CA Versailles, 14e ch., 23 novembre 1988, n° 5619/88
VERSAILLES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Fred Karon (SARL)
Défendeur :
Magtape (Sté), Starter (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Sargos
Conseillers :
Mme Gautrat, M. Frank
Avoués :
Me Lefevre, SCP Jullien et Lecharny, Me Delcaire
Avocats :
Me Lorach, Me Gras, Me Hardeche
Considérant que la Société MAGTAPE, créée par M. MILLER sous la forme d'une entreprise unipersonnelle le 29.11.1985, a été transformée en SARL après que la société FRED KARON ait pris une participation le 6.6.1986 à l'occasion d'une augmentation de capital et détienne ainsi 50 % des parts de cette société ; que la société MAGTAPE a elle-même pris une participation à hauteur de 50 % dans le capital de la société STARTER, M. MILLER devenant co-gérant de cette société avec M. BOUSSUGUE que par courrier en date du 30.11,1987, le gérant de la société FRED KARON demandait à M. MILLER, gérant de la société MAGTAPE, la convocation d'une assemblée générale extraordinaire, le rachat des participations MAGTAPE dans STARTER étant envisagé ; que le 3.12.1987, une convocation était adressée à la société FRED KARON, en vue d'une assemblée générale ayant pour ordre du jour la cession de la participation dans la société STARTER, mais que, par courrier du 16.12, le gérant de la société FRED KARON réclamait divers documents comptables, tandis que le, 23.12.1987 une nouvelle convocation pour une assemblée générale extraordinaire, devant se tenir le 11.01.1988 était envoyée à la société FRED KARON portant un ordre du jour complété par les demandes du gérant de cette société ;
Considérant que par courrier en date du 08.01 1988, le gérant de la société FRED KARON informait M. MLLLFR de ce qu'il ne se rendrait pas à l'assemblée dans la mesure où il n'avait pu obtenir, malgré l'intervention d'un huissier, les documents réclamés, et que, le 27.01.1988 M. MILLER démissionnait de ses fonctions de co-gérant de la société STARTER ; que par acte en date du 08.03.1968, la société MAGTAPE, représentée par son gérant, M. MILLER, a cédé ses parts dans la société STARTER, sous la condition résolutoire du paiement du prix et du remboursement du compte courant de la société MAGTAPE d'un montant de 700.000 F, et qu'enfin, le 18.03.88, la société FRED KARON faisait défense à la société MAGTAPE et à M. MILLER de céder les parts litigieuses, ce dernier répondant le 22.03 qu'il considérait que J'aliénation entrait dans le cadre de ses pouvoirs statutaires ;
Considérant que par acte en date du 08.04.88 la société FRED KARON a assigné en référé les sociétés MAGTAPE et STARTER devant le président du tribunal de commerce de Versailles aux fins de :
"- désigner un mandataire de justice, administrateur judiciaire, à l'effet de recueillir dans la comptabilité des sociétés MAGTAPE et STARTER tous éléments d'information et d'appréciation sur la gestion incriminée à MM. BOUSSUGUE et MILLER ;
- déterminer la licéité ou l'illicéité d'un ensemble d'écritures comptables dans le bilan clos le 31.12.1986 par la société STARTER notamment au titre de l'inventaire des stocks ;
- analyser et se faire communiquer les pièces, devis, documents et factures afférentes au développement anormal du secteur graphisme de la société STARTER ;
- donner tous éléments d'appréciation au tribunal quant à la gestion par les précités des sociétés MAGTAPE et STARTER ;
- se faire justifier de l'existence ou de l'inexistence d'une cession participative ainsi que des conditions de celle-ci ;
- permettre un contrôle interne des activités sociales des sociétés plus amplement dénommées ci-dessus en réunissant les informations sciemment omises à ce jour ;
- convoquer toute assemblée des associés afin de pourvoir au remplacement le cas échéant des dirigeants sociaux ;"
Considérant que par l'ordonnance déférée, Président du tribunal de commerce de Versailles a déclaré irrecevable l'action intentée par la société FRED KARON en ce qu'elle est dirigée contre la société STARTER, dans la mesure où la société FRED KARON n'était ni associée de la société STARTER, ni titulaire d'un titre de créance certaine envers elle ;qu'il a débouté la société FRED KARON de sa demande dirigée contre la société NAGTAPE en estimant que la demande d'expertise de gestion ne pouvait avoir un caractère générai et que les présomptions n'étaient pas suffisamment : précises pour permettre de suspecter certaines opérations de gestion ;
Considérant qu'au soutien de son appel tendant. à l'infirmation de la décision entreprise, à la nomination d'un administrateur judiciaire ou subsidiairement d'un expert judiciaire, la société FRED KARON soutient que la vente des parts de MAC-TAPE dans STARTER a été faite de mauvaise foi en fraude des droits de la société FRED KARON ; qu'elle insiste sur le fait que la société STARTER était nécessairement informée de son opposition à la cession, qui, s'analyserait non en une simple cession de parts mais en une Cession de contrôle ; qu'elle ajoute, qu'en cas de cause grave au sein d'une société, les tribunaux se reconnaissent compétents pour nommer un administrateur ;
Mais, considérant que la demande formée à l'encontre de la société STARTER se heurte, ainsi Glue l'a exactement relevé le premier juge, au fait qu'il n'existait lors de l'assignation lancée le 08.04.1988 plus aucun lien entre la société FRED KARON et la société STARTER dans la mesure où une cession était intervenue le 08.03.1988, qui ne comportait nullement une condition sus ive mais une condition résolutoire relative au paiement effectif des chèques, et billets à ordre ; que, dès lors, les demandes de nomination d'un expert de gestion ou d'un administrateur provisoire, qui supposent toutes deux la qualité de porteur de parts du demandeur, ne peuvent être retenues ; que la société FRED RARUN ne saurait donc exercer un droit de communication sur les éléments comptables et les rapports de gestion de la société STARTER ; que ces demandes apparaissent en outre tardives, le gérant de la société FRED KARON étant au courant de la cession projetée et de la situation de la société STARTER depuis le 30.11.1988 ;
Considérant que la demande formée à l'encontre de la société MAGTAPE se heurte également, ainsi que l'a indiqué exactement le premier juge, aux dispositions de la loi du 01.03,1934 ; qu'en effet, la demande d'expertise de gestion ne peut avoir un caractère général et concerner le centrale de l'ensemble de la politique d'une société, ce qui est le cas en l'espèce ; qu'en tout état de cause, il apparaît qu'effectivement les pouvoirs de M. MILLER en qualité de gérant de la société MAGTAPE lui permettaient de céder la, participation que celle-ci détenait au sein de la société STARTER ; que le problème de la prétendue nullité de l'assemblée générale du 11.01.1988 rie relève pas de l'appréciation de la juridiction des référés, mais qu'il y a lieu d'observer que le gérant de la société FRED KARON avait de lui-même décidé de n'y point participer après avoir réclamé sa convocation, alors même que l'ordre du jour de cette assemblée avait, été complétée sur sa demande, se mettant ainsi de lui-même dans l'impossibilité d'en discuter avec le gérant et les comptables de la société MAGTAPE ; qu'enfin il apparaît que lors de l'assemblée générale ordinaire du 30.06.1988 à laquelle il participait, il a pu obtenir les explications financières, au vu du procès-verbal régulièrement versé et : discute aux débats ;
Considérant que la demande de nomination d'un expert en tant qu'elle serait fondée sur les dispositions d l'article 145 du Nouveau code de procédure civile ne peut qu'être rejetée dans la mesure où il n'est justifié d'aucun motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les allégations présentées par la société FRED KARON étant imprécises quant à une gestion suspecte de la société MAGTAPE ; que la demande de nomination d'un administrateur doit également être écartée, dans la mesure où il n'est pas établi que la mésentente entre les associés risette en péril la société ; qu'il y a dès lors lieu de confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, de débouter la société FRED KARON de toutes ses demandes, et de la condamner à payer à chacune des sociétés MAGTAPE et STARTER une somme de 3000 F en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile pour les frais par elle exposés et non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser à leur a pas lieu, aucun abus n'étant caractérisé, d'accorder à la société MAOTAPE de dommages intérêts pour procédure abusive ;
PAR CES MOTIFS ;
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement après débats en audience publique et en dernier ressort,
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute la société FRED KARON de sa demande d'expertise fondée sur les dispositions de l'article 145 du Nouveau code de procédure civile,
La condamne à régler à chacune des sociétés MACTAPE et STARTER une somme de 3000 F (TROIS MILLE FRANCS),
Déboute la société MAGTAPE de sa demande de dommages intérêts,
Condamne la société FRED KARON en tous les dépens, et autorise Maître DELCAIRE et la SCP JULLIEN & LECHARNY, avoués à les recouvrer, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile.