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Décisions

Cass. com., 8 février 1994, n° 91-20.803

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

Mme Clavery

Avocat général :

M. de Gouttes

Avocat :

Me Choucroy

Paris, 4e ch. sect. A, du 9 juill. 1991

9 juillet 1991

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après avoir fabriqué pour la société Au Lit parfait, un certain nombre de meubles, la société Ateca a établi des factures d'un montant total de 668 447,58 francs, au paiement desquelles la société Au Lit parfait, a opposé un refus, au motif pris de désordres constatés sur certains meubles ; qu'une ordonnance de référé rendue le 19 juillet 1988 a condamné la société Au Lit parfait à payer à la société Ateca une somme provisionnelle de 241 217,23 francs et a ordonné une expertise ; que la société Ateca a assigné sa cocontractante en paiement des factures ; que l'expert a déposé son rapport le 25 avril 1989 ; qu'au vu de ses conclusions, la société Ateca a demandé que la société Au Lit parfait soit condamnée au paiement de la somme de 132 505,49 francs et qu'il soit constaté que cette société avait refusé d'exécuter la transaction du 13 décembre 1988 consignée dans le rapport d'expertise ; que la société Au Lit parfait a conclu, à titre principal à l'inexistence de la transaction et à titre subsidiaire à la compensation entre la somme qu'elle devait de 122 901,36 francs, et celle qui lui est due estimée par l'expert au chiffre de 59 300 francs, en réparation de son préjudice commercial ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Au Lit parfait fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la société Ateca la somme de 122 901,26 francs, sur le fondement de l'existence d'une transaction, alors, selon le pourvoi, que l'expert, qui n'est pas mandataire des parties, n'a pas pouvoir pour concilier les parties ou transiger en leur nom ; que les mentions d'un rapport d'expertise ou les lettres de l'expert n'émanent pas des parties et ne sauraient, à leur égard, valoir commencement de preuve par écrit ;

qu'ainsi, la cour d'appel, qui a cru pouvoir faire découler la preuve de la transaction des seules mentions du rapport d'expertise et d'une lettre adressée le 27 juin 1989 au conseil d'Ateca, sans constater l'existence d'aucune manifestation, par écrit ou même commencement de preuve par écrit, d'un accord de la société Au Lit parfait au principe et au contenu de la prétendue transaction, n'a pas justifié légalement sa décision, au regard des articles 1341, 1347 et 2044 du Code civil ;

Mais attendu, que dès lors qu'en matière commerciale, la transaction peut être établie par tous modes de preuve qu'autorise l'article 109 du Code de commerce et que les deux parties en litige, étaient commerçantes, c'est sans méconnaître les règles édictées en ce qui concerne la preuve des contrats par les articles 1341 et 1347 du Code civil que la cour d'appel s'est fondée sur le rapport déposé par l'expert et sur la lettre écrite par celui-ci au conseil de la société Ateca pour retenir la certitude de l'existence du contenu de la transaction ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en première branche :

Vu les articles 2048 et 2049 du Code civil ;

Attendu que les transactions se renferment dans leur objet ;

Attendu que, pour débouter la société Au Lit parfait de sa demande en réparation de son préjudice commercial, l'arrêt retient que le préjudice de cette société est indiscutable, mais qu'elle n'en a pas exigé la prise en compte dans les éléments de la conciliation réalisée par l'expert ;

Attendu qu'en se prononçant ainsi, alors qu'il résulte de ses constatations que le différend relatif au préjudice subi par la société Au Lit parfait n'avait pas été compris dans la transaction intervenue entre les parties, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur tout autre grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la société Au Lit parfait de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts, en réparation de son préjudice commercial, l'arrêt rendu le 9 juillet 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans.