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Décisions

Cass. soc., 16 février 1999, n° 96-40.643

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gélineau-Larrivet

Rapporteur :

M. Brissier

Avocat général :

M. Kehrig

Avocat :

Me Choucroy

Bordeaux, du 5 déc. 1995

5 décembre 1995

Sur le premier moyen :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 5 décembre 1995), M. X..., de nationalité suédoise, a été engagé par la société française Château Tour Saint-Christophe, en vertu d'un contrat de travail signé en Suède le 21 octobre 1991 ; que ce contrat comporte une clause compromissoire prévoyant " l'arbitrage de la chambre de commerce de Stockholm " pour tout différend concernant ce dernier ; qu'il a été licencié le 1er octobre 1992 ; qu'il a saisi le conseil de prud'hommes pour obtenir notamment le paiement des indemnités liées à son licenciement ; que la société Château Tour Saint-Christophe a décliné la compétence de la juridiction française en se fondant sur la clause compromissoire ;

Attendu que la société Château Tour Saint-Christophe et l'administrateur judiciaire de cette société font grief à l'arrêt d'avoir décidé que le conseil de prud'hommes était compétent pour statuer sur le litige opposant les parties, alors, selon le moyen, d'une part, que viole les principes de droit international privé français régissant les conflits de juridictions l'arrêt qui, pour retenir la compétence des tribunaux français dans le litige international, se fonde sur la circonstance que la convention des parties aurait été soumise à la loi française en vertu de la convention de Rome du 19 juin 1980 énonçant le principe de la liberté des cocontractants dans le choix de la loi applicable et prévoyant à défaut de choix que la loi applicable est celle du lieu d'exécution du contrat ; alors, d'autre part, qu'il était relevé par la cour d'appel que M. X..., de nationalité suédoise, avait été engagé par contrat de travail rédigé en suédois, signé en Suède et comportant une clause compromissoire visant la compétence d'une juridiction arbitrale sise en Suède ainsi que le bénéfice au profit du salarié d'un plan de retraite suédois (SKANDIA) ; qu'il s'ensuit que ledit contrat de travail ayant un caractère international indiscutable, fait une fausse application à l'espèce des articles L. 517-1, L. 121-3 et L. 511-1 du Code du travail, et 14 et 2061 du Code civil, l'arrêt qui, sur le fondement de ces textes, retient que les parties n'avaient pu stipuler une clause attributive de juridiction ou une clause compromissoire visant une juridiction autre que celle désignée par la règle française de compétence interne ; alors, de plus, subsidiairement, que viole l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt qui retient que le contrat de travail de M. X... aurait été soumis à la loi française parce que celui-ci aurait été embauché pour travailler en France, sans s'expliquer sur le moyen des conclusions d'appel de la société faisant valoir que l'intéressé avait conclu son contrat de travail avec le groupe suédois, à partir d'une annonce parue en anglais dans un journal suédois visant un poste de " vendeur " en ces termes : " ... nous cherchons une personne qui puisse à la fois assurer le développement et avoir les qualités d'un vendeur pour promouvoir nos vins en Europe... ", alors, enfin, subsidiairement, que viole l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt qui considère que le lieu de travail de M. X... se trouvait en France, sans s'expliquer sur les moyens des conclusions d'appel de la société faisant valoir que l'intéressé avait conclu son contrat de travail avec le groupe suédois, à partir d'une annonce parue en anglais dans un journal suédois visant un poste de " vendeur " en ces termes : " ... nous cherchons une personne qui puisse à la fois assurer le développement et avoir les qualités d'un vendeur pour promouvoir nos vins en Europe... " et que l'activité du salarié devait se dérouler principalement en zone scandinave et en aucune façon en France dans la région bordelaise où un Suédois vendant du vin de Bordeaux n'aurait présenté aucun intérêt ;

Mais attendu que la clause compromissoire insérée dans un contrat de travail international n'est pas opposable au salarié qui a saisi régulièrement la juridiction française compétente en vertu des règles applicables, peu important la loi régissant le contrat de travail ;

Et attendu que la cour d'appel a constaté que le travail de M. X... de nationalité suédoise était exécuté en France au service de la société Château Tour Saint-Christophe ayant son siège social en France, de sorte que le conseil de prud'hommes avait compétence pour statuer sur le litige ; d'où il suit que la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions invoquées, a décidé à bon droit d'écarter la clause compromissoire ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.