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Décisions

Cass. 2e civ., 14 octobre 2021, n° 20-14.395

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. PIREYRE

Montpellier, du 14 janv. 2020

14 janvier 2020

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 14 janvier 2020), le 4 octobre 2012, un avion de la société Aero delta, qui effectuait des travaux d'épandage agricole, s'est écrasé sur la ligne électrique 63 KV Aigues-Mortes-Saint-Christol alimentant le poste source de la ville d'Aigues-Mortes dont le gestionnaire est la société Réseau de transport d'électricité (RTE). Après expertise, la société RTE a assigné la société Aero delta et son assureur, la société Aviabel, en indemnisation de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. La société Axis Specialty Europe SE (la société Axis), venant aux droits de la société Aviabel, et la société Aero delta, font grief à l'arrêt d'homologuer le rapport d'expertise judiciaire et de les condamner à payer à la société RTE diverses sommes, alors « que le respect du contradictoire impose qu'avant de déposer son rapport, l'expert fixe un délai aux parties pour répondre à un dire, complété de l'envoi de nouvelles pièces, qui lui a été adressé par l'une d'elle ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt qu'après l'envoi d'un dire de la société RTE, accompagné de nouvelles pièces le 30 septembre 2015, l'expert a déposé son rapport le 25 octobre 2015 sans avoir au préalable fixé de délai aux autres parties pour y répondre ni indiqué le délai dans lequel il déposerait son rapport ; que les sociétés Aero delta et Axis n'ont pas été mises à même de discuter en temps utile, avant dépôt du rapport de ces nouvelles productions, prises en compte par l'expert ; qu'en refusant néanmoins d'annuler le rapport d'expertise, l'arrêt attaqué a violé les articles 16 et 276 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. L'arrêt constate qu'à la suite des dires de la société Aero delta en date du 27 août 2015, l'expert a accordé un délai supplémentaire jusqu'au 30 septembre 2015 à la société RTE pour y répondre, ce que la société RTE a fait dans un dire du 25 septembre 2015 complété par l'envoi de pièces le 30 septembre 2015.

5. L'arrêt retient, par motifs propres, qu'il n'est pas contesté par la société Aero delta, comme cela ressort de ses écritures, que son conseil a bien été destinataire le 30 septembre 2015 du message électronique avec les pièces envoyées à l'expert le même jour, mais qu'il a échappé à ce dernier, qui le reconnaît, et que la société Aero delta n'a pas sollicité de l'expert un délai supplémentaire pour répondre comme elle pouvait le faire.

6. L'arrêt ajoute que les appelantes ne précisent pas les observations qu'elles ont été privées de donner, ni en quoi il était pertinent que l'expert tienne une nouvelle réunion d'expertise.

7. L'arrêt relève, par motifs adoptés, que le rapport d'expertise déposé le 26 octobre 2015 découle directement de plusieurs réunions et échanges contradictoires entre les parties et que l'expert a pris en compte toutes observations des parties.

8. De ces constatations et énonciations relevant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de faits et de preuve produits devant elle, la cour d'appel, qui a fait ressortir qu'un délai suffisant avait été ménagé aux parties entre la date à laquelle l'avocat de la société Aero delta avait été informé du dire et celle du dépôt du rapport d'expertise et a relevé que la société n'avait pas sollicité de délai supplémentaire, a pu décider que l'expert avait respecté le principe de la contradiction.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Et sur le second moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

10. La société Axis, venant aux droits de la société Aviabel, et la société Aero delta, font grief à l'arrêt de dire qu'il n'y avait pas lieu de faire injonction à la société RTE de communiquer le règlement MC1, de les débouter de l'ensemble de leurs demandes, d'homologuer le rapport d'expertise judiciaire et de les condamner in solidum à payer à la société RTE une certaine somme, alors « que le principe de la réparation intégrale impose de réparer le dommage sans perte ni profit pour la victime ; qu'en condamnant la société Axis à payer l'intégralité du coût de remplacement des poteaux et câbles endommagés par l'accident sans rechercher, comme elle y était invitée, si indépendamment de la survenance de l'accident, la société RTE n'allait pas procéder au remplacement des pylônes et câblages vétustes, qui était programmé, afin de se conformer à la nouvelle réglementation en vigueur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 devenu 1240 du code civil. »

Réponse de la Cour

11. Ayant exactement retenu qu'en sa qualité de victime d'une faute délictuelle, la société RTE avait droit à la réparation intégrale de son préjudice par le remboursement des frais de remise en état des installations ou par le paiement d'une somme d'argent représentant la valeur de leur remplacement sans qu'il n'y ait lieu de limiter l'indemnisation du sinistre à la valeur vénale de la portion de ligne endommagée, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses énonciations rendaient inopérante, a statué comme elle l'a fait.

12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés Axis Specialty Europe SE et Aero delta aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés Axis Specialty Europe SE et Aero delta et les condamne à payer à la société Réseau de transport d'électricité la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille vingt et un.