Cass. com., 10 janvier 2006, n° 03-19.519
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
Mme Vaissette
Avocat général :
M. Lafortune
Avocats :
SCP Waquet, Farge et Hazan, Me Bertrand, Me Foussard
Sur le moyen unique des deux pourvois, rédigé en termes identiques :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Versailles, 17 juin 2003), rendu sur renvoi après cassation (Chambre commerciale, financière et économique, 20 mars 2001, n° 98-14.125), que la société Hôtel Penthièvre a été mise en liquidation judiciaire le 20 mai 1995, Mme X... étant désignée liquidateur ; que par ordonnance du 19 janvier 1996, le juge-commissaire a autorisé la vente de gré à gré du fonds de commerce de la société à M. Y... pour le prix de 1 420 000 francs ; que cette ordonnance a été signifiée le 25 janvier 1996 aux créanciers inscrits dont la Caisse foncière de crédit (CFC) qui a formé opposition le 26 janvier 1996 ; que le 27 février 1996, la société NACC, venant aux droits de la société CFC, est intervenue pour faire "surenchère" et offrir la somme de 1 650 000 francs ; que par jugement du 1er octobre 1996, le tribunal de commerce a déclaré l'opposition recevable, a accueilli la "surenchère" et autorisé la vente au profit de la société NACC au prix de 1 650 000 francs ; que la cour d'appel a déclaré recevable l'appel de Mme Z... veuve de M. Y..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'administratrice légale de ses enfants mineurs, et a rejeté l'opposition de la société CFC ;
Attendu que la société NACC et Mme X..., ès qualités, font grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'offre de surenchère de la société NACC, confirmé l'ordonnance du juge-commissaire, donné injonction au liquidateur de procéder à la vente du fonds de commerce au profit de Mme Z..., veuve Y... et prononcé la nullité de la cession du fonds de commerce consentie à la société NACC ; alors selon le moyen :
1 / que la "surenchère" qui résulte d'une demande formée à l'appui d'une opposition à une ordonnance du juge-commissaire autorisant la cession de gré à gré d'un fonds de commerce constitue une offre concurrente qui n'est pas soumise à la procédure instituée par les articles 22 et suivants de la loi du 17 mars 1909 ; qu'en faisant application de ces dispositions à l'offre de surenchère de la société NACC qui, venant aux droits de la CFC, concluait à une "surenchère" à l'appui de la procédure d'opposition à l'ordonnance du juge-commissaire régularisée par cette dernière, la cour d'appel a violé les articles L. 143-13 et suivants du Code de commerce et 25 du décret du 27 décembre 1985 ;
2 / que la surenchère du dixième doit être formée dans la quinzaine des notifications à fin de purge, à savoir de la notification des actes portant les mentions de l'article 22, alinéa 2, de la loi du 17 mars 1909 et par lesquels l'acquéreur offre le paiement des dettes inscrites; qu'à supposer que les dispositions de la loi du 17 mars 1909 soient applicables à la surenchère formée par voie d'opposition à l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la cession de gré à gré, en faisant courir ce délai à compter de la notification de l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la cession du fonds de commerce à M. Y..., la cour d'appel a violé les articles L. 143-13 et suivants du Code de commerce et 22, alinéa 2, de la loi du 17 mars 1909 ;
3 / que l'effet dévolutif s'applique à l'appel d'un jugement statuant sur le recours formé contre une ordonnance rendue en application de l'article 156 de la loi du 25 janvier 1985 ; qu'à supposer que les dispositions de l'article L. 143-13 du Code de commerce soient applicables à la cause, l'effet dévolutif de l'appel permettait le cas échéant à la cour d'appel de corriger la prétendue erreur des premiers juges en ordonnant la mise aux enchères publiques du fonds de commerce ; qu'en se bornant à constater cette erreur, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article 561 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé que la loi du 25 janvier 1985 ne contient aucune disposition régissant la procédure de surenchère du créancier inscrit en cas de cession amiable du fonds de commerce autorisée par le juge-commissaire, l'arrêt en déduit exactement qu' à défaut de dérogation aux dispositions de la loi du 17 mars 1909 sur la cession du fonds de commerce, les formalités qu'elle prévoit en son article 23, devenu les articles L. 143-13 à L. 143-15 du Code de commerce, doivent être respectées par le créancier surenchérisseur ;
Attendu, en second lieu, que l'arrêt retient que le tribunal ne pouvait autoriser la vente du fonds de commerce à la société NACC au seul motif que son offre était meilleure que celle de M. Y... sans ordonner la vente aux enchères publiques du fonds ; que la cour d'appel, qui, pas plus que le tribunal, n'était saisie par la société NACC d'une réquisition de mise aux enchères publiques, a, par ce seul motif, et abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par la deuxième branche, légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident.