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Décisions

Cass. com., 8 mars 2023, n° 21-19.202

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigneau

Rapporteur :

Mme Vallansan

Avocat général :

Mme Guinamant

Avocat :

SCP Marc Lévis

Cass. com. n° 21-19.202

8 mars 2023

Faits et procédure 

1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 15 juin 2021), le 10 septembre 2015, la société Joyaux perles gemmes  (la société) a conclu avec plusieurs de ses créanciers un accord de conciliation homologué par un  jugement du 7 octobre 2015. Dans le cadre de cet accord, la société Banque palatine (la banque) a  consenti à la société une ligne de crédit de 70 400 euros et, le 19 mai 2016, la société a émis au bénéfice  de la banque un billet à ordre du même montant, à échéance du 29 juillet 2016, garanti par l'aval de M. [J].

2. La société ayant été placée en redressement puis liquidation judiciaires les 13 juillet et 7 septembre 2016 la banque a déclaré sa créance le 10 août suivant, puis a assigné en paiement M. [J]. 

Examen du moyen

3. La banque fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors « que lorsqu'il est mis fin de plein droit à un accord de conciliation en raison de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire du débiteur, le créancier qui a consenti à celui-ci des délais ou des remises de dettes dans le cadre de l'accord de conciliation recouvre l'intégralité de ses créances et des sûretés qui les  garantissaient, il ne conserve pas le bénéfice des nouvelles sûretés obtenues dans le cadre de l'accord, dès  lors que ces sûretés portent sur des créances antérieures à l'accord de conciliation ; qu'en revanche, le  bénéfice de ces sûretés est conservé pour les nouveaux concours financiers accordés dans ce cadre ; qu'en jugeant au contraire que la société Banque Palatine ne pouvait se prévaloir de l'aval garantissant un nouveau concours accordé dans le cadre de l'accord de conciliation devenu caduc, la cour d'appel a violé  l'article L. 611-12 du code de commerce. »

Réponse de la Cour 

Vu l'article L. 611-12 du code de commerce :

4. Si, selon ce texte, lorsqu'il est mis fin de plein droit à un accord de conciliation en raison de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire du débiteur, le créancier, qui a consenti à celui-ci des délais ou des remises de dettes dans le cadre de l'accord de conciliation, recouvre l'intégralité de ses créances et des sûretés qui les garantissaient, il ne conserve cependant pas le bénéfice des nouvelles sûretés obtenues dans le cadre de l'accord en contrepartie de ces délais ou de ces abandons de créances. 

5. En revanche, le créancier, qui a consenti, pour les besoins de l'accord, une avance donnant naissance à une nouvelle créance, garantie par un cautionnement ou un aval, est en mesure de demander l'exécution par la caution ou l'avaliste de cet engagement, en dépit de la caducité de l'accord. 

6. Pour rejeter la demande de la banque, l'arrêt relève que la ligne de crédit de 70 400 euros, dont le remboursement par la société a été garanti par l'aval de M. [J], a été consentie par la banque dans le cadre d'un accord de conciliation homologué et en déduit que le jugement d'ouverture, qui a eu pour effet d'entraîner la caducité de l'accord dans son intégralité, en ce compris les sûretés consenties dans ce seul cadre, a mis fin à l'aval consenti par M. [J].

7. En statuant ainsi, alors que le billet à ordre, avalisé par M. [J], avait fait naître une nouvelle créance en paiement de l'effet de commerce, la cour d'appel a violé le texte susvisé. 

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.