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Décisions

CA Angers, ch. a com., 10 janvier 2023, n° 19/02036

ANGERS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

4G Restauration (SARL)

Défendeur :

G6 (SAS), La Grignotine Tourangelle (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Corbel

Conseillers :

Mme Robveille, M. Benmimoune

Avocats :

Me Langlois, Me Papin, Me Boisnard

T. com. Angers, du 25 sept. 2019, n° 17/…

25 septembre 2019

FAITS ET PROCÉDURE

La SARL La Grignotine Tourangelle (ci-après, la société) exploite un fonds de commerce de briocherie à [Localité 4] (37). Elle a pour gérant M. [B] [I].

Le capital de cette société est détenu à hauteur de 50,98% par la société G6, qui exerce une activité de holding et est dirigée par M. [B] [I], et à hauteur de 49,02% par la SARL 4G Restauration, qui exerce une activité de holding animatrice de sociétés dans laquelle elle a une participation et qui est dirigée par M. [J] [P].

Des difficultés relationnelles se sont faites jour entre M. [B] [I] et M. [J] [P], liées notamment à la procédure de divorce entre M. [P] et la fille de M. [I].

Par délibération du 27 avril 2017, l'assemblée générale ordinaire annuelle de la société a décidé, par les voix de M. [I], d'affecter le résultat le résultat de l'exercice clos le 30 septembre 2016, d'un montant de 50 065,26 euros et le report à nouveau créditeur d'un montant de 430 458,23 euros, soit un total de 480 523,49 euros, en totalité au poste 'report à nouveau créditeur'.

Prétendant que par cette décision, la SAS G6, associée majoritaire de la société, aurait, sans motif légitime justifié par l'intérêt social, bloqué la distribution des dividendes au titre de l'exercice clos au 30 septembre 2016, bien qu'elle ait exprimé sa volonté de les voir distribuer, la société 4G Restauration a, le 10 juillet 2017, assigné la SAS G6 et la société devant le tribunal de commerce d'Angers en annulation de ladite délibération pour abus de majorité.

La même décision de mise en réserves des bénéfices de l'exercice clos le 30 septembre 2017, d'un montant de 24 919,87 euros, a été prise par délibération de l'assemblée générale ordinaire annuelle le 29 mars 2018, portant le bénéfice distribuable mis en réserves à 505 443,36 euros et le compte 'autres réserves' à 880 943,36 euros.

Dans ses dernières écritures, la société 4G Restauration a demandé au tribunal de :

- dire et juger que la SAS G6 a commis un abus de majorité lors des assemblées des 27 avril 2017 et 29 mars 2018,

- en conséquence, prononcer la nullité des délibérations des assemblées générales de la SARL La Grignotine Tourangelle en dates des 27 avril 2017 et 29 mars 2018 pour abus de majorité,

- désigner un mandataire ad hoc au choix du tribunal aux fins de procéder à la convocation d'une assemblée générale de la SARL La Grignotine Tourangelle ayant pour ordre du jour la distribution des bénéfices de cette dernière correspondant à l'exercice clos au 30 septembre 2016 et à l'exercice clos au 30 septembre 2017,

- dire que le mandataire ad hoc désigné aura également pour mission de représenter la société G6 lors de ladite assemblée et de voter en son nom dans le sens des décisions conformes à l'intérêt social de la SARL La Grignotine Tourangelle,

- dire que tous les frais de rémunération du mandataire ad hoc désigné seront à la charge de la SAS G6,

- condamner la SAS G6 à lui verser la somme totale de 36.757,71 euros au titre de dommages et intérêts,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- condamner solidairement la SARL La Grignotine Tourangelle et la SAS G6 à lui payer la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

La SAS G6 et la SARL La Grignotine Tourangelle se sont opposées à ces prétentions et ont demandé reconventionnellement la condamnation de la société 4G Restauration à payer à la SAS G6 la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, outre à leur payer à chacune la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, condamner la demanderesse aux dépens.

