Cass. 2e civ., 10 janvier 2019, n° 17-25.719
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Brouard-Gallet
Avocats :
SCP Alain Bénabent, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Piwnica et Molinié, SCP Richard
Sur le pourvoi principal :
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Interfimo fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'appel provoqué de M. H... , ès qualités, alors, selon le moyen :
1°/ qu'un appel provoqué n'est recevable que si l'appel principal est susceptible de modifier la situation de l'appelant provoqué, en lui donnant un intérêt nouveau à user d'une voie de recours qu'il n'avait pas précédemment cru à propos d'exercer ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire recevable l'appel provoqué de M. H... , ès qualités, que celui-ci avait un intérêt nouveau à agir en considération du contenu des demandes des parties effectivement présentes en cause d'appel, sans indiquer en quoi les appels interjetés par les différentes parties en cause étaient de nature à modifier la situation du mandataire liquidateur et lui donnait un intérêt à user de cette voie de recours qu'il n'avait pas cru devoir exercer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 549 et 550, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 août 2017, du code de procédure civile ;
2°/ qu'un appel provoqué n'est recevable que si l'appel principal est susceptible de modifier la situation de l'appelant provoqué, en lui donnant un intérêt nouveau à user d'une voie de recours qu'il n'avait pas précédemment cru à propos d'exercer ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire recevable l'appel provoqué de M. H... , ès qualités, que celui-ci avait un intérêt nouveau à agir en considération de l'arrêt de la Cour de cassation du 25 septembre 2014, bien que cet arrêt ait été prononcé antérieurement à l'expiration du délai d'un mois imparti à M. H... pour interjeter appel à titre principal, la cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif impropre à établir que les appels interjetés par les différentes parties en cause à l'encontre du jugement du 17 septembre 2014 étaient de nature à modifier la situation du mandataire liquidateur et lui donnait un intérêt à user de cette voie de recours qu'il n'avait pas cru devoir exercer, a privé sa décision de base légale au regard des articles 549 et 550, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 août 2017, du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt relève que la société Interfimo demandait d'infirmer le jugement en ce qu'il avait dit que la dette de M. X... et de la société CS services envers la société Interfimo s'élève à une certaine somme, montant pour lequel la saisie du 25 octobre 2002 produirait effet et, par réformation, de dire que la dette de M. X... et de la société CS services envers la société Interfimo s'élèverait à une somme plus élevée et d'infirmer ce jugement en ce qu'il avait débouté la société Interfimo de sa demande tendant à voir se substituer dans la voie d'exécution entreprise par M. X... et la société Consultaudit et par réformation, de dire que la société Interfimo dans la limite de sa créance bénéficiait de la créance appartenant à l'origine à la société Consultaudit, aujourd'hui à la société CS services, contre M. Z..., ainsi que de la totalité des accessoires de ladite créance, et notamment les mesures conservatoires et d'exécution pratiquées par la société Consultaudit et la société CS services à l'encontre de M. Z... ;
Qu'en l'état de ces constatations, dont il découlait que les demandes présentées en appel par la société Interfimo étaient de nature à affecter la situation juridique de la société Consultaudit, représentées par M. H... , dont les prétentions en première instance avaient été pour partie déclarées irrecevables et pour partie rejetées, c'est à bon droit que la cour d'appel, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par la seconde branche, a décidé qu'en l'état des demandes des parties présentées en cause d'appel, l'appel provoqué de M. H... , ès qualités, était recevable ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société Interfimo fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à voir juger caduque la saisie conservatoire pratiquée par la société Fegec le 23 février 2004, alors, selon le moyen, qu'à peine de caducité, lorsque la mesure conservatoire est pratiquée entre les mains d'un tiers, le créancier signifie à ce dernier, dans le délai de huit jours à compter de leur date, une copie des actes attestant qu'il a introduit une procédure ou accompli les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire ; que cette signification doit porter sur chacune des procédures engagées afin d'obtenir un titre exécutoire, de manière à ce que le tiers saisi puisse être informé du fondement de l'indisponibilité de la créance saisie et du prolongement de cette indisponibilité dans le temps ; qu'en déboutant la société Interfimo de sa demande tendant à voir juger caduque la saisie conservatoire du 23 février 2004, motif pris que la dénonciation des seuls actes de la procédure commerciale engagée suffisait informer le tiers saisi, pour en déduire qu'il était indifférent que la société Fegec se soit abstenue de signifier les actes afférents à la procédure pénale qu'elle avait engagée en qualité de partie civile, bien