CSA, 17 décembre 2009
CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'AUDIOVISUEL (DEVENU L'ARCOM)
relative à un différend opposant les sociétés NRJ 12 et Canal+ Distribution
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Boyon
Vu la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication, notamment son article 17-1 ;
Vu le décret no 2006-1084 du 29 août 2006 pris pour l'application de l'article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986 et relatif à la procédure de règlement des différends par le Conseil supérieur de l'audiovisuel ;
Vu le règlement intérieur du Conseil supérieur de l'audiovisuel ;
Vu la demande de règlement de différend, enregistrée le 13 mai 2009, présentée par la société NRJ 12, dont le siège social est 22, rue Boileau, 75203 Paris cedex 16, représentée par M. Léonidas Kalogeropoulos ;
Le différend porte sur la numérotation de la chaîne NRJ 12 dans le plan de services de l'offre Canalsat, distribuée par la société Canal+ Distribution.
La société NRJ 12 demande au Conseil d'enjoindre à la société Canal+ Distribution de lui attribuer le numéro 12 dans le plan de services de l'offre Canalsat. En application de l'article 34-4 de la loi du 30 septembre 1986, la société Canal+ Distribution aurait l'obligation d'attribuer à la chaîne NRJ 12 son numéro logique, les chaînes « historiques » de la télévision numérique terrestre (TNT) étant elles-mêmes placées sur leur numéro logique ;
Vu les observations en défense, enregistrées le 2 juin 2009, présentées par la société Canal+ Distribution, dont le siège social est 1, place du Spectacle, 92863 Issy-les-Moulineaux cedex 9, représentée par Me Pascal Wilhelm ;
La société Canal+ Distribution soutient que la demande de la société NRJ 12 visant à obtenir le placement de sa chaîne sur le numéro 12 sur le fondement de l'article 34-4 de la loi du 30 septembre 1986, s'inscrirait dans une démarche de régulation sectorielle de portée générale pour laquelle le Conseil serait incompétent ;
Elle estime également que la demande de NRJ 12 concernerait, en méconnaissance du principe de l'autorité de la chose jugée, une question déjà tranchée par le Conseil le 5 juin 2007 dans le cadre du règlement d'un premier différend relatif à la numérotation opposant les sociétés Canal+ Distribution et NRJ 12 ;
La société Canal+ Distribution considère que l'article 34-4 n'interdirait pas, dans le cadre de la reprise des chaînes dans des blocs thématiques, d'attribuer à des chaînes de la TNT une numérotation correspondant à la numérotation logique définie par le Conseil. Les termes de cet article seraient clairs et n'auraient donc pas à faire l'objet d'une interprétation se référant aux débats parlementaires, qui en tout état de cause confirmeraient l'interprétation de la société Canal+ Distribution. L'application de l'article 34-4 dans le sens voulu par la société NRJ 12 porterait manifestement atteinte au principe de liberté du commerce ;
La société Canal+ Distribution soutient enfin que, en raison du format de sa chaîne, la société NRJ 12 ne serait pas fondée à demander que la chaîne NRJ 12 soit placée dans la thématique « Chaînes Canal+ - Grandes chaînes généralistes ». Elle considère également que la chaîne NRJ 12 ne relèverait pas du même univers concurrentiel que les chaînes « historiques », et qu'aucun traitement discriminatoire ne pourrait être reproché à la société Canal+ Distribution ;
En conséquence, la société Canal+ Distribution demande au Conseil :
* de rejeter les demandes de la société NRJ 12 comme irrecevables ;
* de constater que la société Canal+ Distribution respecte les dispositions de l'article 34-4 de la loi du 30 septembre 1986 ;
* de constater qu'aucune pratique discriminatoire entre les différentes chaînes de la TNT gratuite ne saurait être imputée à la société Canal+ Distribution dans le cadre de la gestion de son plan de services ;
* de déclarer en conséquence la demande de la société NRJ 12 infondée ;
Vu les observations en réplique, enregistrées le 10 juin 2009, présentées par la société NRJ 12 ;
La société NRJ 12 soutient que sa demande, portant sur l'attribution du numéro 12 dans le plan de services de l'offre Canalsat et non sur la numérotation des autres nouvelles chaînes de la TNT, aurait bien un caractère individuel et qu'elle serait recevable ;
Au surplus, en raison du format généraliste de la chaîne, la société Canal+ Distribution aurait l'obligation d'intégrer la chaîne NRJ 12 dans le bloc thématique « Chaînes Canal+ - Grandes chaînes généralistes », qui regroupe notamment les chaînes « historiques » de la TNT, et de lui attribuer le numéro 12 ;
Vu les nouvelles observations en défense, enregistrées le 23 juin 2009, présentées par la société Canal+ Distribution et tendant aux mêmes fins ;
Vu les observations, enregistrées le 26 juin 2009, présentées par la société NRJ 12 et tendant aux mêmes fins ;
Vu les observations complémentaires, enregistrées le 18 septembre 2009, présentées par la société Canal+ Distribution ;
La société Canal+ Distribution soutient que l'opportunité et la portée du questionnaire adressé aux tiers intéressés seraient contestables. Les questions posées ne viseraient nullement le seul plan de services de l'offre Canalsat et la numérotation de la chaîne NRJ 12. Elle estime également que les distributeurs concurrents de la société Canal+ Distribution et les éditeurs des chaînes « historiques » auraient dû être considérés comme tiers intéressés ;
Enfin, elle considère que les réponses des sociétés France Télévisions, Direct 8, LCP-Assemblée nationale, Public Sénat et Jeunesse TV ne seraient pas pertinentes ;
En conséquence, la société Canal+ Distribution demande au Conseil d'écarter des débats les observations communiquées par les sociétés France Télévisions, Direct 8, LCP-Assemblée nationale, Public Sénat et Jeunesse TV ;
Vu les observations, enregistrées le 23 septembre 2009, présentées par la société NRJ 12 et tendant aux mêmes fins ;
Vu la décision du 3 juillet 2009 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a désigné la société Canal+ SA comme partie additionnelle ;
Vu les observations, enregistrées le 30 juillet 2009, présentées par la société Canal+ SA, dont le siège social est 1, place du Spectacle, 92863 Issy-les-Moulineaux cedex 9, représentée par Me Pascal Wilhelm ;
La société Canal+ SA reprend à son compte l'ensemble des arguments développés par la société Canal+ Distribution dans ses observations déposées les 2 et 23 juin 2009 ;
Vu la décision du 14 mai 2009 du directeur général du Conseil supérieur de l'audiovisuel nommant M. Mathieu Guennec en qualité de rapporteur et M. François-Xavier Bergot en qualité de rapporteur-adjoint pour l'instruction du présent règlement de différend ;
Vu la décision du 19 mai 2009 du Conseil supérieur de l'audiovisuel arrêtant un calendrier prévisionnel de procédure ;
Vu la décision du 30 juin 2009 du Conseil supérieur de l'audiovisuel portant extension du délai prévu à l'article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986 ;
Vu la décision du 21 juillet 2009 du Conseil supérieur de l'audiovisuel désignant comme tiers intéressés à la procédure les sociétés France Télévisions, Direct 8, EDI TV, Télé Monte Carlo, NT1, LCP-Assemblée nationale, Public Sénat, SESI, MCM et Jeunesse TV ;
Vu les pièces établissant que les parties ont été régulièrement convoquées à une audience le 25 novembre 2009 ;
Vu les observations des tiers intéressés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Par courrier du 17 novembre 2009, les sociétés Canal+ Distribution et Canal+ SA ont demandé que la séance d'examen du différend se déroule à huis clos. Par courrier du 18 novembre 2009, la société NRJ 12 a demandé que la séance d'examen du différend soit publique. Le Conseil, réuni en assemblée plénière le 24 novembre 2009, a décidé que la séance d'examen du différend serait publique par les motifs qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers que la publicité des audiences porterait atteinte aux secrets protégés par la loi et, notamment, au secret des affaires, et qu'aucun autre élément ne paraît justifier que l'audience ne soit pas publique ;
Après avoir entendu le 25 novembre 2009, lors de l'audience publique tenue par le collège :
* le rapport de M. Mathieu Guennec, rapporteur, présentant les moyens et conclusions des parties ;
* les observations de M. Frédéric Mion, M. Maxime Saada et Me Pascal Wilhelm, pour les sociétés Canal+ Distribution et Canal+ SA ;
* les observations de M. Jean-Paul Baudecroux, Mme Maryam Salehi, M. Gérald-Brice Viret et M. Léonidas Kalogeropoulos, pour la société NRJ 12.
La société NRJ 12 édite un service de télévision à caractère national dénommé NRJ 12, autorisé par le Conseil le 10 juin 2003 conformément aux dispositions des articles 30-1 et 30-2 de la loi du 30 septembre 1986, pour une diffusion en clair par voie hertzienne terrestre en mode numérique. Le Conseil lui a attribué le numéro 12.
La société Canal+ Distribution exploite une offre commerciale de chaînes dénommée Canalsat, distribuée en mode numérique, sur des plates-formes satellite et ADSL. Elle intègre notamment les chaînes de la télévision numérique terrestre (TNT) gratuites.
À la date de la saisine, la chaîne NRJ 12 était accessible sur deux numéros dans le plan de services de l'offre Canalsat : dans le bloc thématique « mini-généralistes », sur le numéro 36, et dans le bloc thématique « TNT gratuite », sur le numéro 312.
La première thématique du plan de services de l'offre Canalsat, intitulée « Chaînes Canal+ - Grandes chaînes généralistes », regroupe les chaînes du groupe Canal+ et les chaînes nationales dites « historiques », diffusées par voie hertzienne terrestre en mode analogique avant leur diffusion en mode numérique, c'est-à-dire : TF1, France 2, France 3, Canal+, France 5, M6 et Arte. Ces dernières sont placées sur leur numéro logique, attribué par le Conseil pour la TNT. Au mois d'octobre 2009, la société Canal+ Distribution a procédé à une modification du plan de services de l'offre Canalsat. Le bloc thématique « mini-généralistes » a été supprimé. La chaîne NRJ 12 est désormais placée dans la thématique « séries et divertissement » sur le numéro 37.
Les sociétés membres de l'association Groupement « Télévision Numérique pour Tous », dont fait partie la société NRJ 12, ont demandé par courrier du 11 mars 2009 à la société Canal+ Distribution le placement de leurs chaînes sur leur numéro logique. Par un courrier du 27 mars 2009, la société Canal+ Distribution a indiqué qu'elle n'entendait pas faire suite à cette demande.
I. - Sur la recevabilité de la demande de la société NRJ 12
La société Canal+ Distribution soutient que la demande de la société NRJ 12 visant à obtenir le placement de sa chaîne sur le numéro 12 sur le fondement de l'article 34-4 de la loi du 30 septembre 1986 ne porterait pas sur le règlement d'u n différend de nature individuelle, mais constituerait une demande de « mesure d'organisation générale de la distribution de services audiovisuels par satellite » ou une « démarche de régulation sectorielle » pour lesquelles le Conseil serait incompétent.
Le Conseil estime que la demande de la société NRJ 12 doit être regardée comme tendant à obtenir le numéro 12 dans le plan de services de l'offre Canalsat. Cette demande traduit le caractère individuel du différend et un intérêt de la requérante lui donnant qualité pour agir.
Le Conseil considère en outre que la demande de la société NRJ 12 porte sur le « caractère objectif, équitable et non discriminatoire des conditions de mise à disposition du public de l'offre de programmes », et entre ainsi dans le champ d' application de l'article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986.
La société Canal+ Distribution soutient également que la demande de NRJ 12 concernerait une question déjà tranchée le 5 juin 2007 par le Conseil dans le cadre du règlement d'un premier différend relatif à la numérotation.
Le Conseil considère que sa délibération du 24 juillet 2007 relative à la numérotation des chaînes (1) et la loi no 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision ont modifié le régime juridique de la numérotation des chaînes et que la société NRJ 12 apporte des éléments factuels nouveaux.
Ces éléments justifient la recevabilité de la nouvelle demande de la société NRJ 12 sur ce point.
En conséquence, le Conseil se reconnaît compétent pour statuer sur la demande de règlement de différend présentée par la société NRJ 12 et écarte la fin de non-recevoir opposée à ses demandes.
II.- Sur la demande de Canal+ Distribution concernant les observations des tiers intéressés
Les questions posées aux tiers intéressés par le Conseil revêtaient expressément un caractère indicatif. Les tiers intéressés ont donc eu toute liberté dans la formulation de leur réponse.
Le Conseil constate que la société Canal+ Distribution ne demande pas que les observations des sociétés éditant I>Télé et W9 soient écartées des débats.
Les éditeurs de chaînes « historiques » ne sont pas directement intéressés par le différend, celui-ci portant en premier lieu sur la numérotation d'une nouvelle chaîne de la TNT.
Les distributeurs concurrents de la société Canal+ Distribution ne sont pas directement intéressés par le différend, dans la mesure où ce dernier porte précisément sur la numérotation dans le plan de services de l'offre Canalsat.
En conséquence, le Conseil considère que la demande de la société Canal+ Distribution tendant à écarter des débats les observations de certains tiers intéressés doit être rejetée.
