Cass. soc., 13 octobre 1999, n° 97-42.027
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Waquet
Rapporteur :
M. Brissier
Avocat général :
M. Lyon-Caen
Avocats :
Me Cossa, SCP Gatineau
Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Vu les articles 2044 et suivants du Code civil ;
Attendu que M. X..., entré le 5 décembre 1973 au service de la société Jet services et exerçant en dernier lieu, les fonctions de directeur d'agence, a été licencié par lettre datée du 1er octobre 1990, portant la mention manuscrite : " reçu en mains propres " suivie de sa signature ; qu'il a signé une transaction concernant la rupture de son contrat de travail ; que, contestant la validité de la transaction, il a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes liées à la rupture de son contrat de travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt attaqué énonce que l'abandon par un salarié de son droit éventuel à des dommages-intérêts pour rupture abusive en contrepartie de la renonciation de l'employeur à invoquer la faute grave du salarié peut constituer la base d'une transaction valable ; que si l'accord transactionnel indique bien en préalable que M. Gérard X... contestait le bien-fondé de son licenciement, et si actuellement il entend prouver, en particulier par la production d'attestations, l'inexactitude des griefs de son employeur relatifs, en particulier, à son comportement au sein de l'entreprise, il n'en demeure pas moins que la société Jet services invoquait des fautes graves à son encontre, et qu'il avait un intérêt certain à éviter une telle mention des causes de la rupture dans la lettre de licenciement, ainsi que les aléas d'un procès à ce sujet ; qu'il sera également relevé que M. Gérard X... n'a pas fait abandon de tout droit à dommages-intérêts, puisqu'outre les diverses indemnités légales qui lui étaient dues et qui lui ont été reconnues par la transaction, il a obtenu et perçu, " à titre de dommages-intérêts, toutes causes confondues ", la somme que la cour d'appel ne jugera pas " dérisoire ", de 60 000 francs, correspondant à presque trois mois de son salaire ; qu'en contrepartie, moyennant ce paiement, M. Gérard X... s'est déclaré rempli de ses droits vis-à-vis de la société Jet services, et a renoncé à toute action ultérieure ou éventuellement entreprise contre cette société ; que la cour d'appel est donc en mesure de s'assurer que des concessions réciproques, du reste non manifestement disproportionnées, sont effectivement intervenues entre les parties ; que la transaction a donc valablement été conclue entre les parties ;
Attendu, cependant, que la cour d'appel a constaté qu'aucun motif n'était énoncé dans la lettre de licenciement et que l'indemnité transactionnelle correspondait à trois mois de salaire ; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que, d'une part, à défaut de motivation de la lettre de rupture, le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et alors que, d'autre part, l'indemnité transactionnelle était inférieure à l'indemnité minimale de six mois de salaire prévue par l'article L. 124-14-4 du Code du travail, ce dont il résultait que la transaction était nulle faute de concession de l'employeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité complémentaire pour licenciement abusif, de dommages-intérêts pour renonciation tardive à la valeur de non-concurrence, et du solde sur le solde de tout compte, l'arrêt rendu le 12 mars 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers.