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Décisions

Cass. 2e civ., 2 décembre 2021, n° 19-24.999

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pireyre

Rapporteur :

M. Cardini

Avocats :

SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés

Fort-de-France, du 10 sept. 2019

10 septembre 2019


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 10 septembre 2019), statuant sur renvoi après cassation (1ère Civ., 15 mars 2017, pourvoi n° 16-10.525), et les productions, à la suite de la vente d'un bien immobilier par la société Mavi vacances à la Sotradom, la Société financière Antilles Guyane (la Sofiag), dénommée désormais Soredom (la Soredom), qui avait pris une inscription hypothécaire sur le bien vendu en garantie d'un prêt consenti à la société venderesse, a fait pratiquer une saisie-attribution entre les mains du notaire.

2. La société Mavi vacances a saisi un juge de l'exécution d'une contestation.

3. La Société d'aménagement et de gestion de la Guadeloupe (la Sagg), bénéficiant d'une inscription hypothécaire de premier rang, est intervenue volontairement à l'instance.

Recevabilité du pourvoi contesté par la défense

4. La Sagg fait valoir que le pourvoi est dépourvu d'objet, et comme tel irrecevable.

5. Elle expose que la Sotradom a assigné, le 11 septembre 2018, les sociétés Mavi vacances, Sagg et Soredom devant le tribunal de grande instance de Basse-Terre qui a, par jugement du 9 mai 2019 assorti de l'exécution provisoire, rejeté la demande de la Soredom, tendant à la suspension de la procédure de distribution du prix dans l'attente de l'examen du présent pourvoi en cassation, rejeté la demande de modification du projet de distribution en vue de se voir attribuer la somme de 200 000 euros et accueilli la demande d'établissement de l'état de répartition du prix excluant la société Sofiag de la distribution. Elle ajoute que l'appel interjeté par la Sofiag a été déclaré caduc par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 6 juillet 2020 et que le notaire a versé l'intégralité des fonds consignés sur le compte CARPA à la demande de la Sotradom.

6. Cependant, ces circonstances ne sont pas de nature à priver d'objet le pourvoi formé contre l'arrêt ayant, par confirmation du jugement entrepris, dit que la créance saisie entre les mains du notaire était indisponible en raison du droit de préférence de la Sagg et ayant ordonné la mainlevée de la saisie-attribution.

7. Le pourvoi est, dès lors, recevable.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. La Soredom fait grief à l'arrêt de dire que la créance saisie entre les mains du notaire était indisponible en raison du droit de préférence de la Sagg et d'ordonner mainlevée immédiate de la saisie-attribution pratiquée le 16 mai 2013, alors « qu'en l'absence de purge des inscriptions, le créancier hypothécaire ne bénéficie d'aucun droit de préférence sur le prix de vente amiable de l'immeuble grevé ; qu'en retenant, pour ordonner la mainlevée de la saisie-attribution, que le « droit de préférence de la Sagg [...] s'[était] reporté sur le prix de vente de l'immeuble [...] [et que] celle-ci était fondée à se prévaloir de l'indisponibilité de la créance » (arrêt, p. 11, § 2), quand elle relevait elle-même que le notaire détenait la créance saisie « dans l'attente de la purge des inscriptions » (ibid.), en sorte que le prix de vente n'avait pas été subrogé à l'immeuble grevé d'une hypothèque, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 211-2 du code des procédures civiles d'exécution et 2475 du code civil. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

9. La Sagg conteste la recevabilité du moyen en soutenant que la critique développée au soutien de la première branche est contraire à l'argumentation soulevée devant les juges du fond.

10. Aux termes de ses conclusions d'appel, la Sofiag faisait valoir que la saisie-attribution entraîne l'attribution immédiate des sommes disponibles et que, dans ces conditions, si la saisie est validée, le notaire lui remettra les somme disponibles après règlement des créanciers hypothécaires qui la précéderaient par leur rang.

11. Il résulte de ces énonciations que la Soredom reconnaissait, implicitement mais nécessairement, que la Sagg bénéficiait d'un droit de préférence sur le prix de vente, de sorte que le moyen est incompatible avec la position soutenue par la Soredom devant la cour d'appel.

12. Le moyen n'est, dès lors, pas recevable.

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

13. La Soredom fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'une saisie-attribution peut porter sur une créance indisponible et qu'elle est seulement privée de son effet attributif ; qu'en retenant, pour ordonner la mainlevée de la saisie-attribution, que la Sagg « était fondée à se prévaloir de l'indisponibilité de la créance [saisie] », quand il résultait seulement de cette indisponibilité que la saisie n'emportait pas attribution immédiate de la créance au profit du saisissant, la cour d'appel, a violé les articles L. 211-1 et L. 211-2 du code des procédures civiles d'exécution. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

14. La Sagg conteste la recevabilité du moyen en soutenant que la critique développée dans la seconde branche est contraire à la thèse soutenue par la Soredom devant les juges du fond.

15. Cependant, la Soredom faisait valoir devant la cour d'appel qu'une saisie-attribution peut être pratiquée sur une créance rendue indisponible et qu'elle est seulement privée de son effet attributif.

16. Le moyen est, dès lors, recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles L. 211-1 et L. 211-2, alinéa 1, du code des procédures civiles d'exécution :

17. Selon le premier de ces textes, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail. Aux termes du second, l'acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers ainsi que de tous ses accessoires. Il rend le tiers personnellement débiteur des causes de la saisie dans la limite de son obligation.

18. Il résulte de ces textes qu'une saisie-attribution peut être pratiquée sur une créance indisponible et qu'elle est seulement privée de son effet attributif.

19. Cependant, l'arrêt retient que le droit de préférence de la Sagg s'est reporté sur le prix de vente de l'immeuble et que le montant de sa créance est supérieur à celui de la créance saisie.

20. Le moyen est, dès lors, inopérant.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.