CA Toulouse, 2e ch., 14 octobre 1992, n° 3829/91
TOULOUSE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
Servipose (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Foulon
Conseillers :
M. Milhet, M. Lebreuil
Avoués :
SCP Nidecker-Prieu Philippot, Me Cantaloube-Ferrieu
Avocats :
Me Azam, Me Jauze Molières
Attendu que M. X, associé de la S.A.R.L. SERVIPOSE créée le 17 juillet 1989, et dont il est le gérant jusqu'au 29 décembre 1989 a saisi le juge des référés d’une demande tendant à voir :
- enjoindre à la S.A.R.L. de procéder à la rectification des mentions portées au registre du commerce, de manière à faire apparaitre le nom du nouveau gérant, M. Y, à compter du 29 décembre 1989,
- désigner un expert avec mission de vérifier s'il a été établi un bilan pour les années 1989 et 1990, dire si la tenue des comptes est conformes au nouveau plan comptable, et à l'intérêt des associés minoritaires, et de donner tous éléments utiles quant à la situation de son compte courant.
Attendu que le premier juge a fait droit à cette demande en ce qui concernés la rectification des mentions portées au registre du commerce, mais la rejeté pour le surplus en considérant que les conditions d*application de l’article 20 de la loi du 1er mars 1984 n’étaient pas réunies, les irrégularités reprochées par le demandeur au nouveau gérant n’entrant pas dans le cadre des opérations de gestion visée par ce texte ;
Attendu que M. X fait grief au juge des référés de s'être ainsi prononcé alors pourtant
- que la désignation de l'expert était une mesure normale destinée à permettre aux associés minoritaires de se renseigner sur la nature, la portée et les conséquences d’opérations de gestion susceptibles de leur porter préjudice.
Que cette désignation était en l’espèce justifié
a) par la mention au bilan de l'exercice 1990 de salaires qui pourraient avoir été attribues au nouveau gérant sans que l'assemblée générale et préalablement fixée sa rémunération
b) par la mention au bilan, au titre des comptes courant associés d’une somme de 113 909 F dont il n’était pas justifié
c) par le refus des nouveaux dirigeants de répondre aux questions qu'il leur avait posées avant L’assemblée générale du 28 juin 1991 attitude d'autant plus préjudiciable qu'aucun rapport de gestion n’avait été communiqué aux associés en vue de cette assemblée générale ;
Attendu qu'il conclut de plus fort à la désignation d'un expert chargé de vérifier les postes comptables ayant fait l'objet de ses demandes d’éclaircissement le 28 juin 1991 à la rectification sous astreinte des mentions portées au registre du commerce, et a la condamnation de la S.A.R.L, SERVIPOSE au paiement de la somme de 3 000 F sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu que la société SERVIPOSE, intimée conclut au contraire à la confirmation pure et simple de la décision déférée, et demande que M. X soit condamné à lui payer la somme de 6 000 F par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
SUR QUOI
Attendu que l'article 64-2 de la loi du 24 juillet 1966 autorise un ou plusieurs associés représentant au moins le dixième du capital social a demander en justice la désignation d’un ou plusieurs experts charges de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion ;
Attendu que même si on ne la conçoit pas comme un remède ultime, ou comme une voie subsidiaire ne pouvant être utilisée que lorsque les autres voies d’information ont été épuisées, l’expertise dite "de gestion" instituée par ce texte est une mesure judiciaire grave en ce qu’elle diminue le crédit de la société par le doute qu’elle fait planer sur une opération sociale, et ne peut donc être ordonnée que si sont caractérisées des présomptions d’irrégularité affectant une ou plusieurs opérations de gestion déterminées ;
Attendu que tel n’est pas le cas en l’espèce ; que les critiques formulées par l’appelant quant à l'absence d’un véritable rapport de gestion ou quant au refus qui lui a été opposé lorsqu’il a tenté de se renseigner sur la rémunération du nouveau gérant, et sur le détail des comptes courants mentionnés au bilan de l'exercice 1990 sont des critiques d'ordre général qui ne permettent pas de remettre en doute la régularité d'une ou de plusieurs opérations déterminées ;
Que la présomption exigée pour la mise en oeuvre de l’expertise soit d’autant moins caractérisée que toutes les pièces comptables ont été communiquées aux associés, et qu’il appartient à M. X d’en demander la certification pour le cas été il en contesterait l’authenticité ;
Que de plus les comptes associés figurent au bilan, et que M. X, comme la pertinemment relevé le premier juge, ne justifie pas que les sommes par lui avancées, alors qu'il était gérant, ne correspondent pas à celles qui lui ont été remboursées en janvier 1990 ;
Qu’enfin le détail de la dette inscrite au bilan pour 113 909 F est fourni en annexe, et que la société SERVIPOSE a communiqué la déclaration D.A.S. 90, comme exigé par l’appelant ; que 5 salariés, dont le gérant, sont mentionnés sur ce document ; que la rémunération de celui-ci n'a certes pas été soumise à l'assemblée générale, mais qu’il serait inutile de désigner un expert aux seules fins de constater cette irrégularité ;
Attendu qu’il convient par conséquent de confirmer l'ordonnance critiquée en ce qu’elle a rejeté la demande d’expertise ;
Attendu pour le surplus que la S.A.R.L. est bien intervenue pour que soit mentionné sur le registre du commerce la date de prise de fonction de son nouveau gérant, soit le 29 décembre 1989 mais que par suite d’une erreur matérielle, c'est une autre date qui a été portée ;
Attendu que l'intimé n’a fait aucune diligence pour que soit rectifiée cette erreur et qu’il convient de l'y contraindre, sous astreinte ;
Attendu que M. X, qui succombe pour l'essentiel doit être condamné aux dépens d’appel ; qu’il est en revanche équitable de le dispenser de toute condamnation sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
PAR CBS MOTIFS
LA COUR
Reçoit l'appel juge régulier, le déclare mal fondé ;
Confirme en toutes ses dispositions 1rordonnance rendue le 12 Juillet 1991 par le Président du Tribunal de Commerce de TOULOUSE dans l’instance opposant la S.A.R.L. SERVIPOSE & M. X ;
Et y ajoutant,
Dit que la S.A.R.L. SERVIPOSE devra procéder aux rectifications des mentions portées au registre du commerce dans le mois de la signification du présent arrêt, et sous astreinte de 100 F par jour de retard ;
Condamne M. X aux dépens d’appel et autorise Me CANTALOUBE-FERRIEU, avoué, à recouvrer directement contre lui ceux des dépens dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante ;
Dit n’y avoir lieu a application de l’article 700 modifié du Nouveau Code de Procédure Civile.