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Décisions

CA Aix-en-Provence, 17e ch., 17 mai 2010, n° 08/04900

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Saint Maclou Nice (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Crousier

Conseillers :

Mme Verhaeghe, Mme Poirine

Avocats :

Me Cunha, Me Besset

Cons. Prud’h. Nice, du 9 janv. 2008, n° …

9 janvier 2008

Monsieur Christian S. a été embauché en qualité de vendeur le 23 juin 1994 par la SCA TAPIS SAINT MACLOU. Il était affecté dans le magasin de la galerie du centre commercial TNL à Nice.

À la suite de la fermeture du magasin et de l'ouverture concomitante d'un nouveau fonds, boulevard de l'Ariane à Nice, le contrat de travail de Monsieur Christian S. a été transféré au sein de l'EURL SAINT MACLOU NICE. Un nouveau contrat a été formalisé entre les parties le 28 janvier 2004, prenant effet le 23 février suivant.

Monsieur Christian S. a été licencié pour faute grave le 18 janvier 2006 en ces termes, exactement reproduits :

« Le mardi 3 janvier 2006, Monsieur N. était occupé avec des clients au rayon tapis. Visiblement contrarié que celui-ci soit en train de réaliser une vente dans le rayon dont vous avez la charge, vous êtes monté à l'étage où se situe le rayon et avait fait, en présence des clients, quelques remarques désobligeantes relatives à la manutention occasionnée par les ventes réalisées par votre chef de centre.

Ce dernier vous priant de cesser vos remarques, vous l'avez alors violemment pris à partie lui précisant notamment que votre « seul souhait, ou rêve, était de lui casser la gueule ».

Vous l'avez suivi au rez-de-chaussée, en continuant de proférer des insultes et en le menaçant de représailles physiques si vous receviez une sanction disciplinaire par sa faute...

Nous ne pouvons tolérer un tel comportement de la part de l'un de nos salariés, d'autant, d'une part que les faits se sont déroulés en présence des clients et de deux collaborateurs, Messieurs M. et H., et que d'autre part, vous aviez déjà été mis à pied à deux reprises pour des faits similaires : insultes et violence physique... ».

Par requête du 2 mars 2006, Monsieur Christian S. a saisi la juridiction prud'homale aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et de réclamer le paiement de rappel de salaire et d'indemnités de rupture.

Par jugement de départage en date du 9 janvier 2008, le Conseil de Prud'hommes de Nice a débouté Monsieur Christian S. de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

Monsieur Christian S. a régulièrement interjeté appel du jugement de départage par pli recommandé du 13 mars 2008.

Il a demandé à la Cour qu'il soit constaté qu'il ne bénéficiait pas du salaire minimum garanti par la Convention collective de l'industrie textile, soutenant que la commission sur le chiffre d'affaires n'entrait pas dans le calcul du salaire minimum garanti, qu'il soit jugé que les sanctions disciplinaires des 24 septembre 2004 et 8 février 2005 ainsi que le licenciement du 18 janvier 2006 étaient nuls en ce qu'il n'ont pas été prononcés par son employeur la SARL SAINT MACLOU NICE mais par la SCA TAPIS SAINT MACLOU et à ce que la SARL SAINT MACLOU NICE soit condamnée à lui verser un rappel de salaire et des indemnités au titre des sanctions disciplinaires nulles et du licenciement nul.

La SARL SAINT MACLOU NICE a demandé à la Cour de dire que le minimum garanti prévu par la Convention collective est composé du fixe et des commissions, de constater que la SARL SAINT MACLOU NICE et la SCA TAPIS SAINT MACLOU sont deux sociétés du même groupe et que le directeur des ressources humaines du groupe a qualité pour prononcer les sanctions disciplinaires à l'égard des salariés de filiales et de débouter le salarié de toutes ses prétentions.

