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Décisions

CJUE, 3e ch., 20 avril 2023, n° C-348/22

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato

Défendeur :

Comune di Ginosa

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

Mme Jürimäe

Avocat général :

Mme Ćapeta

CJUE n° C-348/22

19 avril 2023

1 La demande de décision préjudicielle porte sur la validité de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur (JO 2006, L 376, p. 36), ainsi que sur l’interprétation de l’article 12 de cette directive et des articles 49 et 115 TFUE.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato (autorité garante de la concurrence et du marché, Italie) (ci-après l’« AGCM ») au comune di Ginosa (commune de Ginosa, Italie) au sujet de la décision de ce dernier de proroger, sur son territoire, les concessions d’occupation du domaine public maritime jusqu’au 31 décembre 2033.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 Le droit primaire

3 L’article 47 CE figurait dans le chapitre 2 du titre III du traité CE, intitulé « Le droit d’établissement », et énonçait, à son paragraphe 2 :

« [Afin de faciliter l’accès aux activités non salariées et leur exercice], le Conseil [de l’Union européenne], statuant conformément à la procédure visée à l’article 251, arrête des directives visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant l’accès aux activités non salariées et à l’exercice de celles-ci. Le Conseil statue à l’unanimité tout au long de la procédure visée à l’article 251 sur les directives dont l’exécution dans un État membre au moins comporte une modification des principes législatifs existants du régime des professions en ce qui concerne la formation et les conditions d’accès de personnes physiques. Dans les autres cas, le Conseil statue à la majorité qualifiée. »

4 L’article 55 CE figurait dans le chapitre 3 du titre III du traité CE, intitulé « Les services », et était libellé comme suit :

« Les dispositions des articles 45 à 48 inclus sont applicables à la matière régie par le présent chapitre. »

5 L’article 94 CE, auquel correspond, en substance, l’article 115 TFUE, disposait :

« Le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission [européenne] et après consultation du Parlement européen et du Comité économique et social, arrête des directives pour le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres qui ont une incidence directe sur l’établissement ou le fonctionnement du marché commun. »

 La directive 2006/123

6 Les considérants 1, 5, 12, 64 et 116 de la directive 2006/123 énoncent :

« (1) [...] L’élimination des obstacles au développement des activités de services entre États membres est un moyen essentiel pour renforcer l’intégration entre les peuples européens et pour promouvoir le progrès économique et social équilibré et durable. [...]

[...]

(5) Il convient en conséquence d’éliminer les obstacles à la liberté d’établissement des prestataires dans les États membres et à la libre circulation des services entre États membres et de garantir aux destinataires et aux prestataires la sécurité juridique nécessaire à l’exercice effectif de ces deux libertés fondamentales du traité [CE]. [...]

[...]

(12) La présente directive vise à créer un cadre juridique pour assurer la liberté d’établissement et la libre circulation des services entre les États membres [...]

[...]

(64) En vue de créer un véritable marché intérieur des services, il est nécessaire de supprimer les restrictions à la liberté d’établissement et à la libre circulation des services qui figurent encore dans les législations de certains États membres et qui sont incompatibles avec, respectivement, les articles 43 et 49 [CE]. [...]

[...]

(116) Étant donné que les objectifs de la présente directive, à savoir l’élimination des obstacles à la liberté d’établissement des prestataires dans les États membres et à la libre circulation des services entre États membres, ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison des dimensions de l’action, être mieux réalisés au niveau communautaire, la Communauté peut prendre des mesures, conformément au principe de subsidiarité consacré à l’article 5 [CE]. [...] »

7 Aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, de cette directive :

« La présente directive établit les dispositions générales permettant de faciliter l’exercice de la liberté d’établissement des prestataires ainsi que la libre circulation des services, tout en garantissant un niveau de qualité élevé pour les services. »

8 L’article 12 de ladite directive, intitulé « Sélection entre plusieurs candidats », est libellé comme suit :

« 1. Lorsque le nombre d’autorisations disponibles pour une activité donnée est limité en raison de la rareté des ressources naturelles ou des capacités techniques utilisables, les États membres appliquent une procédure de sélection entre les candidats potentiels qui prévoit toutes les garanties d’impartialité et de transparence, notamment la publicité adéquate de l’ouverture de la procédure, de son déroulement et de sa clôture.

2. Dans les cas visés au paragraphe 1, l’autorisation est octroyée pour une durée limitée appropriée et ne doit pas faire l’objet d’une procédure de renouvellement automatique, ni prévoir tout autre avantage en faveur du prestataire dont l’autorisation vient juste d’expirer ou des personnes ayant des liens particuliers avec ledit prestataire.

3. Sous réserve du paragraphe 1 et des articles 9 et 10, les États membres peuvent tenir compte, lors de l’établissement des règles pour la procédure de sélection, de considérations liées à la santé publique, à des objectifs de politique sociale, à la santé et à la sécurité des salariés ou des personnes indépendantes, à la protection de l’environnement, à la préservation du patrimoine culturel et autres raisons impérieuses d’intérêt général, conformément au droit communautaire. »

9 L’article 44 de la directive 2006/123, intitulé « Transposition », prévoit, à son paragraphe 1, premier alinéa :

« Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive avant le 28 décembre 2009 au plus tard. »

 Le droit italien

 Le code de la navigation

10 L’article 37 du Codice della Navigazione (code de la navigation), approuvé par le regio decreto n. 327 (décret royal no 327), du 30 mars 1942 (GURI no 93, du 18 avril 1942), ne prévoyait une procédure d’évaluation comparative des candidats que dans l’éventualité où plusieurs demandes d’octroi d’une concession étaient présentées pour un même bien du domaine public. Il découlait toutefois de cet article 37, deuxième alinéa, deuxième phrase, que la préférence devait être accordée au titulaire de la concession, qui bénéficiait ainsi d’un droit « de continuation » ou « au renouvellement ».

 Le décret-loi no 194/2009

11 L’article 1er, paragraphe 18, du decreto-legge n. 194 – Proroga di termini previsti da disposizioni legislative (décret-loi no 194, portant prorogation de délais prévus par des dispositions législatives), du 30 décembre 2009 (GURI no 302, du 30 décembre 2009), converti en loi, avec modifications, par la legge n. 25 (loi no 25), du 26 février 2010 (supplément ordinaire no 39 à la GURI no 48, du 27 février 2010) (ci‑après le « décret-loi no 194/2009 »), prévoyait une prorogation de la durée des concessions des biens domaniaux maritimes à des fins touristico‑récréatives existant à la date d’entrée en vigueur de ce décret‑loi jusqu’au 31 décembre 2015. Cette prorogation a ensuite été étendue jusqu’au 31 décembre 2020 par l’article 34 duodecies du decreto-legge n. 179 – Ulteriori misure urgenti per la crescita del Paese (décret‑loi no 179, portant d’autres mesures urgentes pour la croissance du pays), du 18 octobre 2012 (supplément ordinaire no 194 à la GURI no 245, du 19 octobre 2012), converti en loi, avec modifications, par la legge n. 221 (loi no 221), du 17 décembre 2012 (supplément ordinaire no 208 à la GURI no 294, du 18 décembre 2012). Dans sa version applicable au litige au principal, l’article 1er, paragraphe 18, du décret‑loi no 194/2009 prévoit notamment :

« [...] au cours de la procédure de révision du cadre juridique en matière de délivrance des concessions de biens domaniaux maritimes, lacustres et fluviaux à des fins touristico-récréatives, [...] ainsi qu’en vue de l’abandon du régime du droit de préférence prévu à l’article 37, deuxième alinéa, deuxième phrase, du code de la navigation, la durée des concessions existant à la date d’entrée en vigueur du présent décret [...] et arrivant à expiration au plus tard le 31 décembre 2018, est prorogée jusqu’au 31 décembre 2020 [...] »

 Le décret législatif no 59, du 26 mars 2010

12 Le decreto legislativo n. 59 – Attuazione della direttiva 2006/123/CE relativa ai servizi nel mercato interno (décret législatif no 59, portant mise en œuvre de la directive 2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur), du 26 mars 2010 (supplément ordinaire no 75 à la GURI no 94, du 23 avril 2010), qui transpose dans l’ordre juridique italien la directive 2006/123, dispose, à son article 16 :

« 1. Lorsque le nombre d’autorisations disponibles pour une activité de services donnée est limité pour des raisons liées à la rareté des ressources naturelles ou des capacités techniques disponibles, les autorités compétentes appliquent une procédure de sélection entre les candidats potentiels et s’assurent que les critères et les modalités destinés à garantir l’impartialité de la procédure, auxquels les autorités doivent se conformer, seront établis préalablement et feront l’objet d’une publication selon les formes requises par la législation qui leur est applicable.

[...]

4 Dans les cas visés au paragraphe 1, l’autorisation est octroyée pour une durée limitée et ne peut faire l’objet d’une procédure de renouvellement automatique, et aucun avantage ne peut être accordé au prestataire sortant ni à personne d’autre, même s’il est justifié par des liens particuliers avec ledit prestataire.

[...] »

 La loi no 145/2018

13 L’article 1er, paragraphes 675 à 680, de la legge n. 145 – Bilancio di previsione dello Stato per l’anno finanziario 2019 e bilancio pluriennale per il triennio 2019-2021 (loi no 145, concernant le budget prévisionnel de l’État pour l’exercice 2019 et le budget pluriannuel pour la période 2019-2021), du 30 décembre 2018 (supplément ordinaire no 62 à la GURI no 302, du 31 décembre 2018, ci-après la « loi no 145/2018 »), a imposé aux administrations compétentes de réaliser, dans un délai de deux ans, une série de tâches préliminaires, nécessaires à l’élaboration de la réforme des concessions d’occupation du domaine public maritime, telles que la cartographie du littoral, le recensement des concessions en cours et des différents types de structures existantes sur le domaine public ainsi que l’identification des investissements réalisés, des délais d’amortissement, des redevances et de la durée des concessions.

14 Cet article 1er, paragraphes 682 et 683, prévoit :

« 682. Les concessions [...] qui sont en cours à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, ont une durée de quinze ans qui commence à courir à la date d’entrée en vigueur de la présente loi [...]

683. Afin de garantir la protection et la conservation des côtes italiennes attribuées en concession, en tant que ressources touristiques fondamentales du pays, et de protéger l’emploi et le revenu des entreprises qui traversent une crise à cause des préjudices causés par le changement climatique et par les catastrophes extraordinaires qui en ont résulté, les concessions visées au paragraphe 682, qui étaient en cours à la date d’entrée en vigueur du [décret-loi no 194/2009], ainsi que les concessions attribuées après cette date [...] ont une durée de quinze ans qui commence à courir à la date d’entrée en vigueur de la présente loi [...] »

 Le décret-loi no 34, du 19 mai 2020

15 L’article 182, paragraphe 2, du decreto-legge n. 34 – Misure urgenti in materia di salute, sostegno al lavoro e all’economia, nonche’ di politiche sociali connesse all’emergenza epidemiologica da COVID-19 (décret-loi no 34, portant mesures urgentes en matière de santé, de soutien au travail et à l’économie ainsi que de politiques sociales à la suite de la situation épidémiologique liée à la COVID-19), du 19 mai 2020 (supplément ordinaire no 21 à la GURI no 128, du 19 mai 2020), converti en loi, avec modifications, par la legge n. 77 (loi no 77), du 17 juillet 2020 (supplément ordinaire no 25 à la GURI no 180, du 18 juillet 2020), dispose :

« Sans préjudice des dispositions prévues à l’article 1er, paragraphes 682 et suivants, de la [loi no 145/2018] à l’égard des concessionnaires, pour les besoins de relance du secteur touristique et afin de limiter les dommages, directs et indirects, causés par l’urgence épidémiologique liée à la COVID-19, les administrations compétentes ne peuvent engager ou poursuivre, à l’égard des concessionnaires qui souhaitent poursuivre leur activité en utilisant des biens du domaine maritime, lacustre et fluvial, les procédures administratives pour la dévolution des ouvrages inamovibles, visés à l’article 49 du code de la navigation, pour l’octroi ou l’attribution, par des procédures d’appel d’offres publiques, des zones faisant l’objet de concessions à la date d’entrée en vigueur de la loi de conversion du présent décret. [...] »

 La loi no 118/2022

16 La legge n. 118 – Legge annuale per il mercato e la concorrenza (loi no 118, portant loi annuelle pour le marché et de la concurrence), du 5 août 2022 (GURI no 188, du 12 août 2022) (ci-après la « loi no 118/2022 »), dispose, à son article 3 :

« 1. Continuent de produire leurs effets jusqu’au 31 décembre 2023 ou jusqu’au délai visé au paragraphe 3, si celui-ci est postérieur, si elles existent à la date d’entrée en vigueur de la présente loi sur la base de prorogations ou de renouvellements prévus également en vertu de la [loi no 145/2018] et du decreto-legge n. 104 [(décret-loi no 104)], du 14 août 2020 [(supplément ordinaire no 30 à la GURI no 203, du 14 août 2020)], converti en loi, avec modifications, par la legge n. 126 [(loi no 126)], du 13 octobre 2020 [(supplément ordinaire no 37 à la GURI no 253, du 13 octobre 2020)] :

a) les concessions domaniales maritimes, lacustres et fluviales pour l’exercice des activités touristico-récréatives et sportives [...]

[...]

