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Décisions

Cass. com., 1 octobre 2013, n° 12-24.558

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Rapporteur :

Mme Jacques

Avocat général :

M. Le Mesle

Avocats :

Me Le Prado, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Chambéry, du 7 mai 2012

7 mai 2012

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 7 mai 2012, RG n° 11/02652), que la Société nationale de revalorisation (SNR) a obtenu le 22 septembre 2004, un prêt, garanti par un privilège de nantissement, pour le financement d'outillage et de matériel d'équipement, consenti par un pool bancaire constitué par le Crédit industriel et commercial, le Crédit du Nord, la Caisse d'épargne Bourgogne-Franche-Comté ( la Caisse d'épargne) et la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Loire ; que la SNR ayant été mise en redressement judiciaire le 26 juin 2008, un plan de cession de ses actifs a été adopté le 9 octobre 2008 au profit de la société Sobral ; que cette dernière a été mise en redressement judiciaire le 6 avril 2009 ; que les déclarations de créances effectuées par les quatre banques au titre de ce prêt ont été contestées, puis rejetées par ordonnances du 24 octobre 2010 ;

Attendu que la Caisse d'épargne fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa créance déclarée au passif de la société Sobral, alors, selon le moyen :

1°/ qu'est valable le nantissement d'outillage et de matériel d'équipement inscrit au greffe du tribunal de commerce dans le ressort duquel se trouve le siège social de la débitrice, peu important que l'exploitation du matériel nanti se trouve dans un lieu relevant d'un autre ressort ; qu'en énonçant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 525-3 et L. 142-3 du code de commerce ;

2°/ que la nullité d'un nantissement sur matériel et outillage inscrit par erreur au greffe du tribunal de commerce dans le ressort duquel se trouve le siège social de la débitrice est subordonné à la preuve par le demandeur d'un grief lié à cette irrégularité ; qu'en énonçant le contraire motif pris que cette nullité est prévue par « un texte d'ordre public », la cour d'appel a, de nouveau, violé les articles L. 525-3 et L. 142-3 du code de commerce ;

3°/ que l'insuffisance de description du matériel nanti au profit du créancier, à la supposer établie, ne peut impliquer l'inefficacité du privilège que s'il est établi que cette insuffisance a causé un préjudice au demandeur ; qu'en retenant l'inefficacité du nantissement sur outillage consenti le 22 octobre 2004 par la société SNR au profit de la Caisse d'épargne, sans constater que la société cessionnaire, son administrateur et son mandataire judiciaire justifiaient d'un préjudice du fait du manque de description suffisante du matériel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 525-2 du code de commerce ;

4°/ que les prescriptions de l'article R. 525-3-4° du code de commerce relatives à la mention dans le bordereau d'inscription du nantissement de l'outillage et du matériel du lieu où le matériel est placé et éventuellement la mention que ledit matériel est susceptible d'être déplacé ne s'appliquent qu'à l'hypothèse où l'acquéreur n'a pas la qualité de commerçant ; qu'en relevant que le bordereau d'inscription du 8 juillet 2005 ne mentionnait pas ces indications pour nier toute efficacité à ce privilège et rejeter la créance de la banque nantie, déclarée au passif de la cessionnaire, quand la société SNR, acquéreur du matériel avait la qualité de commerçante, la cour d'appel a violé les articles R. 525-1 et R. 525-3 du code de commerce ;

5°/ que l'autorité de la chose jugée attachée à la décision d'admission d'une créance privilégiée au passif de la procédure collective ouverte contre une société dont le tribunal a arrêté postérieurement le plan de cession interdit au cessionnaire, « tiers intéressé », qui n'a pas formé de réclamation contre l'état des créances, de remettre en cause l'existence, le montant et la nature de la créance admise ; qu'en retenant que l'admission de la créance de la Caisse d'épargne au passif privilégié de la société SNR n'était pas opposable au cessionnaire, « tiers à cette procédure », la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;

6°/ que l'autorité de la chose jugée s'attache aux jugements qui n'ont fait l'objet d'aucun recours, quels que soient les vices dont ils sont affectés ; que le jugement irrévocable du 9 octobre 2008, arrêtant le plan de cession de la société SNR au profit de la société Sobral et dont les dispositions s'imposent erga omnes, ordonne expressément dans son dispositif « l'application des dispositions de l'alinéa 4 de l'article L. 642-12 du code de commerce pour les créances nanties » ; que pour rejeter la fin de non-recevoir invoquée par la banque nantie, tirée de la force de chose jugée du jugement du 9 octobre 2008 et partant, de l'irrecevabilité de la contestation émise par la cessionnaire et son mandataire, quant à l'existence et à la nature privilégiée de la créance transmise, l'arrêt retient que ce jugement n'a pu avoir pour effet que de transférer des sûretés valablement inscrites ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles 480 du code de procédure civile et 1351 du code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir rappelé qu'il résulte des dispositions des articles L. 525-3 et L. 142-3 du code de commerce que le nantissement de l'outillage et du matériel d'équipement doit, à peine de nullité, être inscrit sur un registre tenu au greffe du tribunal de commerce dans le ressort duquel le fonds auquel il est affecté est exploité, l'arrêt constate que l'inscription du nantissement a été prise au greffe du tribunal de commerce de Paris, lieu du siège social de la société SNR, et non de l'exploitation du fonds auquel le matériel était affecté; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a exactement déduit que cette inscription était dépourvue de validité, la nullité expressément prévue par un texte d'ordre public étant encourue sans que la démonstration d'un grief soit requise ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'après avoir rappelé les dispositions de l'article L. 525-2 du code de commerce qui édicte que les biens acquis doivent être énumérés dans le corps de l'acte de prêt contenant le nantissement et que chacun d'eux doit être décrit d'une façon précise, afin de l'individualiser par rapport aux autres biens de même nature appartenant à l'entreprise, l'arrêt relève que l'acte de prêt du 22 septembre 2004 ne mentionne ni la marque des matériels (à l'exception des deux fours rotatifs), ni les numéros de série, ni les types de modèle, ni les dimensions des matériels concernés ; qu'ainsi la cour d'appel, qui a considéré dans l'exercice de son pouvoir souverain que cette description était insuffisante pour permettre l'individualisation desdits biens, et qui n'avait pas à procéder à la recherche inopérante évoquée à la troisième branche, a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en troisième lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des productions que la Caisse d'épargne a soutenu devant la cour d'appel que la société cessionnaire n'a pas formé de réclamation contre l'état des créances ; que le grief de la cinquième branche est nouveau et mélangé de fait et de droit ;

Attendu, en quatrième lieu, qu'ayant retenu que les dispositions du jugement du 9 octobre 2008 n'impliquaient qu'un transfert des sûretés valablement inscrites, la cour d'appel n'a pas méconnu l'autorité de la chose jugée attachée à cette décision ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa quatrième branche qui critique un motif surabondant de l'arrêt, est irrecevable en sa cinquième branche et n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.