C 439/20 P et C 441/20 P doit être écartée.

73 Par la seconde branche de ces premiers moyens de pourvois, les institutions reprochent au Tribunal d’avoir commis des erreurs de droit en jugeant, aux points 57 à 64 de l’arrêt attaqué, que l’exception d’illégalité soulevée par Jiangsu Seraphim, à l’égard de l’article 3, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1239/2013, était recevable.

74 Dans la mesure où les institutions soutiennent, en premier lieu, en substance, que le Tribunal a, à tort, considéré, au regard de la jurisprudence issue des arrêts du 9 mars 1994, TWD Textilwerke Deggendorf (C 188/92, EU:C:1994:90), et du 15 février 2001, Nachi Europe (C 239/99, EU:C:2001:101), que Jiangsu Seraphim ne pouvait introduire, en vertu de l’article 263 TFUE, un recours direct contre les dispositions visées par l’exception d’illégalité à la suite de leur adoption, de sorte que la requérante en première instance n’aurait donc pas été « empêchée », au sens de cette jurisprudence, de soulever une exception d’illégalité au titre de l’article 277 TFUE dans le cadre du recours en première instance, il importe de noter que, bien que le Tribunal ait également examiné, notamment aux points 62 et 63 de l’arrêt attaqué, le point de savoir si la requérante en première instance pouvait être considérée comme ayant été directement et, le cas échéant, individuellement concernée par les dispositions visées par l’exception d’illégalité, il ressort, notamment, du point 64 de l’arrêt attaqué qu’il a conclu à la recevabilité de cette exception d’illégalité au motif que Jiangsu Seraphim n’avait pas d’intérêt à agir contre ces dispositions directement à la suite de leur adoption.

75 À cette fin, le Tribunal a souligné, au point 58 de l’arrêt attaqué, que l’article 3 du règlement d’exécution no 1238/2013 et l’article 2 du règlement d’exécution no 1239/2013 constituaient des exemptions en faveur de Jiangsu Seraphim, en ce sens que les produits en cause, importés dans l’Union, n’étaient pas soumis aux paiements des droits antidumping et compensateurs définitifs, sous réserve que les conditions prévues dans les engagements soient satisfaites.

76 S’agissant plus spécifiquement de l’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1239/2013, le Tribunal a relevé, aux points 59 et 60 de l’arrêt attaqué, que ces dispositions ne visaient qu’à conférer à la Commission le droit de retirer l’acceptation des engagements concrets et d’invalider des factures conformes correspondantes, de telle sorte que les effets défavorables de ces dispositions ne pouvaient se manifester que par l’intermédiaire de mesures particulières futures, à savoir, notamment, le retrait par la Commission de l’acceptation d’un engagement pris, ainsi que, par la suite, l’invalidation des factures conformes correspondantes et la perception des droits dus pour les transactions faisant l’objet de celles ci.

77 Or, dans ces circonstances, le Tribunal a pu, sans commettre d’erreur de droit, considérer pour l’essentiel, aux points 61 et 62 de l’arrêt attaqué, que, à la date d’adoption des dispositions visées par l’exception d’illégalité ou directement à la suite de cette adoption, l’application de ces dispositions à Jiangsu Seraphim demeurait hypothétique et que l’intérêt à agir de la requérante en première instance ne pouvait se fonder sur cette simple éventualité, étant donné que, ainsi qu’il est rappelé au point 70 du présent arrêt, un tel intérêt doit être né et actuel à la date d’introduction du recours et ne peut concerner une situation future et hypothétique (voir, en ce sens, arrêt du 27 mars 2019, Canadian Solar Emea e.a./Conseil, C 236/17 P, EU:C:2019:258, point 92).

78 En outre, selon une jurisprudence constante, l’article 277 TFUE est l’expression d’un principe général assurant à toute partie le droit de contester, en vue d’obtenir l’annulation d’un acte de l’Union sur le fondement de l’article 263 TFUE, la validité des actes institutionnels antérieurs constituant la base juridique de l’acte attaqué, si cette partie ne disposait pas du droit d’introduire, en vertu de l’article 263 TFUE, un recours direct contre ces derniers actes, dont elle subit ainsi les conséquences sans avoir été en mesure d’en demander l’annulation (voir, en ce sens, arrêts du 6 mars 1979, Simmenthal/Commission, 92/78, EU:C:1979:53, point 39, ainsi que du 8 septembre 2020, Commission et Conseil/Carreras Sequeros e.a., C 119/19 P et C 126/19 P, EU:C:2020:676, point 67).

79 Il découle de cette jurisprudence que la recevabilité de l’exception d’illégalité d’un acte est nécessairement subordonnée à la condition que le requérant qui l’invoque n’ait pas disposé du droit d’introduire un recours direct tendant à l’annulation de cet acte (arrêt du 17 décembre 2020, BP/FRA, C 601/19 P, non publié, EU:C:2020:1048, point 27).

80 Il s’ensuit que le Tribunal a pu conclure, à bon droit, au point 64 de l’arrêt attaqué, que, à défaut d’avoir pu disposer d’un intérêt à agir contre les dispositions visées par l’exception d’illégalité directement à la suite de leur adoption, Jiangsu Seraphim ne pouvait être « empêchée » de soulever cette exception d’illégalité dans le cadre du recours en première instance.

81 L’éventuel constat d’une erreur de droit entachant le point 63 de l’arrêt attaqué, en ce que le Tribunal aurait jugé erronément que les dispositions visées par l’exception d’illégalité avaient la nature non pas d’une décision individuelle, mais de dispositions à caractère général, ne serait pas susceptible d’ébranler cette conclusion. Partant, le premier grief soulevé au soutien de la seconde branche des premiers moyens de pourvois doit être écarté.

82 Dans la mesure où les institutions font valoir, en deuxième lieu et à titre subsidiaire, en substance, que le Tribunal a commis une erreur de droit en déclarant l’exception d’illégalité soulevée par la requérante en première instance recevable, alors qu’il aurait dû constater que les dispositions visées par l’exception d’illégalité étaient indissociables du reste des règlements d’exécution nos 1238/2013 et 1239/2013 et que cette exception d’illégalité aurait dû être soulevée à l’égard de l’intégralité de ces règlements d’exécution, il y a lieu de relever que le motif d’irrecevabilité tiré de la jurisprudence issue des arrêts 9 mars 1994, TWD Textilwerke Deggendorf (C 188/92, EU:C:1994:90), et du 15 février 2001, Nachi Europe (C 239/99, EU:C:2001:101), que la Commission, soutenue par le Conseil, avait soulevé en première instance était fondé sur l’expiration du délai de recours prévu à l’article 263 TFUE, et non pas sur la circonstance que ces dispositions seraient indissociables des autres dispositions desdits règlements d’exécution.

83 Il convient de rappeler que, selon l’article 170, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, le pourvoi ne peut modifier l’objet du litige devant le Tribunal. Ainsi, selon une jurisprudence constante, la compétence de la Cour dans le cadre d’un pourvoi est limitée à l’appréciation de la solution juridique qui a été donnée aux moyens et aux arguments débattus devant les premiers juges. Une partie ne saurait donc soulever pour la première fois devant la Cour un grief qu’elle n’a pas soulevé devant le Tribunal, dès lors que cela reviendrait à lui permettre de saisir la Cour, dont la compétence en matière de pourvoi est limitée, d’un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal (arrêt du 6 octobre 2021, Sigma Alimentos Exterior/Commission, C 50/19 P, EU:C:2021:792, points 37 et 38).

84 Partant, le grief des institutions tiré de la circonstance que les dispositions visées par l’exception d’illégalité seraient indissociables des autres dispositions des règlements d’exécution nos 1238/2013 et 1239/2013 doit être écarté comme étant irrecevable, car ce grief a été soulevé pour la première fois dans le cadre des pourvois.

85 En troisième lieu, est irrecevable pour les mêmes motifs le grief, également invoqué à titre subsidiaire, tiré de ce que l’exception d’illégalité soulevée en première instance par Jiangsu Seraphim est inopérante en ce qu’elle serait dirigée contre des dispositions qui ne constituent pas la base juridique du règlement litigieux.

86 Pour autant que les institutions soutiennent, en dernier lieu et à titre encore plus subsidiaire, en substance, que le Tribunal aurait statué sur cette exception d’illégalité en procédant à une interprétation erronée du moyen unique soulevé en première instance, en ce sens que, par ce moyen, la requérante aurait fait valoir que le règlement litigieux violait directement les dispositions pertinentes des règlements de base, alors que la requête en première instance ne contiendrait pas ce moyen, si bien que le Tribunal aurait statué ultra petita, il suffit de constater qu’il ressort du libellé de cette requête que ce moyen unique était explicitement fondé sur une violation de l’article 8, paragraphes 1, 9 et 10, et de l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base ainsi que de l’article 13, paragraphes 1, 9 et 10, et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base, et que ledit moyen unique était combiné avec une exception d’illégalité soulevée à l’égard de l’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1239/2013.

87 Ce grief doit, dès lors, être écarté comme étant non fondé.

88 Il résulte des considérations qui précèdent que la seconde branche des premiers moyens de pourvois soulevés dans le cadre des affaires C 439/20 P et C 441/20 P doit être écartée.