3. S’il existe des raisons objectives empêchant la clôture de la procédure de sélection avant le 31 décembre 2023, en lien, par exemple, avec l’existence d’un litige en cours ou avec des difficultés objectives liées à l’accomplissement de la procédure elle-même, l’autorité compétente peut, par acte motivé, différer le délai d’expiration des concessions existantes pendant la période strictement nécessaire à la clôture de la procédure et, en tout état de cause, pas au-delà du 31 décembre 2024. Jusqu’à cette date, l’occupation de la zone domaniale par le concessionnaire sortant est, en tout état de cause, légitime également au regard de l’article 1161 du code de la navigation.

[...]

5. À compter de la date d’entrée en vigueur de la présente loi, sont abrogés :

a) les paragraphes 675, 676, 677, 678, 679, 680, 681, 682 et 683 de l’article 1er de la [loi no 145/2018] ;

[...] »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

17 La commune de Ginosa a, par une décision du 24 décembre 2020, rectifiée par une décision ultérieure du 17 février 2021 (ci-après, ensemble, la « décision litigieuse »), notamment adopté une communication préliminaire à caractère récognitif qui avait vocation à informer tous les titulaires de concessions d’occupation du domaine public maritime du ressort de cette commune que ces concessions seraient prorogées, conformément aux dispositions de l’article 1er, paragraphes 682 et 683, de la loi no 145/2018 et de l’article 182 du décret-loi no 34, du 19 mai 2020, converti en loi, avec modifications, par la loi no 77, du 17 juillet 2020 (ci‑après, ensemble, les « dispositions nationales prorogeant automatiquement les concessions »).

18 Estimant que la décision litigieuse était contraire aux articles 49 et 56 TFUE ainsi qu’à l’article 12 de la directive 2006/123, l’AGCM a notifié à ladite commune un avis motivé, par lequel elle lui a rappelé l’exigence d’une procédure préalable de marché public en vue d’assurer le respect des principes de concurrence et de liberté d’établissement. Cette autorité a notamment relevé que les dispositions nationales prorogeant automatiquement les concessions étaient contraires à cette directive, de telle sorte que tous les organes de l’État devaient les laisser inappliquées.

19 La commune de Ginosa ayant refusé de se conformer à cet avis, l’AGCM a saisi le Tribunale amministrativo regionale per la Puglia (tribunal administratif régional des Pouilles, Italie), la juridiction de renvoi, d’un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse et de toutes les déclarations ou attestations de prorogation délivrées subséquemment.

20 La commune de Ginosa et les autres parties à la procédure au principal allèguent que la directive 2006/123 n’étant pas « autoexécutoire », il y a lieu d’appliquer la loi no 145/2018 afin de préserver le principe de sécurité juridique. En outre, les conditions essentielles d’application de cette directive, tenant à la rareté de la ressource naturelle en cause et, par conséquent, au nombre limité d’autorisations disponibles, ne seraient pas remplies sur le territoire côtier de cette commune, puisque de nombreuses autres zones seraient disponibles en plus de celles déjà concédées. L’existence d’un intérêt transfrontalier certain n’aurait pas non plus été prouvée.

21 Par ailleurs, le refus généralisé de proroger les concessions d’occupation du domaine public maritime qu’impliquerait la simple inapplication de cette loi violerait manifestement le droit de propriété du fonds de commerce ainsi que le principe de protection de la confiance légitime, en l’absence de toute disposition d’indemnisation des investissements réalisés et du fonds de commerce. Ce refus ne permettrait pas non plus d’évaluer au cas par cas les durées d’amortissement des investissements réalisés ou encore les situations spécifiques dans lesquelles des ouvrages de maçonnerie dûment autorisés ont été construits sur la propriété domaniale.

22 La juridiction de renvoi relève, à ces divers égards, que, à l’origine, ce n’est que dans l’hypothèse où plusieurs demandes d’octroi d’une concession portaient sur un même bien du domaine public que l’article 37 du code de la navigation imposait d’organiser une procédure d’évaluation comparative des candidats à l’octroi de cette concession. Cependant, en pareille hypothèse, en vertu du deuxième alinéa, deuxième phrase, de cet article, le titulaire de ladite concession bénéficiait d’un droit de continuation ou au renouvellement. Au cours de l’année 1993, le renouvellement automatique des concessions existantes tous les six ans a été instauré et, durant l’année 2006, la durée maximale d’une concession domaniale a été fixée à vingt ans.

23 Après l’ouverture, par la Commission, de la procédure d’infraction no 2008/4908, la République italienne a adopté le décret-loi no 194/2009, dont l’article 1er, paragraphe 18, abrogeait l’article 37, deuxième alinéa, deuxième phrase, du code de la navigation et prorogeait les concessions existantes jusqu’au 31 décembre 2012. Ce terme a, par la suite, été reporté au 31 décembre 2015 par une loi du 26 février 2010.

24 Compte tenu de ces modifications et de l’engagement des autorités italiennes à se conformer au droit de l’Union, la Commission a décidé, le 27 février 2012, de classer cette procédure d’infraction.

25 Malgré ce, à la fin de l’année 2012, les concessions d’occupation du domaine public maritime ont été prorogées de cinq ans, soit jusqu’au 31 décembre 2020. En outre, à l’approche de cette échéance et faute d’avoir mis le droit italien en conformité avec la directive 2006/123, l’article 1er, paragraphes 682 et 683, de la loi no 145/2018 est venu proroger, encore une fois, les concessions en vigueur jusqu’au 31 décembre 2033.

26 Pour la juridiction de renvoi, cette dernière prorogation des concessions d’occupation du domaine public maritime constitue une violation manifeste de la directive 2006/123 et, en tout état de cause, de l’article 49 TFUE. Dans ce contexte, certaines communes auraient appliqué la loi no 145/2018 et accordé la prorogation jusqu’au 31 décembre 2033, tandis que d’autres s’y refuseraient, sans appliquer pour autant le droit de l’Union. D’autres encore, après avoir accordé cette prorogation, en ont ordonné l’annulation dans le cadre de leur pouvoir d’autotutelle. Enfin, certaines communes préféreraient s’abstenir de répondre aux demandes de prorogation de concessions qui leur sont présentées. Une telle situation serait source d’insécurité juridique et aurait des répercussions négatives sur l’économie de l’ensemble du secteur en cause.

27 La juridiction de renvoi déduit de l’arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558), que, en l’absence de toute procédure de sélection entre les candidats potentiels, les dispositions nationales prorogeant automatiquement les concessions sont incompatibles tant avec l’article 12, paragraphes 1 et 2, de cette directive qu’avec l’article 49 TFUE, sous réserve, dans ce dernier cas, que ces concessions présentent un intérêt transfrontalier certain. L’article 12 de ladite directive ne saurait toutefois produire un effet d’éviction des règles nationales contraires, dès lors que cet article 12, paragraphe 3, laisse expressément aux États membres le soin d’établir les règles de la procédure de sélection.

