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Décisions

Cass. soc., 18 janvier 2012, n° 09-72.916

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacabarats

Avocats :

SCP Delvolvé, SCP Ortscheidt

Poitiers, du 3 nov. 2009

3 novembre 2009

Sur le moyen unique pris en ses deux branches :

Vu les articles 1134 et 2044 du code civil, ensemble l'article L. 1234-9 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 3 avril 1989 en qualité de dactylographe par la société Scati aux droits de laquelle vient la société Segula Technologie Ouest ; que la lettre d'embauche mentionnait Puilboreau comme lieu de travail ; que la salariée a refusé d'exécuter l'ordre de mission l'affectant, à partir du lundi 29 mai 2006 et jusqu'au vendredi 12 janvier 2007, période de recouvrement incluse, à un poste en remplacement d'une assistante en congés de maternité à Blagnac, commune située dans une autre zone géographique que celle où elle exerçait ses fonctions ; qu'une lettre de licenciement pour faute grave tirée de ce refus mentionnant la date du 14 juin 2006 lui a été notifiée ; qu'elle a signé une transaction portant la date du 23 juin 2006 aux termes de laquelle l'employeur lui versait une somme de 11 500 € à titre d'indemnité transactionnelle forfaitaire et définitive en réparation de tous les préjudices résultant de la perte de son emploi en contrepartie de quoi elle renonçait à toutes actions à l'encontre de la société Segula Technologie Ouest ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Attendu que pour déclarer valable l'accord transactionnel conclu entre les parties et, en conséquence, irrecevables les demandes de la salariée, l'arrêt retient que l'employeur prétendait au moment de la signature de la transaction conformément aux motifs invoqués dans la lettre de licenciement que le refus de Mme X... de rejoindre le poste auquel elle avait été affectée temporairement à Blagnac caractérisait de sa part une faute grave privative des indemnités de préavis, que la lettre d'embauche se bornait à mentionner Puilboreau comme lieu de travail à titre d'information, qu'il n'est justifié d'aucune disposition contractuelle claire et précise fixant l'exécution du contrat de travail exclusivement dans un lieu déterminé, qu'il pouvait donc entrer dans le pouvoir de direction de l'employeur de changer les conditions de travail d'un de ses salariés en l'affectant temporairement à un poste éloigné en remplacement d'une salariée en congé maternité, que le refus d'effectuer la mission ainsi impartie pouvait constituer une cause sérieuse de licenciement, que dans ces conditions, l'attribution à Mme X... dans l'accord transactionnel d'une indemnité d'un montant de 11 500 euros correspondant à 7 mois de salaire est proche de celle auquel elle aurait pu prétendre au titre de l'indemnité de préavis, des congés payés afférents et de l'indemnité de licenciement, si son licenciement avait été jugé fondé sur une cause réelle et sérieuse de telle sorte que le versement de cette indemnité a constitué de la part de l'employeur une contrepartie sérieuse à la renonciation de la salariée à toutes actions à son encontre ;

Attendu, cependant, que l'existence de concessions réciproques, qui conditionne la validité d'une transaction, doit s'apprécier en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de l'acte ; que s'il en résulte que le juge ne peut, pour se prononcer sur la validité d'une transaction, rechercher, en se livrant à l'examen des preuves, si ces prétentions étaient justifiées, il peut néanmoins se fonder sur les faits invoqués lors de la signature de l'acte, indépendamment de la qualification juridique qui leur a été donnée ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors, en premier lieu, que le motif de licenciement tiré du refus d'une affectation temporaire à un poste éloigné ne pouvait recevoir la qualification de faute grave, et en second lieu, qu'elle retenait que le fait reproché à la salariée était susceptible de constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, ce dont il résultait que l'attribution à la salariée d'une somme proche de celle à laquelle elle aurait pu prétendre au titre d'un licenciement reposant sur une cause réelle et sérieuse ne pouvait constituer une concession réelle de la part de l'employeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 novembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi du chef de la recevabilité des demandes.