III.- Sur le fond du différend
III-1. Sur le respect de l'article 34-4 de la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986
Pour justifier son placement sur le numéro 12 du plan de services de l'offre Canalsat, la société NRJ 12 invoque à titre principal l'article 34-4 de la loi du 30 septembre 1986.
En son deuxième alinéa, l'article 34-4 de la loi du 30 septembre 1986, dans sa rédaction issue de la loi du 5 mars 2009, pose le principe du respect par les distributeurs de services de la numérotation logique définie par le Conseil. Le caractère logique de la numérotation se rapporte au caractère immédiatement successif des numéros employés. Cet article dispose que : « Les distributeurs de services dont l'offre de programmes comprend l'ensemble des services nationaux de télévision en clair diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique, s'ils ne respectent pas la numérotation logique définie par le Conseil supérieur de l'audiovisuel pour la télévision numérique terrestre, doivent assurer une reprise de ces services en respectant l'ordre de cette numérotation. Dans ce cas, la numérotation doit commencer à partir d'un nombre entier suivant immédiatement un multiple de cent, sans préjudice de la reprise de ces services dans l'ensemble thématique auquel ils appartiennent. »
Ces dispositions ont pour objectif de garantir une meilleure visibilité et une meilleure homogénéité de l'offre audiovisuelle gratuite sur l'ensemble des réseaux de communications électroniques.
Imposer aux distributeurs de respecter la numérotation logique constituerait toutefois une restriction à la liberté du commerce et de l'industrie dont ils disposent. Le législateur leur a donc garanti la possibilité de ne pas la respecter. Ils doivent dans ce cas « assurer une reprise de ces services en respectant l'ordre de cette numérotation, à partir d'un nombre entier suivant immédiatement un multiple de cent, sans préjudice de la reprise de ces services dans l'ensemble thématique auquel ils appartiennent ».
La société Canal+ Distribution affirme qu'elle n'aurait pas repris la numérotation logique. Elle dit avoir créé un bloc thématique « TNT », sur les numéros 301 à 318, et a placé les chaînes « historiques » dans un bloc thématique intitulé « Chaînes Canal+ - Grandes chaînes généralistes », mais sur leur numéro logique. En conséquence, dans le plan de services de l'offre Canalsat, seules les chaînes « historiques » seraient placées sur leur numéro logique. Les nouvelles chaînes de la TNT sont reprises dans le bloc thématique « TNT », placé sur les numéros 301 à 318, et dans d'autres blocs thématiques, définis principalement en fonction du format de la chaîne. Ainsi, la chaîne NRJ 12 était reprise, au moment de la saisine, dans le bloc thématique « mini-généralistes ».
Cette situation est contestée par la société NRJ 12, qui estime qu'elle se trouve dans une situation de discrimination, prohibée par l'article 34-4 de la loi du 30 septembre 1986.
À la lettre, cet article ne semble prévoir que deux hypothèses, qui obligeraient toutes deux les distributeurs de services à traiter de la même manière l'ensemble des chaînes de la TNT, sans distinction entre les chaînes « historiques » et les nouvelles chaînes de la TNT :
* la première hypothèse est celle d'un respect total de la numérotation logique, les chaînes de la TNT étant toutes placées sur leur numéro logique ;
* la seconde est celle d'une reprise intégrale des chaînes de la TNT en début de centaine et dans l'ordre de la numérotation logique.
Le Conseil estime toutefois que les termes du deuxième alinéa de l'article 34-4 ne sont pas clairs dans la mesure où ils ne précisent pas si l'inexécution de l'obligation de respect de la numérotation logique peut être partielle, en ne plaçant que les chaînes « historiques » sur leur numéro logique, et ce, au titre du droit de reprise des chaînes dans un bloc thématique.
Le Conseil considère en conséquence qu'il y a lieu de se référer aux débats parlementaires afin d'identifier les objectifs poursuivis par le législateur.
L'analyse des débats, notamment lors de l'examen par le Sénat de l'amendement no 22 présenté par Mme Catherine Morin-Desailly et M. Michel Thiollière, et des amendements nos 180 et 432 présentés par M. Yves Pozzo di Borgo et Mme Catherine Dumas, fait ressortir l'intention du législateur d' interdire aux distributeurs de services la possibilité de ne placer sur leurs numéros logiques que les chaînes « historiques » de la TNT, au détriment des nouvelles chaînes de la TNT. Il a expressément entendu interdire aux distributeurs de structurer leur plan de services dans le respect partiel de la numérotation logique au profit des seules chaînes « historiques ».