Par arrêt mixte du 29 juin 2009, la 17ème Chambre de la Cour d' Appel d'Aix-en-Provence a dit que le salarié avait perçu le salaire minimum garanti prévu par la Convention collective, a confirmé le jugement de départage en ce qu'il a rejeté les demandes de Monsieur Christian S. relatives au rappel de salaire au titre du salaire minimum garanti, avant dire droit sur le surplus, a invité la société SAINT MACLOU NICE EURL à produire ses statuts ou tout document utile susceptible d'établir l'existence d'un groupe d'entreprises entre elle-même et la société TAPIS SAINT MACLOU SCA et a renvoyé l'affaire à l'audience du 10 novembre 2009.

À l'audience du 22 février 2010, Monsieur Christian S. conclut à l'infirmation du jugement de départage aux fins de voir condamner la SARL SAINT MACLOU NICE à lui payer une somme de 18 000 € de rappel de salaire au titre du salaire minimum garanti par la Convention collective et 1800 € de congés payés sur rappel de salaire, de voir juger que les sanctions disciplinaires des 24 septembre 2004 et 8 février 2005 n'ont pas été prononcées par son employeur, en conséquence, à titre principal, de voir annuler lesdites sanctions disciplinaires, de voir condamner la SARL SAINT MACLOU NICE à lui payer une somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi et une somme de 200 € au titre des journées de mise à pied disciplinaire, outre la somme de 20 € au titre des congés payés sur rappel de salaire, à titre subsidiaire, de voir juger que les sanctions disciplinaires des 24 septembre 2004 et 8 février 2005 sont sans cause réelle et sérieuse, de voir condamner la SARL SAINT MACLOU NICE à lui payer une somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice subi et une somme de 200 € au titre des journées de mise à pied disciplinaire, outre la somme de 20 € au titre des congés payés sur rappel de salaire, de voir juger que la procédure de licenciement n'a pas été menée par son employeur et que le licenciement est nul, de voir condamner la SARL SAINT MACLOU NICE à lui payer 50 000 € d'indemnité pour licenciement nul, à titre subsidiaire, de voir juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse, en conséquence, de voir condamner la SARL SAINT MACLOU NICE à lui payer la somme de 50 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en tout état de cause, de voir condamner la SARL SAINT MACLOU NICE à lui payer :

-30 000 € pour procédure de licenciement abusive et vexatoire,

- 1716 € d'indemnité légale de licenciement,

- 2500 € d'indemnité de préavis,

- 250 € de congés payés sur préavis,

- 620 € au titre de la mise à pied conservatoire,

- 62 € de congés payés y afférents,

de voir ordonner la remise de tous les documents sociaux sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à la condamnation de la SARL SAINT MACLOU NICE à lui payer la somme de 2000 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et à la condamnation de la SARL SAINT MACLOU NICE à lui payer la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La SARL SAINT MACLOU NICE conclut à la confirmation du jugement déféré aux fins de voir débouter Monsieur Christian S. de sa demande de rappel de salaire au titre du salaire minimum garanti, de voir constater que la SARL SAINT MACLOU NICE et la SCA TAPIS SAINT MACLOU sont deux sociétés du même groupe, la SARL SAINT MACLOU NICE étant détenue à 100 % par la SCA TAPIS SAINT MACLOU dont l'unique associé est la société TAPIS SAINT MACLOU, de voir dire que le directeur des ressources humaines du groupe peut lui-même prononcer les sanctions disciplinaires et le licenciement des salariés de filiales, de voir juger que les sanctions disciplinaires sont régulières et parfaitement fondées, de voir juger que le licenciement est régulier et fondé sur une faute grave, de voir débouter Monsieur Christian S. de l'ensemble de ses demandes, et à la condamnation de Monsieur Christian S. au paiement d'une somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est renvoyé au jugement entrepris, aux pièces de la procédure et aux conclusions des parties oralement reprises.

