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Décisions

CA Pau, 2e ch. sect. 1, 5 avril 2011, n° 09/03298

PAU

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

JUVIN

Défendeur :

ARTIGA (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Monsieur BERTRAND

Conseillers :

Madame MEALLONNIER, Monsieur BEAUCLAIR

Avoués :

Me VERGEZ, SCP F. PIAULT / M. LACRAMPE-CARRAZE

Avocats :

Me LECLAIR, Me COLMET

DAX, du 22 juill. 2009

22 juillet 2009

La S.A.R.L. ARTIGA a en charge au sein du groupe de tissage de toiles basques LARTIGUE, la production de couture, soit la création, la coupe et la transformation desdites toiles.

En mai 2004, la S.A.R.L. ARTIGA et Madame JUVIN ont conclu un contrat de prestations de services à l'occasion duquel Madame JUVIN a pris des photographies des produits de la S.A.R.L. ARTIGA qui ont été reproduites dans ses catalogues. Cet accord a été appliqué de juillet 2004 au 28 mars 2007, date à laquelle Madame LARTIGUE cogérante de la S.A.R.L. ARTIGA a fait savoir à Madame JUVIN que sa mission prenait fin.

Madame JUVIN déclare qu'il a été mis fin au contrat en raison d'un désaccord des parties sur la cession de ses droits d'auteur, et la mention de son nom sur les photographies. La S.A.R.L. ARTIGA déclare pour sa part qu'à compter de 2007, elle a fait appel à un photographe professionnel qui correspondait à ses besoins, les photographies de Madame JUVIN présentant des défauts de qualité.

Madame JUVIN maintenant que la S.A.R.L. ARTIGA violait ses droits d'auteur sur ses photographies a assigné la S.A.R.L. ARTIGA en paiement de dommages-intérêts.

Par jugement en date du 22 juillet 2009, le Tribunal de Grande Instance de DAX a :

- débouté Madame JUVIN de l'ensemble de ses demandes comme étant mal fondées,

- débouté la S.A.R.L. ARTIGA de ses demandes reconventionnelles,

- condamné Madame JUVIN à payer à la S.A.R.L. ARTIGA la somme de 1.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné Madame JUVIN aux entiers dépens de l'instance.

Madame Françoise VARTE épouse JUVIN, se disant Caroline JUVIN demande à la Cour, réformant le jugement, de :

- condamner la S.A.R.L. ARTIGA à lui payer la somme de 84.836,00 euros en réparation des atteintes à ses droits patrimoniaux,

- condamner la S.A.R.L. ARTIGA à lui payer la somme de 169.672,00 euros en réparation des atteintes à ses droits moraux,

- ordonner à la S.A.R.L. ARTIGA de cesser toute reproduction ou utilisation des photographies prises par Madame JUVIN et ce sous astreinte définitive de 500,00 euros par infraction constatée,

- ordonner à la S.A.R.L. ARTIGA de détruire tout document ou support reproduisant les photographies en cause sous astreinte de 200,00 euros par jour de retard et ce en vue de leur destruction sous contrôle d'huissier aux frais de la S.A.R.L. ARTIGA,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la S.A.R.L. ARTIGA de ses demandes reconventionnelles,

- condamner la S.A.R.L. ARTIGA à payer à Madame JUVIN la somme de 5.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile outre les dépens, en ce compris les frais de constat d'huissier, dont distraction au profit de Maître VERGEZ.

Madame Françoise VARTE épouse JUVIN, se disant Caroline JUVIN soutient que ses photographies sont soumises aux dispositions de l'article L 131-3 du Code de la Propriété Intellectuelle régissant la transmission des droits d'auteur. Elle rappelle que seule l'originalité de la photographie, détermine son caractère protégeable, le fait qu'elle ne soit pas photographe professionnel et que l'appareil de photographie appartenait à la S.A.R.L. étant indifférent. Il appartient donc au juge de rechercher si les photographies sont originales, c'est-à-dire si elles sont le reflet de la personnalité de leur auteur, selon les critères définis par la jurisprudence, et Madame JUVIN soutient que son choix des couleurs, des accessoires, des compositions afin de créer des ambiances dans un but esthétique et d'efficacité publicitaire, établit que ces clichés sont le reflet de sa personnalité. Elle conteste avoir reçu des instructions de Madame LARTIGUE réduisant son intervention à une simple participation technique, et rappelle que les idées ne sont pas protégeables au contraire des réalisations concrètes. Elle soutient que l'essentiel des clichés a été pris à son domicile avec ses proches et pour l'un d'eux chez Madame CHAMPETIER DE RIBES. Elle relève que ses photographies étaient d'une qualité suffisante pour servir de support à la communication de l'entreprise pendant 33 mois d'expansion de son chiffre d'affaires. Elle fait valoir que la S.A.R.L. ARTIGA ne peut lui opposer des refus d'utilisation des clichés par la presse, alors que chaque organe de presse détermine les ambiances qu'il recherche, ce qui justifie la prise de 'shopping', prises de vue de produits à intégrer dans des ambiances par le journaliste avec d'autres produits d'autres marques.

