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Décisions

Cass. 2e civ., 19 mai 2022, n° 20-22.111

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pireyre

Rapporteur :

Mme Dumas

Avocat général :

M. Aparisi

Avocats :

SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Yves et Blaise Capron

Rennes, du 1 sept. 2020

1 septembre 2020

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 1er septembre 2020), sur le fondement d'un acte notarié du 16 septembre 2011, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Atlantique Vendée (la banque) a fait délivrer, les 28 mars et 19 décembre 2017, deux commandements valant saisie immobilière à MM. [V] sur deux biens immobiliers leur appartenant.

Examen des moyens

Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. MM. [K] et [B] [V] font grief à l'arrêt de les débouter de l'ensemble de leurs demandes, notamment celle tendant à voir condamner la banque à payer à M. [K] [V] des dommages-intérêts pour manquement à son obligation de conseil, d'information et de mise en garde sur l'assurance souscrite par l'emprunteur, et d'ordonner la compensation entre les créances respectives des parties, en conséquence, de constater que la créance de la banque était de 18 222,23 euros, outre intérêts au taux de 3,68 % l'an sur la somme de 16 222,23 euros à compter du 8 novembre 2016 et jusqu'au parfait paiement, et outre intérêts au taux légal pour le surplus à compter du 28 mars 2017, et en conséquence d'ordonner la vente forcée de l'immeuble situé commune de [Localité 6] (44) [Adresse 4] figurant au cadastre section ZY n° [Cadastre 1] [Adresse 5] pour une surface de 02 ha 99 a 50 ca, et les constructions édifiées dessus, et de renvoyer l'affaire devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nantes aux fins de fixation de la date d'adjudication et des modalités de visite de l'immeuble, alors « que la demande reconventionnelle du débiteur saisi tendant à voir condamner le créancier poursuivant à lui verser des dommages et intérêts, qui dépasse le pouvoir juridictionnel du juge de l'exécution, se heurte à une fin de non recevoir et doit donc être jugée irrecevable ; qu'en déboutant MM. [V] de leur demande tendant à voir condamner la banque à verser à M. [K] [V] des dommages et intérêts pour manquement à son obligation de conseil, d'information et de mise en garde sur l'assurance souscrite par l'emprunteur, au motif qu'elle ne relevait de pas la compétence du juge de l'exécution, quand cette fin de non recevoir ne pouvait être sanctionnée que par l'irrecevabilité de la demande, la cour d'appel a violé l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire :

4. En application de ce texte, si le juge de l'exécution est compétent pour connaître de la contestation d'une mesure d'exécution forcée, il n'entre pas dans ses attributions de se prononcer sur une demande de condamnation à des dommages-intérêts contre le créancier saisissant, qui n'est pas fondée sur l'exécution ou l'inexécution dommageable de la mesure.

5. Dès lors qu'une telle demande ne constitue pas une contestation de la mesure d'exécution au sens du texte précité, le juge de l'exécution ne dispose pas du pouvoir juridictionnel de statuer sur celle-ci.

6. Or, le défaut de pouvoir juridictionnel d'un juge constitue une fin de non-recevoir, qui peut, comme telle, être proposée en tout état de cause en application de l'article 123 du code de procédure civile.

7. Après avoir justement retenu que faute de constituer une contestation de la saisie immobilière, la demande présentée par les débiteurs tendant à la condamnation de la banque créancière au paiement de dommages-intérêts d'un montant équivalent à celui de sa créance ne relevait pas des attributions du juge de l'exécution, l'arrêt déboute MM. [V] de leurs demandes.

8. En statuant ainsi, alors qu'une telle demande était irrecevable, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

11. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 4 à 6 que la demande de MM. [V] tendant à la condamnation de la banque à payer à M. [K] [V] une somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts et d'ordonner la compensation entre les créances respectives des parties est irrecevable.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elle a débouté MM. [V] de leur demande tendant à condamner la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Atlantique Vendée à payer la somme de 20 000 euros de dommages-intérêts à M. [K] [V] et d'ordonner la compensation entre les créances respectives des parties, l'arrêt rendu le 1er septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

DÉCLARE IRRECEVABLE la demande de MM. [V] tendant à condamner la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Atlantique Vendée à payer la somme de 20 000 euros de dommages-intérêts à M. [K] [V] et d'ordonner la compensation entre les créances respectives des parties.