SUR CE :

Sur le rappel de salaire :

Attendu que la Cour de céans a, dans son arrêt mixte en date du 29 juin 2009, confirmé le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur Christian S. de sa demande en paiement de la somme de 18 000 € à titre de rappel de salaire en application du salaire garanti par la Convention collective ;

Qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les réclamations du salarié de ce chef ;

Sur la régularité des sanctions disciplinaires :

Attendu que les deux mises à pied disciplinaires ont été notifiées les 24 septembre 2004 et 8 février 2005 par courriers recommandés de la SCA TAPIS SAINT MACLOU signés par Monsieur Gilbert N., responsable des ressources humaines, et que le licenciement a été notifié le 18 janvier 2006 par courrier recommandé à l'en-tête de la SARL SAINT MACLOU NICE signé par Monsieur Rémi H., directeur des ressources humaines de la SCA TAPIS SAINT MACLOU ;

Attendu que l'appelant soutient que les sanctions disciplinaires n'ont pas été prononcées par son employeur mais par la société TAPIS SAINT MACLOU, qui n'a aucun lien contractuel avec lui ;

Qu'il en déduit que les mises à pied disciplinaires et le licenciement sont nuls ;

Attendu que la SARL SAINT MACLOU NICE répond qu'elle est une filiale de la société TAPIS SAINT MACLOU, qui est son unique associé, et que le directeur des ressources humaines du groupe peut mettre en oeuvre lui-même le licenciement des salariés de filiales et prononcer des sanctions disciplinaires ;

Attendu que la société intimée produit les statuts de la société unipersonnelle à responsabilité limitée SAINT MACLOU NICE en date du 7 décembre 2003, desquels il ressort que l'associé unique est la société SCA TAPIS SAINT MACLOU, la délégation de pouvoir en date du 2 juin 1989 établi par le PDG de la société TAPIS SAINT MACLOU, qui délègue à Monsieur Gilbert N., Responsable Paie et administratif, le pouvoir de sanctionner ou licencier tout salarié chez TAPIS SAINT MACLOU SA ou dans ses filiales françaises, ainsi que la délégation de pouvoir en date du 2 juin 2005 établi par le gérant de la SCA TAPIS SAINT MACLOU, qui délègue à Monsieur Rémi H., Directeur des Ressources Humaines, le pouvoir de sanctionner ou licencier tout salarié chez TAPIS SAINT MACLOU SCA ou dans ses filiales françaises ;

Attendu que la SCA TAPIS SAINT MACLOU étant la maison mère de la SARL SAINT MACLOU NICE, son responsable des services administratifs et son directeur des ressources humaines (à partir du 2 juin 2005), qui ne sont pas des personnes étrangères à la filiale, peuvent recevoir une délégation pour procéder à l'entretien préalable, à la notification d'une sanction disciplinaire et au licenciement d'un salarié employé par la filiale ;

Qu'il s'ensuit que les sanctions disciplinaires et le licenciement notifiés à Monsieur Christian S. sont réguliers ;

Sur les mises à pied disciplinaires des 24 septembre 2004 et 8 février 2005 :

Attendu qu'il a été notifié à Monsieur C. le 24 septembre 2004 une mise à pied disciplinaire d'une journée pour le motif suivant :

« Le 23 août 2004, alors que l'adjoint du magasin, Monsieur Éric V., vous faisait remarquer que vous ne respectiez pas vos horaires de travail, vous l'avez traité de « grand con », lui proposant de régler le différend sur parking... », et le 8 février 2005 une seconde mise à pied disciplinaire de trois jours pour le motif suivant :

« Le samedi 22 janvier 2005, vous vous êtes fâché sur votre collègue, Monsieur M., qui était venu en renfort au rayon tapis, à la demande du chef de centre. Votre colère vous a amené à le pousser dans les escaliers. Vous avez ensuite pris vos affaires et vous avez quitté le magasin.

Par chance, Monsieur M. n'est pas tombé. Néanmoins, votre geste aurait pu avoir de graves conséquences.