Madame JUVIN rappelle que la S.A.R.L. ARTIGA a reproduit ses clichés sans autorisation en l'absence d'un acte de cession des droits patrimoniaux, qu'il ne peut être admis qu'il existerait une cession tacite desdits droits au regard des

dispositions de l'article L 131-1 du CPI, et ladite cession ne peut se déduire des factures émises en application de la convention qui ne visent que le paiement de prestations et non la cession totale et illimitée des droits d'auteur. En outre aucun élément ne démontre la volonté de la S.A.R.L. ARTIGA d'acquérir lesdits droits et qu'au contraire ladite société s'est toujours refusée à régulariser le sort des droits d'auteur sur les photographies, malgré l'intervention à cette fin d'une agence de presse, et la question desdits droits est à l'origine de la rupture. Elle justifie sa demande en dommages-intérêts au regard du nombre de dépliants et catalogues, du nombre de photographies sur chacun de ces supports, du nombre de visite sur le site internet de l'entreprise, de l'utilisation de ces supports malgré la défense qu'elle en a faite par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 18 avril 2007. Elle relève que ces photographies ont été publiées sans mention de son nom portant ainsi une atteinte à ses droits moraux qui doit être réparée par l'octroi de dommages-intérêts pour un montant double de celui de l'atteinte aux droits patrimoniaux.

La S.A.R.L. ARTIGA demande à la Cour de :

- constatant le défaut d'originalité des photographies litigieuses, confirmer le jugement déféré et débouter Madame JUVIN de l'ensemble de ses demandes,

- subsidiairement, constater l'autorisation tacite donnée par Madame JUVIN à l'exploitation de ses droits patrimoniaux au bénéfice de la S.A.R.L. ARTIGA et constater le défaut d'atteinte à ses droits moraux, en conséquence débouter de plus fort Madame JUVIN de ses demandes,

- en tout état de cause, réformant la décision déférée de ce chef, condamner Madame JUVIN à payer à la S.A.R.L. ARTIGA la somme de 10.000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et dilatoire,

- confirmer le jugement sur les frais d'instance occasionnés devant le Tribunal de Grande Instance,

- y ajoutant, condamner Madame JUVIN à payer à la S.A.R.L. ARTIGA la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile outre les dépens dont distraction au profit de la SCP PIAULT - LACRAMPE-CARRAZE.

La S.A.R.L. ARTIGA rappelle que toute oeuvre de l'esprit, pour être protégée doit présenter un caractère d'originalité, or les photographies de Madame JUVIN ne présentent aucun caractère d'originalité, en ce qu'elles ne portent pas l'empreinte de la personnalité de leur auteur et se différencier de celles qui préexistent dans le même champ intellectuel. Or Madame JUVIN n'a fait aucun choix artistique alors que l'ensemble de la communication était dicté par Madame LARTIGUE. Elle souligne que les clichés de Madame JUVIN sont éminemment substituables et que Madame JUVIN n'est pas un photographe professionnel et n'a exécuté qu'un travail de technicien avec le matériel de l'entreprise, et non de créateur en ce qu'elle n'avait le choix, ni du lieu, ni du moment de la prise de vue, ni de l'élaboration du cadre ou de la composition, ni de la position des personnages, ni des éclairages, l'ensemble des instructions esthétiques étant imposé par Madame LARTIGUE. Cette dernière faisait le choix des toiles pour les visuels, pour les lieux de prise de vue (décor champêtre, maison de famille, de vacances). Elle relève que les attestations versées sont celles

d'amies de l'appelante, et pour certaines étrangères aux débats. Elle soutient que le choix du support de communication de la marque appartenait au seul dirigeant de l'entreprise le visuel venant renforcer et établir l'image même de la marque au-delà des produits qu'elle représente, que ce choix était posé par Madame LARTIGUE dans le cadre de discussions indications préalables ainsi qu'il ressort de l'attestation de Madame CHAMPETIER DE RIBES. Elle souligne que n'importe quelle personne équipée du matériel nécessaire aurait pu réaliser les clichés en question qui n'ont fait que reproduire avec banalité des juxtapositions de tissages sans que la sensibilité du photographe ou ses compétences personnelles ne transparaissent. Elle rappelle que Madame JUVIN a perçu pendant la période considérée la somme mensuelle de 2.200,00 euros par mois, la rémunérant de ses peines et de ses services.

Subsidiairement, la S.A.R.L. ARTIGA soutient l'existence d'une autorisation tacite d'exploitation des droits patrimoniaux, les factures précisant la destination des travaux réalisés lesquels ne porte pas mention de l'exécution des missions visées à l'accord du 25 mai 2004. Elle rappelle en outre d'une première part que la durée de vie des photographies est d'un an correspondant à celle du catalogue, et que Madame JUVIN en a permis la diffusion, que la S.A.R.L. ARTIGA détient les CD-ROM avec les fichiers photos, d'une deuxième part que Madame JUVIN a laissé reproduire les photographies de ses proches sur les catalogues sans autorisation, d'une troisième part qu'elle n'a jamais sollicité que son nom figure sur les clichés alors qu'elle veillait à ce que les photographies d'un tiers ne soient pas utilisées en fraude de ses droits, d'une troisième part que les catalogues portent mention de l'imprimeur et de 'photo ARTIGA c' (pour copyright), ce qui démontre la cession des droits de Madame JUVIN. Enfin en participant sciemment à la divulgation des clichés, Madame JUVIN ne peut prétendre que son droit moral aurait été altéré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1 - Sur la protection des photographies de Madame JUVIN

Aux termes de l'article L 111-1 alinéa 1 du Code de la Propriété Intellectuelle, l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous.

Aux termes de l'article L 112-2 alinéa 1 du Code de la Propriété Intellectuelle, sont considérés notamment comme oeuvres de l'esprit au sens du présent code :

9° Les oeuvres photographiques et celles réalisées à l'aide de techniques analogues à la photographie.

Les photographies sont des oeuvres de l'esprit sans qu'il y ait lieu de distinguer suivant la nature des photographies utilisées, dès lors que celui qui revendique la protection légale démontre que les clichés qu'il a réalisés présentent une originalité suffisante manifestant l'empreinte de la personnalité de leur auteur.

L'originalité ainsi visée est indépendante de la qualité de professionnel du photographe, ou du fait que l'appareil utilisé appartiendrait à un tiers.

L'originalité de la photographie doit s'apprécier au vu de l'angle de vue, l'éclairage adéquat pour mettre en valeur les objets, le cadrage, les contrastes de couleur et reliefs, la composition, le jeu des lumières, le choix des objectifs, le tout en l'espèce dans un but esthétique et publicitaire.

Les photographies litigieuses portent sur les produits textiles de couleur de la marque ARTIGA.

Il n'est pas contesté que Madame JUVIN est l'auteur technique des prises de vues. Elle bénéficie donc d'une présomption selon laquelle elle en est l'auteur intellectuel, d'autant plus qu'il n'est pas contesté que nombre de clichés ont été réalisés dans sa maison et mettent en scène ses proches.

La S.A.R.L. ARTIGA, qui soutient que Madame JUVIN ne peut prétendre qu'à la qualité de technicien, au motif que Madame LARTIGUE lui imposait l'ensemble des données à partir desquelles s'apprécie l'originalité d'une photographie, doit donc rapporter la preuve de l'existence de ces directives et de ce qu'elles couvraient tout le champ d'expression de la personnalité d'un photographe.

La convention liant Madame JUVIN à la S.A.R.L. ARTIGA, en date du 25 octobre 2005 vise 19 chefs de mission aux fins de 'valoriser une communication qui doit être plus incisive, ultra tendance, réactive, chaleureuse, dégageant du bien être et de la douceur'. Les points paraissant se rattacher à la production de visuels sont les suivants : 'création de supports graphiques pour le salon au mois d'août ; recherche graphique ; réalisation de dossiers de presse ; relations média ; recherche de supports'. Aucun ne vise expressément la réalisation de clichés photographiques à fins publicitaires. La convention ne porte aucune description de la répartition des rôles entre Madame JUVIN et Madame LARTIGUE à propos de l'élaboration de visuels.

La S.A.R.L. ARTIGA verse aux débats les attestations suivantes :

- Madame LAHONDA, assistante de direction : '... Madame LARTIGUE a donné les directives artistiques pour la création des toiles ARTIGA ainsi que pour les prises de vue des photos et leurs ambiances.'

- Madame DARDY attachée commerciale : '... Madame Quitterie SOUMIREU LARTIGUE dirigeante et responsable du service création de la marque ARTIGA s'occupe de donner les grandes lignes de l'orientation artistique de la marque'.

- Madame ARRABIE responsable de production : 'Madame JUVIN intervenait en tant que prestataire de services au niveau de la communication de l'entreprise pour la réalisation de catalogues et cartes de voeux. Elle était rémunérée par la société ARTIGA dirigée au commercial et création par Madame Quitterie LARTIGUE'.

- l'attestation de Monsieur SCRIVE cousin de Madame LARTIGUE ne porte pas sur les liens professionnels entre les parties.

- Madame PETIT PICAL attaché de presse demeurant à NÎMES (30) : 'prestataire de la société ARTIGA depuis septembre 2005, certifie que Madame Quitterie LARTIGUE a décidé sur toutes les précédentes collections de la mise en place des prises de vue pour l'ensemble des supports visuels utilisés pour la communication ARTIGA. En effet les directives concernant la créativité des prises de vue : stylisme, ambiance angle des photos lumière, etc... ont toujours été transmises par Madame Quitterie LARTIGUE. De plus en tant qu'attaché de presse de la marque, j'ai rencontré de nombreuses difficultés quant à l'utilisation de ces photos que certains journaux ont refusé : maisons et travaux, journal de la maison, à cause de leur qualité jugée non professionnelle.'