28 Sur ce point, la juridiction de renvoi est en désaccord avec le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie), qui, par deux arrêts nos 17 et 18, du 9 novembre 2021, rendus en assemblée plénière, a considéré que la Cour avait expressément reconnu, dans l’arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558), le caractère autoexécutoire dudit article 12. Par ailleurs, la juridiction de renvoi estime que la limitation des effets dans le temps de ces deux arrêts, décidée par le Consiglio di Stato (Conseil d’État), n’est pas cohérente avec la reconnaissance d’un effet direct à la directive 2006/123. Bien que cette solution vise vraisemblablement à permettre au législateur italien d’adopter une législation nationale de mise en œuvre concrète de cette directive, elle aurait pour conséquence une nouvelle prorogation automatique et généralisée de la date d’échéance des concessions publiques existantes du 31 décembre 2020 jusqu’au 31 décembre 2023.

29 Enfin, la juridiction de renvoi ne partage pas non plus le choix du Consiglio di Stato (Conseil d’État) de qualifier la directive 2006/123 de directive de libéralisation et non d’harmonisation et considère donc que, conformément à l’article 115 TFUE, cette directive aurait dû être adoptée à l’unanimité et non à la majorité des voix du Conseil.

30 Dans ces conditions, le Tribunale amministrativo regionale per la Puglia (tribunal administratif régional des Pouilles) a décidé de surseoir à statuer et de saisir la Cour des questions préjudicielles suivantes :

« 1) La directive 2006/123 est-elle valide et contraignante pour les États membres ou est-elle au contraire invalide, en ce que – s’agissant d’une directive d’harmonisation – elle a été adoptée uniquement à la majorité et non à l’unanimité, en violation de l’article 115 [TFUE] ?

2) La directive 2006/123[...] répond-elle, de manière objective et abstraite, aux exigences minimales quant au caractère suffisamment détaillé des dispositions et à l’absence corollaire de marge d’appréciation laissée au législateur national, de sorte qu’elle peut être considérée comme autoexécutoire et immédiatement applicable ?

3) Dans l’hypothèse où la directive 2006/123 ne serait pas considérée comme “self-executing”, l’effet consistant simplement à exclure ou [à] évincer la loi nationale en la laissant inappliquée (“effet d’exclusion” ou “inapplication évictive”), y compris lorsque le juge national n’est pas en mesure de recourir à une interprétation conforme, est-il compatible avec le principe de la sécurité juridique ou bien, au contraire, la loi nationale ne devrait‑elle pas ou ne pourrait‑elle pas s’appliquer dans un tel cas de figure, sans préjudice des sanctions spécifiques prévues par l’ordre juridique de l’Union européenne en cas de manquement de l’État membre aux obligations découlant de l’adhésion au traité [FUE] (article 49), ou de la non‑transposition de [cette] directive (procédure en manquement) ?

4) L’effet direct de l’article 12, paragraphes 1, 2 et 3, de la directive 2006/123 revient-il à reconnaître le caractère “selfexecuting” ou l’applicabilité immédiate de la directive elle‑même ou doit-il être compris, dans le cadre d’une directive d’harmonisation telle que la directive en cause (“il doit être considéré que les articles 9 à 13 de [la] même directive procèdent à une harmonisation exhaustive”, selon l’arrêt [du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558)]), comme imposant à l’État membre l’adoption de mesures d’harmonisation non pas générales mais définies de manière contraignante quant à leur contenu ?

5) La tâche de déterminer si une directive est de nature autoexécutoire et, dans l’affirmative, d’évincer simplement la loi nationale en la laissant inappliquée, peut-elle ou doit-elle être considérée comme relevant de la compétence exclusive du juge national (qui dispose à cette fin d’outils spécifiques pour l’assister dans le processus d’interprétation, tels que le renvoi préjudiciel à la Cour de justice ou la procédure de contrôle de constitutionnalité) ou est-elle également de la compétence des fonctionnaires ou du personnel de direction des communes ?

6) Dans l’hypothèse où la directive 2006/123 serait au contraire considérée comme “self-executing”, étant donné que l’article 49 [TFUE] s’oppose à la prorogation automatique des concessions-autorisations domaniales maritimes à usage touristico-récréatif uniquement “dans la mesure où ces concessions présentent un intérêt transfrontalier certain”, cette condition est-elle également un préalable nécessaire pour l’application de l’article 12, paragraphes 1 et 2, de [cette] directive [...] ?

7) Est-il conforme aux objectifs poursuivis par la directive 2006/123 et par l’article 49 [TFUE] que le juge national se prononce sur l’existence, de manière générale et abstraite, de la condition relative à l’intérêt transfrontalier certain en ce qui concerne l’ensemble du territoire national, sans autre précision, ou cette appréciation ne devrait-elle pas au contraire être comprise, compte tenu de la compétence dévolue aux communes italiennes, comme concernant le territoire côtier de chaque commune et, partant, comme étant réservée à la compétence des communes ?

8) Est-il conforme aux objectifs poursuivis par la directive 2006/123 et par l’article 49 [TFUE] que le juge national se prononce sur l’existence, de manière générale et abstraite, de la condition relative au caractère globalement limité des ressources et des concessions disponibles en ce qui concerne l’ensemble du territoire national, sans autre précision, ou cette appréciation ne devrait-elle pas au contraire être comprise, compte tenu de la compétence dévolue aux communes italiennes, comme concernant le territoire côtier de chaque commune et, partant, comme étant réservée à la compétence des communes ?

9) Dans l’hypothèse où la directive 2006/123 serait considérée de manière abstraite comme “self executing”, cette applicabilité immédiate peut-elle également être retenue concrètement dans un contexte juridique – tel que le contexte juridique italien – régi par l’article 49 du [code de la navigation] (qui prévoit qu’à l’expiration de la concession “tous les ouvrages inamovibles restent acquis à l’État sans aucune compensation ou remboursement”), et cette conséquence du caractère “selfexecuting” ou de l’applicabilité immédiate de la directive en question (notamment en ce qui concerne les ouvrages de maçonnerie dûment autorisés ou les concessions domaniales fonctionnellement liées aux activités d’hébergement touristique comme les hôtels ou villages) est-elle compatible avec la protection des droits fondamentaux, tels que le droit de propriété, considérés comme dignes d’une protection privilégiée dans l’ordre juridique de l’Union européenne et dans la charte des droits fondamentaux [de l’Union européenne] ? »

 Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

31 L’AGCM et le gouvernement italien ont fait part de leurs doutes quant à la recevabilité de la demande de décision préjudicielle. Selon eux, les questions posées à la Cour sont devenues hypothétiques à la suite de l’abrogation, par la loi no 118/2022, des dispositions nationales prorogeant automatiquement les concessions.