Un tel manque de maîtrise de soi est intolérable de la part de l'un de nos collaborateurs... » ;

Attendu que la SARL SAINT MACLOU NICE se contente d'affirmer qu'il ressort d'attestations versées aux débats que les faits à l'origine de ces sanctions sont avérés alors même qu'elle ne produit aucun témoignage sur les faits des 23 août 2004 et 22 janvier 2005 ;

Attendu qu'à défaut de tout élément probant versé par l'employeur, il y a lieu d'ordonner l'annulation des sanctions disciplinaires des 24 septembre 2004 et 8 février 2005, qui sont infondées ;

Attendu que Monsieur Christian S. a été mis à pied une journée le 5 octobre 2004 à la suite de la sanction notifiée le 24 septembre 2004 ainsi que trois journées les 14, 15 et 16 février 2005 ;

Qu'il a eu une retenue sur son salaire fixe pour une journée en octobre 2005 d'un montant de 20,64 € , tel que mentionné sur l'annexe jointe à la fiche de paie, aucune retenue sur le salaire fixe n'ayant été effectuée pour le mois de février 2005 ;

Qu'il a cependant connu une réduction de son commissionnement, qui est lié à sa présence sur le magasin, mais qu'il est impossible de chiffrer avec précision ;

Attendu qu'il convient d'allouer à Monsieur Christian S. un rappel de salaire de 20,64 € bruts pour la journée du 5 octobre 2004, 2,06 € de congés payés sur rappel de salaire et un dédommagement de 3000 € tant en réparation de son préjudice matériel qu'en réparation de son préjudice moral ;

Sur le licenciement :

Attendu que la SARL SAINT MACLOU NICE produit, à l'appui du grief visé dans la lettre de licenciement, l'attestation de Monsieur Jean-Louis N., chef de centre, qui relate les faits tels que décrits dans la lettre de licenciement, l'attestation du 6 avril 2006 de Monsieur Gilles M., salarié de l'entreprise, qui rapporte avoir « entendu M. N. et M. S. avoir une altercation verbale au sujet de plusieurs ventes effectuées par M.NOUCHI dans le rayon de M. S. », l'attestation du 28 mars 2006 de Monsieur N.H., salarié de l'entreprise, qui précise qu'il était à l'étage tapis avec Monsieur N. lorsque « Christian S. a dit que (c'était) facile de les descendre (les tapis), il faudra les remonter, (M. H. l'a) regardé et il (lui) a dit : toi dégages et fais ce qu'on te demande, devant les clients, il est ensuite descendu en râlant et parlant à haute voix mais (M. H.) ne comprenait pas ce qu'il disait... » et l'attestation du 6 avril 2006 de Monsieur Louis E., agent de sécurité à l'EURL NICE ARIANE, qui indique avoir « été témoin d'une altercation verbale entre M. N. et M. S. le 03/01/2006 » ;

Attendu qu'en dehors du témoignage de Monsieur Jean-Louis N., les autres témoins rapportent tout au plus avoir assisté à une « altercation verbale » entre Messieurs S. et N. sans préciser si la responsabilité de cette « altercation verbale » incombait au salarié licencié ;

Attendu que Monsieur Christian S. expose que les relations entre le chef de centre, Monsieur Jean-Louis N., et l'ensemble des salariés du magasin était très tendues ;

Qu'il avait lui-même écrit le 4 août 2005 à sa direction pour se plaindre des « manipulations» et des « pressions » exercées par son chef de centre Monsieur N. ;

Attendu que l'appelant verse un tract de la CFDT annonçant la grève des salariés du magasin S.N. ARIANE le 3 décembre 2005 et un courrier collectif de six salariés, dont Monsieur Christian S., en date du 10 janvier 2006 dénonçant les « motifs mensongers pour amorcer le licenciement des signataires de cette contre-proposition (concernant la revalorisation des salaires et adressée le 23/12/2005 à la direction). Pour preuve la première victime est M. C. qui se retrouve en mise à pied conservatoire depuis le 06/01/2006 pour un motif plus que léger, victime de la pression générée par le chef de centre du magasin... » ;

Qu'il produit par ailleurs l'attestation du 23 février 2006 de Monsieur Éric V., adjoint chef de centre, qui témoigne que « le 23/10/2005 les employés de l'EURL NICE ARIANE S. (et lui-même compris) ont fait une demande de revalorisation des salaires. À partir de cette date la direction a semblé tout mettre en uvre pour (les) empêcher de réaliser (leur) chiffre d’affaires dans le magasin (les) pénalisant sur (leurs) salaires. Le fait que la direction par le biais de M. N. pénalise la possibilité de faire du CA à certains vendeurs a indéniablement créé des tensions », l'attestation du 22 février 2006 de Monsieur Louis E., agent de sécurité, qui indique qu'il a « été témoin de provocation de la part du directeur de l'établissement envers M. Christian S. », l'attestation du 22 février 2006 de Madame Claudia B., hôtesse de caisse, qui rapporte que « le chef de centre M.NOUCHI mettait une pression certaine à M. SAÏD C. en lui demandant de faire toutes sortes de travaux incluant la manutention à outrance sachant qu'il avait de gros problèmes de dos. D'où de nombreuses altercations dont une qui s'est terminée un jour par cette phrase de M. N. : « TOI tu vas en chier mon grand », et une autre plus récente : « c'est toi ou moi ». Les derniers temps lorsque M. S. posait les dates pour ses congés ou RTT, cela lui était

systématiquement refusé sous prétexte de sous-effectif du personnel dans le magasin », l'attestation du 28 février 2006 de Monsieur Gilles M. qui indique que « de nombreuses altercations ont eu lieu : -sur des temps de pause, pourtant mérités, sans tenir compte de tout le travail que Christian S. venait d'effectuer, -sur des ventes : M. N. allait vendre ou envoyer un autre vendeur dans le rayon de Christian S. sans mettre son code vendeur (il faut savoir que les vendeurs sont payés au chiffre d'affaires effectué), -sur des devis : non validés par M. N., -sur des demandes de congés : refusées par M. N.. Leurs différents devenaient de plus en plus virulents et (M.MILHAS a) entendu M. N. dire à Christian S. : « de toute façon ce sera vous ou moi » », l'attestation du 23 février 2006 de Madame Isabelle T., vendeuse, qui témoigne avoir « constaté une animosité certaine entre le chef de centre M. N. et M.SAÏD. Monsieur N. étant quelqu'un d'exigeant et ayant constaté que M. S. faisait bien son travail mais ne se laissait pas faire face au comportement excessif de M.NOUCHI... Il a toujours été derrière (M. S.) lui faisant très souvent des réflexions sachant que cela irritait M. S.... Le comportement de M. N. n'a pas eu un effet que sur M. S. mais sur l'ensemble du personnel, car (ils ont) tous eu plusieurs altercations avec lui... » et l'attestation de Monsieur Alain C., intérimaire, qui témoigne que «M.NOUCHI n'avait aucune confiance en son personnel et de pratiquer une sorte de harcèlement, de surveillance insupportable à la longue, ce qui provoquait souvent des altercations avec ses employés... » ;

Attendu qu'il ressort des différents témoignages produits par l'appelant que Monsieur Jean-Louis N. a créé au sein de son personnel un état de tension permanente qui s'est accentuée après une revendication collective salariale du personnel et a mis la pression sur Monsieur Christian S. en le privant de certaines ventes effectuées sur son rayon et non enregistrées sous son code vendeur, en le surveillant et lui adressant de nombreuses réflexions, en lui imposant l'exécution de multiples travaux de manutention et en lui refusant ses demandes de congés et de RTT ;

Que ces agissements répétés de harcèlement moral avaient pour objectif de déstabiliser le salarié et de conduire à la rupture du contrat de travail, telle qu'annoncée par le chef de centre sous la formule : « c'est toi ou moi » ;

Attendu que, dans ces conditions, le témoignage de Monsieur Jean-Louis N. n'apparaît pas objectif et crédible, étant rappelé que les autres témoignages produits par l'employeur ne précisent pas à quel protagoniste incombait la responsabilité de l'altercation verbale du 3 janvier 2006 et ne relatent pas d'insultes ou de menaces proférées par Monsieur Christian S. à l'encontre de son supérieur hiérarchique;

Attendu qu'il y a donc lieu de réformer le jugement sur ce point et de dire que le licenciement du salarié est dénué de cause réelle et sérieuse ;

Qu'il s'ensuit que la mise à pied à titre conservatoire du salarié est injustifiée et qu'il y a lieu d'accorder à celui-ci la somme de 620 € à titre de rappel de salaire et la somme de 62 € au titre des congés payés y afférents ;

Attendu que, le salarié ayant plus de deux ans d'ancienneté, il convient de lui allouer 2500 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1716 € à titre d'indemnité légale de licenciement, indemnités dont le calcul du montant n'est pas discuté, outre 250 € à titre de congés payés sur préavis ;

Attendu que l'appelant produit des éléments médicaux sur sa hernie discale (certificat du 20 janvier 2000, compte rendu d'IRM de rachis cervical du 17 août 2005 et scanner cérébral des 9 avril et 8 novembre 2005), des recherches d'emploi d'avril et mai 2006, un avis de l'ASSEDIC d'admission au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 3 mars 2006, des relevés de situation des indemnités de chômage versées en mars et avril 2006, l'intéressé ayant perçu 904,80 € pour le mois d'avril 2006, trois bulletins de salaire de mai, juin et juillet 2008 établis par la SA TOUS PLASTIQUES DU BATIMENT au sein de laquelle il est employé en qualité de magasinier vendeur

depuis le 5 mai 2008 avec une rémunération mensuelle brute de 1596,29 € , et un avis d'impôts sur les revenus de 2007 mentionnant un total de revenus de 12 576 € ;

Qu'il ne fournit pas d'élément sur l'évolution de sa situation professionnelle entre mai 2006 et avril 2008 ;

Attendu qu'en considération des éléments fournis par l'appelant sur son préjudice, de son ancienneté de 11 années dans l'entreprise occupant plus de 10 salariés et du montant de son salaire, la Cour alloue à Monsieur Christian S. la somme de 20 000 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu qu'eu égard aux circonstances ayant entouré le licenciement de Monsieur Christian S., au comportement de son chef de centre ayant multiplié les agissements de harcèlement moral aux fins de provoquer la rupture du contrat de travail et au renvoi brutal du salarié ayant plus de 11 années d'ancienneté et ayant donné de satisfaction à son employeur jusqu'à son transfert dans le nouveau magasin, il convient d'allouer au salarié la somme de 10 000 € en réparation de son préjudice moral ;

Sur la remise des documents sociaux :

Attendu qu'il y a lieu d'ordonner la remise par l'employeur d'un bulletin de salaire mentionnant les sommes allouées et d'une attestation ASSEDIC rectifiée, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette condamnation d'une astreinte ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Attendu qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, tel que précisé au dispositif ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

STATUANT PUBLIQUEMENT, EN MATIERE PRUD'HOMALE, PAR ARRET CONTRADICTOIRE,

Confirme le jugement en ce qu'il a dit que les sanctions disciplinaires et le licenciement étaient réguliers,

Réforme pour le surplus,

Annule les mises à pied disciplinaires en date des 24 septembre 2004 et 5 février 2005,

Condamne la SARL SAINT MACLOU NICE à payer à Monsieur C. 20,64 € bruts à titre de rappel de salaire sur la journée du 5 octobre 2004 et 2,06 € au titre des congés payés y afférents,

Condamne la SARL SAINT MACLOU NICE à payer à Monsieur C. 3000 € de dommages-intérêts au titre des mises à pied disciplinaires injustifiées,

Dit que le licenciement pour faute grave du salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la SARL SAINT MACLOU NICE à payer à Monsieur Christian S. :

-620 € de rappel de salaire que la période de mise à pied,

- 62 € de congés payés sur rappel de salaire,

-2500 € d'indemnité compensatrice de préavis,

-250 € de congés payés sur préavis,

-1716 € d'indemnité légale de licenciement,

-20 000 € d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-10 000 € de dommages-intérêts pour préjudice moral résultant des circonstances vexatoires et brutales ayant entouré le licenciement,

Ordonne la remise par la SARL SAINT MACLOU NICE d'un bulletin de salaire mentionnant les sommes allouées et de l'attestation ASSEDIC rectifiée en conformité avec le présent arrêt,

Condamne la SARL SAINT MACLOU NICE aux dépens de première instance et d'appel et à payer à Monsieur C. 3000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile.