CAA Douai, 1re ch. formation a 3, 25 mars 2010, n° 08DA01871
DOUAI
Arrêt
Annulation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Mulsant
Rapporteur :
M. Lequien
Commissaire du Gouvernement :
M. Lepers
Avocat :
SCP Huglo Lepage & Associés
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 17 novembre 2008, présentée pour la SARL VITSE et la SARL DEVAREM DEVELOPPEMENT, dont les sièges sont rue Langhemast Straete à Noordpeene (59670), par la SCP Huglo, Lepage et Associés ; la SARL VITSE et la SARL DEVAREM DEVELOPPEMENT demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 0606891-0703212 du 9 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant, d'une part, à l'annulation des décisions du préfet du Nord du 29 août 2005, leur imposant des prescriptions complémentaires pour la poursuite de l'exploitation de leur établissement situé à Houplin Ancoisne, du 12 septembre 2006, les mettant en demeure de respecter les dispositions des articles 9, 10, 11 et 12 de l'arrêté du 29 août 2005, et du 9 mai 2007, suspendant leur activité d'installation de traitement et de recyclage de matériaux et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à leur verser les sommes de 3 000 euros et de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) à titre principal, d'annuler les décisions des 29 août 2005, 12 septembre 2006 et 9 mai 2007 du préfet du Nord visant l'installation exploitée par les sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT, à titre subsidiaire, à la modification de la décision du 29 août 2005 leur imposant des prescriptions complémentaires afin d'en assouplir les mesures ;
3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elles soutiennent que les conclusions dirigées à l'encontre de l'arrêté du 29 août 2005 portant prescriptions spéciales ne sont pas tardives, aucun délai de recours contentieux n'ayant pu commencer à courir, compte tenu de ce que la notification de cet acte, qui n'a pas été faite à l'exploitante, la société VITSE, mais à la société DEVAREM DEVELOPPEMENT, qui est une entité distincte de celle-ci, n'a pas été régulière ; que les termes mêmes de l'arrêté préfectoral dont s'agit, qui comporte en titre la mention projet d'arrêté préfectoral , étaient de nature à induire le destinataire de la notification en erreur sur la portée réelle de cette décision ; qu'il n'est pas établi que cet arrêté ait été pris par une autorité régulièrement habilitée et sur la base d'un rapport dressé par un inspecteur des installations classées assermenté ; que cet arrêté est, en outre, insuffisamment motivé au regard des exigences posées par les article 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'en particulier, le rapport de l'inspecteur des installations classées auquel ses motifs font référence n'y a pas été joint et n'a jamais été notifié à l'exploitante ; qu'au fond, les prescriptions que cet arrêté a eu pour objet d'imposer à la société exploitante de l'installation d'Houplin Ancoisne sont excessives, non fondées ou impossibles à respecter, qu'il s'agisse des horaires d'autorisation d'accès, de l'obligation d'analyse HAP métaux lourds , de l'obligation de bâchage des camions, de la limitation de la hauteur des matériaux stockés, de l'obligation de mesurage tous les trois mois par un géomètre expert, de la limitation à 130 du nombre de camions journaliers, de l'obligation d'approvisionnement des matériaux à raison de 30 % par voie fluviale, des mesures de limitation des poussières, de la fermeture de l'accès nord et enfin de la limitation à deux mois de stockage des matériaux ; que ces prescriptions créent une rupture d'égalité devant les charges publiques ; qu'en effet, ses concurrents exercent leur activité sans être soumis aux mêmes règles, ce qui crée à son détriment une situation de concurrence déloyale caractérisée par les conditions d'exploitation inéquitables ; que cette situation se conçoit d'autant moins que la société VITSE recycle tous ses matériaux, ce qui constitue une plus value environnementale incontestable, tandis que ses concurrents se contentent pour la plupart de les enfouir ; que celle-ci subit de ce chef un préjudice anormal et spécial ; que l'arrêté de mise en demeure du 12 septembre 2006 d'avoir à respecter certaines prescriptions est lui même illégal, par voie de conséquence de l'illégalité de l'arrêté du 29 août 2005, pour l'application duquel il a été pris, qui n'est pas définitif ; qu'il est ainsi dépourvu de base légale ; que cet arrêté de mise en demeure est, en outre, insuffisamment motivé ; que le rapport de l'inspecteur des installations classées auquel ses motifs font référence et qui constitue l'exclusive motivation dudit arrêté, n'y