Cass. com., 26 avril 1994, n° 92-18.173
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
Mme Loreau
Avocat général :
Mme Piniot
Avocats :
Me Le Prado, SCP Defrénois et Levis
Attendu selon l'arrêt confirmatif attaqué (Lyon, 22 mai 1992), que Mme X..., détentrice de la moitié des actions de la société anonyme Gimenez frères a, nonobstant un pacte de préférence consenti à la société Béton travaux, soumis à l'agrément de la société Gimenez frères une offre d'acquisition de ses titres faite par la société Luxembourgeoise de placements ; que se prévalant de la carence de Mme X... à lui fournir des informations complètes sur l'identité de l'acquéreur potentiel et s'estimant de ce fait dans l'impossibilité de se prononcer en toute connaissance de cause, la société Gimenez frères l'a assignée pour voir déclarer nulle la demande d'agrément ; que parallèlement, Mme X..., à l'expiration du délai de 3 mois fixé par l'article 275 de la loi du 24 juillet 1966, a demandé au Tribunal la transcription forcée sur les registres de la société Gimenez frères de la cession de ses titres à la société Luxembourgeoise de placements ;
Sur le premier moyen pris en ses deux branches :
Attendu que la société Gimenez frères fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré que, faute de réponse dans le délai de 3 mois à compter de la demande, l'agrément sollicité par Mme X... était réputé acquis, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la cour d'appel n'a pu, sans violer l'article 275 de la loi du 24 juillet 1966, prendre en compte, pour répondre à la question de savoir si la société Gimenez frères pouvait examiner une demande d'agrément présentée le 29 mai 1991, un événement survenu le 9 octobre 1991, postérieurement à l'expiration du délai de 3 mois prévu par la disposition précitée, alors que, d'autre part, si l'affirmation, selon laquelle l'existence d'un pacte de préférence notifié n'entrave pas l'incessibilité des actions, était tenue pour un motif autonome de la décision, ce motif erroné en droit devrait être censuré ; que la cour d'appel n'aurait pu, sans violer les articles 267 et suivants de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, et 1134 du Code civil, méconnaître que l'existence d'un pacte de préférence notifié à la société Gimenez frères excluait la faculté pour celle-ci d'agréer une cession à une personne autre que le bénéficiaire du pacte de préférence ;
Mais attendu que, relevant que l'existence d'un pacte de préférence ne rendait pas incessibles les actions sur lesquelles il porte, la cour d'appel a pu retenir, par ces seuls motifs, que Mme X... pouvait, en dépit de l'existence d'un tel pacte, présenter à l'agrément de la société Gimenez une offre émanant d'une société tierce ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
Sur le deuxième moyen pris en ses trois branches :
Attendu que la société Gimenez frères fait encore grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait alors, selon le pourvoi, d'une part, que la société, dont l'agrément est requis, doit être aussi précisément informée que le cessionnaire soit une personne physique, seule hypothèse expressément visée par l'article 275 de la loi du 24 juillet 1966, ou une personne morale ; que la seule indication de la dénomination et du siège social d'une personne morale ne renseigne pas la société dont les actions sont en cause avec la même précision que ne le fait, s'agissant d'une personne physique, l'indication des nom, prénoms et adresse de celle-ci ; que la demande d'agrément de cession à une personne morale doit permettre de connaître la réalité économique de cette dernière, sans que la société à laquelle la demande est faite ait à la rechercher par ses propres moyens ; qu'en le niant, la cour d'appel a violé l'article 275 de la loi du 24 juillet 1966 ; alors que, d'autre part, en retenant que la demande d'agrément satisfaisait aux exigences statutaires, sans répondre à la question posée de savoir si ces exigences n'excédaient pas celles de la loi, la cour d'appel, qui a procédé par voie de simple affirmation, a méconnu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors que, la cour d'appel, en ignorant que l'article 11 des statuts de la société requiert en tout état de cause quant à lui que la demande d'agrément contienne des indications relatives à la réalité économique de la personne morale cessionnaire, a dénaturé cette stipulation, et violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt énonce, par motifs adoptés, que l'article 11 des statuts prévoyait que " la demande d'agrément qui doit être notifiée à la société indique d'une manière complète l'identité du cessionnaire, le nombre des actions dont la cession est envisagée et le prix offert s'il s'agit d'une cession à titre onéreux, le conseil d'administration doit notifier son agrément ou son refus avant l'expiration d'un délai de 3 mois à compter de la demande " ; que de ces constatations, la cour d'appel, répondant ainsi hors toute dénaturation aux conclusions invoquées en les écartant, a pu déduire qu'ayant mentionné dans sa demande d'agrément la forme et la dénomination de la société cessionnaire ainsi que l'adresse de son siège social, Mme X... avait satisfait aux exigences imposées par la loi et les statuts ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur les troisième et quatrième moyens : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.