Cass. 3e civ., 8 novembre 2006, n° 05-17.773
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Weber
Rapporteur :
M. Jacques
Avocat général :
M. Gariazzo
Avocats :
Me Bouthors, SCP Boré et Salve de Bruneton
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 17 mai 2005), que par acte sous seing privé du 4 août 1988, Mme X... a vendu, sous conditions suspensives, à la société Sotrafon (la société) une parcelle de terrain ; que cette vente a été réitérée le 1er février 1990 par acte authentique dressé par M. Y..., notaire ; que Mme Z..., venant aux droits de Mme X..., a assigné la société en rescision pour lésion de plus des sept douzièmes ; qu'elle a en outre agi en responsabilité contre M. Y... ; que la liquidation judiciaire des biens de la société ayant été prononcée, elle a appelé en la cause M. A..., désigné en qualité de mandataire liquidateur (le liquidateur) ; qu'après expertise, le liquidateur a demandé qu'il lui fût donné acte de ce qu'il optait pour la restitution de l'immeuble en retirant le prix que la société en avait payé ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme Z... fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article L. 622-16 du code de commerce, l'autorisation du juge commissaire est un préalable obligatoire pour toute réalisation de l'actif ; que l'exercice du droit d'option en cas de vente lésionnaire nécessite de la part du mandataire liquidateur une autorisation préalable dès lors que chacune des branches de l'option, restitutions réciproques ou paiement du supplément de prix, intéresse la réalisation de l'actif ; qu'il suit de là que l'acquiescement à la restitution de la parcelle formulée, sans autorisation du juge commissaire, par le mandataire ne peut sortir aucun effet ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé le texte précité, ensemble l'article 1681 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant exactement retenu que les dispositions de l'article L. 622-16 du code de commerce ne s'appliquaient pas à la rescision puisqu'il s'agissait non d'une vente mais de la mise à néant d'une vente antérieurement réalisée, la cour d'appel en a déduit à bon droit que l'option prise par le liquidateur en application de l'article 1681 du code civil ne requérait pas l'autorisation préalable du juge-commissaire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que Mme Z... fait grief à l'arrêt de la condamner à payer les intérêts au taux légal sur le prix de vente à compter du 1er février 1990, alors, selon le moyen :
1 / que la rescision pour lésion, constatée en 1997, d'un terrain à vocation constructible vendu en 1990, donne lieu à des restitutions réciproques entre les parties ; quand toutefois le terrain sur lequel l'acquéreur n'a pas engagé à temps les opérations qu'il s'y proposait d'y réaliser, le fait pour ce terrain d'avoir perdu en 1998 toute vocation constructible, interdit à la cour d'appel d'ordonner, en contrepartie du retour d'un terrain dévalorisé par la faute de l'acquéreur, le remboursement par l'acheteur du prix qu'il en a obtenu en 1990 avec les intérêts légaux à partir de cette date ; que les restitutions ordonnées sont manifestement disproportionnées et violent l'article 1682 du code civil, ensemble l'article 1 du protocole n° 1 additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2 / qu'en tout état de cause, aux termes de l'article 1682, alinéa 3, du code civil, les intérêts ne sont dus à compter de la demande que si la chose restituée a produit des fruits ; qu'en l'absence de tout fruit produit par le terrain litigieux, la créance de restitution du prix ne pouvait être assortie d'intérêts au jour du paiement ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble le principe de proportionnalité ;
Mais attendu, d'une part, que Mme Z... n'ayant pas soutenu dans ses conclusions d'appel que le fait pour le terrain d'avoir perdu en 1998 toute vocation constructible interdisait d'ordonner le remboursement par l'acheteur du prix qu'il en avait obtenu en 1990 avec les intérêts légaux à partir de cette date, le moyen est de ce chef nouveau, mélangé de fait et de droit ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, qu'il n'était pas contesté que le terrain, demeuré dans son état originaire sans être bâti ni utilisé comme terre agricole, n'avait produit aucun fruit depuis l'acquisition, la cour d'appel en a déduit à bon droit que Mme Z... devait les intérêts du prix à compter du jour du paiement ;
D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le troisième moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.