a pas été joint et n'a été communiqué à la société VITSE que dans le cadre de la procédure contentieuse devant le Tribunal administratif de Lille ; qu'il n'est pas établi que cet arrêté ait été pris sur la base d'un rapport dressé par un inspecteur des installations classées assermenté ; que cet arrêté n'a pas été pris après mise en oeuvre de la procédure contradictoire prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; que concernant l'arrêté de suspension du 9 mai 2007, il n'est pas établi qu'il ait été pris par une autorité régulièrement habilitée ; que cet arrêté de suspension est, en outre, insuffisamment motivé ; qu'en effet, le rapport d'inspection sur lequel est fondé l'arrêté de suspension d'activité en date du 9 mai 2007 n'a jamais été joint audit arrêté et ne leur a jamais été notifié ; qu'elles peuvent invoquer à bon droit l'illégalité de l'arrêté de suspension d'activité du 9 mai 2007 en soulevant par la voie de l'exception, l'illégalité de l'arrêté du 12 septembre 2006 portant mise en demeure de respecter les dispositions de l'arrêté du 29 août 2005 portant prescriptions spéciales, lui même illégal ; que la mesure de suspension présente un caractère disproportionné dès lors que depuis le 11 mai 2007, l'exploitation a dû être interrompue, le site a été fermé et elle a subi un préjudice commercial important ; qu'à titre subsidiaire, elles sollicitent que certaines prescriptions excessives portées par l'arrêté du 29 août 2005 soient supprimées ou aménagées par la Cour, afin de parvenir à un équilibre acceptable entre la préservation de l'environnement et les conséquences économiques de ces mesures ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu l'ordonnance, en date du 15 juin 2009, portant clôture d'instruction au 15 juillet 2009 ;
Vu le mémoire, enregistré le 8 juillet 2009 par télécopie et confirmé le 10 juillet 2009 par la production de l'original, présenté pour la SARL VITSE et la SARL DEVAREM DEVELOPPEMENT, par la SCP Gros, Deharbe et Associés, qui concluent aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et soutiennent en outre qu'en tant que tiers, la société DEVAREM DEVELOPPEMENT est recevable à contester les prescriptions spéciales excessives imposées à la société VITSE qui viennent limiter le développement du VAREM (Valorisation Remblais) et de la valorisation des déchets du BTP ; que des prescriptions horaires concentrent dans l'absolu le risque engendré par le passage des poids lourds, sont inadaptées au regard des intérêts de voisinage et restreignent une activité favorable à l'environnement ; que des prescriptions qui ne sont pas imposées aux concurrents de VITSE ou plus généralement aux autres installations du même type méconnaissent le principe de la liberté du commerce et de l'industrie ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 juillet 2009 par télécopie et confirmé le 16 juillet 2009 par la production de l'original, présenté par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, qui conclut au rejet des requêtes des sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT ; il soutient, à titre principal, que la requête des sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT tendant à l'annulation de l'arrêté de prescriptions spéciales du 29 août 2005 est irrecevable dès lors qu'elle a été introduite après l'expiration du délai de recours ; qu'à titre subsidiaire sur le bien-fondé de la requête, l'arrêté préfectoral du 29 août 2005 a régulièrement été signé par le secrétaire général adjoint de la préfecture du Nord qui a reçu délégation de signature par arrêté du 1er mars 2005 ; qu'en outre Mme Nathalie A a bien été régulièrement assermentée comme le démontre la copie de son assermentation ; que l'arrêté contesté qui énonce les considérations de droit et de fait qui fondent la décision du préfet est suffisamment motivé ; que les sociétés requérantes n'apportent aucun élément de nature à démontrer que les prescriptions spéciales ne seraient pas justifiées et n'établissent pas non plus que leur coût serait excessif au regard de la protection des intérêts visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ; que concernant l'arrêté de mise en demeure du 12 septembre 2006, il s'avère que lors d'une visite du site effectuée le 6 juin 2007 par l'inspecteur des installations classées, les sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT s'étaient mises en conformité avec les prescriptions spéciales fixées par l'arrêté du 29 août 2005 ; qu'en conséquence, le préfet du Nord a, par arrêté du 20 juin 2007, abrogé l'arrêté de mise en demeure du 12 septembre 2006 ainsi que l'arrêté de suspension de l'activité du 9 mai 2007 devenus sans objet ; que la Cour ne pourra que prononcer un non-lieu à statuer sur la demande d'annulation de l'arrêté de mise en demeure du 12 septembre 2006 et de l'arrêté de suspension de l'activité du 9 mai 2007 ; qu'en tout état de cause, concernant l'arrêté de mise en demeure du 12 septembre 2006, les moyens des sociétés requérantes tirés d'une absence de motivation et d'une absence de justification du serment de l'agent ayant établi le constat en date du 15 juin 2006 ne sont pas fondés comme l'a démontré le préfet ; que concernant le moyen tiré de la violation de la procédure contradictoire, il est inopérant, la mise en demeure adressée par le préfet à l'exploitant d'une installation classée n'est pas soumise à la procédure contradictoire, le préfet se trouvant en situation de compétence liée ; que comme il a été dit, il n'y a pas lieu non plus de statuer sur la demande d'annulation de l'arrêté de suspension du 9 mai 2007 ; qu'en tout état de cause, les moyens des sociétés requérantes tirés à nouveau de l'incompétence du signataire de l'acte et de l'insuffisance de motivation ne sont pas fondés comme l'a démontré le préfet ; que si les sociétés requérantes invoquent que l'arrêté de suspension du 9 mai 2007 est illégal par voie d'exception, l'arrêté du 29 août 2005 ayant acquis un caractère définitif à l'égard des sociétés requérantes, l'exception d'illégalité est irrecevable, comme elle est également irrecevable envers l'arrêté du 12 septembre 2006 qui a été abrogé ; que, comme l'a démontré le préfet, la mise en demeure de suspension n'est pas disproportionnée ; que la demande adressée à la Cour par les sociétés requérantes tendant à modifier les prescriptions techniques imposées par l'arrêté du 29 août 2005 est irrecevable dès lors que le préfet n'a pas été saisi au préalable de cette demande ; que toutefois, ainsi qu'il a été démontré en première instance, les prescriptions complémentaires imposées aux sociétés requérantes sont pleinement justifiées et n'étant en aucun cas disproportionnées, il n'y a pas lieu de les modifier ;
Vu l'ordonnance en date du 21 juillet 2009 portant réouverture d'instruction ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 8 décembre 2009, présenté pour la SARL VITSE et la SARL DEVAREM DEVELOPPEMENT qui concluent aux mêmes fins que leurs précédentes écritures par les mêmes moyens et soutiennent en outre que le respect total des prescriptions a entraîné un effondrement de l'activité de la plate forme, une procédure de redressement judiciaire est en cours et il y a un risque sérieux de mise en liquidation en l'absence de reprise d'un niveau d'activité acceptable ; que les prescriptions spéciales imposées à la société VITSE méconnaissent le régime de la déclaration, ainsi le préfet a commis un détournement de procédure pour corseter son activité après lui avoir refusé l'autorisation d'exploiter ; que les arrêtés de mise en demeure ont produit des effets et leur illégalité engage la responsabilité de l'administration, eu égard aux pertes d'exploitation qu'ils ont engendrées pour la société VITSE ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Albert Lequien, président-assesseur, les conclusions de M. Jacques Lepers, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Hicter, pour la société VITSE et la société DEVAREM DEVELOPPEMENT ;
Considérant que la société à responsabilité limitée VITSE a créé en 1999 une plateforme de criblage, de concassage de béton et d'enrobés routiers et de transit de produits minéraux sur le territoire de la commune d'Houplin Ancoisne ; que ces installations étaient soumises à la réglementation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, sous le régime de la déclaration ; qu'à la suite du dépôt, le 28 avril 1999, du dossier de déclaration y afférent, un récépissé a été délivré à ladite société par le préfet du Nord le 4 octobre 1999 ; que, de nombreuses réclamations de riverains, d'associations et des maires de communes environnantes lui ayant été rapportées, le préfet du Nord a fait effectuer à plusieurs reprises des inspections du site ; que, sur le rapport de l'inspecteur des installations classées, le préfet, estimant que les prescriptions générales imposées à ladite installation n'étaient pas suffisantes pour limiter les inconvénients générés par celle-ci, a imposé, par arrêté du 29 août 2005, des prescriptions spéciales ; que, certaines de ces prescriptions n'ayant pas été respectées, le préfet a pris, le 12 septembre 2006, un arrêté de mise en demeure imposant à l'exploitante de mettre ses installations en conformité avec celles-ci ; qu'enfin, par arrêté du 9 mai 2007, le préfet a suspendu l'activité d'installation de traitement et