89 Eu égard à tout ce qui précède, il y a donc lieu d’écarter ces premiers moyens de pourvois dans leur ensemble.

Sur les deuxième et troisième moyens de pourvoi dans l’affaire C 439/20 P et sur la première branche du second moyen de pourvoi dans l’affaire C 441/20 P

Argumentation des parties

90 Par les deuxième et troisième moyens de pourvoi dans l’affaire C 439/20 P et par la première branche du second moyen de pourvoi dans l’affaire C 441/20 P, les institutions reprochent au Tribunal, en substance, d’avoir commis, aux points 115 à 152 de l’arrêt attaqué, des erreurs de droit en considérant que les règlements de base ne constituaient pas des fondements juridiques suffisants pour l’adoption de l’article 2 du règlement litigieux, portant sur l’invalidation des factures conformes de Jiangsu Seraphim ainsi que la perception des droits antidumping et des droits compensateurs dus au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique des marchandises visées par ces factures.

91 En particulier, par le deuxième moyen de pourvoi dans l’affaire C 439/20 P et par la première branche du second moyen de pourvoi dans l’affaire C 441/20 P, les institutions reprochent au Tribunal d’avoir, notamment aux points 119, 129 à 132, 138, 140 à 147 et 151 de l’arrêt attaqué, commis des erreurs de droit en ce qu’il a qualifié la perception de droits sur les importations concernées comme étant « rétroactive ».

92 Selon les institutions, premièrement, le Tribunal n’a pas motivé l’hypothèse selon laquelle ces droits auraient été perçus « rétroactivement », bien que cette hypothèse sous-tende ces points de l’arrêt attaqué et soit « au cœur » de l’interprétation effectuée par le Tribunal, aux points 128 à 138 de cet arrêt, des dispositions pertinentes des règlements de base.

93 Deuxièmement, en qualifiant la perception des droits en cause comme étant « rétroactive », le Tribunal aurait commis des erreurs de droit dans l’interprétation, en particulier, de l’article 8, paragraphe 10, et de l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base ainsi que de l’article 13, paragraphe 10, et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base. En effet, ces dispositions constitueraient une base juridique suffisante pour la perception des droits sur des importations considérées comme violant l’engagement concerné.

94 À cet égard, les institutions soulignent qu’il ne s’agit pas de savoir quand un droit est perçu sur l’importation concernée, mais de savoir si cette importation a été mise en libre pratique après l’institution de ce droit. Ainsi, le critère décisif pour déterminer si la perception dudit droit est rétroactive serait la date à laquelle la mesure en cause a été instituée. Or, en l’espèce, il ressortirait clairement des règlements d’exécution nos 1238/2013 et 1239/2013 que les droits sur les importations en cause ont été institués en 2013, soit avant la mise en libre pratique de ces importations, couvertes par les factures conformes invalidées. Le règlement litigieux aurait uniquement déclenché la perception de ces droits.

95 Par le troisième moyen de pourvoi dans l’affaire C 439/20 P, les institutions reprochent au Tribunal, en substance, d’avoir, aux points 119, 129 à 138, 140 à 147 et 151 de l’arrêt attaqué, interprété de manière erronée l’article 8, paragraphes 1, 9 et 10, et l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base ainsi que l’article 13, paragraphes 1, 9 et 10, et l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base, en ce que celui-ci a considéré que ces dispositions n’étaient pas applicables au cas d’espèce. Le Tribunal aurait, à tort, écarté l’interprétation desdites dispositions adoptée par les institutions.

96 Tout d’abord, les mêmes dispositions, telles que modifiées par le règlement no 461/2004, constitueraient, en réalité, une base juridique suffisante pour la perception de droits sur les importations dont il a été constaté qu’elles violaient l’engagement concerné. Le Tribunal aurait complètement ignoré, aux points 115 à 118 de l’arrêt attaqué, que, à la suite d’une telle modification, un droit définitif est institué dès l’acceptation de l’engagement en cause, et non pas seulement une fois que cet engagement a été retiré. Dès lors, ces droits n’auraient pas été institués rétroactivement.

97 Serait, notamment, entaché de deux erreurs de droit le point 119 de l’arrêt attaqué, en ce que le Tribunal a considéré que la perception de droits sur des importations qui ont violé l’engagement en cause se limitait aux deux hypothèses prévues à l’article 8, paragraphe 10, et à l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base ainsi qu’à l’article 13, paragraphe 10, et à l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base.

98 Premièrement, ces dispositions porteraient sur l’application rétroactive des droits, c’est-à-dire, contrairement à ce que le règlement litigieux prévoirait, la perception de droits sur des importations mises en libre pratique avant l’institution de droits définitifs. Deuxièmement, le Tribunal aurait dénaturé la modification législative intervenue en 2004. En effet, les deux hypothèses prévues porteraient uniquement sur la situation dans laquelle un droit définitif n’avait pas été institué par le Conseil au moment de l’acceptation de l’engagement en cause.

99 Les institutions estiment, ensuite, que les considérants des règlements de base sur lesquels le Tribunal s’appuie aux points 132 à 137 de l’arrêt attaqué sont dépourvus de pertinence. Contrairement à ce que le Tribunal a constaté au point 144 de cet arrêt, ce seraient les considérants 18 et 19 du règlement no 461/2004 qui devraient être pris en considération. Par conséquent, contrairement à ce que le Tribunal aurait indiqué au point 138 de l’arrêt attaqué, les dispositions spécifiques relatives à l’institution de droits provisoires uniquement après la violation ou le retrait d’un engagement et à l’institution rétroactive de ces droits ne limiteraient pas la perception de droits précédemment institués sur les importations dont il avait été constaté qu’elles ne respectaient pas les conditions formelles ou matérielles de l’engagement concerné.

100 Enfin, les constatations effectuées, notamment, par le Tribunal aux points 141, 145 et 146 de l’arrêt attaqué seraient erronées.

101 Jiangsu Seraphim soutient que le Tribunal a, à bon droit, écarté l’interprétation invoquée par les institutions et que les moyens soulevés par ces dernières doivent donc être écartés comme étant dénués de fondement.

102 À cet égard, d’une part, le règlement litigieux imposerait des droits rétroactivement, en allant au-delà de ce que les règlements de base permettent. Le Tribunal aurait donc conclu à bon droit que ces règlements de base ne constituaient pas une base juridique suffisante pour l’adoption des dispositions du règlement litigieux.

103 D’autre part, en cas de violation des termes d’un engagement, il résulterait de l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base que les droits qui ne s’appliquaient pas, en conséquence de l’acceptation de cet engagement, s’appliquent automatiquement aux importations effectuées à partir de la date à laquelle ledit engagement a été retiré, et non à des importations antérieures.

104 Ainsi que le Tribunal l’aurait considéré, dans le système créé par les règlements de base, les droits dus en raison de la violation des engagements concernés ne pourraient être imposés rétroactivement en dehors des limites procédurales fixées par les dispositions de l’article 8, paragraphe 10, et de l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base ainsi que de l’article 13, paragraphe 10, et de l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base. Le droit de l’Union n’autoriserait en aucune manière la Commission à invalider les factures concernées et à enjoindre aux autorités douanières nationales de percevoir des droits définitifs rétroactivement sur les précédentes importations mises en libre pratique en l’absence d’enregistrement et d’imposition de droits provisoires. Selon Jiangsu Seraphim, les modifications apportées en 2004 avaient exclusivement pour objet, d’une part, de permettre le retrait d’un engagement et l’application du droit concerné par un seul acte juridique, en mettant fin à la « lourde double procédure en vigueur antérieurement », qui prévoyait l’intervention tant de la Commission que du Conseil, et, d’autre part, de fixer des délais contraignants pour la clôture des enquêtes relatives à des violations présumées des engagements concernés.

Appréciation de la Cour

105 Les deuxième et troisième moyens de pourvoi dans l’affaire C 439/20 P et la première branche du second moyen de pourvoi dans l’affaire C 441/20 P sont dirigés contre les motifs de l’arrêt attaqué, figurant aux points 115 à 152 de celui-ci, par lesquels le Tribunal a accueilli sur le fond le moyen unique soulevé par Jiangsu Seraphim à l’appui de son recours en première instance, tendant à démontrer que, par l’article 2 du règlement litigieux, la Commission a violé, d’une part, les articles 8 et 10 du règlement antidumping de base et, d’autre part, les articles 13 et 16 du règlement antisubventions de base, en invalidant les factures conformes et en ordonnant la perception des droits dus au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique relative aux importations visées par ces factures.

106 Par les griefs que les institutions soulèvent au soutien de ces moyens et cette branche, qu’il convient d’examiner ensemble, elles reprochent au Tribunal, en substance, d’avoir procédé à une interprétation erronée des règlements de base, en particulier de ces dispositions, lues dans leur contexte, le Tribunal ayant jugé, notamment, en qualifiant à tort les mesures visées à l’article 2 du règlement litigieux comme étant « rétroactives », que ceux-ci n’autorisaient pas les institutions à adopter ces mesures en conséquence du retrait de l’acceptation de l’engagement concerné.

107 À cet égard, il convient de relever que, pour parvenir à la conclusion figurant au point 152 de l’arrêt attaqué, selon laquelle les règlements de base ne sauraient constituer des fondements juridiques suffisants pour l’adoption de l’article 2 du règlement litigieux, le Tribunal a, tout d’abord, considéré, aux points 115 à 119 de l’arrêt attaqué, que, le cas d’espèce ayant trait, selon lui, à l’imposition des droits antidumping et des droits compensateurs qui auraient été dus en l’absence d’un engagement entre-temps violé, ce cas n’était régi ni par l’article 8, paragraphe 10, du règlement antidumping de base et l’article 13, paragraphe 10, du règlement antisubventions de base ni par l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base et l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base, de sorte que ce cas d’espèce ne relèverait d’aucune des hypothèses expressément prévues par les règlements de base, et qu’il convenait d’examiner s’il n’existait aucune autre base juridique pour l’adoption de l’article 2 du règlement litigieux.

108 Le Tribunal a ensuite exclu, aux points 130 à 138 de l’arrêt attaqué, que tel pût être le cas, étant donné qu’il ressortait de l’économie et des finalités des règlements de base, et notamment des considérants de ces derniers, d’une part, que le législateur de l’Union souhaitait régler de manière explicite, dans les règlements de base, les modalités selon lesquelles, à la suite d’un retrait d’acceptation d’un engagement, les institutions avaient le pouvoir d’imposer rétroactivement les droits dus et, d’autre part, que les dispositions susmentionnées de ces règlements énuméraient de manière limitative les situations dans lesquelles une telle imposition rétroactive était autorisée.

109 Le Tribunal en a déduit, en particulier, aux points 137 et 138 de l’arrêt attaqué, que ce pouvoir ne saurait se fonder ni sur les termes de l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base, en vertu desquels les droits s’appliquent automatiquement à la suite du retrait de l’acceptation d’engagements, ni sur les termes de l’article 14, paragraphe 1, du règlement antidumping de base et de l’article 24, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base, dans la mesure où les « autres éléments » de perception des droits y sont énoncés.

110 Enfin, le Tribunal a estimé, aux points 139 à 151 de l’arrêt attaqué, qu’aucun des autres griefs soulevés par les institutions, tels que celui tiré d’un contrôle et d’une sanction efficaces des engagements concernés, n’était de nature à modifier cette appréciation.

111 Aux fins d’examiner si l’interprétation que le Tribunal a ainsi adoptée des règlements de base est entachée d’une erreur de droit, il convient de rappeler, à titre liminaire, que, par le règlement litigieux, la Commission a, premièrement, à l’article 1er de ce dernier, retiré l’acceptation de l’engagement concerné, conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement antidumping de base et à l’article 13, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base, et, deuxièmement, à l’article 2 du règlement litigieux, tiré les conséquences de ce retrait en invalidant les factures conformes concernées et en ordonnant la perception des droits antidumping et des droits compensateurs dus au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique relative aux transactions faisant l’objet de ces factures.

112 L’article 2 du règlement litigieux ayant donc trait aux conséquences ou aux effets d’un retrait de l’acceptation d’un engagement et cette question étant précisément visée à l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et à l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base, il convient d’examiner la légalité de cet article 2, en premier lieu, à l’égard de ces dispositions, que le règlement litigieux présente, de surcroît, comme étant la base juridique pour son adoption.

113 Ainsi que le Tribunal l’a à bon droit rappelé au point 131 de l’arrêt attaqué, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie [arrêt du 2 décembre 2021, Commission et GMB Glasmanufaktur Brandenburg/Xinyi PV Products (Anhui) Holdings, C 884/19 P et C 888/19 P, EU:C:2021:973, point 70 ainsi que jurisprudence citée].

114 Dans ce contexte, il convient de relever, tout d’abord, qu’il ressort des termes de l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base que, en cas, notamment, de retrait de l’acceptation d’un engagement par la Commission, le droit antidumping ou le droit compensateur définitifs institués conformément, respectivement, à l’article 9, paragraphe 4, du règlement antidumping de base et à l’article 15, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base, tels les droits institués en l’espèce par les articles 1er des règlements d’exécution nos 1238/2013 et 1239/2013, « s’applique[nt] automatiquement ».

115 Afin de déterminer si ces dispositions sont susceptibles de permettre l’adoption de mesures telles que celles prévues à l’article 2 du règlement litigieux, à savoir l’invalidation de factures conformes et la perception des droits à l’égard des transactions visées par ces factures, y compris celles ayant précédé l’entrée en vigueur de ce règlement, il convient de les lire en combinaison avec, d’une part, les dispositions de l’article 9, paragraphe 4, du règlement antidumping de base et de l’article 15, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base, dont il ressort que des droits définitifs sont « imposés » par la Commission, ainsi que, d’autre part, celles de l’article 8, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement antisubventions de base, prévoyant que, « aussi longtemps » qu’un engagement reste en vigueur, les droits définitifs « ne s’appliquent pas » aux importations concernées.

116 Or, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 88 de ses conclusions, il ressort d’une lecture conjointe de ces dispositions que l’« application automatique » du droit provisoire ou définitif telle que prévue à l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et à l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base, en cas, notamment, de retrait de l’acceptation d’un engagement par la Commission, doit être interprétée non pas comme l’institution d’un nouveau droit, mais comme l’application du droit institué initialement, étant entendu que l’application de ce droit était suspendue « aussi longtemps » que l’engagement était resté en vigueur.

117 Ainsi, plus particulièrement, la suspension de l’application des droits définitifs prévue à l’article 8, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement antidumping de base et à l’article 13, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement antisubventions de base, lors de l’acceptation d’un engagement, et l’application automatique de ces droits, prévue à l’article 8, paragraphe 9, premier alinéa, du règlement antidumping de base et à l’article 13, paragraphe 9, premier alinéa, du règlement antisubventions de base, en conséquence du retrait de celui-ci, ne font pas référence à l’institution même desdits droits, mais à leurs effets tels que, notamment, leur perception.

118 Il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que le Tribunal a considéré, notamment, au point 138 de l’arrêt attaqué, le pouvoir des institutions de l’Union chargées de l’exécution des règlements de base d’exiger le paiement, à la suite du retrait de l’acceptation d’un engagement, des droits dus au titre des transactions couvertes par les factures conformes invalidées, comme le prévoit l’article 2 du règlement litigieux, peut valablement se fonder sur l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base.

119 La même conclusion s’impose par ailleurs pour autant que l’article 2 du règlement litigieux prévoie l’invalidation de ces factures conformes.

120 À cet égard, il convient de relever que, aux termes de l’article 14, paragraphe 1, du règlement antidumping de base et de l’article 24, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base, les droits antidumping ou les droits compensateurs sont imposés par voie de règlement et perçus par les États membres selon la forme, le taux et les autres éléments fixés par le règlement qui les impose. Ainsi que la Cour l’a jugé, il découle de ce libellé que le législateur de l’Union n’a pas entendu déterminer de manière limitative les éléments relatifs à la perception des droits antidumping qui peuvent être fixés (voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2018, Deichmann, C 256/16, EU:C:2018:187, points 57 et 58).

121 Or, l’émission de factures conformes, telle qu’elle a été imposée en l’espèce à l’article 3, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1238/2013 et à l’article 2, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1239/2013, vise la perception des droits antidumping ou des droits compensateurs définitifs institués par ces règlements d’exécution dans la mesure où la production de ces factures constitue une condition de l’exonération prévue auxdits articles. Par ailleurs, lesdites factures servent également à assurer l’identification des transactions concernées lorsque la perception de ces droits est ordonnée en conséquence du retrait de l’acceptation de l’engagement en cause.

122 Par conséquent, l’émission des factures conformes relève bien, ainsi que les institutions le soutiennent, des exigences que ces dernières peuvent arrêter, dans un règlement instituant des droits antidumping ou des droits compensateurs, en vertu de l’article 14, paragraphe 1, du règlement antidumping de base et de l’article 24, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base.

123 S’agissant, plus spécifiquement, du pouvoir de procéder à l’invalidation des factures conformes, celui-ci appartient par voie de conséquence aux institutions au titre de ces dispositions.

124 Ainsi, lorsque la Commission tire, par un acte adopté sur le fondement de l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et de l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base, les conséquences du retrait de l’acceptation d’un engagement, rien ne s’oppose, contrairement à ce que le Tribunal a suggéré aux points 137 et 138 de l’arrêt attaqué, à ce que cette institution procède, par cet acte, à l’invalidation des factures conformes concernées par cet engagement, en tant que condition formelle préalable à la perception des droits sur les transactions visées par ces factures.

125 En outre, il convient encore de relever que le raisonnement exposé aux points 130 à 138 de l’arrêt attaqué est entaché d’erreurs de droit en ce qu’il se fonde sur la prémisse erronée selon laquelle l’article 2 du règlement litigieux s’appliquerait de manière rétroactive, en ce qu’il prévoit, à la suite du retrait de l’acceptation de l’engagement pris par Jiangsu Seraphim, l’invalidation des factures conformes énumérées à l’annexe I de ce règlement et le paiement des droits antidumping et compensateur sur les transactions couvertes par ces factures.

126 Il convient de rappeler que, à la différence des règles de procédure qui sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur, les règles de l’Union de droit matériel doivent être interprétées, en vue de garantir le respect des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime, comme ne visant des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur que dans la mesure où il ressort clairement de leurs termes, de leur finalité ou de leur économie qu’un tel effet doit leur être attribué (arrêt du 22 juin 2022, Volvo et DAF Trucks, C 267/20, EU:C:2022:494, point 31 ainsi que jurisprudence citée).

127 Il ressort également de la jurisprudence de la Cour que, en principe, une règle de droit nouvelle s’applique à compter de l’entrée en vigueur de l’acte qui l’instaure. Si elle ne s’applique pas aux situations juridiques nées et définitivement acquises sous l’empire de la loi ancienne, elle s’applique aux effets futurs d’une situation née sous l’empire de la règle ancienne, ainsi qu’aux situations juridiques nouvelles. Il n’en va autrement, et sous réserve du principe de non-rétroactivité des actes juridiques, que si la règle nouvelle est accompagnée de dispositions particulières qui déterminent spécialement ses conditions d’application dans le temps (arrêt du 22 juin 2022, Volvo et DAF Trucks, C 267/20, EU:C:2022:494, point 32 ainsi que jurisprudence citée).

128 En ce qui concerne le règlement litigieux, il convient de constater, ainsi qu’il ressort des points 113 à 118 du présent arrêt et comme les institutions l’ont, à juste titre, souligné, que celui-ci n’a pas institué de nouveaux droits à l’égard des transactions visées à l’article 2 de ce règlement, mais a procédé à l’application des droits institués par les règlements d’exécution nos 1238/2013 et 1239/2013, étant entendu que l’application de ces droits était seulement suspendue aussi longtemps que l’engagement pris par Jiangsu Seraphim restait en vigueur, en application de l’article 3, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 1239/2013, et ce conformément à l’article 8, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement antidumping de base et à l’article 13, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement antisubventions de base.

129 L’article 2 du règlement litigieux comporte donc une application aux effets futurs des situations nées antérieurement à son entrée en vigueur, plutôt qu’une application rétroactive à une situation acquise antérieurement à cette date, au sens de la jurisprudence rappelée aux points 126 et 127 du présent arrêt.

130 Est également entaché d’une erreur de droit l’argument retenu par le Tribunal au point 138 de l’arrêt attaqué, selon lequel, d’une part, l’article 8, paragraphe 10, du règlement antidumping de base et l’article 13, paragraphe 10, du règlement antisubventions de base et, d’autre part, l’article 10, paragraphe 5, du règlement antidumping de base et l’article 16, paragraphe 5, du règlement antisubventions de base s’opposeraient à l’existence du pouvoir de la Commission d’invalider des factures conformes et d’exiger, de manière prétendument rétroactive, le paiement des droits sur les transactions concernées, au motif que ces dispositions identifieraient de manière limitative les situations dans lesquelles ces droits peuvent être appliqués de manière rétroactive.

131 En effet, d’une part, il suffit de relever que les mesures adoptées à l’article 2 du règlement litigieux ne revêtent pas une portée rétroactive, comme il a été constaté au point 129 du présent arrêt.

132 D’autre part, il a été constaté, aux points 115 à 118 du présent arrêt, qu’un tel pouvoir peut valablement se fonder sur l’article 8, paragraphe 9, du règlement antidumping de base et l’article 13, paragraphe 9, du règlement antisubventions de base.

133 En ce qui concerne, par ailleurs, l’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1238/2013 et l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1239/2013, ces règlements d’exécution ne sauraient non plus être considérés comme étant rétroactifs, en ce qu’ils ont institué des droits antidumping et des droits compensateurs à l’égard des importations effectuées, en violation de l’engagement concerné, après leur entrée en vigueur, et prévu, moyennant l’invalidation des factures conformes, la perception de ces droits à l’avenir en conséquence et dans l’hypothèse d’une telle violation et du retrait de cet engagement.

134 Il s’ensuit que l’arrêt attaqué est également entaché d’erreurs de droit dans la mesure où le Tribunal s’est fondé, notamment aux points 132 à 139 de cet arrêt, sur la rétroactivité du règlement litigieux ou celle des règlements d’exécution susmentionnés pour conclure qu’il ressortait de l’intention du législateur de l’Union et de l’économie générale des règlements de base que ceux-ci ne pouvaient constituer une base juridique pour l’adoption des mesures visées à l’article 2 du règlement litigieux.

135 Enfin, force est de constater que, ainsi que M. l’avocat général l’a, en substance, souligné aux points 100 à 104 de ses conclusions, l’interprétation susmentionnée des règlements de base est corroborée par le fait que, contrairement à ce que le Tribunal a estimé au point 151 de l’arrêt attaqué, en l’absence de possibilité de percevoir, à la suite du retrait de l’acceptation d’un engagement, les droits antidumping et les droits compensateurs à l’égard de toutes les importations ayant été effectuées en violation de cet engagement, une telle violation n’entraînerait pas de conséquences suffisamment importantes pour assurer le respect et l’exécution correcte des engagements pris par les producteurs exportateurs, ce qui porterait ainsi atteinte à l’efficacité des systèmes de défense que les règlements de base visent à instituer.

136 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que les règlements de base ne pouvaient constituer des bases juridiques suffisantes pour l’adoption de l’article 2 du règlement litigieux.

