Livv
Décisions

Cass. com., 28 février 1995, n° 93-10.581

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pasturel

Rapporteur :

M. Lassalle

Avocat général :

M. de Gouttes

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, Me Choucroy

Aix-en-Provence, 8e ch. civ. A, du 19 no…

19 novembre 1992

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 novembre 1992), qu'après la mise en redressement judiciaire de la société anonyme Sophia country club, un plan de cession de l'entreprise a été arrêté par jugement du 10 mars 1989, prévoyant le paiement du prix à la signature des actes de cession ; que, dans l'attente de l'accomplissement de ces actes, l'administrateur a confié, le 15 mars 1989, la gestion de l'entreprise au cessionnaire contre le versement du prix convenu, soit 25 millions de francs ; que les actes ont été signés le 10 juillet 1989 ; que la SNC Sophia country club, cessionnaire substitué, a demandé le paiement des intérêts du prix de cession pour la période écoulée du 15 mars au 10 juillet 1989, ainsi que la rétrocession partielle des sommes reçues par la société anonyme Sophia country club au titre de droits d'inscription et cotisations des stagiaires et adhérents ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir débouté la SNC Country club de sa demande de paiement des intérêts sur la somme de 25 000 000 francs, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le terme fixé par le jugement arrêtant le plan de cession pour le paiement du prix de cession est opposable à tous et qu'à défaut de disposition spéciale du jugement en ce sens, l'application par l'administrateur au profit du cessionnaire de l'article 87, alinéa 2, de la loi du 25 janvier 1985, n'est pas de nature en elle-même à modifier ce terme ; qu'en estimant, en l'espèce, que l'administrateur était en droit d'exiger le paiement anticipé de ce prix, la cour d'appel a méconnu les articles 1351 du Code civil, 62, 64 et 87 de la loi du 25 janvier 1985 ; et alors, d'autre part, que la cour d'appel ne pouvait affirmer que les parties s'étaient entendues pour qualifier ce versement de paiement anticipé du prix quand elles ont expressément exclu que toute conclusion en ce sens puisse être déduite de l'acte du 10 juillet 1989 ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis dudit acte et violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir énoncé exactement que l'interdiction formulée par l'article 62 de la loi du 25 janvier 1985 d'imposer aux personnes qui exécuteront le plan, des charges autres que les engagements qu'elles ont souscrits au cours de sa préparation, ne s'applique qu'au juge qui arrête un plan de redressement, la cour d'appel, dès lors que la modification de la date de paiement du prix ne constitue pas une modification substantielle de ce plan, a pu décider, hors toute dénaturation de l'acte du 10 juillet 1989, que l'administrateur ayant, sous sa responsabilité, confié au cessionnaire la gestion de l'entreprise avant la signature des actes de cession, était en droit d'exiger, en contrepartie, le paiement immédiat du prix ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est fait grief aussi à l'arrêt d'avoir débouté la SNC Sophia country club de sa demande tendant au paiement de sommes correspondant à des droits d'inscription et à des cotisations, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la cour d'appel, qui relève que ni l'offre, ni le jugement de cession ne comportaient de dispositions relatives au financement des prestations assumées par les cessionnaires, ce dont il résultait que l'appauvrissement de ceux-ci, né de ce que l'administrateur avait conservé le prix de ces prestations, était sans cause, a méconnu les conséquences de ses propres énonciations et violé les règles applicables à l'enrichissement sans cause ; et alors, d'autre part, que la cour d'appel, qui ne s'explique pas sur le sort des prestations exécutées par les cessionnaires pendant la période où la gestion de l'entreprise leur a été confiée en application de l'article 87, alinéa 2, de la loi du 25 janvier 1985, a privé sa décision de base légale au regard de cette disposition ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé, pour refuser toute rétrocession de droits d'inscription et cotisations, que l'engagement unilatéral du cessionnaire d'assurer la continuité de l'exploitation, non accompagné d'une stipulation expresse d'une indemnité représentative des prestations à fournir à partir du 16 mars 1989, avait été présenté comme un élément supplémentaire en faveur du choix de son offre ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, qui font apparaître que l'appauvrissement du cessionnaire n'était pas sans cause, pour toute la période litigieuse, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.