Cass. 2e civ., 17 octobre 2019, n° 18-20.209
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pireyre
Avocat :
SCP Spinosi et Sureau
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un arrêt d'une cour d'appel du 21 septembre 2009, MM. O..., E..., E..., F... et O... D... et Mme Z... D... (les consorts D...) ont été condamnés à démolir une construction implantée sur le terrain de M. S..., sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de son prononcé ; que par un jugement du 22 mars 2016, un juge de l'exécution a liquidé l'astreinte à la somme de 25 000 euros ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les consorts D... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à ce que leur soit octroyé un délai de grâce pour exécuter l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 21 septembre 2009 alors, selon le moyen, que, après signification d'un commandement, le juge de l'exécution a compétence pour accorder au débiteur un délai de grâce pour s'exécuter ; qu'en l'espèce, les consorts D... faisaient régulièrement valoir dans leurs conclusions d'appel qu'il convenait de leur accorder un délai de grâce pour l'exécution de la décision rendue le 21 septembre 2009 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ayant ordonné la démolition sous astreinte de partie de leur bâtiment qui empiéterait sur le terrain de M. S..., à raison de la procédure en cours devant le tribunal de grande instance de Toulon et tendant à ce que leur soit reconnue l'usucapion sur cette parcelle de terrain litigieuse ; qu'ils invoquaient notamment le désordre qui résulterait de l'exécution de l'arrêt du 21 septembre 2009 en cas de reconnaissance de cette usucapion par le tribunal, qui entraînerait, par voie de conséquence, reconstruction de partie du bâtiment qui aura été précédemment et injustement démoli ; qu'en ne procédant à aucune recherche sur ce point, pourtant de nature à justifier l'octroi d'un délai de grâce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 510 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'en refusant d'accorder un délai de grâce au débiteur d'une obligation de faire assortie d'une astreinte, le juge de l'exécution ne fait qu'exercer le pouvoir discrétionnaire qu'il tient de l'article 1244-1 du code civil, dans sa rédaction alors applicable ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Mais, sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
Attendu qu'en infirmant le jugement en date du 22 mars 2016 en ses dispositions portant sur le montant de l'astreinte liquidée et en liquidant à la somme de 100 000 euros le montant de l'astreinte mise à la charge des consorts D... par l'arrêt rendu le 21 septembre 2009, pour la période comprise entre le 30 décembre 2009 et le 6 juillet 2016, aux motifs que le montant de l'astreinte doit être réduit en application de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du jugement qui avait fixé son montant à 25 000 euros et violé le principe susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il liquide à la somme de 100 000 euros le montant de l'astreinte mise à la charge des consorts D... par l'arrêt rendu le 21 septembre 2009 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence pour la période comprise entre le 30 décembre 2009 et le 6 juillet 2016 et condamne in solidum MM. O... D..., E... D..., E... D..., F... D..., O... D... et Mme Z... D... à payer cette somme de 100 000 euros à M. S..., l'arrêt rendu le 5 octobre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.