Par jugement du 25 septembre 2019, le tribunal de commerce d'Angers a :

- jugé la SARL 4G Restauration recevable mais mal fondée en ses demandes,

- constaté que la SAS G6 n'a commis aucun abus de majorité,

- débouté la SARL 4G Restauration de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la SARL 4G Restauration d'avoir à payer à la SARL La Grignotine Tourangelle et à la SAS G6 chacune, la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SARL 4G Restauration aux entiers dépens de l'instance, y compris les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 95,30 euros.

Pour statuer ainsi le tribunal s'est appuyé sur l'existence d'une baisse significative du chiffre d'affaires (passé de 372 703 € sur l'exercice 2015 à 318 418 € sur l'exercice 2016 et à 281 384 € sur l'exercice 2017, soit une baisse de 24 % en trois ans), et corrélativement, sur une baisse des bénéfices (passés de 50 065 euros en 2016, à 24 919 euros en 2017 et à 2 189 euros en 2018), tout en constatant une diminution des charges globales. Il en a déduit que la décision de l'associée majoritaire de ne pas distribuer les dividendes des deux exercices était un acte de saine gestion, malgré le montant des réserves s'élevant à 694 K€.

Par déclaration du 16 octobre 2019, la SARL 4G Restauration a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il l'a jugée recevable mais mal fondée en ses demandes, a constaté que la SAS G6 n'a commis aucun abus de majorité, l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes tendant notamment à voir prononcer la nullité des délibérations des assemblées générales de la SARL La Grignotine Tourangelle en date des 27 avril 2017 et 29 mars 2018 pour abus de majorité, voir désigner un mandataire ad hoc de la SARL La Grignotine Tourangelle, voir dire que le mandataire ad hoc désigné aura également pour mission de représenter la SAS G6 lors de l'assemblée générale qui sera convoquée, dire que tous les frais de rémunération du mandataire ad hoc seront à la charge de la SAS G6, voir condamner la SAS G6 à lui verser la somme de 36.757,71 euros à titre de dommages et intérêts et voir condamner la SARL La Grignotine Tourangelle et la SAS G6 solidairement à lui payer la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ; en ce qu'il l'a condamnée d'avoir à payer à la SARL La Grignotine Tourangelle et à la SAS G6 chacune, la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et l'a condamnée aux entiers dépens ; intimant la SAS G6 et la SARL La Grignotine Tourangelle.

La SARL 4G Restauration, d'une part, la SAS G6 et la SARL La Grignotine Tourangelle, d'autre part, ont conclu.

Une ordonnance du 3 octobre 2022 a clôturé l'instruction de l'affaire.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La SARL 4G Restauration prie la cour de :

vu les articles 1240 et 1844-1 du code civil,

vu l'article L. 223-27 du code de commerce,

- déclarer recevable et en tout cas bien fondé l'appel qu'elle a formé à l'encontre du jugement du tribunal de commerce d'Angers en date du 25 septembre 2019,

y faisant droit,

- infirmer le jugement entrepris,

statuant à nouveau,

- en conséquence, prononcer la nullité des délibérations des assemblées générales de la SARL La Grignotine Tourangelle en dates des 27 avril 2017 et 29 mars 2018 pour abus de majorité,

- désigner un mandataire ad hoc au choix aux fins de procéder à la convocation d'une assemblée générale de la SARL La Grignotine Tourangelle ayant pour ordre du jour la distribution des bénéfices de cette dernière correspondant à l'exercice clos au 30 septembre 2016 et à l'exercice clos au 30 septembre 2017,

- ordonner que le mandataire ad hoc désigné aura également pour mission de représenter la société G6 lors de ladite assemblée et de voter en son nom dans le ses des décisions conformes à l'intérêt social de la société La Grignotine Tourangelle,

- ordonner que tous les frais de rémunération du mandataire ad hoc désigné seront à la charge de la société G6,

- condamner la société G6 à lui verser la somme totale de 36.757,71 euros au titre de dommages et intérêts,

- débouter la demande de condamnation articulée à son encontre aux fins de la voir payer à la société G6 la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée,

- débouter plus largement la société G6 de toutes ses demandes plus amples ou contraires,

- condamner solidairement la SARL La Grignotine Tourangelle et la SAS G6 à lui payer la somme de 17.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

- condamner les mêmes aux dépens de première instance et d'appel.

La société 4G Restauration expose que l'abus de majorité est constitué toutes les fois qu'un associé majoritaire use de ses pouvoirs en dehors de la considération impérieuse de l'intérêt social, pour satisfaire ses intérêts personnels fussent-ils résumés à la volonté d'empêcher les autres associés de satisfaire leurs droits à la distribution des bénéfices, et que dans ces conditions, un abus de droit de majorité peut résulter de l'affectation des bénéfices aux réserves lorsqu'elle ne sert que les associés majoritaires notamment à travers leur volonté d'asphyxier financièrement l'associé minoritaire, en le privant de son droit le plus absolu qui est celui aux bénéfices à dividende, sans que l'intérêt social ne le nécessite, dès lors qu'il n'existe aucun profit pour une société à poursuivre une thésaurisation stérile sans motif.

Elle soutient que pour qu'un abus de majorité soit constitué, il n'y a pas à faire la démonstration d'un acte contraire à l'intérêt social mais qu'il suffit qu'il ait été fait dans l'unique intérêt d'un associé majoritaire.

Elle souligne que la distribution de dividendes ne posait pas de problème avant la séparation de M. [P] et de la fille de M. [I] et affirme qu'il y avait toujours eu, depuis son entrée dans le capital de la société, une distribution annuelle des bénéfices conformément aux statuts modifiés.

Elle fait valoir qu'aucun motif légitime sous-tendu par l'intérêt social n'est avancé pour justifier la mise en réserve systématique des bénéfices de la société depuis l'exercice clos du 30 septembre 2016. Elle constate que les intimées ne justifient l'existence d'un projet d'achat d'un autre fonds de commerce ou de travaux de rénovation de la vitrine du magasin allégués pour justifier le refus de distribuer les dividendes ; que lors de l'assemblée du 27 avril 2017, elle n'a obtenu aucune réponse sur les investissements futurs prétendument envisagés pour la société alors que le rapport de gestion de la gérance n'en fait pas état ; que lors de l'assemblée du 29 mars 2018, M. [I] a prétexté, sans justificatif, la volonté de vendre le fonds de commerce pour en acquérir un autre ; que le rapport de gestion de cette assemblée ne renvoie à aucune activité de recherche et de développement au cours de l'exercice écoulé. Elle en conclut qu'il s'agit d'hypothétiques projets inventés pour les seuls besoins de la cause et constate, d'ailleurs, qu'ils n'ont toujours aucune existence plusieurs années plus tard alors que la trésorerie est toujours aussi importante puisqu'à ce jour et au titre des comptes clos au 30 septembre 2021, les comptes affichent toujours des capitaux propres à hauteur de 886 782 euros et une trésorerie de près de 700 000 euros.

Pour caractériser la satisfaction d'un intérêt personnel de l'associée majoritaire, elle invoque l'existence d'une convention de prestations de services conclue entre la société G6 et la Grignotine Tourangelle selon laquelle la première effectue au profit de la seconde toutes prestations de services en matière administrative, juridique, comptable, financière et commerciale, en effectuant le suivi de comptabilité, l'établissement des paies, la rédaction des contrats de travail, l'établissement et le dépôt des déclarations fiscales et sociales, moyennant une redevance calculée en fonction des charges de la société G6 et non du coût des prestations supportées par elle, et souligne, en outre, que cette convention n'a pas jamais été soumise au vote des associés bien qu'il s'agisse d'une convention réglementée.

Elle déclare que la SAS G6 a cherché, pour préserver ses intérêts à son détriment, à augmenter la redevance annuelle de la SARL La Grignotine Tourangelle alors même que le chiffre d'affaires de celle-ci décroît depuis plus de cinq ans. Elle estime que par ce biais, la société G6 assèche la trésorerie de la société, ce qui lui permet, à la fois, de justifier l'absence de distribution de dividendes et de ne pas en souffrir puisque la convention de prestations de services lui permettrait d'appréhender l'intégralité du résultat de la société par le biais de la redevance payée par cette dernière et ce, de façon injustifiée parce que les prestations facturées relèveraient de la gérance et que la gérance dans les statuts s'était engagée à ne pas être rémunérée.

Elle en déduit que la décision de non-distribution et de mise en réserve des bénéfices ne préjudice pas à la société G6 qui s'est constituée un moyen d'assurer sa rémunération, peu important la dégradation des résultats de la structure.

Elle ajoute que M. [I] cherche à multiplier les procédures pour asphyxier M. [P], qu'il se sert aussi de la SCI Sabriga qu'il dirige aussi, bailleresse la société La Gourmandise, filiale de la SARL G4 Restauration, placée en redressement judiciaire, pour entretenir un esprit procédurier à l'endroit de ex-gendre.

La SAS G6 et la SARL La Grignotine Tourangelle sollicitent de la cour qu'elle :

- dise et juge la SARL 4G Restauration irrecevable et en tout cas mal fondée en ses demandes,

- constate que la SAS G6 n'a commis aucun abus de majorité,

- confirme le jugement dont appel,

- rejette les demandes tendant à prononcer la nullité de la délibération de l'assemblée générale de la société La Grignotine Tourangelle du 27 avril 2017 et du 29 mars 2018,

- rejette la demande de désignation d'un mandataire ad hoc ou d'un administrateur provisoire,

- déboute la SARL 4G Restauration de ses demandes de dommages-intérêts,

- condamne la SARL 4G Restauration à payer à la SAS G6 la somme de 5.000 euros à titre de dommages intérêts,

- condamne la SARL 4G Restauration à leur payer chacune la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la SARL 4G Restauration aux dépens.

La SAS G6 conteste tout abus de majorité et rappelle que, contrairement à ce que soutient l'appelant, la distribution de dividendes n'est pas un droit absolu.

Elle oppose que la SARL La Grignotine Tourangelle enregistre depuis plusieurs années une diminution de son chiffre d'affaires, due notamment à la concurrence importante liée à l'installation de nouveaux commerces proches et que, depuis les exercices clos au 30 septembre 2016 et 30 septembre 2017, il a été décidé la mise en réserve des bénéfices de la société afin de sécuriser son activité, en conformité avec son objet social, en vue de créer un second point de vente à [Localité 4], dans une rue à fort potentiel. Elle souligne que, néanmoins, la société a connu une marge brute et une masse salariale contenus.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :

- le 23 septembre 2022 pour la SARL 4G Restauration,

- le 30 septembre 2022 pour la SAS G6 et la SARL La Grignotine Tourangelle.

MOTIFS DE LA DECISION

L'action en nullité des délibérations de l'assemblée générale d'une société pour abus de majorité est subordonnée à la démonstration par le demandeur à l'action de deux conditions cumulatives tenant à ce que la décision contestée est contraire à l'intérêt social et a été prise dans l'unique intérêt de l'associé majoritaire au détriment de l'associé minoritaire.

Il ne suffit donc pas d'établir que le refus de distribuer les bénéfices de la société répond à l'intérêt de l'associé majoritaire, il faut établir qu'il est contraire à cet intérêt social.

Il convient de rappeler que la mise en réserves n'est pas en soi constitutive d'abus. Elle peut être une décision de bonne gestion en permettant l'autofinancement de la société.

Dans le cas présent, il est vrai que le montant des sommes mises en réserves est important.

Le poste « report à nouveau» antérieurement à la mise en réserves des bénéfices de l'exercice clos le 30 septembre 2017 était d'un montant de 430 458,23 euros. Du fait des reports successifs, le montant des valeurs mobilières de placement et des disponibilités s'élevaient, au 30 septembre 2017, à 694 K€, quand le chiffre d'affaires annuel était à cette date de 296 K€. La société 4G Restauration fait justement observer, au vu des comptes annuels 2016-2017, que la trésorerie de la société représente près de 2,5 fois son chiffre d'affaires annuel, que les capitaux propres de la société s'élèvent à plus de 889 K€ et que l'actif circulant est de plus de 736 K€.

Ceci est d'autant plus significatif que la société 4G Restaurant affirme, sans être contredite sur ce point, que le commerce de boulangerie exploité par la société et qui est en réalité un point de vente chaud, ne requiert pas un fonds de roulement très important et que ce besoin serait même, dans les faits, négatif. Or, la mise en réserves pratiquée représente trente-sept mois de charges (les charges dans les comptes étant de 22 800 euros par mois pour 856 023 euros de réserves).

Pour autant, il doit, d'abord, être relevé que la mise en réserves des bénéfices de la société n'est pas systématique puisque lors des assemblées générales antérieures à l'exercice clos du 30 septembre 2016, il a été décidé une distribution des bénéfices à hauteur de 100 000 euros pour l'exercice clos au 30 septembre 2013 et à hauteur de 200 000 euros pour l'exercice clos au 30 septembre 2014. De même, la distribution des bénéfices n'a pas été systématique puisqu'aucune distribution n'a eu lieu sur l'exercice clos au 30 septembre 2015.

Le refus de distribution de dividendes au titre des exercices clos au 30 septembre 2016 et au 30 septembre 2017, alors que la société présentait un résultat positif respectivement de 50 065 euros et de 24 920 euros, s'appuie sur une baisse significative des chiffres d'affaires sur les deux exercices concernés.

Cette baisse de l'activité de la société est analysée par les intimées comme venant essentiellement de la présence de concurrents mieux géographique implantés, ce qui les conduit à mettre en avant l'intérêt d'acquérir un nouveau fonds.

Force est de constater que la société 4G Restauration ne conteste pas cette analyse et de l'intérêt que pourrait présenter pour la société l'investissement dans un nouveau fonds. Elle suspecte seulement que les intentions de la société d'y procéder ne soient pas réelles.

Mais la circonstance qu'aucun projet d'investissement ne se soit concrétisée jusqu'à ce jour et que la société n'a pas été en mesure de justifier d'une quelconque recherches en ce sens n'invalide pas l'intérêt qu'un tel projet pourrait avoir pour la société et, par suite, l'intérêt pour la société de disposer de fonds lui permettant un tel investissement.

Le fait que les deux décisions attaquées qui privent la société 4 G Restauration de la distribution immédiate des résultats de la société coïncide avec l'apparition de la mésentente liée à la situation familiale n'est pas suffisant pour établir que la mise en réserves des bénéfices des deux exercices clos en 2016 et 2017 n'obéirait pas à une politique de prudence nécessaire ou à une politique d'investissement, et ne correspondrait ni à l'objet de la société ni à une exigence de saine gestion.

En outre, il n'est pas démontré que ces décisions de refus de distribution de dividendes en 2016 et 2017 aient eu pour effet de favoriser l'associé majoritaire au détriment de la société 4 G Restauration.

Les profits non distribués accroissent la valeur des parts.

Contrairement à ce que prétend la société 4 G Restauration, la connexion entre la mise en réserves des bénéfices et une prétendue rémunération indirecte de l'associée majoritaire à travers une convention de prestations de service n'est pas démontrée.

En effet, il n'est pas établi, en l'absence de décision judiciaire en ce sens ou de tous documents permettant à la cour de se prononcer sur ce point, que la convention de prestations de service qui a été conclue entre la société G.6 et la société pourrait s'analyser en une rémunération déguisée de l'associée majoritaire au cours des années 2016 et 2017, ce qui supposerait de rapporter la preuve que les rétributions versées par la société, dont le montant n'est d'ailleurs pas précisé, serait supérieure à la valeur des prestations assurées. De même la validité de cette convention n'a pas été remise en cause judiciairement.

En l'état, si cette convention a pour effet de participer aux charges de l'entreprise, les premiers juges ont justement relevé que les charges avaient été globalement contenues au cours des deux exercices en cause, ce qui est logique du fait de la baisse du chiffre d'affaires.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation des délibérations, les autres demandes qui en découlent et la demande en paiement de dommages -intérêts à défaut de faute établie.

L'exercice d'une action en justice ne dégénère en faute pouvant donner lieu à des dommages et intérêts que si le demandeur a agi par malice ou de mauvaise foi, ou avec légèreté blâmable.

En l'espèce, les intimées n’en démontre pas un abus de l'appelante dans l'exercice de son droit d'agir en justice. Elles seront déboutées de leur demande de dommages et intérêts.

La société 4 G Restauration, qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel.

Il n'est pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Déboute les sociétés G6 et La grignotine tourangelle de leur demande de dommages et intérêts.

Condamne la société 4 G Restauration aux dépens d'appel.

Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.