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Décisions

Cass. soc., 4 mai 1999, n° 97-41.860

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gélineau-Larrivet

Rapporteur :

M. Brissier

Avocat général :

M. Kehrig

Avocats :

Me Bouthors, Me Ricard

Douai, du 28 févr. 1997

28 février 1997

Sur le moyen unique :

Vu les articles 2061 du Code civil et L. 511-1, alinéa 6, et R. 517-1, alinéa 4, du Code du travail, et les articles 5-1 et 54 de la convention de Lugano du 16 septembre 1988 ;

Attendu que M. X..., de nationalité belge, a été engagé le 11 février 1986, en qualité " d'ingénieur d'affaires ", par la société suisse Sacinter pour exécuter un travail en France ; que le contrat de travail comportait une clause compromissoire rédigée en ces termes : " Tout différend intervenant dans l'exécution ou l'interprétation du présent contrat sera soumis à un arbitrage tel qu'il est défini par le "concordat suisse sur l'arbitrage". Le siège du tribunal arbitral sera Lausanne " ; que M. X... a été licencié le 17 février 1995 pour motif économique ; qu'il a saisi, le 4 juillet 1995, le conseil de prud'hommes d'une demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la société Sacinter a décliné la compétence de la juridiction prud'homale ;

Attendu que, pour confirmer le jugement du conseil de prud'hommes qui s'est déclaré incompétent pour statuer sur le litige opposant les parties, l'arrêt attaqué énonce que la convention de Lugano du 16 septembre 1988 invoquée par M. X... a été publiée au Journal officiel le 5 février 1992, postérieurement à la formation du contrat du 11 février 1986 ; qu'en outre, elle exclut l'arbitrage de son champ, aux termes de son article 1er, 4° ; qu'il convient, en conséquence, de la déclarer inapplicable au cas du demandeur ; que le contrat de travail de M. X... est, des termes de son sixième paragraphe, soumis au " titre dixième du Code des obligations, loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 ", la seule dérogation exprimée dans le paragraphe 7 du même texte ayant trait " au délai de résiliation par l'employeur " ; que formé en Suisse entre un citoyen belge, alors domicilié en Belgique et une société suisse, il se réfère ainsi expressément à la loi suisse, à laquelle les parties ont entendu soumettre leurs rapports contractuels ; que la clause d'arbitrage insérée dans ce contrat est, dès lors, valide et exclut l'application des articles 2060 du Code civil français et L. 511-1 et R. 517-1 du Code du travail français ;

Attendu, cependant, que la clause compromissoire insérée dans un contrat de travail international n'est pas opposable au salarié qui a saisi régulièrement la juridiction française compétente en vertu des règles applicables, peu important la loi régissant le contrat de travail ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle a constaté que l'action du salarié devant le conseil de prud'hommes avait été engagée le 4 juillet 1995 et que le salarié exécutait son travail en France, ce dont il résultait, d'une part, que, la saisine de la juridiction prud'homale étant postérieure à l'entrée en vigueur le 1er janvier 1992, entre la Suisse et la France, de la convention de Lugano du 16 septembre 1988, cette convention était applicable en vertu de son article 54 et, d'autre part, que la juridiction française était compétente pour statuer sur le litige en application de l'article 5-1 de ladite Convention, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 février 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.