CA Chambéry, 2e ch., 9 mars 2023, n° 21/00898
CHAMBÉRY
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Sadal (SAS)
Défendeur :
Garage Des Grands Pres (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Fouchard
Conseillers :
M. Therolle, M. Gauvin
Avocats :
SCP Conte Souvy Chavot, SARL Ballaloud & Associes, SELARL Perspectives Merotto Favre
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte de vente du 28 janvier 2015, M. [X] [F] a acquis auprès de la société Sadal un véhicule Citroën de type C4 cactus immatriculé [Immatriculation 5] moyennant le prix de 16 598,50 euros.
M. [X] [F] a rencontré des problèmes d'infiltrations d'eau dans le véhicule.
Le 2 février 2016, puis le 10 janvier 2017, la société Garage des Grands Prés est intervenue pour procéder à des réparations sur le véhicule.
Une expertise a, par la suite, été réalisée à la demande de la société Pacifica, assureur de M. [X] [F]. La société Sadal, ainsi que la société Garage des Grands Prés étaient représentées lors des opérations d'expertise, la société Citroën France, bien que convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception, n'était quant à elle pas présente.
Le 24 mai 2018, l'expert a déposé son rapport.
Par actes d'huissier du 14 décembre 2018, M. [X] [F] a alors assigné la société Sadal et la société Garage des Grands Prés afin d'obtenir la résolution de la vente.
Par acte d'huissier du 4 avril 2014 la société Sadal a appelé en cause la société automobiles Citroën. Par ordonnance du 5 juin 2019, les deux affaires ont été jointes.
Par jugement contradictoire du 6 avril 2021, le tribunal judiciaire de Bonneville a :
- déclaré irrecevables les demandes de M. [X] [F] fondées sur la garantie des vices cachés et la garantie de conformité prévue par le code de la consommation, comme étant prescrites,
- ordonné la résolution du contrat de vente conclu le 28 janvier 2015 entre M. [X] [F] et la société Sadal,
- en conséquence, ordonné la restitution par M. [X] [F] du véhicule Citroën C4 cactus pure tech 82 bvm line, immatriculée [Immatriculation 5] à la société Sadal,
- ordonné la restitution par la société Sadal de la somme de 16 598,50 euros à M. [X] [F],
- condamné in solidum la société Sadal et la société Garage des Grands Prés à verser à M. [X] [F] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamné la société automobiles Citroën à les garantir de cette condamnation,
- débouté la société Sadal de sa demande de résolution de la vente, - condamné la société Automobiles Citroën à verser à M. [X] [F], à la sas Sadal et à la société Garage des Grands Prés chacun la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Automobiles Citroën aux dépens, dont distraction au profit des avocats de la cause,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- ordonné l'exécution provisoire.
Par déclaration du 26 avril 2021, la société Sadal a interjeté appel du jugement. Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 28 septembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la société Sadal demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bonneville le 6 avril 2021 en toutes ses dispositions, sauf les dispositions aux termes desquelles le tribunal a :
- déclaré prescrite l'action en résolution sur la garantie des vices cachés des articles 1641 et suivants,
- déclaré prescrite l'action fondée sur les articles L. 217-4 et L. 217-5 du code de la consommation, et, statuant à nouveau,
- débouter M. [X] [F] de l'intégralité de ses demandes orientées contre elle, à titre très subsidiaire, si la cour confirmait le jugement de première instance s'agissant de la résolution de la vente,
- limiter le montant du prix à restituer à la somme de 12 698,50 euros,
- préciser dans le dispositif de l'arrêt à intervenir que la restitution du prix de vente sur la foi de l'arrêt que rendra la cour ne pourra être exigée qu'après restitution par M. [X] [F] du véhicule et de ses accessoires,
- prononcer la résolution de la vente intervenue le 11 juin 2014 entre elle et la société Automobiles Citroën, en conséquence,
- condamner la société Automobiles Citroën à lui payer la somme de 15 031,20 euros TTC en restitution du prix de vente à elle payé, outre intérêts de droit,
- condamner la société Automobiles Citroën à la relever et garantir des condamnations à titre de dommages et intérêts qui pourraient être prononcées contre elle,
- condamner la société Automobiles Citroën à lui payer une indemnité de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, en toute hypothèse,
- débouter M. [X] [F] de ses demandes de dommages-intérêts orientées contre elle,
- débouter M. [X] [F] de sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles d'instance orientée contre elle,
- condamner M. [X] [F] à lui payer une indemnité de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique du 27 décembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la société Automobiles Citroën demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu le 6 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Bonneville en ce qu'il :
- a condamné in solidum la société Sadal et la société Garage des Grands Prés à verser à M. [X] [F] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- l'a condamnée à les garantir de cette condamnation,
- l'a condamnée à verser à M. [X] [F], à la société Sadal et à la société Garage des Grands Prés chacun la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'a condamnée aux dépens, dont distraction au profit des avocats de la cause. et, statuant à nouveau, sur la demande en résolution de la vente formée par M. [X] [F],
- dire et juger que M. [X] [F] ne rapporte la preuve d'aucun manquement de la société Sadal à son obligation de délivrance conforme,
En conséquence,
- débouter M. [X] [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Sadal,
sur la demande en résolution de la vente formée par la société Sadal,
- constater que les actions de M. [X] [F] et de la société Sadal ont été diligentées plus de deux ans après la découverte du prétendu défaut d'étanchéité au cours de l'hiver 2015,
en conséquence,
- déclarer irrecevable comme prescrite l'action de la société Sadal à son encontre sur le fondement de la garantie des vices cachés,
- dire et juger que la société Sadal ne rapporte la preuve d'aucun manquement de la sa part à son obligation de délivrance conforme,
En conséquence,
- débouter la société Sadal de sa demande en résolution de la vente à son encontre,
Sur la demande de dommages-intérêts formée par Monsieur [X] [F] contre les sociétés Sadal et Garage des Grands Prés,
- dire et juger que M. [X] [F] ne rapporte la preuve d'aucune faute ni d'aucun préjudice, en conséquence,
- débouter M. [X] [F] de l'ensemble de ses demandes de dommages-intérêts, sur les demandes de garanties formées par les sociétés Sadal et Garage des Grands Prés à son encontre,
- dire et juger que les société Sadal et Garage des Grands Prés ne rapportent la preuve d'aucun manquement dont elle aurait à répondre,
En conséquence,
- débouter la société Sadal de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à son encontre,
- débouter la société Garage des Grands Prés de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à son encontre,
En tout état de cause,
- débouter M. [X] [F] et les sociétés Sadal et Garage des Grands Prés de leurs demandes au titre des frais irrépétibles et dépens de première instance et d'appel,
- ordonner la restitution des sommes qui, le cas échéant, auraient été versées par elle à M. [X] [F] et aux sociétés Sadal et Garage des Grands Prés au titre de l'exécution provisoire,
- condamner la ou les parties succombant à lui payer au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique du 21 octobre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la société Garage des Grands Prés demande à la cour de :
à titre principal,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à M. [X] [F] une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,
Statuant à nouveau,
- rejeter toutes demandes contre elle comme étant mal fondées,
à titre subsidiaire, si la cour confirmait le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer in solidum avec la société Sadal à M. [X] [F] une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société automobiles Citroën à la relever et garantir de cette condamnation, en tout état de cause,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société automobiles Citroën à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
y ajoutant,
- débouter M. [X] [F], la société Sadal et la société Automobiles Citroën de toutes demandes à son encontre,
- condamner M. [X] [F], la société Sadal et la société Automobiles Citroën in solidum à lui payer la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel, ainsi qu'à payer les entiers dépens dont distraction au profit de maître Ribes.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique du 28 septembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [X] [F] demande à la cour de :
- confirmer en tous points le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bonneville le 6 avril 2021,
- débouter la société Automobiles Citroën et la société Sadal de leurs demandes fins et prétentions, et donc,
- prononcer la résolution de la vente sur le fondement des articles 1603 et 1604 du code civil pour le défaut de conformité,
en conséquence,
- condamner la société Sadal à lui rembourser la somme de 16 598,50 euros TTC,
- constater que la société Garage des Grands Prés n'a pas rempli ses obligations, en conséquence,
- condamner la société Garage des Grands Prés à lui payer, in solidum avec la société Sadal, la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,
- condamner solidairement la société Sadal et la société Garage des Grands Prés à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel, laquelle somme viendra s'ajouter à celle de 1 500 euros allouée par les premiers juges,
- condamner solidairement la société Sadal et la société Garage des Grands Prés en tous les dépens dont distraction au profit de la sarl Ballaloud et associés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 décembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1. Sur les actions de M. [X] [F] en garantie contre les vices cachés et en garantie de conformité sur le fondement du droit de la consommation La cour observe qu'à hauteur d'appel, M. [X] [F] sollicite la confirmation du jugement sans remettre en question les points de ce dernier ayant dit prescrite l'action en garantie contre les vices cachés et l'action en défaut de conformité relevant du droit de la consommation.
De leurs côtés :
- la société Sadal, appelante, demande la confirmation du jugement sur ce point ;
- la société Citroën France ne critique pas ce point du jugement ;
- la société Garage des Grands Prés ne critique pas ce point du jugement.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré prescrites les actions de M. [X] [F] en garantie contre les vices cachés et en garantie de conformité sur le fondement du droit de la consommation. 2. Sur l'action en délivrance non conforme La société Sadal demande, à titre principal, que M. [X] [F] soit débouté de l'ensemble de ses demandes.
L'article 1604 du code civil dispose que : « la délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur ». Il est constant en jurisprudence que la notion de conformité est inhérente à l'obligation de délivrance.
En l'espèce M. [X] [F] a commandé auprès de la société Sadal un véhicule de marque Citroën, modèle « C4 cactus » type « pure tech 82 BVM Live » le 16 janvier 2015 (date du bon de commande) et livré selon la mention portée sur la facture et les propres écritures de M. [X] [F] le 6 février 2015.
Le défaut de conformité dont il se plaint résulte d'un défaut d'étanchéité provoquant d'importants problèmes d'humidité et de formation de buée à l'intérieur du véhicule en hiver et affectant l'écran tactile du tableau de bord rendu inutilisable.
Si, les problèmes ainsi décrits et constatés par une expertise amiable peuvent être considérés objectivement comme constituant des non conformités en ce que l'usage normal du véhicule s'en trouve affecté, même si ce n'est qu'à certaines périodes de l'année, force est de constater que M. [X] [F] a accepté le véhicule sans réserve et sans en retenir le prix. Or, il est constant en jurisprudence que l'acceptation sans réserve de la marchandise par l'acheteur lui interdit de se prévaloir du défaut de conformité (Cass. com, 1er mars 2005, n°03-19.296). En revanche, elle ne s'oppose pas à ce qu'il puisse se prévaloir de la garantie contre les vices cachés, action prescrite en l'espèce.
Il résulte de ce qui précède que M. [X] [F] ne peut pas se prévaloir de l'action en défaut de conformité. Le jugement entrepris sera donc infirmé sur ce point et M. [X] [F] débouté de l'ensemble de ses demandes. Cette décision entraînera le cas échéant l'obligation pour les parties ayant bénéficié du versement de sommes au titre de l'exécution provisoire, à les restituer.
3. Sur les autres demandes
La cour observe que les demandes de la société Sadal contre la société Citroën France étaient formulées à titre subsidiaire. Elles sont donc sans objet dans la mesure où il a été fait droit au principal.
Les demandes d'appel en garantie formées contre la société Citroën France par la société Garage des Grands Prés et la société Sadal sont également devenues sans objet en l'absence de condamnation.
4. Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, M. [X] [F] qui succombe sera condamné aux dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de maître Agnès Ribes par application de l'article 699 du code de procédure civile. M. [X] [F] sera corrélativement débouté de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile comme n'en remplissant pas les conditions d'octroi.
En l'espèce, au regard du déroulement des événements ayant suivi l'achat du véhicule, aucune considération d'équité ne permet de faire supporter par M. [X] [F] les frais irrépétibles non compris dans les dépens exposés par la société Citroën France, la société Garage des Grands Prés et la société Sadal. Elles seront déboutées de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile formées contre lui.
Enfin aucune considération de droit ne permet de faire supporter par la société Citroën France ou par la société Sadal partie ou totalité des frais irrépétibles non compris dans les dépens exposés par la société Garage des Grands Prés.
C'est, en effet, M. [X] [F] qui l'a attrait dans la cause. Elle sera déboutée de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit prescrites les actions de M. [X] [F] en garantie contre les vices cachés et en garantie de conformité fondée sur le droit de la consommation,
Infirme le jugement déféré pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Déboute M. [X] [F] de l'ensemble de ses demandes,
Condamne M. [X] [F] aux dépens de première instance et d'appel, maître Agnès Ribes étant autorisée à recouvrer contre lui ceux dont elle a fait l'avance sans recevoir provision,
Déboute M. [X] [F], la société Sadal, la société Citroën France et la société Garage des Grands Prés de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.