que la société Fegec ait été tenue, afin d'informer le tiers saisi de son obligation de maintenir les fonds indisponibles, de lui dénoncer l'ensemble des procédures qu'elle avait diligentées pour obtenir un titre exécutoire, la cour d'appel a violé les articles L. 511-4, R. 511-7 et R. 511-8 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu qu'en application de l'article R. 511-8 du code des procédures civiles d'exécution, à peine de caducité de la mesure conservatoire, lorsque celle-ci est pratiquée entre les mains d'un tiers, le créancier saisissant lui signifie une copie des actes attestant l'introduction d'une procédure ou l'accomplissement des formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire requis par l'article R. 511-7 du même code, dans un délai de huit jours à compter de leur date ; que cette diligence étant requise en vue d'informer le tiers saisi du maintien de l'obligation qui lui incombe de conserver les biens rendus indisponibles par la saisie conservatoire, la caducité n'est pas encourue, en cas de pluralité de procédures engagées à fin d'obtention d'un tel titre, lorsqu'au moins l'une de ces procédures lui a été dénoncée ;
Qu'ayant relevé que dans la suite de la saisie conservatoire du 23 février 2004, la société Fegec a assigné, le 23 mars 2004, M. X... et la société Consultaudit devant le tribunal de commerce, à fin de recouvrement de la créance ayant fait l'objet de la saisie conservatoire, et a déposé contre M. X... une plainte avec constitution de partie civile et que l'assignation devant le tribunal de commerce a été dénoncée à M. Z... le 26 mars 2004 mais non les actes relatifs à la procédure pénale, c'est à bon droit que la cour d'appel, retenant exactement qu'était atteint l'objectif de la dénonciation, a écarté la demande de caducité de la saisie conservatoire pratiquée par la société Fegec ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société Interfimo fait grief à l'arrêt de dire que la créance de la société CS services à l'encontre de M. Z... n'avait pu être attribuée à la société Interfimo à hauteur de sa propre créance par l'effet de la saisie-attribution pratiquée par cette dernière le 16 février 2005, alors, selon le moyen :
1°/ que compte tenu de l'effet dévolutif de l'appel prévu par l'article 561 du code de procédure civile, en cas d'infirmation de la décision entreprise, le dispositif de l'arrêt se substitue à celui de cette décision et prend rétroactivement la place de celle-ci, qui est mise à néant des chefs infirmés ; qu'en décidant que la saisie-attribution réalisée par la société Interfimo le 16 février 2005 n'avait produit aucun effet attributif en l'absence de créance saisissable, motif pris que cette mesure avait été pratiquée postérieurement à la sentence arbitrale du 4 octobre 2004 ayant dit que par l'effet de la compensation, la créance de M. X... et de la société Consultaudit était réduite à néant, après avoir pourtant relevé que cette sentence arbitrale avait été infirmée par un arrêt du 30 novembre 2006, ce dont il résultait que M. X... et la société Consultaudit étaient demeurés créanciers de M. Z... en l'absence de toute compensation et que la saisie-attribution pratiquée par la société Interfimo entre les mains de ce dernier avait eu un effet attributif, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 542 et 561 du code de procédure civile, dans leur rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, ensemble les articles L. 211-1 et L. 211-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
2°/ qu'en décidant que la saisie-attribution du 16 février 2005 pratiquée par la société Interfimo n'avait produit aucun effet attributif en l'absence de créance saisissable, motif pris que cette mesure avait été pratiquée postérieurement à la sentence arbitrale du 4 octobre 2004 ayant dit que par l'effet de la compensation, la créance de M. X... et de la société Consultaudit était réduite à néant, après avoir dans le même temps décidé que la validité de l'acte de cession du 18 janvier 2005, par lequel la société Consultaudit avait cédé sa créance envers M. Z... à la société CS services, ne pouvait être remise en cause, ce dont il résultait qu'il existait une créance saisissable entre les mains de M. Z... à la date de la saisie-attribution pratiquée par la société Interfimo le 16 février 2005, la cour d'appel a violé les articles L. 211-1 et L. 211-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu que la saisie-attribution ne peut porter que sur une créance existant au jour de la saisie ; qu'ayant relevé que la saisie-attribution pratiquée par la société Interfimo le 16 février 2005 était intervenue après une décision, dont le caractère exécutoire n'est pas débattu, ayant ordonné la compensation de la créance que cette société prétendait saisir avec des créances réciproques de M. Z..., la cour d'appel en a exactement déduit que faute de créance saisissable à sa date, la saisie-attribution du 16 février 2005 n'avait pas produit d'effet attributif, peu important que cette décision soit ultérieurement infirmée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que la société Interfimo fait grief à l'arrêt de décider que la créance de la société CS services à l'encontre de M. Z... n'avait pu être attribuée à la société Interfimo à hauteur de sa propre créance par l'effet de la saisie-attribution pratiquée par cette dernière le 22 mai 2015, alors, selon le moyen, qu'en se bornant à énoncer, pour décider que la saisie-attribution, non contestée, pratiquée le 22 mai 2015 par la société Interfimo n'avait pu lui attribuer le bénéfice de la créance que la société CS services détenait à l'encontre de M. Z... à hauteur de sa propre créance, que cette mesure ne pouvait faire échec au droit de préférence du premier saisissant, sans indiquer quel créancier serait venu en préférence de la société Interfimo, de sorte que la créance visée par la saisie-attribution du 22 mai 2015 n'aurait pu lui être attribuée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 211-1 et L. 211-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu que la cour d'appel n'a pas énoncé que la société Interfimo se prévalait en cause d'appel d'une saisie-attribution ayant pour effet de lui attribuer le bénéfice de la créance de la société CS services sur M. Z... ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait, ne peut être accueilli ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le cinquième moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le pourvoi incident de M. Z... et de la société Z... :
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Z... et la société Z... font grief à l'arrêt de les débouter de leur demande tendant à voir juger que le total des intérêts dus par M. Z... au titre des condamnations prononcées par la sentence du 23 juin 2000 s'établit à la somme de 153 418 euros, et en conséquence que ses dettes envers M. X... et la société CS services ne sauraient s'établir à la somme de 5 270 579,02 euros, alors, selon le moyen :
1°/ que dans leurs conclusions d'appel, M. Z... et la société Z... démontraient, de manière particulièrement étayée, que le montant de la dette de M. Z... à l'égard de M. X... et de la société CS services était bien inférieur à la somme de 5 270 579,02 euros figurant dans le décompte de M. B... du 19 décembre 2003 ; qu'en retenant néanmoins, pour rejeter leur demande relative au quantum de la dette de M. Z..., qu'ils ne contestaient pas utilement le montant figurant sur le décompte du 19 décembre 2013, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile, ensemble l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
2°/ qu'en se bornant à affirmer, pour rejeter la demande de M. Z... et la société Z... relative au quantum de la dette de M. Z..., qu'ils ne contestaient pas utilement le montant figurant sur le décompte du 19 décembre 2013, sans s'expliquer, même sommairement, sur les explications particulièrement détaillées que fournissaient ces derniers à l'appui de leur contestation, étayées par un tableau récapitulatif synthétisant très clairement ces explications, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel n'a pas statué sur une demande de liquidation de la dette, en principal comme en intérêts, de M. Z... envers M. X... et la société CS services ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait, ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. Z... et la société Z... font grief à l'arrêt de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il avait dit que la saisie conservatoire du 25 octobre 2002 pratiquée par la société Interfimo portait sur la créance de M. X... telle que fixée par la sentence du 23 juin 2000 et dit que la société Interfimo serait en droit d'être payée par préférence à la société Fegec au titre de sa saisie conservatoire du 25 octobre 2002 sur M. Z..., alors, selon le moyen, que la conversion d'une saisie conservatoire en saisie-attribution ne permet pas au créancier saisissant d'appréhender la créance saisie si elle intervient après que cette créance ait été éteinte par compensation avec une créance connexe ; qu'en jugeant que la société Interfimo serait en droit d'être payée par préférence à la société Fegec sur la créance de M. X... contre M. Z..., au titre de sa saisie conservatoire du 25 octobre 2002 qu'elle avait convertie par acte du 20 juillet 2005, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si le fait que cette conversion soit intervenue après que la créance saisie ait, par l'effet des sentences arbitrales des 7 juin 2004 et 4 octobre 2004, été éteinte par compensation avec une créance connexe ne la privait pas d'effet, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 523-1 et L. 112-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu que l'acte de conversion d'une saisie conservatoire en saisie-attribution ne tendant qu'à l'attribution de la créance préalablement saisie, la condition d'existence de cette créance s'apprécie au jour où la saisie conservatoire est pratiquée ;
Qu'ayant relevé que ce n'était que postérieurement à la saisie conservatoire pratiquée le 25 octobre 2002 entre les mains de M. Z... par la société Interfimo au préjudice de M. X... qu'avait été rendue une décision ordonnant la compensation entre les créances réciproques de M. Z... et M. X..., et que cette décision de compensation avait été infirmée, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le pourvoi incident de M. H... , ès qualités :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les deux moyens du pourvoi, annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident de M. Z... et de la société Cabinet F... Z... , qui est éventuel :
REJETTE le pourvoi principal et les autres pourvois incidents.