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Décisions

CA Reims, ch. civ., 17 janvier 2017, n° 16/01209

REIMS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Immo Pile (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Martin

Conseillers :

Mme Maussire, Mme Lefort

CA Reims n° 16/01209

16 janvier 2017

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour le 17 Janvier 2017, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l' article 450 du code de procédure civile et signé par Monsieur Francis Martin, président de la 1ère chambre civile et Madame Goulard, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Par jugement réputé contradictoire rendu le 4 décembre 2015 et signifié à M. Mongi C. le 23 décembre 2015, le tribunal d'instance de Troyes a constaté que le bail conclu entre la société Immo Pile et M. C. concernant le logement situé [...] s'est trouvé résilié en raison de l'abandon des lieux par le locataire, a autorisé la société Immo Pile à reprendre les lieux et ce par voie judiciaire par huissier et avec le concours de la force publique et d'un serrurier si nécessaire et à faire transporter le mobilier garnissant le logement dans les conditions prévues à l'article L 433-1 du code des procédures civiles d'exécution.

La société Immo Pile a, par acte du 29 décembre 2015, fait signifier à M. C. un commandement de quitter les lieux le 29 février 2016 au plus tard, étant précisé qu'en raison de la trêve dite hivernale son expulsion forcée ne pourra pas intervenir avant le 31/03/2016.

Par acte d'huissier du 20 janvier 2016, la société Immo Pile a, en exécution du jugement rendu par le tribunal d'instance de Troyes le 4 décembre 2015, procédé à la reprise des locaux d'habitation situés [...] loués à M. Mongi C. selon contrat de location du 24 janvier 2009.

En l'absence du locataire, l'huissier a fait dresser l'inventaire des biens se trouvant sur place en précisant que ces biens étaient dépourvus de valeur marchande et qu'ils ont été laissés sur place à l'issue de l'inventaire.

Le même jour l'huissier a dressé un procès-verbal de conservation mentionnant que les documents personnels de M. Mongi C. trouvés dans la boîte aux lettres de l'appartement ont été placés à l'intérieur d'un sac plastique scellé.

Le procès-verbal d'expulsion du 20 janvier 2016 signifié à la personne de M. C. le 29 janvier 2016 contient une sommation de retirer ces biens dans le délai d'un mois et convocation à comparaître devant le juge de l'exécution à l'audience du 1er mars 2016, le bailleur souhaitant faire statuer sur le sort des biens et obtenir paiement d'une indemnité de procédure.

M. C. n'a pas comparu.

Par jugement réputé contradictoire le juge de l'exécution a, sur le fondement de l'article L 412-1 du code des procédures civiles d'exécution, déclaré la demande de la société Immo Pile irrecevable et l'a condamnée aux entiers dépens.

Il a relevé que la société Immo Pile avait fait procéder à l'expulsion de M. C. sur le fondement du jugement rendu le 4 décembre 2015 par le tribunal d'instance de Troyes après lui avoir fait, le 29 février 2016, signifier un commandement de quitter les lieux précisant à l'intéressé qu'il avait jusqu'au 29 février 2016 pour quitter les lieux et que son expulsion forcée ne pourrait pas intervenir avant le 31 mars 2016 compte tenu de la trêve hivernale, que le non-respect de ce délai entraînait la nullité du procès-verbal d'expulsion.

La société Immo Pile a interjeté appel.

Par conclusions transmises au greffe de la cour le 25 octobre 2016 elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de statuer sur le sort des biens présents au sein du logement et non retirés par M. C., de condamner M. C. à lui payer la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à payer les entiers dépens en faisant observer que le juge de l'exécution a fait une confusion entre la procédure d'expulsion classique et la procédure de reprise des locaux vacants qui obéit à des règles qui lui sont propres.

M. C. n'a pas constitué avocat.

M. Mongi C. a été régulièrement assigné par acte d'huissier du 26 octobre 2016 remis selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile. Le calendrier de procédure et les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées selon les mêmes modalités. Le présent arrêt sera donc rendu par défaut par application de l'article 473 du code de procédure civile.

Sur ce, la cour :

Par application de l'article L 411-1 du code des procédures civiles d'exécution, sauf disposition spéciale l'expulsion ou l'évacuation d'un immeuble ou d'un lieu habité ne peut être poursuivie qu'en vertu d'une décision de justice ou d'un procès-verbal de conciliation exécutoire et après signification d'un commandement d'avoir à libérer les locaux.

L' article 451-1 précise que l'huissier de justice chargé de l'exécution de la mesure d'expulsion peut procéder comme il est dit à l' article L 142-1 pour constater que la personne expulsée et les occupants de son chef ont volontairement libéré les locaux postérieurement à la signification du commandement prévue à l' article L 411-1 et pour procéder à la reprise des lieux.

L' article R 451-1 du même code dispose que pour l'application des dispositions de l' article L 451-1 l'huissier de justice chargé de l'exécution procède aux opérations de reprise des lieux, notamment, 2° lorsqu'il est autorisé par décision de justice passée en force de chose jugée à reprendre des locaux abandonnés dans les conditions des articles 1er à 8 du décret n° 2011-945 du 10 août 2011 pris pour l'application de l'article 14-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 . L' article R 451-3 précise que dans le cas prévu au 1° de l' article R 451-1 le procès-verbal de reprise des lieux peut être dressé avant l'expiration du délai fixé dans le commandement d'avoir à libérer les locaux.

La société Immo Pile verse aux débats, outre le contrat de location signé par M. C. le 24 janvier 2009 et un commandement de payer les loyers délivré à M. C. le 4 mai 2011, la mise en demeure de justifier de l'occupation du logement ( article 14 de la loi n° 89-0462 du 6 juillet 1989 ) délivrée à M. C. le 27 juillet 2012, le procès-verbal de constat d'abandon ou d'inoccupation dressé le 1er octobre 2012 ( article 14-1 de la loi n° 89-0462 du 6 juillet 1989 ), l'ordonnance sur requête rendue le 7 mars 2013 par le juge du tribunal d'instance de Troyes qui a notamment constaté l'abandon par M. C. du logement sis [...], constaté la résiliation du bail du 24 janvier 2009 à compter de la présente ordonnance et autorisé la société Immo Pile à reprendre le dit logement et à se débarrasser des biens présents dans le logement qui sont sans valeur et ce dans les conditions édictées par l' article du décret du 10 août 2010 lui imposant de conserver les papiers et documents personnels des anciens locataires entre les mains de l'huissier de justice pendant deux ans. Elle présente enfin le jugement rendu le 4 décembre 2015 par le tribunal d'instance de Troyes qui a, par application de l'article 14-1 de la loi n° 89-0462 du 6 juillet 1989 modifiée par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, constaté que le bail passé entre la société Immo Pile et M. C. relatif au logement situé [...] s'est trouvé résilié en raison de l'abandon des lieux par le locataire, a autorisé la société Immo Pile à reprendre les lieux et ce par voie judiciaire par huissier et avec le concours de la force publique et d'un serrurier si nécessaire et à faire transporter le mobilier garnissant le logement dans les conditions prévues à l' article L 433-1 du code des procédures civiles d'exécution. Ce jugement a été signifié à M. C. le 23 décembre 2015.

Il résulte de ces éléments que le tribunal a dans son jugement constaté que l'appartement loué avait été abandonné par ses occupants au cours du bail. L'huissier de justice chargé de l'exécution pouvait donc, par application de l'article R 451-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, procéder à la reprise des lieux et le procès-verbal de reprise des lieux pouvait être dressé avant l'expiration du délai fixé dans le commandement d'avoir à libérer les locaux.

Le jugement déféré sera donc infirmé en tant qu'il a considéré que le bailleur n'avait pas respecté le délai de deux mois suivant le commandement de quitter les lieux et avait méconnu les dispositions de l'article L 412-1 du code des procédures civiles d'exécution.

La demande de la société Immo Pile sera déclarée recevable.

L' article R 451-4 prévoit, dans les cas prévus au 2° de l' article R451-1 en cas de vente aux enchères des meubles laissés sur place, que celle-ci a lieu dans les conditions prévues par le deuxième et troisième alinéa de l' article R 433-5. Le sort des papiers et documents de nature personnelle est régie par l' article R 433-6.

Le procès-verbal de reprise du 20 janvier 2016 signifié à M. C. le 29 janvier 2016, a dressé un inventaire des biens présents au sein du logement et non retirés par M. C.. Les photographies annexées révèlent, tel que l'a relevé l'huissier pour la plupart d'entre eux, que ces biens sont sans valeur marchande, que la table roulante en bois à deux plateaux, le buffet de cuisine ancien, les trois chaises, la mini-chaîne hifi et la guitare électrique ne sont pas susceptibles d'être vendus et qu'ils n'ont pas une valeur suffisante pour couvrir les frais d'une vente publique. Il convient dés lors de déclarer les biens présents au sein du logement, non retirés par M. C., abandonnés.

M. C. qui succombe supportera les entiers dépens de première instance et d'appel et paiera à la société Immo Pile la somme de 700 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs :

Statuant publiquement et par défaut ;

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 1er avril 2016 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Troyes ;

et statuant à nouveau ;

Déclare abandonnés les biens présents dans le logement situé [...] et non retirés par M. Mongi C. ;

Condamne M. Mongi C. à payer à la société Immo Pile la somme de 700 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. Mongi C. aux entiers dépens de première instance et d'appel.