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Décisions

Cass. soc., 20 novembre 2013, n° 10-28.582

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacabarats

Rapporteur :

M. Hénon

Avocat général :

M. de la Tour

Avocats :

SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Waquet, Farge et Hazan

Basse-Terre, du 4 oct. 2010

4 octobre 2010

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 4 octobre 2010) rendu sur renvoi après cassation (Soc. 6 novembre 2008, n° 07-42. 222) et les pièces de la procédure, que M. X... a été engagé le 8 mars 1992 en qualité de technicien par la société CCB Martinique ; que cette société dont l'actionnaire de référence était la société Canon France, a été placée en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire le 23 janvier 2001 ; que par décision du 22 mars 2001, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de ce salarié protégé et le liquidateur judiciaire lui a notifié son licenciement pour motif économique le 28 avril 2001 ; que la décision d'autorisation a été annulée le 30 juillet 2001 ; que l'intéressé a demandé sa réintégration dans l'entreprise les 22 septembre 2001 et 22 décembre 2003 auprès de la société LGM bureautique, laquelle avait repris une partie des actifs de la société liquidée, ainsi que le paiement de ses salaires ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 28 janvier 2004 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de retrait de la pièce n° 11 correspondant au protocole transactionnel intervenu entre la société Canon France et lui-même, alors, selon le moyen :

1°/ que, le protocole d'accord transactionnel du 15 octobre 2001 le liant à la société Canon France n'ayant été produit ni par cette société, ni par lui-même, il y avait lieu d'ordonner son rejet des débats comme ayant été obtenu à la suite d'un artifice coupable, d'une fraude ou d'un abus ; qu'en déboutant le salarié de sa demande de rejet de cette pièce au motif qu'elle avait été produite par M. Y..., avocat de la société Canon France et de M. Z..., liquidateur de la société CCB Martinique, par bordereau du 29 janvier 2004, alors qu'il résulte des énonciations claires et précises de ce bordereau que M. Y... était seulement le conseil de Me Z..., le liquidateur judiciaire de la société CCB Martinique, la cour d'appel a dénaturé cette pièce et, par suite, a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ que la simple référence par le salarié dans ses écritures à la conclusion d'un protocole d'accord transactionnel avec la société Canon France ne constitue pas un motif de nature à dispenser la société LGM bureautique, tiers à ce contrat, du respect des procédures et des règles de preuve applicables ; qu'en se fondant sur la référence des écritures de M. X... devant la cour d'appel de Basse-Terre pour l'audience du 3 avril 2006 pour déduire la régularité de la production par la société LGM bureautique de cette convention à caractère confidentiel à laquelle elle n'était pas partie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 9 du code de procédure civile et L. 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a fait ressortir que la clause de confidentialité stipulée dans la transaction conclue avec la société Canon France, en qualité d'actionnaire de référence de la société CCB Martinique, avait privé la société LGM bureautique de la possibilité d'en invoquer les effets en défense à l'action du salarié, en a déduit à bon droit, sans dénaturation, que cette dernière pouvait se prévaloir de la portée de cette transaction produite aux débats par la société Canon France ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen, qu'il résulte de l'article 2048 du code civil, que les transactions se renferment dans leur objet et que la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, s'entend de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu ; que le préambule de la transaction énonçait d'une part, qu'il avait été expressément convenu entre la société Canon France et M. Jean Joël X... de trancher toute difficulté et toute conséquence tirée de la rupture des relations ayant existé entre M. Jean Joël X... et la société CCB Martinique et plus généralement, toute autre difficulté et litige se rattachant directement et indirectement à la procédure, dans tous ses aspects, de redressement et de liquidation judiciaire de CCB Martinique et susceptible de concerner le Groupe Canon France et/ ou ses dirigeants et d'autre part que Monsieur Jean Joël X... reprochait à la société Canon France d'avoir directement concouru à la déconfiture de la société CCB Martinique en gérant directement cette société, mais aussi en n'apportant pas suffisamment de trésorerie afin de permettre le redressement de ladite société et d'avoir commis des fautes engageant sa responsabilité tant civile que pénale qui l'oblige à réparer les préjudices qui en résultent ; qu'en déclarant que par la signature de cette transaction, M. X... a renoncé à toute demande, de quelque nature que ce soit, liée à son licenciement, la cour d'appel a violé les articles 2048 et 2049 du code civil ;

Mais attendu que si l'effet relatif des contrats interdit aux tiers de se prévaloir de l'autorité d'une transaction à laquelle ils ne sont pas intervenus, ces mêmes tiers peuvent néanmoins invoquer la renonciation à un droit que renferme cette transaction ;

Et attendu qu'ayant retenu que par l'effet de la transaction le salarié avait renoncé à remettre en cause son licenciement, la cour d'appel en déduit à bon droit que la société qui avait repris partie des contrats de travail dans le cadre de la liquidation judiciaire de l'employeur était fondée à se prévaloir de cette renonciation pour s'opposer à la demande de réintégration formée à son encontre par l'intéressé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.