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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 10, 5 janvier 2023, n° 22/01454

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Crédit Immobilier de France Développement (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pruvost

Conseillers :

Mme Lefort, M. Trarieux

Avocats :

Me Puget, Me Fournie

JEX Créteil, du 24 déc. 2021, n° 21/0295…

24 décembre 2021

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par jugement du 12 mars 2018, signifié le 2 mai 2018, le tribunal de grande instance de Créteil a notamment :

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour les deux prêts souscrits par Mme [Y] [K] les 28 juin et 11 octobre 2014 auprès de la SA Crédit Immobilier de France Développement (ci-après CIFD),

- condamné Mme [K] à payer au CIFD la somme de 322.216,38 euros au titre des deux prêts, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- condamné Mme [K] aux dépens,

- ordonné l' exécution provisoire.

Suivant procès-verbal du 5 mars 2021, le CIFD a fait pratiquer une saisie-attribution entre les mains de la SA BNP Paribas à l'encontre de Mme [K], pour avoir paiement d'une somme totale de 286.381,21 euros en vertu de ce jugement. La saisie a été dénoncée à la débitrice par acte d'huissier du 11 mars 2021.

Par assignation en date du 8 avril 2021, Mme [K] a fait citer le CIFD devant le juge de l' exécution du tribunal judiciaire de Créteil en contestation de la saisie-attribution.

Par un premier jugement du 29 octobre 2021, le juge de l' exécution a notamment :

déclaré recevable la contestation formée par Mme [K] de la saisie-attribution du 5 mars 2021,

débouté Mme [K] de sa demande d'exonération de la majoration du taux d'intérêt légal,

dit que le montant des requêtes [Z] et des demandes de renseignement des 29 janvier 2020 et 1er avril 2020 (soit 205,92 euros) et de demande judiciaire d'état civil du 24 mars 2020 (25,75 euros) sera laissé à la charge du CIFD,

ordonné la réouverture des débats pour présentation par les parties d'un compte détaillé mentionnant notamment la créance en principal de 322.216,38 euros avec imputation progressive des versements partiels, le calcul des intérêts sur cette seule somme en principal progressivement imputée par les versements effectués, et les frais d' exécution à la charge de Mme [K].

Par jugement du 24 décembre 2021, le juge de l' exécution a notamment :

déclaré recevable la contestation formée par Mme [K] de la saisie-attribution du 5 mars 2021,

débouté Mme [K] de sa demande d'exonération de la majoration du taux d'intérêt légal,

dit que le montant des requêtes [Z] et des demandes de renseignement des 29 janvier 2020 et 1er avril 2020 (soit 205,92 euros) et de demande judiciaire d'état civil du 24 mars 2020 (25,75 euros) sera laissé à la charge du CIFD,

dit que la créance de Mme [K] à l'égard du CIFD s'établit à la somme de 184.555,73 euros arrêtée au 3 novembre 2021, (sic)

ordonné le cantonnement des effets de la saisie-attribution pratiquée le 5 mars 2021 à la somme de 184.555,73 euros,

en conséquence, ordonné mainlevée de la saisie-attribution pour le surplus,

condamné le CIFD au paiement d'une somme de 1.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par déclaration du 13 janvier 2022, le CIFD a formé appel de ce jugement. Puis par déclaration du 16 mars 2022, Mme [K] a formé appel du jugement du 29 octobre 2021, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'exonération de la majoration du taux d'intérêt légal et l'a déboutée partiellement de sa demande de rejet de frais mis à sa charge.

Les deux affaires ont été jointes par ordonnance du 7 avril 2022.

Par conclusions n°3 du 6 juillet 2022, la SA Crédit Immobilier de France Développement (venant aux droits de la Cifraa) demande à la cour d'appel de :

confirmer le jugement du 29 octobre 2021, SAUF en ce qu'il a dit que le montant des requêtes [Z] et des demandes de renseignement des 29 janvier 2020 et 1er avril 2020 (soit 205,92 euros) et de demande judiciaire d'état civil du 24 mars 2020 (25,75 euros) sera laissé à la charge du CIFD,

confirmer le jugement du 24 décembre 2021 en ce qu'il a débouté Mme [K] de sa demande d'exonération de la majoration du taux d'intérêt légal,

infirmer le jugement du 24 décembre 2021 en toutes ses autres dispositions,

Statuant à nouveau,

débouter Mme [K] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

constater que les sommes saisies sont largement inférieures au quantum de sa créance à l'encontre de Mme [K],

fixer sa créance à la somme de 188.744,61 euros arrêtée au 03/11/2021, outre les intérêts et frais postérieurs, se décomposant comme suit :

principal restant dû au 03/11/2021 : 183.321,82 euros,

intérêts restant dus au 03/11/2021 : 3.049,50 euros,

frais dus selon jugement du 29 octobre 2021 : 2.373,29 euros,

intérêts postérieurs jusqu'à parfait paiement : mémoire

frais postérieurs : mémoire

accessoires : mémoire,

augmentée des frais écartés en première instance,

valider la saisie-attribution du 5 mars 2021 dénoncée le 11 mars 2021 à hauteur de 188.744,61 euros, arrêté au 03/11/2021, outre les intérêts et frais postérieurs jusqu'à parfait paiement,

condamner Mme [K] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction.

Le CIFD fait valoir que les calculs réalisés par Mme [K] ont brouillé les débats devant le premier juge ; que ces calculs ne pourront être retenus car Mme [K] impute les règlements directement sur le principal, ce qui est totalement contraire aux dispositions de l'article 1343-1 du code civil ; qu'il produit un nouveau décompte actualisé au 3 novembre 2021 exempt de toute critique. Il souligne que le dispositif du jugement mentionne par erreur que Mme [K] est créancière, ce qu'il convient de rectifier ; et que la saisie-attribution n'a finalement permis de rendre indisponible que la somme de 7.186,50 euros (et non 70.071,62 euros comme indiqué au départ), si bien que les sommes saisies seront nécessairement absorbées. Il explique que la décision rendue fait fi des règles d'imputation des paiements définies par le législateur ; que son nouveau décompte prend bien en compte les trois versements omis, impute bien la somme de 13.882 euros sur le capital et applique bien le taux légal tel que successivement arrêté par le législateur ; qu'ainsi ce décompte impute progressivement les versements partiels effectués par Mme [K] d'abord sur les intérêts, puis sur le capital, calcule les intérêts sur la seule somme de 322.216,38 euros en principal progressivement minorée des versements, et donc déduction faite des frais d' exécution , et laisse les frais d' exécution à la charge de Mme [K], déduction faite des requêtes [Z] et des demandes de renseignement des 29 janvier et 1er avril 2020 tel que décidé par le premier juge ; qu'il résulte de ce décompte un solde dû de 188.744,61 euros au 3 novembre 2021.

Il conteste la demande de réduction des frais de Mme [K], qui omet de prendre en compte l'ensemble des dispositions qui régissent le tarif des huissiers, qui se compose d'un émolument fixe, qu'il faut multiplier par un coefficient selon le montant de la somme due, auquel peut s'ajouter des frais supplémentaires spécifiques à certains actes, outre des frais forfaitaires, des coûts de signification électronique, et auquel il faut ajouter la taxe forfaitaire, les débours et la TVA. Il conclut que le calcul opéré par Mme [K] est parcellaire. Il rappelle que les frais d' exécution sont à la charge du débiteur en application de l'article L.111-8 du code des procédures civiles d' exécution , sauf s'ils n'étaient pas nécessaires, et fait valoir que les mesures d' exécution engagées étaient nécessaires.

Sur l'impossible minoration du taux d'intérêt, elle soutient que l'exonération de la majoration d'intérêt prévue par l'article L.313-3 du code monétaire et financier n'est pas automatique et qu'il appartient au débiteur de démontrer l'existence d'une situation pécuniaire difficile et de justifier de diligences entreprises pour apurer sa dette ; que les pièces communiquées désormais devant la cour montrent que Mme [K] vit confortablement avec un revenu net mensuel de 7.538 euros par mois, étant rappelé qu'au jour de la saisie, les comptes de la débitrice étaient créditeurs de plus de 70.000 euros, ce qui démontre une sérieuse capacité d'épargne ; que les charges alléguées par Mme [K] démontrent en réalité sa mauvaise foi ; qu'elle ne rapporte pas la preuve de son endettement ; qu'il n'y a donc pas lieu de lui accorder la réduction de la majoration d'intérêt.

Enfin, il estime que la demande de Mme [K] visant à ce que les sommes saisies ne produisent pas d'intérêts est sans objet, car le tiers saisi ne s'est toujours pas libéré des fonds et que la somme qui lui sera remise est actuellement indéterminable.

Par conclusions du 18 octobre 2022, Mme [Y] [K] demande à la cour de :

- débouter le CIFD de toutes ses fins et conclusions,

- confirmer les jugements entrepris en ce qu'ils ont dit qu'il convenait de déduire le montant des requêtes [Z] et des deux demandes de renseignement des 20 janvier et 1er avril 2020, soit 205,92 euros, ainsi que la demande judiciaire d'état-civil du 24 mars 2020 de 25,75 euros,

Statuant à nouveau,

- débouter le CIFD :

de sa demande de paiement des frais à hauteur de 131,45 euros correspondant à un trop facturé au regard des dispositions des articles A444-16 et A444-13 du code de commerce

de ses demandes de provisions pour frais de non contestation (51,07 euros), de signification du certificat (78,44 euros), la mainlevée de quittance (61,56 euros ) et la signification acquiescement (78,44 euros) qui sont des frais non exposés et inutiles lesquels s'élèvent à 269,51 euros,

- infirmer les jugements des 29 octobre et 24 décembre 2021 en ce qu'ils l'ont déboutée de sa demande d'exonération de la majoration de 5 points du taux d'intérêt légal,

- statuant à nouveau, fixer la créance du CIFD à la somme de 148.570,25 euros en principal et à 30,94 euros en intérêts au 3 novembre 2021,

- juger qu'aucun intérêt ne pourra courir sur la somme saisie à compter du 1er janvier 2022,

- débouter le CIFD de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,

- condamner le CIFD au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et laisser les dépens de l'instance à sa charge.

Elle fait valoir que le CIFD avait fourni trois décomptes erronés en première instance, de sorte qu'elle a repris les calculs ; qu'il apparaît qu'au 3 novembre 2021, il restait dû 140.696,19 euros au titre du capital restant dû et 41.486,25 euros au titre des intérêts, soit un total de 182.182,44 euros ; que le CIFD ne peut reprocher au juge de l' exécution d'avoir corrigé ses erreurs ; que le décompte rectifié communiqué en appel est également faux, puisque le paiement de la somme de 13.882 euros est imputé d'abord sur les intérêts alors qu'il est antérieur au jugement, et qu'il applique une majoration à un taux d'intérêt inexact. Elle précise qu'elle conteste les frais, estimant que les frais nécessaires sont les frais de l'acte de saisie-attribution et de la dénonciation, de sorte que des frais lui ont été facturés en trop ; que les provisions sur frais ne sont pas dues ; que le montant du droit proportionnel est erroné.

Sur sa demande d'exonération de la majoration d'intérêt, elle rappelle que la banque a été déchue des intérêts aux taux conventionnel, que la sanction doit selon la CJUE être effective et dissuasive, ce qui n'est pas le cas si l'on majore les intérêts légaux, que la majoration de 5 points revient en l'espèce à un taux supérieur au taux conventionnel de 5,45% l'an, ce qui rend la sanction totalement inefficace et même avantageuse pour le créancier, et ce qui est une incitation au non-respect de la loi, que cette majoration est donc contraire au droit européen. Elle fait valoir en outre qu'elle est âgée de 67 ans et est acculée, par ses nombreuses charges et dettes, d'autant plus qu'elle va bientôt prendre sa retraite. Elle conclut que sa situation lourdement obérée justifie de l'exonérer de la majoration.

Sur les sommes saisies et l'absence de production d'intérêts, elle fait valoir que le CIFD n'indique pas s'il a perçu les fonds saisis, que les sommes sont bloquées par les saisies conservatoires antérieures et ne lui ont pas été reversées, qu'il appartient au CIFD de donner mainlevée de la saisie-attribution et il ne peut en tout état de cause percevoir aucun intérêt sur les sommes saisies.

MOTIFS DE LA DECISION

Avant de fixer le montant de la créance du CIFD, il y a lieu de statuer sur la demande d'exonération de la majoration du taux d'intérêt légal formulée par Mme [K].

Sur la demande d'exonération de la majoration d'intérêt

L'article L.313-3 du code monétaire et financier dispose :

« En cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fût-ce par provision. Cet effet est attaché de plein droit au jugement d'adjudication sur saisie immobilière, quatre mois après son prononcé.

Toutefois, le juge de l' exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de cette majoration ou en réduire le montant. »

Ainsi, le juge de l' exécution ne statue sur la demande d'exonération qu'en considération de la situation du débiteur.

De l'aveu même de Mme [K] et au vu des pièces produites, elle dispose d'un revenu disponible d'environ 3.100 euros après paiement de ses charges (comprenant les versements au CIFD pour sa dette). Elle justifie avoir une autre dette à l'égard du Crédit Mutuel Etang de Berre (181.376 restant dû en 2019). En revanche, elle n'apporte pas la preuve qu'elle est débitrice de la BNP Paribas Personal Finance car elle ne produit que des conclusions de la banque qui datent de 2010 sans préciser ce que cette procédure judiciaire est devenue. Au vu des éléments communiqués, la situation de Mme [K] ne justifie pas de l'exonérer de la majoration des intérêts au taux légal.

Par ailleurs, la Cour de justice de l'Union européenne, saisie d'une question préjudicielle au sujet notamment de l'article L.313-3 du code monétaire et financier, a, par un arrêt du 27 mars 2014 (affaire C-565/12), dit que l'article 23 de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil concernant les contrats de crédit aux consommateurs devait être interprété comme s'opposant à l'application d'un régime national de sanctions en vertu duquel, en cas de violation par le prêteur de son obligation pré-contractuelle d'évaluer la solvabilité de l'emprunteur, le prêteur est déchu de son droit aux intérêts conventionnels, mais bénéficie de plein droit des intérêts au taux légal, exigibles à compter du prononcé de la décision condamnant l'emprunteur au versements des sommes restant dues, lesquels sont en outre majorés de cinq points si, à l'expiration d'un délai de deux mois qui suit ce prononcé, celui-ci ne s'est pas acquitté de sa dette, lorsque la juridiction constate que, dans un cas impliquant l'exigibilité immédiate du capital du prêt restant dû en raison de la défaillance de l'emprunteur, les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur à la suite de l'application de la déchéance des intérêts ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s'il avait respecté son obligation de vérification de la solvabilité de l'emprunteur.

Dans la mesure où les dispositions du code de la consommation relatives au calcul du taux effectif global ont été modifiées par la même loi du 1er juillet 2010 (transposant la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil) qui a instauré l'obligation pour le prêteur de vérifier la solvabilité de l'emprunteur, cet arrêt de la CJUE, qui s'impose aux juridictions nationales, peut être transposé au cas, comme en l'espèce, où la déchéance du droit aux intérêts contractuels a été prononcée pour non-respect des dispositions impératives relatives au taux effectif global, dès lors que l'exigibilité immédiate du capital restant dû a été prononcée en raison de la défaillance de Mme [K] et que les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur à la suite de l'application de la déchéance du droit aux intérêts ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont il aurait bénéficié s'il avait respecté ses obligations légales sur le calcul du taux effectif global.

Cependant, il est constant que le taux d'intérêt conventionnel était en l'espèce de 5,45% l'an. Même si le taux légal majoré est légèrement supérieur (entre 5,88% et 5,76%), ce taux n'est appliqué que depuis 2018 (postérieurement au jugement), alors que si la déchéance du droit aux intérêts n'avait pas été prononcée, le prêteur aurait pu bénéficier des intérêts au taux contractuel depuis le début du prêt, soit 2004. Dès lors, il n'est pas démontré que les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur à la suite de l'application de la déchéance du droit aux intérêts seraient avantageux par rapport à ceux dont il aurait bénéficié si cette sanction n'avait pas été prononcée.

Les jugements déférés seront donc confirmés en ce qu'ils ont débouté Mme [K] de sa demande d'exonération de la majoration d'intérêts.

Sur la fixation de la créance

Il résulte de l'article 1343-1 du code civil que les paiements s'imputent d'abord sur les intérêts puis sur le capital.

Mme [K] n'explique pas en quoi le dernier décompte produit par le CIFD (pièce 10) serait erroné alors que :

- le montant du principal est exact (322.216,38 euros),

- le calcul des intérêts est effectué avec le taux légal, puis le taux légal majoré,

- tous les règlements invoqués par Mme [K] ont été pris en compte et imputés à bonne date, mais en priorité sur les intérêts conformément à l'article 1343-1 du code civil,

- le versement antérieur de 13.882 euros a bien été imputé uniquement sur le capital,

- aucun intérêt n'a été calculé sur les frais.

Au vu de ce décompte, il reste dû par Mme [K], au 3 novembre 2021, la somme de 183.321,82 euros au titre du principal, outre la somme de 3.049,50 euros au titre des intérêts, soit un total de 186.371,32 euros. Le décompte de Mme [K] est erroné en ce que les paiements ont été imputés sur le capital, ce qui est contraire aux dispositions de l'article 1343-1 du code civil.

S'agissant des frais, le décompte détaillé du CIFD fait ressortir un solde dû de 2.373,29 euros, après déduction des sommes de 205,92 euros (requêtes [Z]) et 25,75 euros (demande d'état-civil) selon le jugement.

Le CIFD demande l'infirmation des jugements des 29 octobre et 24 décembre 2021 en ce qu'ils ont dit que le montant des requêtes [Z] et des demandes de renseignement des 29 janvier 2020 et 1er avril 2020 (soit 205,92 euros) et de demande judiciaire d'état civil du 24 mars 2020 (25,75 euros) sera laissé à sa charge, mais son décompte tient compte de ces décisions et le montant de la créance qu'il revendique n'inclut pas ces sommes. La cour n'est donc pas saisie d'une prétention relativement à ces frais.