- Madame CHAMPETIER DE RIBES styliste salariée : 'Je ne tenais pas à faire d'attestations de l'une ou de l'autre des deux parties, étant trop proche de Quitterie et de Caroline. Mais je peux dire que lorsque nous avons fait les deux premiers catalogues Hiver 2004 et Eté 2005, il y avait une relation de bonne entente entre nous trois. Quitterie était aussi présente à la maison au moment des prises de vues. Elle donnait à ce moment là des directions expliquant ce qu'elle voulait. Il lui est arrivé aussi de prendre quelques photos comme elle le faisait au tout début quand nous étions toutes les deux'.

Sur sommation interpellative, Madame CHAMPETIER DE RIBES précise :

* Hormis une photo sur le catalogue automne hiver 2004, toutes les autres photos des catalogues cités (automne hiver 2004 à printemps été 2007) sont de Madame JUVIN.

* Sur la présence de Madame LARTIGUE lors des prises de vues : 'à mon souvenir elle n'est venue que deux fois chez moi à l'occasion de prises de vues de ces catalogues et au début, uniquement pour le catalogue 2004 et printemps été 2005.'

* Sur les directives pour les prises de vues : 'ces directives ont existé mais sur une ambiance à donner pour certains produits. Madame JUVIN et moi-même devions trouver dans nos maisons respectives de quoi mettre en scène les produits, les tissus, de façon totalement libre et autonome. Ma réponse ne concerne que les catalogues dont les photos ont été prises chez moi.

* Sur les directives techniques et artistiques données par Madame LARTIGUE, portaient-elles sur : le cadrage : non ; les angles de vue : non ; la lumière : non ; la création et la réalisation des ambiances : non.

* Diriez vous que Madame JUVIN réalisait avec les produits ARTIGA ses propres ambiances ses propres prises de vue et y intégrait sa propre créativité ' : oui pour les photos que Madame JUVIN réalisait chez elle.

* Diriez vous que grâce au travail photographique de Caroline JUVIN un style a été donné à la marque ' : à mon avis oui dans la mesure où elle a intégré des enfants aux photos, les rendant pour moi plus chaleureuses.

* A votre connaissance, Madame JUVIN présentait-elle à Madame LARTIGUE et à vous-même plusieurs planches de photos avec des ambiances différentes sur un même produit ' : oui.

* Lieux de prises de vues : au domicile de Madame JUVIN et à mon propre domicile.

* Sur sa présence au domicile de Madame JUVIN lors des prises de vue : non jamais.

* Sur la présence de Madame LARTIGUE au domicile de Madame JUVIN lors des prises de vue : pas à ma connaissance.

* Sur les qualités techniques et le rendu des couleurs et des matières : je trouve le rendu des couleurs et des matières très proche de la réalité, pour moi très professionnel. Je ne peux me prononcer sur les qualités techniques.

* Sur sa connaissance de critiques des qualités techniques : oui des photos ont été écartées pour des problèmes de moirage sur tissus ou des défauts de présentation (plis sur certains tissus).

* Sur des essais d'appareils photographiques au début pour proposer un choix à Madame LARTIGUE : oui.

* Sur la revendication de Madame JUVIN de la qualité d'auteur des photographies : oui.

* Sur ses rencontres avec Madame PETIT PICAL : trois ou quatre fois à PARIS sur des salons.

* Sur la présence de Madame PETIT PICAL aux réunions de communication au sein de la société ARTIGA avec Madame CHAMPETIER et Madame JUVIN : non jamais.

Il convient de relever que les trois premières attestations et la sixième émanent de subordonnées de la S.A.R.L. ARTIGA. En outre elles demeurent très vagues sur la nature et le contenu des directives données par Madame LARTIGUE dont il n'est pas contesté qu'elle détermine les orientations artistiques de la marque et dirige le service création.

L'attestation de Madame PETIT PICAL doit être prise avec circonspection compte tenu des remarques de Madame CHAMPETIER DE RIBES : Madame PETIT PICAL n'a jamais assisté aux réunions de communication, n'a jamais assisté à aucune prise de vue et demeure à NÎMES. On ne voit pas comment elle aurait pu être témoin de la transmission de directives artistiques précises.

Il convient en outre de relever que Madame PETIT PICAL est l'auteur d'un e-mail en date du 27 février 2007 qui comporte en pièce jointe un projet d'autorisation donnée par la S.A.R.L. ARTIGA d'utilisation par l'agence CP PRESSE, des visuels concernant la collection, 'qui ont été réalisés par... qui nous a cédé ses droits'... Par ce document qui semble être l'élément ayant déclenché le litige, Madame PETIT PICAL agissant au nom d'un tiers, son agence, met en évidence l'existence des droits au bénéfice de Madame JUVIN susceptible de cession donc de protection.

La S.A.R.L. ARTIGA ne verse aucune pièce, compte rendu de réunion, directive générale, note de service, instructions écrites sur sa politique en matière de communication visuelle. Il n'est pas produit un emploi du temps de Madame LARTIGUE mettant en évidence ses déplacements sur les lieux de prise de vue, et le temps qu'elle a consacré à la mise en oeuvre des directives qu'elle prétend avoir données sur l'ensemble des éléments techniques, cadrages, angles de vue composition lumière, etc...

Madame JUVIN verse aux débats les attestations suivantes :

- Madame CAMBON dont il convient de relever qu'elle est en relation avec un concurrent de la S.A.R.L. ARTIGA les tissages MOUTET : 'ayant fait travailler Madame JUVIN en 1997 pour [...], j'ai tout de suite reconnu en voyant les différents supports de communication de la société ARTIGA son style et sa patte artistique.'

- Monsieur GALLITRE expose avoir confié le budget communication de son entreprise à Madame JUVIN en raison de son professionnalisme, de son honnêteté de sa créativité...

- Monsieur Laurent PHILIPPE manifeste sa satisfaction à la suite de la réalisation d'un journal publicitaire pour son entreprise, soulignant l'esprit innovant et créatif apporté à son projet.

- Monsieur DELMAS et Madame LENOËL attestent de son esprit créatif dont ils ont bénéficié dans l'aménagement de leur intérieur.

- l'attestation de Monsieur JUVIN époux de l'appelante doit être écartée comme empreinte d'une légitime partialité.

- Madame Valérie GAUTIER, cadre commercial et amie, déclare : 'lors de mes visites, je l'ai vue très souvent travailler pour ARTIGA que ce soit sur informatique pour du détourage et la réalisation d'outils de communication ou lors de la réalisation de photos de produits. Elle était seule et travaillait selon son libre arbitre quant au choix de l'ambiance, du lieu, de l'éclairage naturel, et de la mise en valeur des articles de la gamme ARTIGA. Pour cela elle utilisait son mobilier de la vaisselle personnelle son cadre de vie voire ses enfants et cela toujours de manière créative...'

- Madame DENIS qui a travaillé pour un Casino ayant sollicité les services de Madame JUVIN, déclare : '... j'ai assisté à plusieurs reprises à son travail de prises de vues des produits ARTIGA... elle utilisait les éléments de son environnement personnel pour mettre en avant la gamme de produits maison de charme avec sol de pierre, cheminée, terrasse, parc arboré... son choix artistique était de travailler en lumière naturelle afin de donner un rendu de simplicité et d'accessibilité des produits, 'comme à la maison'. Elle a même mis en scène sur certains clichés sa fille Louise jouant à la dînette ou avec un nounours ARTIGA... elle guettait littéralement les moments ensoleillés et profitait de chaque sortie du soleil pour réaliser des photographies... m'expliquait l'ambiance qu'elle voulait créer, me montrait comment elle plaçait l'article pour la première photo et me demandait de lui apporter différents objets au gré de son inspiration de mise en scène... ensuite, un fois que l'environnement créé lui convenait, elle attaquait les prises de vue...'

Outre les catalogues et dépliants, est produite une photographie de la cuisine de Madame JUVIN illustrant une carte de voeux publicitaire.

Au vu des pièces versées, il apparaît que les parties communiquent par e-mail. Les e-mails émis par l'entourage de Madame LARTIGUE et produits par Madame JUVIN sont ainsi rédigés : 31 janvier 2007 : 'je n'ai pas terminé de rentrer les produits mais il me manque déjà ces photos. Dis moi ce que tu peux faire' ; 6 février 2007 suite à une commande de tissus d'un client qui veut aussi une photo 'quand tu auras fait une photo du CORDA METIS marine/blanc pourrais-tu l'envoyer par mail à l'adresse ci dessous' 13 février 2007 : 'voici la liste des photos manquantes' ; 15 février 2007 : 'peux-tu faire 3/4 photos des nouveautés ARTIGA à Madame LARTIGUE s'il te plaît, c'est pour les transférer ensuite au cuisinier XXX de Bordeaux' ; 26 février 2007 : 'donc je résume ok pour le 7 (on enlève le 5 la serrure) avec correction des boutons, pour le texte c'est ok, vu avec Quitterie puis validation orthographe avec Véronique !! C'est good tu peux y aller pour 2100 étiquettes, 300 de chaque'.

Les e-mails produits par la S.A.R.L. ARTIGA et émanant de Madame JUVIN sont les suivants souvent accompagnés de visuels en pièces jointes : 14 avril 2006 : 'j'ai reçu un coup de téléphone de la revue Down Town pour une parution que nous aurions validé. Je dois leur envoyer un visuel. Peux-tu demander à Quitterie son choix de toile pour que je puisse lui faire les sorties sur papier des photos que je possède afin qu'elle fasse son choix' ; 5 octobre 2006 : une publicité de 2005 et les cinq autres 'sont des idées' ; 12 octobre 2006 : un projet de carte de voeux en pièce jointe et le message suivant : 'coucou une autre proposition pour l'intérieur de la carte de voeux2cv' ; 16 février 2007 : 'voici neuf visuels de nappe (uniquement les nouveautés) si elles ne convenaient pas à Quitterie, l'ensemble des prises de vue que j'ai réalisé se trouve dans le classeur jaune dans le bureau d'Annabelle. Une fois que les photos seront choisies, il me faudra l'adresse mail pour que je puisse les envoyer'.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les parties ont procédé de la manière suivante : Madame LARTIGUE détermine la politique artistique de l'entreprise, l'orientation générale en fonction des saisons, qui semble être plutôt mer et extérieur en été, plutôt campagne et intérieur en hiver, et choisit les produits à photographier. Madame JUVIN met en scène les produits à photographier, prend un nombre important de clichés, qu'elle soumet à Madame LARTIGUE laquelle fait son choix pour publication.

Madame LARTIGUE a assisté à une séance de photos chez Madame CHAMPETIER DE RIBES pour l'année 2004. Il n'est pas établi qu'elle ait donné à cette occasion des directives précises pour les prises de vue sur les trois années suivantes. Madame JUVIN dispose d'une grande liberté dans le choix des mises en scène et des éléments techniques et artistiques de photographie. Elle propose en outre des créations faites de sa propre initiative, ainsi doit-on entendre ses 'idées'.

Il ne ressort des rectifications demandées par la S.A.R.L. ARTIGA - on enlève la serrure, on modifie les boutons 26/02/07 - une remise en cause fondamentale de la proposition de Madame JUVIN, qui permettrait, à Madame LARTIGUE de se déclarer auteur de la photographie retenue.

Le fait que certains clichés aient présenté des défauts, moirages mais surtout plis des toiles, est indifférent à la qualification des clichés et démontre que Madame LARTIGUE n'intervenait pas sur les mises en scène, elle aurait alors prévenu ce genre de désordre.

Il en résulte que Madame LARTIGUE ne donne aucune directive technique quant à l'angle de vue, l'éclairage, le cadrage, les contrastes de couleur et reliefs, la composition et la mise en scène, le jeu des lumières, le choix des objectifs, qui relèvent de la seule initiative de Madame JUVIN qui opère seule. Il apparaît donc que Madame JUVIN jouit d'une liberté d'action lui permettant, par l'expression d'une véritable créativité, de manifester sa personnalité, de sorte que les photographies figurant sur les catalogues et prospectus de la S.A.R.L. ARTIGA pour la période fin 2004 début 2007 présentent une originalité qui permet leur protection au titre du droit d'auteur.

La S.A.R.L. ARTIGA invoque le critère de substituabilité et celui de nouveauté en lien avec la notion d'antériorité. Elle ne verse cependant qu'un document antérieur à l'intervention de Madame JUVIN, un prospectus portant un amoncellement d'objets de salle de bains dans un camaïeu d'écru, et en l'absence de tout personnage. Si effectivement un 'shopping', décrit comme étant la prise de vue d'un objet destiné à être inséré par un éditeur de presse dans un article présentant des objets de diverse provenance, ne présente pas de nouveauté d'une année sur l'autre, les autres clichés des catalogues et prospectus présentent un nombre très limité d'objet (trois chiliennes, ou une nappe, avec ou sans serviette ou un coussin...) avec la présence d'accessoires de la vie quotidienne et souvent un personnage, soit en entier soit pour partie. Les clichés de Madame JUVIN présentent donc un caractère nouveau qui permet d'écarter la substituabilité invoquée par la S.A.R.L. ARTIGA.

Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de reconnaissance d'un droit d'auteur de Madame JUVIN sur les clichés litigieux.

2 - Sur la cession de droits d'auteur

Aux termes de l'article L 131-3 alinéa 1 du Code de la Propriété Intellectuelle, la transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession et que le domaine d'exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée.

Le principe est que le contrat de commande unissant le photographe et la société utilisatrice de ses clichés n'entraîne en lui-même aucune cession des droits

d'exploitation. Le louage d'ouvrage n'emportant aux termes de l'article L 111-1 du CPI aucune dérogation à la jouissance de droit de propriété intellectuelle de l'auteur, la preuve d'une cession de ses droits d'exploitation doit être établie par convention expresse et conclue dans les conditions de l'article L 131-3 du CPI.

La S.A.R.L. ARTIGA déclare qu'elle bénéficie au vu des factures, d'une cession tacite des droits d'auteur de Madame JUVIN sur les clichés reproduits sur ses dépliants et catalogues publicitaires, en relevant que les faits de la cause mettent en évidence la volonté de céder les droits.

La convention du 25 mai 2004 ne porte aucune mention de la cession des droits que pourrait avoir Madame JUVIN sur les photographies qu'elle serait appelée à prendre en exécution de sa mission. Elle vise une rémunération constante de prestations de services diverses, pour un montant forfaitaire de 2.200,00 euros.

Les factures émises par Madame JUVIN sont produites aux débats : elles portent, entre autres, les intitulés suivants relatifs à une activité de création photographique, sans jamais évoquer la cession des droits d'auteur : 'prises de vues pour détourage, détourage,... prises de vue pour catalogue... prises de vue articles... reportage photo boutique.'

Cependant ces factures comportent en outre des prestations correspondant à la mission définie le 25 mai 2004 qui vont au-delà d'un travail de création photographique : 'suivi avec la société Alload, réalisation étiquette petit malin, réflexion sur logo petit malin, suivi shopping CP Presse, suivi presse, réalisation de tarifs bon de commande, dossier de presse complet pour salon, maquette de catalogue, création du petit livre du salon A/H 2006, conception et réalisation du journal de 'fil en aiguilles', finalisation du dépliant, réalisation d'annonces de presse, réalisation de différents supports publicitaires, réalisation du journal interne, suivi imprimerie...'

La S.A.R.L. ARTIGA n'a jamais contesté la réalité des prestations fournies en exécution de la convention du 25 mai 2004 et figurant sur les factures produites. Les règlements versés correspondent aux prestations fournies au titre dudit accord et ne vont pas à la constitution d'une photothèque comportant une cession des droits d'auteur.

L'examen des documents produits, catalogues et prospectus publicitaires, met toujours en évidence la mention d'un imprimeur, mais l'attribution du crédit photo à ARTIGA c ne figure que sur les catalogues automne hiver 2005 et printemps été 2006, elle ne figure sur aucun des dépliants ni sur les catalogues automne hiver 2006 2007 ou printemps été 2007 qui comporte des photographies de Madame JUVIN. La S.A.R.L. ARTIGA ne peut donc tirer de ces mentions isolées l'existence d'une cession tacite des droits d'auteur de Madame JUVIN.

Il ressort en outre des échanges d'e-mails entre les parties que Madame JUVIN effectue des tirages à la demande de Madame LARTIGUE, et la S.A.R.L. mentionne dans ses écritures - en gras - que Madame JUVIN n'avait pas le choix de la pellicule. Or la S.A.R.L. étaye sa position sur la cession des droits d'auteur sur le fait qu'elle détient un CD ROM des clichés de Madame JUVIN. D'une part s'il a été fait usage de pellicule, la cession serait matérialisée par la remise des négatifs que ne possède pas la S.A.R.L., et si les photos sont numériques, la détention d'un CD ROM, reproduction exacte de documents numériques, ne permet pas à la S.A.R.L. de prétendre détenir un original.

De plus, sur sommation interpellative, Madame CHAMPETIER DE RIBES répond 'oui' à la question, 'à votre connaissance, Madame JUVIN a-t'elle toujours revendiqué sa qualité d'auteur pour les photographies utilisées par ARTIGA'' Madame CHAMPETIER DE RIBES n'ignore pas la portée de cette déclaration, il est versé aux dossiers l'autorisation qu'elle a donnée le 30 juin 2004 à Madame JUVIN de reproduire des clichés représentant sa personne ainsi que sa famille.

Enfin, la S.A.R.L. ARTIGA ne pouvait ignorer la nécessité de régulariser sa situation au regard du droit d'auteur de Madame JUVIN à l'égard des tiers. De première part, l'examen des documents produits, catalogues et prospectus publicitaires met toujours en évidence la mention d'un imprimeur, mais l'attribution du crédit photo à ARTIGA c ne figure que sur les catalogues automne hiver 2005 et printemps été 2006, elle ne figure sur aucun des dépliants ni sur les catalogues automne hiver 2006 2007 ou printemps été 2007 qui comporte des photographies de Madame JUVIN. La S.A.R.L. ARTIGA ne peut donc tirer de ces mentions isolées l'existence d'une cession tacite des droits d'auteur de Madame JUVIN.

De deuxième part, l'agence de presse CP PRESSE, professionnel du droit d'auteur, avait adressé 27 février 2007 à la S.A.R.L. une ébauche de lettre ainsi rédigée ' tous les visuels de notre catalogue concernant la collection Printemps Eté ont été réalisés par... qui nous en a cédé les droits. Nous sommes, en effet, titulaires d'un droit de propriété et d'utilisation de ces oeuvres photographiques...' Or la S.A.R.L. ARTIGA n'a jamais établi un document définitif et retourné à l'agence de presse ce document, au contraire elle a indiqué à l'agence de presse le 13 avril 2007, soit quinze jours après la rupture des relations entre les parties, que les photographies étaient libres de droit.

De troisième part, la rémunération d'un auteur à qui est commandée une création se compose d'une part d'honoraires de réalisation, et d'autre part, de droits d'auteur destinés à rémunérer l'exploitation de l'oeuvre. En l'absence de mention de cession des droits d'auteur sur les factures, la rémunération portée par les factures doit être considérée comme constituant lesdits honoraires et non la cession des droits d'auteur.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que, d'une part Madame JUVIN n'a jamais renoncé à ses droits d'auteur, d'autre part la S.A.R.L. ARTIGA ne démontre pas la cession des droits d'auteur de Madame JUVIN sur les visuels employés sur ses divers supports publicitaires.

2 - Sur l'indemnisation du préjudice de Madame JUVIN

Il résulte des développements ci-dessus que la S.A.R.L. ARTIGA a utilisé les clichés de Madame JUVIN sans en avoir acquis les droits.

Les articles L 132-31 du CPI fixent les bases du mode de calcul de la cession des droits d'auteur d'oeuvres de commande en matière de publicité. En application de ces textes, la commission ad hoc a, par décision en date du 23 février 1987 déterminé les critères de fixation de la rémunération du droit d'auteur. Pour les catalogues et les imprimés publicitaires, le coefficient varie en fonction du tirage.

La S.A.R.L. ARTIGA ne conteste pas le nombre de tirages relevés par Madame JUVIN soit 5.000,00 catalogues et 23.000 dépliants. Elle ne conteste pas que le site INTERNET reçoit environ 150 visites par jour.

Madame JUVIN soutient sans être contestée que les catalogues contiennent 347 photographies et les dépliants 15.

Il convient de retenir pour les photographies litigieuses la valeur de 1,00 euro le point, en moyenne, compte tenu du grand nombre de 'shopping' parmi ces clichés.

L'application du barème des oeuvres de commande conduit à fixer à la somme de 28.280,00 euros le montant des dommages-intérêts alloués en réparation du préjudice patrimonial de Madame JUVIN.

L'atteinte au droit moral de Madame JUVIN, droit au nom, au respect de sa qualité et de son oeuvre, est constitué par le refus constant de la S.A.R.L. ARTIGA de reconnaître sa qualité d'auteur des photographies litigieuses. Il est caractérisé par l'absence de mention du crédit photo sur les catalogues et dépliants alors que la mention au moins une fois du nom de l'auteur des photographies est obligatoire en application de l'article L 121-1 du CPI, et par l'attribution dudit crédit à la S.A.R.L. ARTIGA en toute connaissance de cause de l'absence de cession des droits. Il est en outre caractérisé par le maintien sur le site internet de la S.A.R.L. ARTIGA des photographies de Madame JUVIN alors que cette dernière avait fait défense de les utiliser après la rupture des relations entre les parties.

En réparation de cette atteinte au droit moral de l'auteur, il sera alloué à Madame JUVIN la somme de 15.000,00 euros à titre de dommages-intérêts.

Sont versés aux débats des procès-verbaux de constat d'huissier en date des 22 mai 2007 puis des 16 juillet et premier octobre 2007 qui mettent en évidence qu'à cette date des photographies visées dans des e-mails échangés entre la S.A.R.L. ARTIGA et Madame JUVIN en janvier 2007, au cours des relations contractuelles, illustraient toujours le site internet de la S.A.R.L. malgré mise en demeure de cesser l'atteinte aux droits d'auteur en date du 18 avril 2007.

Cependant, il ressort des mêmes pièces qu'entre chacun des deux procès-verbaux un certain nombre de visuels a été retiré. Il n'est pas justifié du maintien de la publication desdits visuels au-delà du mois de novembre 2007. Il apparaît donc inutile d'ordonner à la S.A.R.L. ARTIGA de cesser toute reproduction ou utilisation des photographies prises par Madame JUVIN et ce sous astreinte définitive de 500,00 euros par infraction constatée et de lui ordonner de détruire tout document ou support reproduisant les photographies en cause sous astreinte de 200,00 euros par jour de retard et ce en vue de leur destruction sous contrôle d'huissier à ses frais de la S.A.R.L. ARTIGA.

3 - Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts

Le droit de défendre en justice ses intérêts légitimes ne dégénère en abus de nature à justifier l'allocation de dommages intérêts que dans l'hypothèse d'une attitude fautive génératrice d'un dommage. Les développements ci-dessus mettent en évidence le bien-fondé de la demande de Madame JUVIN, la demande de dommages et intérêts doit donc être rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

4 - Sur les demandes accessoires

La S.A.R.L. ARTIGA succombant supportera les dépens de première instance et d'appel qui comprendront le coût des procès-verbaux de constat d'huissier, outre une somme de 4.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de la S.A.R.L. ARTIGA.

L'infirme pour le surplus.

Et statuant à nouveau,

Condamne la S.A.R.L. ARTIGA à payer à Madame Françoise JUVIN la somme de 28.280,00 euros en réparation des atteintes à ses droits patrimoniaux.

Condamne la S.A.R.L. ARTIGA à payer à Madame Françoise JUVIN la somme de 15.000,00 euros en réparation des atteintes à ses droits moraux.

Déboute Madame Françoise JUVIN de sa demande sous astreinte aux fins de cessation de toute reproduction ou utilisation des photographies prises par Madame JUVIN et de destruction des documents ou supports reproduisant les photographies en cause sous contrôle d'huissier.

Condamne la S.A.R.L. ARTIGA à payer à Madame JUVIN la somme de 4.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamne la S.A.R.L. ARTIGA aux entiers dépens de première instance qui comprendront les frais de constats d'huissier et les dépens d'appel dont distraction au profit de Maître VERGEZ, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.