Les distributeurs de services ont donc la possibilité :
* soit de respecter la numérotation logique ;
* soit de créer un bloc « TNT » en début de centaine, dans le respect de l'ordre de la numérotation logique.
Le Conseil estime que la société Canal+ Distribution n'est pas fondée à invoquer le droit de reprise dans un ensemble thématique pour faire échec à l'obligation de non-discrimination entre chaînes « historiques » et nouvelles chaînes de la TNT, dans l'hypothèse où les premières sont placées sur leur numéro logique.
La société Canal+ Distribution prétend toutefois que l'application de l'article 34-4 dans ce sens porterait atteinte au principe de liberté du commerce. À cet égard, il ressort de l'analyse des débats que le législateur a entendu préserver la liberté éditoriale des distributeurs qui conservent le choix de reprendre l'offre gratuite en respectant totalement la numérotation logique ou d'organiser leur plan de services de manière thématique.
Ainsi, lors de l'adoption du deuxième alinéa de l'article 34-4 de la loi du 30 septembre 1986, le législateur a entendu limiter la liberté du commerce et de l'industrie afin de garantir le respect d'autres principes de nature constitutionnelle, les principes d'égalité et de non-discrimination.
Ces principes sont également rappelés à l'article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986 qui dispose que le Conseil « assure l'égalité de traitement » et veille « à l'établissement de relations non discriminatoires entre éditeurs et distributeurs de services quel que soit le réseau de communications électroniques utilisé par ces derniers » et « au caractère équitable, transparent, homogène et non discriminatoire de la numérotation des services de télévision dans les offres de programmes des distributeurs de services ».
Ces missions peuvent être exercées par le Conseil dans le cadre de sa compétence en matière de règlement de différends. Il a en effet le pouvoir de préciser les conditions permettant d'assurer le respect du « caractère objectif, équitable et non discriminatoire des conditions de la mise à disposition du public de l'offre de programmes ».
Au regard de tout ce qui précède, il y a lieu :
* de considérer que l'absence de placement de la chaîne NRJ 12 sur son numéro logique est contraire à l'article 34-4 de la loi du 30 septembre 1986 et ne présente pas un caractère « objectif, équitable et non discriminatoire » au sens de l'article 17-1 de cette loi, dans la mesure où les chaînes TF1, France 2, France 3, Canal+, France 5, M6 et Arte sont placées sur leur numéro logique ;
* d'enjoindre à la société Canal+ Distribution d'établir un plan de services de l'offre Canalsat assurant une numérotation du service NRJ 12 conforme aux dispositions des articles 3-1 et 34-4 de la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986. Sauf à justifier d'un critère de numérotation conforme à ces dispositions permettant un autre positionnement, le service NRJ 12 devra être placé sur le numéro 12. En outre, ce plan ne devra comporter aucune discrimination, pour les numéros 1 à 18, entre les chaînes nationales diffusées sur la télévision numérique terrestre selon qu'elles étaient ou non diffusées auparavant en mode analogique.
III-2. Sur la présence de la chaîne NRJ 12 dans le bloc thématique « Chaînes Canal+ - Grandes chaînes généralistes »
Le Conseil faisant droit à la demande de la société NRJ 12 au titre de son argumentation principale, il n'y a pas lieu de répondre à sa demande subsidiaire tendant aux mêmes fins et fondée sur ce que la chaîne NRJ 12 aurait un format généraliste et devrait être intégrée dans la thématique « Chaînes Canal+- Grandes chaînes généralistes ».
Après en avoir délibéré le 17 décembre 2009, hors la présence du rapporteur,
Décide :
Article 1er
Il est enjoint à la société Canal+ Distribution d'établir un plan de services de l'offre Canalsat assurant une numérotation du service NRJ 12 conforme aux dispositions des articles 3-1 et 34-4 de la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986. Sauf à justifier d'un critère de numérotation conforme à ces dispositions qui permettrait un autre positionnement, le service NRJ 12 devra être placé sur le numéro 12. En outre, ce plan ne devra comporter aucune discrimination, pour les numéros 1 à 18, entre les chaînes nationales diffusées sur la télévision numérique terrestre selon qu'elles étaient ou non diffusées auparavant en mode analogique.
Le plan devra être communiqué au Conseil dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, en vue de sa mise en application effective au plus tard à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la même date.
Article 2
Les demandes des sociétés Canal+ Distribution et Canal+ SA sont rejetées.
Article 3
La présente décision sera notifiée aux sociétés NRJ 12, Canal+ Distribution et Canal+ SA et publiée au Journal officiel de la République française.