Mme [K] ne saurait valablement soutenir que les émoluments de l'huissier ne seraient que de 43,61 euros et 32,98 euros en application des articles A444-16 et A444-13 du code de commerce, alors que la somme de 338,24 euros réclamée correspond, d'après le procès-verbal de saisie-attribution, à l'émolument proportionnel de l'article A444-31 du même code .

En revanche, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme [K] des frais d'acquiescement à la saisie-attribution litigieuse dès lors qu'elle a justement fait l'objet d'une contestation. Après déduction de ces frais de 52,80 euros (d'après l'autre décompte pièce n°5), il reste dû 2.320,49 euros.

S'agissant de frais d' exécution antérieurs, ils restent à la charge de la débitrice en application de l'article L.111-8 du code des procédures civiles d' exécution .

Ainsi, les autres frais contestés par Mme [K] sont soit déjà déduits du nouveau décompte, soit relatifs à des saisies-attributions antérieures que la débitrice ne peut plus contester faute d'avoir saisi le juge de l' exécution dans le délai légal.

La créance du CIFD sera donc fixée à un montant total de 188.691,81 euros (186.371,32 + 2.320,49), étant ajouté que le dispositif du jugement du 24 décembre 2021 fait référence par erreur à la créance de Mme [K] à l'égard du CIFD alors que c'est l'inverse. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit que la créance de Mme [K] à l'égard du CIFD s'établit à la somme de 184.555,73 euros arrêtée au 3 novembre 2021, et ordonné le cantonnement des effets de la saisie-attribution pratiquée le 5 mars 2021 à la somme de 184.555,73 euros. La saisie sera cantonnée à la somme de 188.691,81 euros.

Par ailleurs, il convient de préciser que si cette créance continue de produire des intérêts sur le principal jusqu'à parfait paiement, les sommes effectivement saisies n'en produisent pas puisqu'elles s'analysent au contraire en un paiement à imputer d'abord sur les intérêts.

Sur les demandes accessoires

La saisie-attribution litigieuse a été pratiquée pour un montant total de 286.381,21 euros et la créance a finalement été fixée à 188.691,81 euros. La contestation de Mme [K] sur le montant de la dette était donc largement justifiée. En outre, devant le premier juge, la banque a d'abord produit plusieurs décomptes erronés et il a fallu une réouverture des débats pour production d'un décompte clair. C'est donc à bon droit que le premier juge a condamné le CIFD aux dépens et au paiement d'une indemnité pour frais irrépétibles. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

En revanche en appel, le CIFD obtient largement gain de cause tandis que Mme [K] succombe en ses prétentions sur son appel incident. Il convient donc de condamner Mme [K] aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés par l'avocat du CIFD, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité commande de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles d'appel. Les demandes respectives des parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

INFIRME le jugement rendu le 24 décembre 2021 par le juge de l' exécution du tribunal judiciaire de Créteil, en ce qu'il a :

dit que la créance de Mme [Y] [K] à l'égard du Crédit Immobilier de France Développement s'établit à la somme de 184.555,73 euros arrêtée au 3 novembre 2021,

ordonné le cantonnement des effets de la saisie-attribution pratiquée le 5 mars 2021 à la somme de 184.555,73 euros,

Statuant à nouveau dans cette limite,

FIXE la créance de la SA Crédit Immobilier de France Développement à l'égard de Mme [Y] [K] à la somme de 188.691,81 euros arrêtée au 3 novembre 2021, se décomposant comme suit :

- 183.321,82 euros au titre du principal,

- 3.049,50 euros au titre des intérêts échus,

- 2.320,49 euros au titre des frais,

ORDONNE le cantonnement des effets de la saisie-attribution pratiquée le 5 mars 2021 entre les mains de la SA BNP Paribas à la somme de 188.691,81 euros,

RAPPELLE que si cette créance continue de produire des intérêts au taux légal majoré sur le principal jusqu'à parfait paiement, les sommes effectivement saisies n'en produisent pas,

CONFIRME le jugement du 24 décembre 2021 pour le surplus, dans les limites de la saisine de la cour,

CONFIRME le jugement rendu le 29 octobre 2021 par le juge de l' exécution du tribunal judiciaire de Créteil, dans les limites de la saisine de la cour,

Y ajoutant,

DEBOUTE les parties de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [Y] [K] aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés par Me Jean-François Puget, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.