CA Caen, 2e ch. civ., 11 janvier 2023, n° 22/01068
CAEN
Arrêt
Autre
PARTIES
Demandeur :
Crédit Du Nord (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gouarin
Avocats :
Me Masure-Letourneur, Me Rem, Me Poussin
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS
Par jugement contradictoire du 25 avril 2022, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Caen a :
- constaté la nullité de l'acte de cautionnement de M. [D] [R] et prononcé en conséquence l'annulation du cautionnement de M. [R] du 5 septembre 2012,
- débouté le Crédit du nord de sa demande de saisie des rémunérations de M. [R],
- condamné le Crédit du nord à payer à M. [R] la somme de 800 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux dépens.
Par déclaration du 29 avril 2022, le Crédit du nord a interjeté appel de cette décision.
Le Crédit du nord a fait signifier à l'intimé dans les conditions de l'article 659 du code de procédure civile sa déclaration d'appel le 8 juillet 2022 et ses conclusions le 19 juillet suivant.
Selon dernières conclusions du 13 décembre 2022, auxquelles il est référé pour l'exposé de ses moyens, M. [R] demande au président de la chambre de déclarer l'incident recevable, de prononcer la nullité de la signification de la déclaration d'appel et de la signification des conclusions du Crédit du nord, de débouter celui-ci de toutes ses prétentions, de prononcer l'irrecevabilité de l'appel interjeté par le Crédit du nord et de condamner celui-ci au paiement de la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens.
Par dernières conclusions du 22 novembre 2022, auxquelles il est référé pour l'exposé de ses moyens, le Crédit du nord demande au conseiller de la mise en état de débouter M. [R] de toutes ses demandes, de dire et juger en conséquence l'appel formé par ses soins recevable, de déclarer M. [R] irrecevable à conclure au fond et de condamner celui-ci au paiement de la somme de 4.000 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens.
MOTIVATION
1. Sur la validité des actes de signification de la déclaration d'appel et des conclusions d'appelant
Selon l'article 659 du code de procédure civile, lorsque la personne à laquelle l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connu, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte.
Il résulte de ces dispositions que la signification doit être faite à personne, qu'il n'y a lieu à signification par procès-verbal de recherches que si le destinataire de l'acte n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, que le procès-verbal doit comporter avec précision les diligences accomplies par l'huissier de justice pour rechercher le destinataire de l'acte et qu'il convient de vérifier si les diligences mentionnées au procès-verbal sont suffisantes et si l'adresse du destinataire n'aurait pas pu être obtenue selon le moyen indiqué par les conclusions.
M. [R] poursuit l'annulation des actes de signification de la déclaration d'appel et des conclusions d'appelant les 8 et 19 juillet 2022, au motif que les diligences de l'huissier instrumentaire pour rechercher sa nouvelle adresse sont insuffisantes en ce qu'il n'a pas chercher à obtenir celle-ci auprès de son avocat en première instance, connu du Crédit du nord, et que cette irrégularité l'a empêché de préparer sa défense et de faire signifier de conclusions dans les délais impartis.
Il affirme qu'il résidait bien à l'adresse figurant sur le jugement entrepris lors de la procédure de première instance.
Le Crédit du nord réplique que les actes signifiés n'étaient pas un jugement, comme dans l'espèce jugée par la cour d'appel d'Angers dans l'arrêt invoqué par M. [R], mais une déclaration d'appel et des conclusions, qu'en une telle hypothèse l'huissier instrumentaire dispose de sources d'information réduite contrairement à celle de l'exécution forcée d'une décision de justice, que l'adresse de signification est celle déclarée par ce dernier dans les actes de procédure antérieurs, que l'intimé ne justifie pas de sa nouvelle adresse déclarée ni de la date de son changement de domicile et que son avocat n'était pas tenu de répondre à l'huissier instrumentaire en vertu du secret professionnel, conformément à l'article L. 152-1 du code des procédures civiles d'exécution.
Il ressort des procès-verbaux établis les 8 et 19 juillet 2022, dont les mentions font foi jusqu'à inscription de faux, que l'huissier de justice instrumentaire s'est rendu au [Adresse 1], dernière adresse connue figurant sur le jugement rendu contradictoirement le 25 avril 2022 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Caen, constaté qu'il s'agissait d'un gîte, a rencontré le propriétaire, M. [P], qui lui a indiqué ne pas connaître M. [R], que l'enquête de voisinage a été infructueuse, que les recherches effectuées sur internet et l'annuaire électronique ont été vaines, que les services de la mairie lui ont indiqué que le destinataire des actes leur était inconnu et qu'il n'était pas inscrit sur la liste électorale et que les services de la Poste lui ont opposé le secret professionnel.
Ces diligences doivent être considérées comme suffisantes dès lors qu'il n'est établi par les productions que l'adresse du destinataire aurait pu être obtenue selon le moyen indiqué par M. [R].
En effet, M. [R] ne justifie pas de son adresse déclarée lors de la procédure de première instance, de sa nouvelle adresse, de la date de son changement de domicile, ni de ce que son avocat en avait été informé, celui-ci étant lié par le secret professionnel et n'étant pas tenu de communiquer à l'huissier de justice chargé de l'exécution les renseignements qu'il détiendrait permettant de déterminer l'adresse du débiteur en application de l'article L. 152-1 du code des procédures civiles d'exécution, au demeurant applicable à l'huissier de justice chargé de l'exécution d'une décision de justice et non de la signification d'actes de procédure comme en l'espèce.
Ainsi, il ne saurait être reproché à l'huissier instrumentaire de ne pas avoir contacté l'avocat du destinataire des actes litigieux lors de la procédure de première instance afin de déterminer sa nouvelle adresse.
La demande de M. [R] tendant à l'annulation des actes de signification de la déclaration d'appel et des conclusions d'appelant en date des 8 et 19 juillet 2022 sera donc rejetée.
Par voie de conséquence, en application des dispositions des articles 905-1 et 905-2 du code de procédure civile, M. [R] sera déclaré irrecevable à conclure au fond.
Succombant, M. [R] sera condamné aux entiers dépens de l'incident.
Il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le conseiller délégué, statuant publiquement, par ordonnance mise à disposition au greffe, susceptible de déférer,
Déboute M. [D] [R] de sa demande tendant à l'annulation des actes de signification de la déclaration d'appel et des conclusions d'appelant en date des 8 et 19 juillet 2022 ;
Déclare M. [D] [R] irrecevable à conclure au fond ;
Condamne M. [D] [R] aux entiers dépens de l'incident ;
Dit n'y avoir lieu de prononcer de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.