de recyclage de matériaux ; que la requête de la SARL VITSE et de la SARL DEVAREM DEVELOPPEMENT est dirigée contre le jugement du 9 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Nord des 29 août 2005, 12 septembre 2006 et 9 mai 2007 ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 29 août 2005 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 514-6 du code de l'environnement : I. Les décisions prises en application des articles L. 512-1, L. 512-3, L. 512-7, L. 512-8, L. 512-12, L. 512-13, L. 513-1 à L. 514-2, L. 514-4, L. 515-13 I et L. 516-1 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction. Elles peuvent être déférées à la juridiction administrative : 1° Par les demandeurs ou exploitants, dans un délai de deux mois qui commence à courir du jour où lesdits actes leur ont été notifiés (...) ;
Considérant que, pour rejeter les conclusions présentées par les sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT à l'encontre de l'arrêté préfectoral du 29 août 2005 imposant des prescriptions spéciales pour la poursuite de l'exploitation de l'installation en cause, le Tribunal administratif de Lille a, par le jugement attaqué du 9 octobre 2008, estimé que lesdites conclusions étaient irrecevables comme tardives ; que les sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT font valoir, au soutien de la requête d'appel que ledit arrêté n'ayant pas été notifié à la société VITSE, seule titulaire de l'autorisation d'exploiter, et mentionnant par ailleurs qu'il s'agit d'un projet d'arrêté, le délai de recours contentieux n'a pas commencé à courir ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'arrêté litigieux a été notifié à la société DEVAREM DEVELOPPEMENT, filiale de la société VITSE ; que l'article 1er de l'arrêté impose le respect des dispositions édictées par l'arrêté à la société VITSE DEVAREM ; que ces deux sociétés ont le même siège social, le même gérant et des objets sociaux et activités étroitement liées ; que la société DEVAREM DEVELOPPEMENT s'est elle-même présentée à l'égard des tiers, notamment par ses tarifs, et, en particulier, à plusieurs reprises à l'égard de l'administration comme l' exploitante de la plateforme d'Houplin Ancoisne, en déposant en son seul nom, le 26 juin 2002, à titre de régularisation, une demande d'autorisation, sur le fondement de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, aux fins de poursuivre l'exploitation du site en cause et en communiquant, sous sa seule en-tête, à la préfecture, par télécopie du 18 avril 2005, ses observations préalablement à l'examen du projet d'arrêté portant imposition de prescriptions spéciales par le conseil départemental d'hygiène ; qu'ainsi la notification de l'arrêté doit être regardée comme ayant été régulièrement effectuée à l'égard de la société exploitante ;
Considérant, en second lieu, que, si l'arrêté litigieux porte, par erreur, sous l'intitulé arrêté la mention projet d'arrêté préfectoral , il comporte, contrairement aux projets d'arrêtés successifs qui ont été notifiés aux sociétés dans le cadre de la procédure contradictoire, la mention du nom du préfet signataire de l'arrêté et l'ampliation du chef de bureau ; qu'en outre, contrairement également aux précédents envois, la lettre du 29 août 2005 de notification de l'arrêté comportait la mention des voies et délais de recours ; qu'ainsi la mention erronée ci-dessus relevée ne saurait avoir été de nature à induire son destinataire en erreur sur le caractère exécutoire dudit arrêté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que les sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT ne sont pas fondées à soutenir que les erreurs matérielles qui ont affecté la présentation et la notification de l'arrêté litigieux ont empêché le délai de recours contentieux de courir ; qu'ainsi, comme l'a retenu le Tribunal administratif de Lille, la demande, enregistrée au greffe le 13 novembre 2006 à l'encontre de l'arrêté du 29 août 2005 notifié le 30 août 2005 était tardive au regard du délai de recours contentieux de deux mois prévu par les dispositions de l'article L. 514-6 du code de l'environnement et, par suite, irrecevable ;
Sur les conclusions à fin d'annulation des arrêtés des 12 septembre 2006 et 9 mai 2007 :
En ce qui concerne les conclusions du ministre tendant au non-lieu à statuer :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que par arrêté du 20 juin 2007, le préfet du Nord a abrogé l'arrêté de mise en demeure du 12 septembre 2006 et l'arrêté du 9 mai 2007 suspendant l'activité de l'installation de traitement et de recyclage de matériaux exploitée par les sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT ; que toutefois, contrairement à ce que soutient le ministre, ces abrogations n'ont pu avoir pour effet de rendre sans objet les conclusions des sociétés requérantes tendant à l'annulation desdits arrêtés, lesquels ont produit des effets ;
En ce qui concerne les conclusions des sociétés requérantes dirigées contre l'arrêté du 12 septembre 2006 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 514-1 du code de l'environnement : I. Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, et lorsqu'un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le ministre chargé des installations classées a constaté l'inobservation des conditions imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet met en demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. Si, à l'expiration du délai fixé pour l'exécution, l'exploitant n'a pas obtempéré à cette injonction, le préfet peut : 1° Obliger l'exploitant à consigner entre les mains d'un comptable public une somme répondant du montant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée à l'exploitant au fur et à mesure de l'exécution des mesures prescrites ; (...) 2° Faire procéder d'office, aux frais de l'exploitant, à l'exécution des mesures prescrites ; 3° Suspendre par arrêté, après avis de la commission départementale consultative compétente, le fonctionnement de l'installation, jusqu'à exécution des conditions imposées et prendre les dispositions provisoires nécessaires ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 19 juillet 1976, que lorsque l'inspecteur des installations classées a constaté, selon la procédure requise par le code de l'environnement, l'inobservation de conditions légalement imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet, sans procéder à une nouvelle appréciation de la violation constatée, est tenu d'édicter une mise en demeure de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, le préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord était tenu, dès lors que l'inspecteur des installations classées avait, en application de l'article L. 514-1 du code de l'environnement, constaté l'inobservation des dispositions des articles 9, 10, 11 et 12 de l'arrêté du 29 août 2005, inobservation dont la réalité n'est pas contestée, de mettre en demeure l'exploitant de respecter ces prescriptions dans un délai déterminé ; que, par suite, les moyens invoqués par les sociétés requérantes sont inopérants ;
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre l'arrêté du 9 mai 2007 et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que les mesures énumérées à l'article L. 514-1 précité du code de l'environnement ont été instituées pour contraindre les exploitants à prendre les dispositions nécessaires à la sauvegarde des intérêts visés à l'article L. 511-1 du même code ; que toutefois, il résulte de l'instruction que parmi les prescriptions imposées aux sociétés requérantes, celles qui prévoient que l'accès des camions au site se fera exclusivement de 9h15 à 16h30 du lundi au vendredi sauf les jours fériés tout en limitant le nombre de camions entrant sur le site à 130 véhicules par jour en pointe et en imposant que les camions entrant ou sortant du site doivent obligatoirement être bâchés sauf pour les chargements de blocs en béton sont excessives au regard de l'importance réelle des nuisances causées par l'installation concernée et sont susceptibles d'affecter la situation financière des sociétés requérantes ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'à retenu le Tribunal administratif de Lille le moyen tiré du caractère disproportionné de la mesure de suspension doit être accueilli ; que, par suite, l'arrêté du préfet du Nord du 9 mai 2007 doit être annulé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT sont seulement fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande en tant qu'elle concerne l'annulation de l'arrêté du 9 mai 2007 du préfet du Nord suspendant leur activité d'installation de traitement et de recyclage de matériaux ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par les sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lille du 9 octobre 2008 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande des sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 mai 2007 du préfet du Nord.
Article 2 : L'arrêté du préfet du Nord du 9 mai 2007 est annulé.
Article 3 : L'Etat versera aux sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des sociétés VITSE et DEVAREM DEVELOPPEMENT est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société VITSE, à la société DEVAREM DEVELOPPEMENT et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer.
Copie sera transmise au préfet du Nord.