CA Bourges, ch. civ., 10 mars 2011, n° 10/01556
BOURGES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
Lecaudey (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Richard
Conseillers :
M. Lachal, M. Tallon
Avoués :
Me le Roy des Barres, Me Guillaumin
Avocat :
Me Levoir
Exposé de l'affaire
Melle Christelle P. a fait appel de la décision rendue le 20 octobre 2010 par le juge commissaire du Tribunal de Commerce de NEVERS dans la liquidation judiciaire de l'appelante, qui a autorisé la SELARL Aurélie LECAUDEY en qualité de liquidateur judiciaire de Melle P. à saisir le tribunal de grande instance de NEVERS afin de faire procéder à la vente dans la forme de la saisie immobilière de l'immeuble situé à LANGERON (NIEVRE), cadastré section C n° 595, lieudit Chevigny pour 11 ares 81 ca (lot n° 4 du
lotissement Chevigny II) sur une mise à prix de 70 000 euros et a désigné Me Aude BONNET, huissier, pour dresser le procès-verbal de description de cet immeuble ;
Par conclusions du 14 décembre 2010, auxquelles il est fait référence par application de l'article 455 du Code de Procédure Civile, l'appelante expose que l'immeuble lui appartenant situé à LANGERON, a fait l'objet d'une déclaration d'insaisissabilité conformément à l'article L 526-1 du code de commerce reçue par Me THEVENY, notaire à COSNE SUR LOIRE, et régulièrement publiée, que parmi les créanciers de Melle P. il en est dont les droits sont nés antérieurement à cette publication (crédit agricole CENTRE LOIRE pour 91 697,46 euros), mais l'immeuble est insaisissable pour d'autres créanciers (services fiscaux, URSSAF, crédit mutuel...pour 208740 euros), qu'ainsi le liquidateur n'est pas recevable à représenter une partie des créanciers selon un arrêt de la chambre commerciale de la cour de cassation du 03 févier 2009 et qu'en outre si la vente et autorisée, il lui sera impossible de répartir le prix de cession, ne pouvant exclure une partie des créanciers de la distribution ;
Elle conclut à l'infirmation de la décision, dont appel, et au débouté de la SELARL Aurélie LECAUDEY ès qualités de sa demande ;
L'intimée, par des écritures du 12 janvier 2011, auxquelles il est de même fait référence, répond que l'arrêt du 03 février 2009 invoqué par Melle P. est inapplicable en l'espèce, l'action étant totalement différente (nullité de la déclaration d'insaisissabilité et non ses effets), que cette déclaration est inopposable à la caisse de crédit mutuel, dont les prêts ont été souscrits les 17 novembre 2006 et 17 avril 2008, avant la publication de ladite déclaration (22 septembre 2008), créancier pour 236 945,20 euros, soit 86,70% du passif admis, que du moment où il existe un créancier antérieur à cette publication ou un créancier non professionnel, l'immeuble tombe dans la saisie collective, que réalise la
liquidation judiciaire (cf cour d'appel d' ORLÉANS du 15 mai 2008) et qu'ainsi l'intimée a intérêt à agir, les textes sur l'insaisissabilité limitent la liberté de saisir mais ne prévoyant pas un droit de préférence sur le prix de vente de l'immeuble en cause ;
Elle conclut à la confirmation de la décision entreprise ;
Le ministère public dans des observations écrites du 27 janvier 2011 conclut dans le même sens rappelant que la caisse de crédit mutuel, ayant régulièrement déclaré une créance de 234 945,20 euros représentant 86,70% du passif admis, possède des créances (prêts des 17 novembre 2006 et 17 avril 2008) bien antérieures à la clause d'insaisissabilité, qu'ainsi la demande du liquidateur en réalisation de l'immeuble de la débitrice est régulière et qu'enfin cette action profitera à l'ensemble des créanciers, les fonds dégagés par cette cession devant être partagés entre tous les créanciers ;
Motifs de la décision
Attendu que Melle Christelle P. , qui tenait à COSNE SUR LOIRE un commerce façonnage photographique, a fait l'objet par jugement rendu le 20 janvier 2010 par le tribunal de commerce de NEVERS d'une liquidation judiciaire, le passif déclaré étant supérieur à 285 000 euros ;
Attendu que par acte reçu le 29 août 2008 par Me Christophe THEVENY, notaire associé à COSNE, Melle P. avait effectué en application de l'article L 526-1 du code de commerce une déclaration d'insaisissabilité relative à un immeuble situé à LANGERON cadastré section C n° 595 (11 ares 81 ca),
laquelle a été publiée le 22 septembre 2008 ;
Attendu que parmi les créanciers figure la caisse de crédit mutuel de DIJON pour 234 945,20 euros en vertu de deux prêts antérieurs à la publication de la déclaration précitée (17 novembre 2004 et 17 avril 2008) si bien que la déclaration d'insaisissabilité ne lui est pas opposable en application de l'article L. 526-1 sus mentionné ;
Attendu que contrairement aux affirmations erronées de l'appelante, l'instance invoquée par cette dernière (cass. com 3 pièces 2009) n'est nullement identique avec la présente procédure, s'agissant non pas d'un problème d'opposabilité de la déclaration d'insaisissabilité à la procédure collective mais de dire si un immeuble protégé peut ou non être réalisé ;
Attendu que du fait que pour au moins un créancier représentant d'ailleurs plus de 85% du passif admis ladite clause est inopposable, la demande du liquidateur est recevable et fondée ;
Attendu que l'article L. 526-1 du code de commerce, s'il prévoit une dérogation aux articles 2286 et 2285 du code civil, celle-ci n'est relative qu'à l'insaisissabilité du bien en cause mais une fois le bien réalisé, le premier texte ne déroge pas aux dispositions légales selon lequel le droit de gage de tous les créanciers s'étend sur l'ensemble du patrimoine du débiteur ; que pour ces motifs la décision entreprise ne peut qu'être confirmée ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme en toutes ses dispositions la décision déférée ;
Condamne Melle P. aux dépens d'appel et autorise Me GUILLAUMIN, avoué à se prévaloir des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.