32 À cet égard, même si ces dispositions, notamment celles de la loi no 145/2018, ont effectivement été abrogées par la loi no 118/2022, il n’en reste pas moins que, lorsque la commune de Ginosa a adopté la décision litigieuse, lesdites dispositions étaient en vigueur et que cette dernière a été prise sur la base de celles-ci. Par ailleurs, il ne ressort pas des informations dont dispose la Cour que l’abrogation des dispositions nationales prorogeant automatiquement les concessions ait privé ladite décision de ses effets.

33 Il s’ensuit que l’abrogation des dispositions nationales prorogeant automatiquement les concessions ne saurait renverser la présomption de pertinence qui s’attache aux questions préjudicielles que la juridiction de renvoi a adressées à la Cour (voir, en ce sens, arrêts du 7 septembre 1999, Beck et Bergdorf, C‑355/97, EU:C:1999:391, point 22, ainsi que du 26 mars 2020, Miasto Łowicz et Prokurator Generalny, C‑558/18 et C‑563/18, EU:C:2020:234, point 43). En effet, il n’apparaît pas de manière manifeste que l’interprétation du droit de l’Union sollicitée est sans rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal ou que le problème est de nature hypothétique (voir, par analogie, arrêt du 22 septembre 2022, Admiral Gaming Network e.a., C‑475/20 à C‑482/20, EU:C:2022:714, point 26).

34 Partant, la demande de décision préjudicielle est recevable.

 Sur les questions préjudicielles

35 Il y a lieu d’examiner, dans un premier temps, les sixième et septième questions ainsi que le premier volet de la huitième question en ce qu’ils ont trait à l’applicabilité de la directive 2006/123 au litige au principal, puis, dans un deuxième temps, la première question, qui met en cause la validité de cette directive, et, dans un troisième temps, les deuxième à cinquième questions, le second volet de la huitième question ainsi que la neuvième question, par lesquels la juridiction de renvoi cherche à déterminer si l’article 12 de ladite directive est d’effet direct.

 Sur l’applicabilité de la directive 2006/123

 Considérations liminaires

36 Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, toute mesure nationale adoptée dans un domaine qui a fait l’objet d’une harmonisation exhaustive ou complète à l’échelle de l’Union doit être appréciée au regard non pas des dispositions du droit primaire, mais de celles de cette mesure d’harmonisation (arrêts du 12 octobre 1993, Vanacker et Lesage, C‑37/92, EU:C:1993:836, point 9 ; du 11 décembre 2003, Deutscher Apothekerverband, C‑322/01, EU:C:2003:664, point 64, ainsi que du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a., C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558, point 59).

37 Or, en l’occurrence, ainsi qu’il ressort notamment du point 61 de l’arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558), les articles 9 à 13 de la directive 2006/123 procèdent à une harmonisation exhaustive concernant les services relevant de leur champ d’application.

38 Dans ces conditions, les sixième et septième questions ainsi que le premier volet de la huitième question seront examinés exclusivement au regard de l’article 12 de cette directive.

 Sur la sixième question

39 Par sa sixième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 12, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/123 doit être interprété en ce sens qu’il s’applique uniquement aux concessions d’occupation du domaine public maritime qui présentent un intérêt transfrontalier certain.

40 À cet égard, la Cour a déjà eu l’occasion de juger, à plusieurs reprises, aux termes d’une interprétation littérale, historique, contextuelle et téléologique de la directive 2006/123, que les dispositions du chapitre III de celle-ci, relatif à la liberté d’établissement des prestataires, lesquelles incluent l’article 12 de cette directive, doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’appliquent, notamment, à une situation dont tous les éléments pertinents se cantonnent à l’intérieur d’un seul État membre (voir, en ce sens, arrêts du 30 janvier 2018, X et Visser, C‑360/15 et C‑31/16, EU:C:2018:44, points 99 à 110, ainsi que du 22 septembre 2020, Cali Apartments, C‑724/18 et C‑727/18, EU:C:2020:743, point 56).

41 Il s’ensuit que l’article 12, paragraphes 1 et 2, de ladite directive doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas uniquement aux concessions d’occupation du domaine public maritime qui présentent un intérêt transfrontalier certain.

 Sur la septième question

42 Compte tenu de la réponse apportée à la sixième question, il n’y a pas lieu de répondre à la septième question, qui repose sur la prémisse selon laquelle l’applicabilité de l’article 12 de la directive 2006/123 est subordonnée à la démonstration que la concession d’occupation du domaine public maritime en cause présente un intérêt transfrontalier certain.

 Sur le premier volet de la huitième question

43 Par le premier volet de sa huitième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 12, paragraphe 1, de la directive 2006/123 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que la rareté des ressources naturelles et des concessions disponibles soit appréciée en combinant une approche abstraite et générale, à l’échelle nationale, et une approche casuistique, reposant sur une analyse du territoire côtier de la commune concernée, ou bien si une telle appréciation doit se faire exclusivement sur la base de l’une ou l’autre de ces approches.

44 Certes, au point 43 de l’arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558), la Cour a précisé qu’il convient de prendre en considération la circonstance que les concessions en cause sont octroyées non pas au niveau national, mais au niveau communal, afin de déterminer si les zones domaniales pouvant faire l’objet d’une exploitation économique sont en nombre limité.

45 Néanmoins, cette précision constituait une simple indication donnée à la juridiction de renvoi et s’expliquait par le contexte dans lequel s’inscrivait l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt.

46 En effet, eu égard à son libellé, l’article 12, paragraphe 1, de la directive 2006/123 confère aux États membres une certaine marge d’appréciation quant au choix des critères permettant d’apprécier la rareté des ressources naturelles. Cette marge d’appréciation peut les conduire à faire prévaloir une appréciation abstraite et générale, valable pour l’ensemble du territoire national, mais aussi, à l’inverse, à privilégier une approche casuistique qui met l’accent sur la situation existant sur le territoire côtier d’une commune ou de l’autorité administrative compétente, voire à combiner ces deux approches.

47 En particulier, la combinaison d’une approche abstraite et générale, à l’échelle nationale, et d’une approche casuistique, reposant sur une analyse du territoire côtier de la commune concernée, semble équilibrée et, partant, de nature à assurer concomitamment le respect d’objectifs d’exploitation économique des littoraux susceptibles d’être définis au niveau national, tout en s’assurant de la pertinence de la mise en œuvre concrète de ces objectifs sur le territoire côtier d’une commune.

48 En tout état de cause, il importe que les critères retenus par un État membre pour apprécier la rareté des ressources naturelles utilisables repose sur des critères objectifs, non discriminatoires, transparents et proportionnés.

49 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre au premier volet de la huitième question que l’article 12, paragraphe 1, de la directive 2006/123 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce que la rareté des ressources naturelles et des concessions disponibles soit appréciée en combinant une approche abstraite et générale, à l’échelle nationale, et une approche casuistique, reposant sur une analyse du territoire côtier de la commune concernée.

 Sur la première question relative à la validité de la directive 2006/123

50 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive 2006/123 est valide au regard de l’article 94 CE, dès lors que cette directive d’harmonisation n’a pas été adoptée par le Conseil statuant à l’unanimité.

51 Cette question suggère que ladite directive est invalide au motif qu’elle aurait dû être adoptée sur le fondement de l’article 94 CE, qui prévoyait un vote à l’unanimité au Conseil, et non sur celui de l’article 47, paragraphe 2, première et troisième phrases, CE et de l’article 55 CE, qui prévoyaient un vote à la majorité qualifiée.

52 À cet égard, il convient de relever, en premier lieu, que, selon la jurisprudence constante de la Cour, dans le cadre du système de compétences de l’Union, le choix de la base juridique d’un acte ne peut pas dépendre seulement de la conviction d’une institution quant au but poursuivi, mais doit se fonder sur des éléments objectifs susceptibles de contrôle juridictionnel, tels que le but et le contenu de l’acte. Si l’examen d’un acte de l’Union démontre qu’il poursuit une double finalité ou qu’il a une double composante et si l’une de celles-ci est identifiable comme principale ou prépondérante, tandis que l’autre n’est qu’accessoire, l’acte doit être fondé sur une seule base juridique, à savoir celle exigée par la finalité ou composante principale ou prépondérante. À titre exceptionnel, s’il est établi que l’acte poursuit à la fois plusieurs objectifs, qui sont liés d’une façon indissociable, sans que l’un soit second et indirect par rapport à l’autre, un tel acte devra être fondé sur les différentes bases juridiques correspondantes. Toutefois, le cumul de deux bases juridiques est exclu lorsque les procédures prévues pour l’une et l’autre base juridique sont incompatibles (voir, en ce sens, arrêts du 26 mars 1987, Commission/Conseil, 45/86, EU:C:1987:163, point 11, et du 29 avril 2004, Commission/Conseil, C‑338/01, EU:C:2004:253, points 54 à 57).

53 En l’occurrence, dès lors que l’article 94 CE prévoyait un vote à l’unanimité au Conseil, tandis que, dans le cadre de l’article 47, paragraphe 2, première et troisième phrases, CE et de l’article 55 CE, le Conseil devait statuer à la majorité qualifiée, le cumul de ces bases juridiques s’avérait impossible.

54 En deuxième lieu, aux termes de son article 1er, paragraphe 1, la directive 2006/123 entend « établi[r] les dispositions générales permettant de faciliter l’exercice de la liberté d’établissement des prestataires ainsi que la libre circulation des services, tout en garantissant un niveau de qualité élevé pour les services ». Cet objectif consistant à contribuer à assurer l’effectivité des libertés d’établissement et de prestation de services est itérativement confirmé par l’exposé des motifs de cette directive, notamment à ses considérants 1, 5, 12, 64 ou encore 116.

55 Il est ainsi manifeste que, conformément à l’article 47, paragraphe 2, CE, afin de faciliter l’accès aux activités non salariées et leur exercice, la directive 2006/123 « vis[e] à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant l’accès aux activités non salariées et à l’exercice de celles‑ci ». La même constatation s’impose à l’égard de l’article 55 CE relatif aux services, lequel renvoie notamment à cet article 47, paragraphe 2.

56 En outre, lors de la procédure d’adoption de cette directive, aucun État membre n’a sollicité, sur le fondement de la deuxième phrase dudit article 47, paragraphe 2, un vote à l’unanimité au Conseil, au motif que l’exécution de ladite directive aurait comporté une modification des principes législatifs existants du régime des professions en ce qui concerne la formation et les conditions d’accès de personnes physiques.

57 En troisième lieu, c’est à bon droit que, conformément à la dernière phrase du même article 47, paragraphe 2, auquel l’article 55 CE renvoie par ailleurs, le Conseil a statué à la majorité qualifiée.

58 En effet, ces dispositions conféraient au législateur de l’Union une compétence spécifique pour adopter des mesures destinées à améliorer le fonctionnement du marché intérieur (voir, par analogie, arrêt du 5 octobre 2000, Allemagne/Parlement et Conseil, C‑376/98, EU:C:2000:544, point 87). Or, conformément à l’adage en vertu duquel les règles spéciales dérogent aux règles générales, dès lors qu’il existait, dans le traité CE, une disposition plus spécifique pouvant constituer la base juridique de l’acte en cause, celui-ci doit être fondé sur cette disposition (voir, par analogie, arrêt du 29 avril 2004, Commission/Conseil, C‑338/01, EU:C:2004:253, point 60). C’est donc à bon droit que le législateur de l’Union a privilégié l’article 47, paragraphe 2, première et troisième phrases, CE ainsi que l’article 55 à l’article 94 CE.

59 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que l’examen de la première question n’a révélé aucun élément de nature à affecter la validité de la directive 2006/123 au regard de l’article 94 CE.

 Sur l’effet direct de l’article 12, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/123

 Sur les deuxième et quatrième questions

60 À titre liminaire, il convient de relever que les dispositions nationales en cause dans le litige au principal ont eu pour effet de proroger automatiquement les concessions d’occupation du domaine public maritime en vigueur, de telle sorte qu’aucune procédure de sélection n’a été organisée dans le cadre de ce litige. Sont donc uniquement pertinentes, en l’occurrence, les dispositions de l’article 12 de la directive 2006/123 qui portent, d’une part, sur l’obligation, pour les États membres, d’appliquer une procédure de sélection impartiale et transparente entre les candidats potentiels ainsi que, d’autre part, sur l’interdiction de renouveler automatiquement une autorisation octroyée pour une activité donnée. Aussi les deuxième et quatrième questions doivent-elles être regardées comme portant sur l’interprétation de l’article 12, paragraphes 1 et 2, de cette directive, à l’exclusion du paragraphe 3 de cet article.

61 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que, par ses deuxième et quatrième questions, qu’il convient d’examiner conjointement, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 12, paragraphes 1 et 2, de ladite directive doit être interprété en ce sens que l’obligation, pour les États membres, d’appliquer une procédure de sélection impartiale et transparente entre les candidats potentiels, ainsi que l’interdiction de renouveler automatiquement une autorisation octroyée pour une activité donnée sont énoncées de manière inconditionnelle et suffisamment précise pour pouvoir être considérées comme étant d’effet direct.

62 Il résulte de la jurisprudence constante de la Cour que, dans tous les cas où les dispositions d’une directive apparaissent, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisamment précises, les particuliers sont fondés à les invoquer devant les juridictions nationales contre un État membre soit lorsque celui-ci s’est abstenu de transposer dans les délais la directive en droit national, soit lorsqu’il en a fait une transposition incorrecte [voir, en ce sens, arrêts du 19 janvier 1982, Becker, 8/81, EU:C:1982:7, point 25 ; du 5 octobre 2004, Pfeiffer e.a., C‑397/01 à C‑403/01, EU:C:2004:584, point 103 ; du 17 septembre 1996, Cooperativa Agricola Zootecnica S. Antonio e.a., C‑246/94 à C-249/94, EU:C:1996:329, points 18 et 19, ainsi que du 8 mars 2022, Bezirkshauptmannschaft Hartberg-Fürstenfeld (Effet direct), C‑205/20, EU:C:2022:168, point 17].

63 La Cour a précisé qu’une disposition du droit de l’Union est, d’une part, inconditionnelle lorsqu’elle énonce une obligation qui n’est assortie d’aucune condition ni subordonnée, dans son exécution ou dans ses effets, à l’intervention d’aucun acte soit des institutions de l’Union, soit des États membres, autre que l’acte qui la transpose en droit national et, d’autre part, suffisamment précise pour être invoquée par un justiciable et appliquée par le juge lorsqu’elle énonce une obligation dans des termes non équivoques [voir, en ce sens, arrêts du 3 avril 1968, Molkerei-Zentrale Westfalen/Lippe, 28/67, EU:C:1968:17, p. 226 ; du 26 février 1986, Marshall, 152/84, EU:C:1986:84, point 52, et du 8 mars 2022, Bezirkshauptmannschaft Hartberg-Fürstenfeld (Effet direct), C‑205/20, EU:C:2022:168, point 18].

64 La Cour a en outre jugé que, même si une directive laisse aux États membres une certaine marge d’appréciation lorsqu’ils adoptent les modalités de sa mise en œuvre, une disposition de cette directive peut être considérée comme ayant un caractère inconditionnel et précis dès lors qu’elle met à la charge des États membres, dans des termes non équivoques, une obligation de résultat précise et qui n’est assortie d’aucune condition quant à l’application de la règle qu’elle énonce [voir, en ce sens, arrêt du 8 mars 2022, Bezirkshauptmannschaft Hartberg-Fürstenfeld (Effet direct), C‑205/20, EU:C:2022:168, point 19].

65 En effet, même si une directive accorde aux États membres une certaine marge d’appréciation lorsqu’ils adoptent les modalités de sa mise en œuvre, cette circonstance n’affecte pas le caractère précis et inconditionnel de ses dispositions, lorsque cette marge d’appréciation n’exclut pas que l’on puisse déterminer des droits minimaux et qu’il est donc possible de déterminer la protection minimale qui doit en tout état de cause être mise en place (voir, en ce sens, arrêts du 14 juillet 1994, Faccini Dori, C‑91/92, EU:C:1994:292, point 17 ; du 3 octobre 2000, Simap, C‑303/98, EU:C:2000:528, point 68, ainsi que du 14 janvier 2021, RTS infra et Aannemingsbedrijf Norré-Behaegel, C‑387/19, EU:C:2021:13, point 49).

66 En l’occurrence, il ressort du libellé même de l’article 12, paragraphe 1, de la directive 2006/123 que, lorsque le nombre d’autorisations disponibles pour une activité donnée est limité en raison de la rareté des ressources naturelles, les États membres doivent appliquer une procédure de sélection entre les candidats potentiels qui prévoit toutes les garanties d’impartialité et de transparence, notamment la publicité adéquate de l’ouverture de la procédure, de son déroulement et de sa clôture.

67 Certes, les États membres conservent une certaine marge d’appréciation s’ils décident d’adopter des dispositions destinées à garantir concrètement l’impartialité et la transparence d’une procédure de sélection. Il n’en demeure pas moins que, en imposant l’organisation d’une procédure de sélection impartiale et transparente, l’article 12, paragraphe 1, de la directive 2006/123 prescrit, de manière inconditionnelle et suffisamment précise, un contenu de protection minimale en faveur des candidats potentiels (voir, par analogie, arrêts du 15 avril 2008, Impact, C‑268/06, EU:C:2008:223, point 74, ainsi que du 5 octobre 2004, Pfeiffer e.a., C‑397/01 à C‑403/01, EU:C:2004:584, point 105).

68 Quant à l’article 12, paragraphe 2, de cette directive, il prévoit notamment qu’une autorisation, telle qu’une concession d’occupation du domaine public maritime, est octroyée pour une durée limitée appropriée et qu’elle ne doit pas faire l’objet d’une procédure de renouvellement automatique.

69 Cette disposition est d’effet direct, en ce qu’elle interdit, en des termes non équivoques, aux États membres, sans que ceux-ci ne disposent d’une quelconque marge d’appréciation ou puissent assortir cette interdiction d’une quelconque condition et sans qu’une intervention d’un acte de l’Union ou des États membres soit nécessaire, de prévoir des prorogations automatiques et généralisées de telles concessions. Il résulte d’ailleurs de la jurisprudence de la Cour qu’un renouvellement automatique de celles-ci est exclu par les termes mêmes de l’article 12, paragraphe 2, de la directive 2006/123 (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a., C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558, point 50).

70 L’article 12, paragraphes 1 et 2, de cette directive impose donc aux États membres l’obligation d’appliquer une procédure de sélection impartiale et transparente entre les candidats potentiels et leur interdit de renouveler automatiquement une autorisation octroyée pour une activité donnée, en des termes inconditionnels et suffisamment précis.

71 La circonstance que cette obligation et cette interdiction ne s’appliquent que dans les cas où le nombre d’autorisations disponibles pour une activité donnée est limité en raison de la rareté des ressources naturelles utilisables, lesquels doivent être déterminés par référence à une situation de fait appréciée par l’administration compétente sous le contrôle d’une juridiction nationale, ne saurait remettre en cause l’effet direct qui est attaché à cet article 12, paragraphes 1 et 2.

72 Par ailleurs, il convient de rappeler que l’effet direct dont bénéficient les dispositions inconditionnelles et suffisamment précises d’une directive constitue une garantie minimale, découlant du caractère contraignant de l’obligation imposée aux États membres par l’effet des directives, en vertu de l’article 288, troisième alinéa, TFUE, qui ne saurait servir de justification à un État membre pour se dispenser de prendre, en temps utile, des mesures d’application adéquates à l’objet de chaque directive (arrêt du 6 mai 1980, Commission/Belgique, 102/79, EU:C:1980:120, point 12). Il s’ensuit que, en dépit de la reconnaissance d’un effet direct auxdites obligation et interdiction, prévues à l’article 12, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/123, les autorités italiennes demeurent tenues d’en assurer la transposition dans leur ordre juridique.

73 Enfin, il convient de souligner qu’un arrêt préjudiciel, tel que l’arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558), éclaire et précise, lorsque besoin en est, la signification et la portée de la règle énoncée à cette disposition de la directive 2006/123, telle qu’elle doit ou aurait dû être comprise et appliquée depuis le moment de son entrée en vigueur, soit, conformément à l’article 44 de cette directive, depuis le 28 décembre 2009 au plus tard. Il s’ensuit que ladite règle ainsi interprétée doit être appliquée par le juge même à des rapports juridiques nés et constitués avant cet arrêt [voir, en ce sens, arrêts du 27 mars 1980, Denkavit italiana, 61/79, EU:C:1980:100, point 16, et du 22 février 2022, RS (Effet des arrêts d’une cour constitutionnelle), C‑430/21, EU:C:2022:99, point 77].

74 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux deuxième et quatrième questions que l’article 12, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/123 doit être interprété en ce sens que l’obligation, pour les États membres, d’appliquer une procédure de sélection impartiale et transparente entre les candidats potentiels, ainsi que l’interdiction de renouveler automatiquement une autorisation octroyée pour une activité donnée sont énoncées de manière inconditionnelle et suffisamment précise pour pouvoir être considérées comme étant d’effet direct.

 Sur la troisième question

75 Compte tenu de la réponse apportée aux deuxième et quatrième questions, il n’y a pas lieu de répondre à la troisième question.

 Sur la cinquième question et le second volet de la huitième question

76 Par sa cinquième question et par le second volet de sa huitième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 288, troisième alinéa, TFUE doit être interprété en ce sens que l’appréciation de l’effet direct attaché à l’obligation et à l’interdiction prévues à l’article 12, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/123 et l’obligation de laisser inappliquées des dispositions nationales contraires incombent exclusivement aux juridictions nationales ou également aux autorités administratives, y compris communales.

77 Sur ce point, il suffit de rappeler qu’il résulte de la jurisprudence constante de la Cour que tout comme le juge national, une administration, y compris communale, a l’obligation d’appliquer les dispositions inconditionnelles et suffisamment précises d’une directive ainsi que d’écarter l’application de celles du droit national qui n’y sont pas conformes (voir, en ce sens, arrêts du 22 juin 1989, Costanzo, 103/88, EU:C:1989:256, points 29 à 33, ainsi que du 10 octobre 2017, Farrell, C‑413/15, EU:C:2017:745, point 33).

78 À cet égard, il convient de préciser que l’indication figurant au point 43 de l’arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558), selon laquelle il incombait à la juridiction de renvoi de vérifier si la condition relative à la rareté des ressources naturelles, prévue à l’article 12, paragraphe 1, de la directive 2006/123, était remplie, ne saurait signifier que seules les juridictions nationales sont tenues de veiller à la satisfaction de cette condition. En effet, dès lors que le nombre d’autorisations disponibles pour une activité donnée est limité en raison de la rareté des ressources naturelles utilisables, toute administration est tenue d’organiser, en vertu de cette disposition, une procédure de sélection entre les candidats potentiels et de s’assurer que l’ensemble des conditions prévues à ladite disposition sont remplies, le cas échéant en laissant inappliquées les règles de droit national non conformes.

79 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient donc de répondre à la cinquième question et au second volet de la huitième question que l’article 288, troisième alinéa, TFUE doit être interprété en ce sens que l’appréciation de l’effet direct attaché à l’obligation et à l’interdiction prévues à l’article 12, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/123 ainsi que l’obligation de laisser inappliquées des dispositions nationales contraires incombent aux juridictions nationales et aux autorités administratives, y compris communales.

 Sur la neuvième question

80 Par sa neuvième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 12, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/123 doit être interprété en ce sens que l’effet direct dont bénéficie cette disposition impose de laisser inappliquée une réglementation nationale en vertu de laquelle, à l’expiration d’une concession, tous les ouvrages inamovibles construits par un concessionnaire sur le terrain qui lui a été concédé, restent acquis au concédant, sans aucune compensation ou remboursement et si l’inapplication de cette réglementation est compatible avec l’article 17 de la charte des droits fondamentaux.

81 À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’esprit de collaboration qui doit présider au fonctionnement du renvoi préjudiciel implique que le juge national ait égard à la fonction confiée à la Cour, qui est de contribuer à l’administration de la justice dans les États membres et non de formuler des opinions consultatives sur des questions générales ou hypothétiques (arrêts du 3 février 1983, Robards, 149/82, EU:C:1983:26, point 19 ; du 16 juillet 1992, Meilicke, C‑83/91, EU:C:1992:332, point 25, et du 15 décembre 1995, Bosman, C‑415/93, EU:C:1995:463, point 60).

82 Partant, la Cour peut refuser de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation ou l’appréciation de validité sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (voir, en ce sens, arrêts du 15 décembre 1995, Bosman, C‑415/93, EU:C:1995:463, point 61, et du 15 juillet 2021, The Department for Communities in Northern Ireland, C‑709/20, EU:C:2021:602, point 55).

83 En l’occurrence, le litige au principal concerne la prorogation des concessions et non la question du droit, pour un concessionnaire, d’obtenir, à l’expiration de la concession, une quelconque compensation pour les ouvrages inamovibles qu’il a construits sur le terrain qui lui a été concédé. Ainsi, faute pour la juridiction de renvoi d’avoir exposé les éléments factuels et juridiques caractérisant la situation en cause au principal, la Cour est dans l’impossibilité de répondre utilement à la neuvième question.

84 Il y a donc lieu de déclarer cette question irrecevable.

 Sur les dépens

85 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit :

1) L’article 12, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur,

doit être interprété en ce sens que :

il ne s’applique pas uniquement aux concessions d’occupation du domaine public maritime qui présentent un intérêt transfrontalier certain.

2) L’article 12, paragraphe 1, de la directive 2006/123

doit être interprété en ce sens que :

il ne s’oppose pas à ce que la rareté des ressources naturelles et des concessions disponibles soit appréciée en combinant une approche abstraite et générale, à l’échelle nationale, et une approche casuistique, reposant sur une analyse du territoire côtier de la commune concernée.

3) L’examen de la première question n’a révélé aucun élément de nature à affecter la validité de la directive 2006/123 au regard de l’article 94 CE.

4) L’article 12, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/123

doit être interprété en ce sens que :

l’obligation, pour les États membres, d’appliquer une procédure de sélection impartiale et transparente entre les candidats potentiels ainsi que l’interdiction de renouveler automatiquement une autorisation octroyée pour une activité donnée sont énoncées de manière inconditionnelle et suffisamment précise pour pouvoir être considérées comme étant d’effet direct.

5) L’article 288, troisième alinéa, TFUE

doit être interprété en ce sens que :

l’appréciation de l’effet direct attaché à l’obligation et à l’interdiction prévues à l’article 12, paragraphes 1 et 2, de la directive 2006/123 ainsi que l’obligation de laisser inappliquées des dispositions nationales contraires incombent aux juridictions nationales et aux autorités administratives, y compris communales.