Cass. com., 17 mars 1987, n° 85-11.130
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué (Colmar, 27 novembre 1984) que la société Rhinolith a assigné en référé la société Bank fur karnten (la banque) pour obtenir la désignation d'un expert chargé d'examiner une laine de verre prétendument défectueuse qui lui avait été livrée par la société Thermowool, que la cour d'appel, qui a rejeté cette demande, a retenu essentiellement que la société Rhinolith n'était pas en droit de refuser le paiement de la créance de la banque en se fondant sur les éventuels défauts de la marchandise livrée par la société Thermowool, qu'en effet, elle avait non seulement accepté, le 14 novembre 1981, la cession à la banque de la créance envers elle de la société Thermowool mais encore promis, le 26 avril 1982, après la dernière livraison de marchandise, de payer à la banque la créance ainsi cédée ;
Attendu que la société Rhinolith fait grief à la cour d'appel de s'être ainsi prononcée alors, selon le pourvoi, que, d'une part, l'on ne peut accepter par avance la cession de créances futures ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que la prétendue acceptation, par lettre du 14 novembre 1981, de la société Rhinolith était antérieure à la naissance des créances du cédant ; qu'en déduisant de cette lettre l'engagement de la société Rhinolith de ne pas contester les créances futures du cédant, la cour d'appel a violé l'article 1690 du Code civil, alors que, d'autre part, la renonciation à un droit ne peut être antérieure à la naissance de ce droit ; d'où il suit que la société Rhinolith ne pouvait renoncer par avance à contester ces créances futures ; qu'en déduisant de la lettre du 14 novembre 1981 une renonciation générale de la société Rhinolith à opposer toute exception pour des créances futures, la cour d'appel a violé l'article 2220 du Code civil, alors qu'en outre, la renonciation à un droit doit résulter d'actes manifestant sans équivoque l'intention de renoncer ; que la société Rhinolith s'est bornée, dans sa lettre du 14 novembre 1981, à opposer au cessionnaire l'exception de compensation qu'elle aurait du opposer au cédant, ce conformément aux dispositions de l'article 1295 du Code civil ; qu'en déduisant de cette lettre une renonciation de la société Rhinolith à opposer au cessionnaire toutes les exceptions qu'elle aurait pu opposer au cédant, la cour d'appel a violé les articles 1315 et 2221 du Code civil, alors que, de plus, l'acceptation pure et simple de la cession de créance n'a pour seul effet que d'interdire au débiteur d'opposer au cessionnaire l'exception de compensation qu'il aurait pu opposer au cédant ; d'où il suit que la reconnaissance faite par un administrateur de la société anonyme Rhinolith, lors d'une réunion du 26 avril 1982, de la créance de la société Thermowool et l'engagement de la payer dorénavant à la banque ne pouvait emporter pour le débiteur aucune renonciation à se prévaloir des causes de nullité ou d'extinction de la créance cédée ; qu'en déduisant de l'engagement d'un administrateur de la société Rhinolith du 26 avril 1982 une renonciation de cette société à opposer toute exception au cessionnaire, la cour d'appel a violé l'article 1295 du Code civil, alors qu'encore, l'action estimatoire de l'article 1644 du Code civil a pour objet une restitution d'une partie du prix ; qu'en énonçant que l'action estimatoire que pouvait exercer la société Rhinolith aurait pour objet l'allocation à son profit de dommages et intérêts qui se compenserait avec la créance du prix de la société Thermowool, la cour d'appel a violé le texte susvisé, alors, de surcroît, que la réception de marchandises sans réserve n'a pour effet que de couvrir les vices apparents dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même ; qu'en déduisant de la réception des marchandises sans réserve par la société Rhinolith l'impossibilité pour elle de se prévaloir de la garantie de vices cachés, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 1642 du Code civil et, par refus d'application, l'article 1641 du même Code, et alors qu'enfin, les dispositions de l'article 146 du nouveau Code de procédure civile ne sont pas applicables lorsqu'une mesure d'instruction est sollicitée sur le fondement de l'article 145 du même Code ; qu'en subordonnant l'octroi de l'expertise sollicitée à la preuve par la société Rhinolith de faits susceptibles de caractériser les vices cachés allégués, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 146 du nouveau Code de procédure civile et, par fausse interprétation, l'article 145 du même Code ;
Mais attendu qu'en refusant la mesure d'instruction sollicitée, la cour d'appel, qui n'a pas fondé sa décision sur l'application de l'article 146, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, n'a fait qu'user du pouvoir qu'elle tient de l'article 145 de ce Code ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi