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Décisions

Cass. 3e civ., 15 février 2006, n° 04-19.931

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Weber

Versailles, du 17 septembre 2004

17 septembre 2004

Sur les premier et second moyens du pourvoi principal et du pourvoi incident, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué ( Versailles, 17 septembre 2004), que les époux X... ont, par l'intermédiaire de l'agence immobilière MHT, conclu avec les consorts Y... une promesse de vente d'une propriété leur appartenant ; que les acquéreurs ont refusé de signer l'acte authentique de vente au motif que le terrain était grevé d'une importante servitude de passage et ont engagé une action en nullité de la promesse ;

Attendu que les époux X... et la société MHT font grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen : 1 / que la cour d'appel, dès lors qu'elle avait constaté que l'avenue Raspail constituait une voie ouverte à la circulation publique sur laquelle le pouvoir du maire s'appliquait pour l'entretien, l'éclairage public, le nettoiement et le curage des réseaux d'égout, ne pouvait, pour réfutation des conclusions des époux X... et de la société MHT, refuser de rechercher en quoi le fait que cette voie ait été privée et non publique, et ait eu pour fondement juridique une servitude non apparente, aurait pu causer quelconque préjudice aux acquéreurs, et donc constituer un élément déterminant de leur consentement, et n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 1110 et 1638 du Code civil ; 2 / que, dès lors que la perte de surface utile consécutive à l'ignorance de la servitude n'était pas relative à la largeur de la voie existante, mais seulement à la bande de terrain de 70 centimètres, la cour d'appel ne pouvait juger au soutien de sa décision que la surface utile aurait été inférieure de presque 10 % à celle que les consorts Y... comptaient acquérir (181 m après déduction de la totalité de la servitude au lieu des 200 m annoncés dans le compromis), sans priver sa décision de tout fondement légal au regard des articles 1110 et 1638 du Code civil ; 3 / qu'en ne recherchant pas, en réfutation des conclusions des époux X..., si l'élargissement de l'avenue Raspail sur le fondement de la servitude n'était pas devenu juridiquement impossible en l'état de l'existence de constructions plus que trentenaires sur la bande de 70 centimètres, et par conséquent de l'extinction partielle de la servitude par impossibilité d'usage trentenaire, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 4 / que la cour d'appel, qui, après avoir constaté qu'après la déduction de la servitude la surface utile de la parcelle était de 181 m et non de 200 m comme annoncé au compromis, n'a pas justifié en quoi le fait que les époux X... aient pu mentionner une surface de 192,50 m dans une demande de permis de construire une véranda aurait pu caractériser la connaissance par ceux-ci de l'existence de la servitude, alors que, par ailleurs, la servitude n'avait pas été mentionnée dans leur acte de vente, et aurait pu ainsi justifier la non-application de la clause de non-responsabilité, n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que la servitude de passage constituée sur une bande de deux mètres de large sur toute la longueur du terrain était une servitude unique qui avait été effectivement mise en oeuvre, que le non-usage d'une bande de soixante-dix centimètres faisant partie du jardin découlait des seules convenances des bénéficiaires de la servitude et correspondait à leurs besoins qui jusque là n'avaient pas impliqué l'élargissement de l'avenue Raspail, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérante ou qui n'était pas demandée, et qui a souverainement retenu que M. Z... et Mme A... n'auraient pas acheté le bien s'ils avaient su que la surface utile proposée à la vente était inférieure de près de dix pour cent à celle qu'ils comptaient acquérir et qu'ils devraient supporter un risque d'éviction, a pu en déduire que leur consentement à la vente avait été vicié ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que si le plan cadastral annexé à la déclaration de travaux figurant dans le dossier de permis de construire d'une véranda déposé en 1995 par les époux X... était peu lisible quant à l'existence de la servitude, la déclaration indiquait une surface totale de la propriété de 192,50 m et non de 200 m , la cour d'appel, qui en a souverainement déduit que les époux X... connaissaient l'existence de la servitude, a retenu à bon droit que la clause de la promesse selon laquelle les acquéreurs s'engageaient à souffrir les servitudes, apparentes ou non, continues ou discontinues, était inopposable aux consorts Y... ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE les pourvois ;

Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les époux X... et la société MHT, ensemble, à payer aux consorts Y... la somme de 2 000 euros ; rejette les autres demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille six.