Cass. 2e civ., 16 novembre 2017, n° 16-23.173
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Flise
Avocats :
SCP Boullez, SCP Ohl et Vexliard
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, qu'un arrêt du 19 décembre 2013 a constaté la résiliation du contrat de bail portant sur des locaux à usage commercial donnés en location à la société Fantasy et a ordonné son expulsion ainsi que celle de tout occupant de son chef ; que M. Cédric X... et Mme Alexa X... (les consorts X...), propriétaires indivis avec une autre société des locaux loués, ont fait délivrer un commandement de quitter les lieux à la société Nice Shop (la société), cessionnaire du fonds de commerce auparavant exploité par la société Fantasy, qui a saisi un juge de l'exécution ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 411-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
Attendu que pour confirmer le jugement ayant déclaré nul le commandement de quitter les lieux, l'arrêt retient que ce commandement, que les consorts X... ont fait délivrer en vertu de l'arrêt du 19 décembre 2013, constitue une mesure d'exécution, conformément à l'article L. 411-1 du code des procédures civiles d'exécution qui dispose que l'expulsion d'un immeuble ne peut être poursuivie qu'en vertu d'une décision de justice après signification d'un commandement d'avoir à libérer les lieux, sauf disposition spéciale, ce dont les consorts X... ne justifient pas ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, au jour de la résiliation du contrat de bail par l'effet de la clause résolutoire, la société disposait d'un droit propre opposable aux bailleurs, alors que l'arrêt du 19 décembre 2013 avait ordonné l'expulsion de la société Fantasy et de tout occupant de son chef, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu les articles L. 111-9 du code des procédures civiles d'exécution, 815-2 et 815-3, 1°, du code civil ;
Attendu que selon le premier de ces textes, sauf disposition contraire, l'exercice d'une mesure d'exécution et d'une mesure conservatoire est considéré comme un acte d'administration, que selon le deuxième, tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d'urgence et que selon le troisième, le ou les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité, effectuer les actes d'administration relatifs aux biens indivis ;
Attendu que pour confirmer le jugement entrepris, l'arrêt retient, après avoir relevé que conformément à l'article L. 111-9 du code des procédures civiles d'exécution, l'exercice d'une mesure d'exécution est considéré comme un acte d'administration et que conformément à l'article 815-3 du code civil, seuls les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis peuvent effectuer des actes d'administration relatifs au bien indivis, que c'est en conséquence à bon droit qu'au visa de ces articles, le premier juge a déclaré nul le commandement de quitter les lieux après avoir constaté que les consorts X... n'étaient titulaires que de la moitié des droits indivis sur le bien loué ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la délivrance d'un commandement de quitter les lieux, signifié en exécution d'un titre d'expulsion, constitue une mesure nécessaire à la conservation du bien indivis qui n'implique donc pas le consentement d'indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 mars 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.