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Décisions

Cass. com., 14 décembre 2022, n° 20-17.782

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigneau

Rapporteur :

M. Riffaud

Avocat général :

Mme Henry

Avocats :

SCP Alain Bénabent, SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Zribi et Texier

Reims, du 12 mai 2020

12 mai 2020


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 12 mai 2020), la société [J]ub dont M. [J] est le président a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 8 janvier 2015 et 7 janvier 2016, la société Tirmant [Y], devenue la société [M] [Y], étant désignée en qualité de liquidateur.

2. Par une ordonnance du 9 avril 2018, le juge-commissaire a ordonné la vente aux enchères publiques en deux lots d'un immeuble à usage industriel appartenant à la société [J]ub.

3. Le 23 novembre 2018, le second lot a été adjugé à la société AGP.

4. La société Saint-Pourcain, dont M. [J] est le gérant, a formé une surenchère du dixième, qui a été contestée par la société adjudicataire.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La société Saint-Pourcain fait grief à l'arrêt de dire qu'elle est une personne interposée et d'annuler la surenchère qu'elle a formée le 3 décembre 2018, alors :

« 1°/ que le débiteur saisi ne peut se porter enchérisseur ni par lui-même, ni par personnes interposées ; que l'interposition d'une personne morale suppose, outre que la société débiteur saisi et la société auteur de la surenchère soient majoritairement détenues par une même personne, que l'auteur de la surenchère ait été constituée dans le seul objectif de se porter surenchérisseur pour le débiteur saisi et qu'elle n'ait pas surenchéri pour son propre compte ; qu'en se contentant de relever, pour décider que la situation caractérisait une "interposition de personnes" prohibée par l'article R. 322-39 du code des procédures civiles d'exécution, que "M. [J] contrôlait donc en totalité tant la société débitrice [J]ub que la société Saint-Pourcain, surenchérisseur", sans prendre en compte, comme il lui était demandé, la circonstance que la SCI Saint-Pourcain, constituée dès 2006, avait une existence propre et avait surenchéri pour son propre compte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 322-39 du code des procédures civiles d'exécution ;

2°/ que l'adjudication ordonnée par le juge-commissaire, qui est organisée pour les besoins de la liquidation judiciaire, est destinée à permettre une cession des actifs du débiteur dans les meilleures conditions possibles en vue du désintéressement des créanciers ; qu'en retenant, pour décider que la situation caractérisait une "interposition de personnes" prohibée par l'article R. 322-39 du code des procédures civiles d'exécution, "que la surenchère de la SCI Saint-Pourcain permet[ait] à M. [J] de transférer le bien immobilier d'une de ses sociétés en liquidation judiciaire à une autre in bonis, et ce à un moindre coût", sans prendre en compte, comme il lui était demandé, la circonstance que la surenchère permettait au contraire d'accroître l'assiette du droit de gage des créanciers et de favoriser leur désintéressement, ce qui constitue la finalité principale de la procédure d'adjudication dans le cadre d'une liquidation judiciaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 322-39 du code des procédures civiles d'exécution et L. 642-18, alinéa 3, du code de commerce. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte de l'article L. 642-3, alinéa 1er du code de commerce, rendu applicable à l'adjudication des immeubles d'un débiteur en liquidation judiciaire par l'article L. 642-20 de ce code, que les dirigeants de droit ou de fait de la personne morale en liquidation judiciaire ne sont pas admis, directement ou par personne interposée, à présenter une offre, peu important qu'ils aient ou non l'intention d'agir pour leur compte.

7. L'arrêt relève que M. [J] est le dirigeant de droit de la société [J]ub.

8. Il s'en déduit qu'il ne pouvait valablement former une surenchère.

9. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, la décision se trouve légalement justifiée.

10. Le moyen ne peut être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.