137 Par conséquent, il y a lieu d’accueillir les deuxième et troisième moyens de pourvoi dans l’affaire C 439/20 P et la première branche du second moyen de pourvoi dans l’affaire C 441/20 P et, partant, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le quatrième moyen de pourvoi dans l’affaire C 439/20 P et la seconde branche du second moyen de pourvoi dans l’affaire C 441/20 P, d’annuler l’arrêt attaqué.

 Sur le recours devant le Tribunal

138 Conformément à l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lorsque la Cour annule la décision du Tribunal, elle peut soit statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé, soit renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue.

139 La Cour estime que le litige est en état d’être jugé et qu’il convient de statuer sur la demande d’annulation du règlement litigieux.

140 À cet égard, il ressort, tout d’abord, de la réponse, d’une part, à la première branche des premiers moyens des pourvois soulevés dans les deux affaires, aux points 53 à 72 du présent arrêt, et, d’autre part, à la seconde branche de ces premiers moyens, aux points 73 à 88 du présent arrêt, qu’il y a lieu de déclarer recevables, en substance pour les motifs retenus par le Tribunal, tant le recours tendant à l’annulation de l’article 2 du règlement litigieux que Jiangsu Seraphim a introduit devant celui-ci que l’exception d’illégalité que la requérante en première instance a soulevée à l’égard de l’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement d’exécution no 1239/2013.

141 En ce qui concerne, ensuite, le moyen unique soulevé par Jiangsu Seraphim devant le Tribunal, tendant à démontrer que, par l’article 2 du règlement litigieux, la Commission a violé, d’une part, les articles 8 et 10 du règlement antidumping de base et, d’autre part, les articles 13 et 16 du règlement antisubventions de base, en invalidant les factures conformes et en ordonnant la perception des droits dus au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique relative aux importations visées par ces factures, ce moyen doit être écarté comme étant non fondé pour les motifs exposés aux points 111 à 135 du présent arrêt.

142 Enfin, Jiangsu Seraphim a, sur le fondement de ces dispositions des règlements de base, soulevé une exception d’illégalité à l’égard de l’article 3, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1238/2013 et de l’article 2, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 1239/2013.

143 Jiangsu Seraphim soutient, en substance, que le Conseil, en agissant en tant qu’autorité d’exécution, et non en tant que législateur, ne pouvait pas déléguer à la Commission le pouvoir d’invalider les factures conformes sur simple retrait de l’acceptation d’un engagement, ni enjoindre aux autorités douanières de percevoir les droits sur des marchandises déjà mises en libre pratique sur le territoire douanier de l’Union.

144 À cet égard, il ressort des motifs exposés aux points 111 à 136 du présent arrêt que cette interprétation n’est pas fondée en droit.

145 En particulier, pour les motifs indiqués aux points 114 à 118 du présent arrêt, il ressort de l’économie générale des règlements de base, en particulier de l’article 8, paragraphes 1 et 9, du règlement antidumping de base ainsi que de l’article 13, paragraphes 1 et 9, du règlement antisubventions de base, que le Conseil pouvait habiliter la Commission à prévoir que, à la suite d’un retrait de son acceptation d’un engagement et de l’invalidation des factures correspondantes, une dette douanière devait naître au moment de l’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique.

146 En outre, ainsi qu’il résulte du raisonnement exposé aux points 120 à 124 du présent arrêt, le pouvoir du Conseil d’adopter les dispositions visées par l’exception d’illégalité s’inscrit dans le cadre du pouvoir de fixer, dans le règlement instituant les droits antidumping ou compensateurs, les « autres éléments » relatifs à la perception de ces droits, comme le prévoient l’article 14, paragraphe 1, du règlement antidumping de base et l’article 24, paragraphe 1, du règlement antisubventions de base.

147 Eu égard à ce qui précède, l’exception d’illégalité soulevée par Jiangsu Seraphim doit être écartée comme étant non fondée.

148 Ni le moyen unique du recours introduit par Jiangsu Seraphim devant le Tribunal ni l’exception d’illégalité soulevée dans le cadre de ce recours n’étant fondés, ledit recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

149 Aux termes de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens.

150 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

151 Jiangsu Seraphim ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés tant en première instance que dans le cadre des procédures de pourvoi par les institutions, conformément aux conclusions de ces dernières.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête :

1) L’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 8 juillet 2020, Jiangsu Seraphim Solar System/Commission (T 110/17, EU:T:2020:315), est annulé.

2) Le recours en annulation introduit devant le Tribunal de l’Union européenne par Jiangsu Seraphim Solar System Co. Ltd est rejeté.

3) Jiangsu Seraphim Solar System Co. Ltd est condamnée aux dépens exposés en première instance et dans le cadre des procédures de pourvoi par la Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne.