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Décisions

Cass. 2e civ., 12 janvier 2023, n° 21-14.710

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pireyre

Rapporteur :

Mme Latreille

Avocat général :

M. Adida-Canac

Avocats :

SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SCP Piwnica et Molinié

Basse-Terre, du 8 févr. 2021

8 février 2021

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 8 février 2021), par ordonnance du 18 juillet 2019, un juge de l'exécution a autorisé la société Dm services et levage (la société Dmsl) à pratiquer une saisie conservatoire au préjudice de la société Sam Btp, désormais dénommée la société Sam Btp levage, afin de garantir le paiement d'une créance.

2. En exécution de cette ordonnance, la société Dmsl a diligenté trois saisies conservatoires sur les comptes bancaires de la société Sam Btp levage les 29 juillet, 8 août et 16 septembre 2019.

3. Par assignation du 20 septembre 2019, la société Sam Btp levage a saisi un juge de l'exécution aux fins d'annulation et de rétractation de l'ordonnance du 18 juillet 2018 ainsi que de condamnation de la société Dmsl à des dommages et intérêts.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La société Sam Btp levage fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, de dire que la créance alléguée par la société Dmsl paraissait fondée en son principe à hauteur de 77 035 euros, et de donner pleinement effet aux saisies conservatoires pratiquées les 29 juillet, 8 août et 16 septembre 2019 par la société Dmsl à son encontre, alors « que l'ordonnance du juge de l'exécution autorisant à procéder à une saisie conservatoire ne constitue pas le titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible dont doit disposer l'huissier de justice à l'occasion de la mis en oeuvre d'une mesure d'exécution forcée ou d'une mesure conservatoire pour obtenir l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur ; qu'excède en conséquence ses pouvoirs le juge de l'exécution qui octroie à l'huissier de justice qu'il désigne l'autorisation de consulter le fichier Ficoba ; qu'en disant cependant que l'autorisation « superfétatoire » donnée par le juge de l'exécution à l'huissier de consulter le fichier Ficoba ne pouvait entraîner la nullité de l'ordonnance autorisant la saisie conservatoire, la cour d'appel a violé les articles L. 152-1 et L. 152-2 du code des procédures civiles d'exécution et l'article L. 151 A du livre des procédures fiscales, ensemble les articles L. 111-2 et L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution ».

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 111-2, L. 111-3, L. 152-1, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021, et L. 152-2 du code des procédures civiles d'exécution, et l'article L. 151 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 :

5. Selon les quatre premiers de ces textes, les administrations, les entreprises concédées ou contrôlées par l'Etat, les régions, les départements et les communes, les établissements publics ou organismes contrôlés par l'autorité administrative et les établissements habilités par la loi à tenir des comptes de dépôt doivent communiquer à l'huissier de justice chargé de l'exécution les renseignements qu'ils détiennent permettant de déterminer l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur, sans pouvoir opposer le secret professionnel.

6. Selon le cinquième de ces textes, les administrations fiscales communiquent à l'huissier de justice chargé de l'exécution les renseignements qu'elles détiennent permettant de déterminer l'adresse de tout tiers débiteur ou dépositaire de sommes liquides ou exigibles, sans pouvoir opposer le secret professionnel.

7. Pour écarter la demande de nullité de l'ordonnance du 18 juillet 2019, l'arrêt énonce que l'ordonnance du juge de l'exécution autorisant à procéder à une saisie conservatoire ne constitue certes pas un titre exécutoire, mais que l'article L. 152-1 du code des procédures civiles d'exécution, tant dans sa version actuelle que dans celle antérieure à la loi du 7 juin 1951, ne mentionne aucune autorisation du juge de l'exécution, et qu'en conséquence, l'autorisation superfétatoire donnée par le juge de l'exécution à l'huissier de justice de consulter le fichier Ficoba ne peut entraîner la nullité de l'ordonnance autorisant une saisie conservatoire.

8. En statuant ainsi, alors que l'ordonnance du juge de l'exécution autorisant à procéder à une saisie conservatoire, quand bien même elle autoriserait l'huissier de justice à consulter le fichier Ficoba, ne constitue pas le titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible dont doit se prévaloir l'huissier de justice à l'occasion de la mise en oeuvre d'une mesure d'exécution forcée ou d'une mesure conservatoire pour obtenir l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France.